LE COMITE POUR L’ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES ENTEND LES REPONSES DU KAZAKHSTAN
Communiqué de presse FEM/1123 |
Comité sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination
à l'égard des femmes
497e séance - après-midi
LE COMITE POUR L’ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES ENTEND LES REPONSES DU KAZAKHSTAN
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a entendu cet après-midi les réponses du Kazakhstan dans le cadre de l’examen du rapport initial de ce pays au titre de l’article 18 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Les réponses apportées par la représentante du Kazakhstan ont attribué la dégradation d’un certain nombre d’indicateurs sociaux à la restructuration économique traversée par le pays qui a entraîné notamment l’aggravation des problèmes de santé. Certaines tendances ont pu être renversées, la progression de la tuberculose ou des maladies sexuellement transmissibles par exemple, ou dans le domaine économique, la progression du chômage. Par contre, la baisse de la natalité fait l’objet d’actions gouvernementales notamment à destination des familles les plus pauvres. Un autre problème géré par le Kazakhstan, de façon prioritaire, est celui de la dégradation de l’environnement responsable, selon les chiffres fournies par la déléguée kazakhe, de 85% des maladies. Le rapport du Kazakhstan précisait à ce sujet qu’une loi adoptée en 1992, prévoit que les personnes, notamment les femmes et les enfants, ayant été exposées aux essais nucléaires réalisés au polygone de Semipalatinsk, aient accès à un certain nombre d’aides comme la gratuité ses soins médicaux. La représentante a conclu en rappelant l’intention de son pays de ratifier prochainement le Protocole facultatif.
Les membres du CEDAW ont souligné les performances réalisées par un pays indépendant depuis moins de dix ans et qui, dans cet intervalle, a réussi à mettre sa législation en conformité avec les dispositions de la Convention. Ils ont cependant encouragé le Gouvernement du Kazakhstan à s’engager dans une politique de quotas, seule susceptible à leurs yeux de promouvoir les femmes aux niveaux élevés de prise de décisions, ce que justifierait pleinement le niveau élevé de leur éducation.
Le Comité se réunira de nouveau demain à 10h30 pour examiner le rapport initial des Maldives.
REPONSE DU GOUVERNEMENT DU KAZAKHSTAN
Réponse de l'État partie aux questions des experts
Mme AITKUL B. SOMAKOVA, Présidente de la Commission nationale pour la famille et les femmes du Kazakhstan, a expliqué que le droit en vigueur en matière de discrimination sont les normes mêmes de la Constitution. En cas de conflits avec les normes internationales, celles-ci sont prioritaires, a-t-elle précisé mais le Conseil constitutionnel n’a eu à examiner qu’un seul cas de ce type. Un projet de loi sur la promotion de l’égalité des droits et des chances est en cours d’élaboration et nous tiendrons compte des recommandations du Comité nous encourageant à définir la discrimination directe et indirecte. Le projet de loi sur l’élimination de la violence devrait être adopté en 2001. Un groupe de travail a également été constitué pour élaborer un projet de loi sur le rôle du médiateur en matière de droits de l’homme qui disposerait que celui-ci aurait également en charge la question de l’égalité des hommes et des femmes. La représentante a indiqué que le réseau de Centres de crise, dont le nombre vient de passer à 13, a reçu l’an dernier 1 500 appels émanant essentiellement de femmes victimes de violence et qu’ils leur ont apporté une aide matérielle, psychologique et médicale. Ces centres sont des ONG qui fonctionnent avec l’aide matérielle du Gouvernement, a-t-elle précisé.
Elle a indiqué que l’homosexualité ne constituait un crime que si elle s’exerçait sous la contrainte et la menace ou vis-à-vis de personnes sans défense. Elle a par ailleurs fait état, au titre des mesures temporaires gouvernementales destinées à réduire le chômage féminin, du programme pour le développement des industries légères qui met en place des crédits à taux préférentiel pour les femmes. Sur les moyens dont dispose le Gouvernement pour influencer les médias, elle a évoqué la loi de 1999 sur les médias dont l’article 14 régit la vente au détail des périodiques, des publications érotiques et interdit la projection à la télévision d’émissions pornographiques et un projet de loi sur la publicité qui interdirait les annonces publicitaires de caractère sexiste.
Mme Samakova a indiqué que le premier parti féminin, l’Alliance politique des femmes, avait fait son apparition lors des dernières législatives; les quotas font l’objet de nombreuses discussions, a-t-elle ajouté. Ils ne sont pas considérés comme nécessaires en raison du haut niveau de l’éducation des femmes qui favorise leur représentation au plus haut niveau de prise de décisions. 19% de femmes ont été candidates aux législatives et la même proportion a été élue. Pour renforcer la participation des femmes dans le pays, il suffit de disposer des garanties constitutionnelles et législatives, a-t-elle fait valoir. 42% des professeurs et la majorité des enseignants universitaires sont des femmes. Les efforts du Gouvernement portent sur le renforcement de l’alphabétisation, l’amélioration de la législation nationale et l’accroissement de la formation sur l’égalité des sexes. Il a également été créé une réserve de cadres féminins pour la fonction publique. Une mission d’étude va partir en Suède pour étudier l’expérience suédoise. Concernant les établissements ouverts seulement aux filles ou aux garçons, ils représentent moins de 3% de la population scolaire.
Dans le domaine de la santé, la représentante a fait état de mesures gouvernementales visant à développer les soins de santé primaires dans les villages en ouvrant des unités médicales pratiquant notamment l’accouchement.
La détérioration de la santé publique est liée à la fermeture de ces centres au moment de la restructuration de l’économie du pays. La mise en place d’un programme d’Etat destiné à combattre les maladies sexuellement transmissibles a eu des effets positifs et le nombre des personnes atteintes de gonorrhée et de syphilis était à la baisse en 1999. Les efforts faits en matière de planification familiale ont également renversé la tendance à la hausse de l’avortement; elle a expliqué l’augmentation du cancer du sein par l’insuffisance du matériel de dépistage et les problèmes environnementaux. Mme Somakova a également expliqué que le nouveau code administratif interdisait la vente du tabac aux mineurs. Depuis 1998, en conséquence notamment de l’achat groupé de produits anti-tuberculeux, le nombre de décès causés par la tuberculose a diminué de 25% ces deux dernières années. L’amélioration de l’accès aux soins de santé a produit un gain dans l’espérance de vie de 1,6 année pour les femmes.
On estime que les problèmes écologiques sont responsables de 85% des maladies, a-t-elle également indiqué. La protection de l’environnement est une des grandes priorités du Gouvernement du Kazakhstan. Il s’agit de problèmes
d’une telle ampleur qu’il a fallu que le Gouvernement s’assure du concours de
la communauté internationale pour mettre en place les programmes adaptés.
Mme Somakova a également attribué la diminution de la croissance démographique à la détérioration de la situation économique et a expliqué qu’un programme gouvernemental d’aide aux familles pauvres avait été mis en place pour tenter de corriger cette tendance. Elle a précisé que l’âge légal du mariage était le même pour les hommes et les femmes et fixé à 18 ans mais que dans certains cas, si le couple en faisait la demande par exemple, il pouvait être réduit d’au maximum deux ans et que dans tous les cas cette réduction ne pouvait se faire qu’avec l’accord de ceux qui se mariaient. Nous travaillons activement avec les institutions des Nations Unies et notamment le PNUD, a déclaré Mme Somakova. Quant à la question de la suppression de la peine de mort sur laquelle une question a été posée, elle est actuellement à l’étude. Elle a fait valoir que l’amélioration de la situation économique du pays avec notamment l’injection des ressources pétrolières, devrait avoir pour effet d’atténuer un certain nombre de problèmes dont ceux liés aux mouvements migratoires. Elle a rappelé que son pays avait l’intention de ratifier dans un avenir proche le Protocole facultatif à la Convention.
Commentaires des experts
Mme HANNA BEATE SCHÖPP-SCHILLING, experte de l'Allemagne, est intervenue au sujet de l'article 4 qui prévoit des mesures temporaires d'action positive. Elle a expliqué que certaines mesures mentionnées par la Ministre du Kazakhstan, telle la retraite anticipée pour les femmes, renvoyaient à l'article 4.2. Elle a suggéré d'utiliser l'article 4.1. pour lutter contre des cas de discrimination tels que les très bas salaires dans les secteurs de l'emploi dominés par les femmes. Elle a également suggéré que le Kazakhstan profite de la reprise économique pour instaurer des salaires plus équitables.
Mme FRANCES LIVINGSTONE-RADAY, experte d'Israël, s'est déclarée préoccupée par la détérioration de la situation des femmes, et notamment des plus pauvres d'entre elles, suite à la crise économique qu'a traversé le Kazakhstan. Elle s'est prononcée en faveur de mesures temporaires spéciales pour favoriser la promotion des femmes et a proposé que le Gouvernement restaurent les subsides aux plus pauvres qui ont été supprimées pendant la crise.
Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, s'est félicitée de ce que le Protocole l'année dernière. Elle a exprimé le souhait que l'accès des femmes aux tribunaux soit facilité, afin qu'elles puissent elles-mêmes faire respecter leurs droits.
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, s'exprimant sur la possibilité pour les mères de prendre une retraite anticipée, a mis en garde contre les conséquences discriminatoires à l'embauche qu'une telle mesure peut avoir. De plus, cela perpétue une représentation traditionnelle des femmes en les cantonnant dans leur rôle de mères de famille, a ajouté l'experte.
Mme CHIKAKO TAYA, experte du Japon, a déclaré que l'absence de femmes à des postes de responsabilité justifiait le recours aux mesures prévues à l'article 4.1. de la Convention.
Mme IVANKA CORTI, experte de l'Italie, a vivement souhaité que le Protocole facultatif soit ratifié rapidement. Soulignant que la condition de la femme au Kazakhstan est loin d'être idéale, elle s'est félicitée de ce que la ratification de la Convention ait constitué un élément moteur dans l'engagement politique en faveur des femmes. Elle a encouragé la collaboration avec les ONG dans la lutte contre la paupérisation.
Reprenant la parole, Mme AITKUL B. SAMAKOVA a remercié les expertes pour leurs questions et la qualité de leur évaluation. En ce qui concerne la discrimination salariale, elle a déclaré que les salaires dans les secteurs féminisés ont été augmentés de 30% en janvier 2001. Elle a regretté l'absence de femmes à des niveaux élevés de la fonction publique et précisé que la promotion des fonctionnaires se fait par concours. En ce qui concerne l'âge de la retraite, elle a déclaré que le peuple n'est pas prêt à ce que les âges de la retraite des hommes et des femmes soient égalisés, ce qui reviendrait à élever l'âge de la retraite des femmes.
La Vice-Présidente du Comité, Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, résumant les conclusions des experts, a souhaité que le Protocole facultatif signé l'année dernière soit ratifié. Elle a félicité le Kazakhstan pour sa législation égalitaire et a conseillé d'inclure dans cette législation une définition de la discrimination conforme à la Convention. Elle s'est déclarée impatiente de voir toutes les mesures présentées par la Ministre entrer en vigueur. Elle a salué la lutte contre les stéréotypes menée par le Gouvernement et le fait que la poursuite pénale des violeurs a lieu indépendamment des plaintes déposées. Elle s'est félicitée de ce que la situation des femmes aux postes de prise de décisions politiques ait fait l'objet de réponses très franche de la part de la Ministre. Elle s'est faite l'avocate de la mise en place de quotas au Kazakhstan, et ce d'autant plus que le haut niveau d'éducation des femmes représente une garantie contre les risques de médiocrité que les quotas peuvent entraîner. Elle s'est félicitée de ce que l'ensemble des questions ait été abordé de façon exhaustive par les experts et que les réponses apportées aient été satisfaisantes. Elle en conclusion exprimé le souhait que les commentaires de conclusion du Comité bénéficient d'une large diffusion.
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