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CPSD/192

LA QUATRIEME COMMISSION ENTEND DES REPRESENTANTS DE GIBRALTAR ET DE GUAM ET DES PETITIONNAIRES SUR LES QUESTIONS DE GIBRALTAR ET DU SAHARA OCCIDENTAL

27 septembre 2000


Communiqué de Presse
CPSD/192


LA QUATRIEME COMMISSION ENTEND DES REPRESENTANTS DE GIBRALTAR ET DE GUAM ET DES PETITIONNAIRES SUR LES QUESTIONS DE GIBRALTAR ET DU SAHARA OCCIDENTAL

20000927

La Commission de la décolonisation et des questions de politique spéciale a poursuivi ce matin l’examen des questions de décolonisation en entendant le Ministre principal du Gouvernement de Gibraltar qui a déclaré que seul le principe d’autodétermination doit s’appliquer à la situation de Gibraltar. Rejetant l’argument de l’Espagne qui se réfère à une disposition du traité d’Utrecht pour exclure la possibilité d’une indépendance ou d’un Etat de libre association, le Ministre a demandé à la Commission de renvoyer cette question devant la Cour internationale de Justice afin de savoir si le droit à l’autodétermination du peuple de Gibraltar peut être limité par ce Traité, et si oui, de quelle manière? Il a indiqué que le Parlement de Gibraltar a adopté à l’unanimité une résolution en ce sens. Le Ministre a affirmé que la meilleure solution pour Gibraltar passait par un dialogue structuré auquel la population du territoire prendrait part et non par un dialogue bilatéral entre l’Espagne et le Royaume-Uni. Il a ainsi regretté que la résolution de la Commission ne fasse pas place au peuple de Gibraltar, rappelant que les discussions bilatérales, qui ont commencé en 1984, n’ont jusqu’à présent pas permis d’avancer sur cette question.

Le Vice-Président de la Commission pour la décolonisation de Guam a, pour sa part, dénoncé la situation de domination et d’exploitation coloniales dont souffre son peuple et notamment le peuple Chamorro, dont le prix est le sous-développement de ce territoire. Il a informé la quatrième Commission que le Gouvernement de Guam réclame un statut séparé distinct et que la détermination de ce statut passe par l’exercice de leur droit à l’autodétermination. A cet égard, il a déploré le manque d’engagement de la Puissance administrante.

Les pétitionnaires qui se sont exprimés sur la question du Sahara occidental ont dans l’ensemble dénoncé l’impasse dans laquelle se trouve la mise en œuvre du plan de règlement. Ils ont, à cet égard, mis en garde la Commission du risque que fait courir la non-application des dispositions des résolutions de l’ONU et des accords acceptés par les parties sur la stabilité de l’ensemble de la région du Maghreb. Certains ont craint que l’ONU ne renonce à ses responsabilités en matière de décolonisation au Sahara occidental. Ils ont tous affirmé que seuls le plan de règlement et l’Accord de Houston constituent le cadre d’une issue à ce conflit.

Les délégations du Ghana, de l’Egypte et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont pris la parole dans le cadre du débat général.

M. Peter Caruana, Ministre principal de Gibraltar, M. Ron Riviera, Représentant du Gouverneur de Guam et Vice-Président de la Commission de la décolonisation de Guam et M. Carlyle Corbin, Représentant du Gouvernement des îles Vierges américaines ont pris la parole en tant que représentants des territoires non-autonomes.

Sur la question de Gibraltar, la Commission a entendu la déclaration, en tant que pétitionnaire, de M. Joe Bossano, chef de l’opposition. Tandis que sur la question du Sahara occidental, elle a entendu les pétitionnaires suivants: Mme Régine Villemont, Secrétaire générale de l’Association des Amis de la République arabe Sahraouie Démocratique; Mme Margot Kessler, Peace for the Sahrawi People; M. Carmelo Ramirez Marrero, Federacion estatal de Instituciones Solidarias con el Pueblo Saharaui; M. Werner Ruf, professeur de relations internationales à l’Université de Kassel; Mme Gajmoula Ebbi, Association des femmes sahraouie; M. Julio Bonis Alvarez, Conseiller, Département de la présidence du Gouvernement des îles Canaries et M. Eldifio Alonso Quintero, Député au Parlement des îles Canaries.

La Quatrième Commission reprendra ses travaux jeudi 28 septembre à 10 heures.

Débat général

M. YAW O. OSEI (Ghana) a fait observer qu’à l’occasion du Sommet du millénaire, les dirigeants politiques ont inscrit dans leur Déclaration leur engagement à travailler à la réalisation de l’autodétermination des peuples qui sont encore sous domination coloniale et sous occupation étrangère. Un tel engagement souligne notre obligation de mettre fin rapidement au colonialisme, a- t-il déclaré indiquant que l’objectif d’assurer l’autodétermination à tous les territoires avant la fin de la décennie n’a pas été réalisé. Une autre décennie internationale pour l’élimination du colonialisme montrerait que la cause des territoires non autonomes n’est pas oubliée et par conséquent, la délégation du Ghana appuie la recommandation visant à proclamer une deuxième décennie pour l’élimination du colonialisme. A cet égard, elle estime que tout progrès au cours de ce processus dépend de la coopération des Puissances administrantes pour mettre au point un programme de travail pour chacun des territoires. Le Ghana félicite d’ailleurs la Nouvelle-Zélande pour ces efforts continus concernant le processus d’autodétermination de Tokelau et engage les autres Puissances administrantes à faire montre de la même volonté de coopération.

La délégation du Ghana reste préoccupée par la situation au Sahara occidental. Le peuple Sahraoui a des aspirations justes à l’autodétermination, a réaffirmé M. Osei ajoutant que sans progrès dans la mise en œuvre du plan de règlement aucune solution ne peut être réalisée. Il a ainsi appelé toutes les parties à faire preuve de compromis et s’est félicité des suggestions du Secrétaire général visant à ce que les parties s’attachent à trouver des solutions concrètes pour faire avancer le processus.

M. SHAMSHAD AHMAD (Pakistan) a rappelé qu’au cours des 56 dernières années des progrès significatifs ont été enregistrés du point de vue du processus de décolonisation, tandis que des centaines de millions de personnes parvenaient à la liberté. Pourtant, toutes les formes et toutes les manifestations du colonialisme n’ont pas été totalement éliminées et l’indépendance des peuples colonisés reste un sujet de préoccupation majeur pour les Nations Unies. Le représentant a fait remarquer que tandis que la Décennie internationale pour l’élimination du colonialisme touche à sa fin, son programme d’action n’a pu être complètement réalisé. A cet égard, il a accueilli avec satisfaction le fait que le Comité des 24 ait envisagé de lancer une deuxième Décennie, afin d’achever la mise en œuvre de ce programme. Il a exhorté les Puissances administrantes à coopérer avec le Comité en vue de faciliter la mise en œuvre de son mandat et des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale sur la décolonisation, y compris celles concernant spécifiquement chaque territoire.

M. Ahmad a accueilli avec satisfaction le fait que l’on assiste à une prise de conscience grandissante de la part des Puissances administrantes du fait qu’on ne peut nier indéfiniment le droit des peuples à la liberté. Il s’agit d’un développement positif. Il a toutefois regretté que certaines Puissances administrantes continuent d’arguer que les populations de ces territoires ont accepté les accords existants et ne souhaitent pas changer leur situation. Pour la communauté internationale, de telles allégations ne peuvent être acceptées sans qu’une mission indépendante ait pu attester qu’il s’agit bien des vœux de ces populations que de rester non autonomes. A cet égard, le représentant a rappelé que les Puissances administrantes doivent prendre diverses mesures sans préconditions afin d’accélérer le processus de décolonisation et notamment coopérer avec le Comité spécial pour mettre en place un programme de travail

constructif pour chaque territoire ou encore renforcer les conditions économiques dans les territoires en diversifiant l’économie et en permettant une plus grande participation de la population.

Malgré la détermination des Etats Membres le droit à l’autodétermination est encore refusé dans certaines régions du monde, dans les régions de Jammu et Kashmir notamment où 10 millions de personnes continuent de ne pas pouvoir exercer ce droit et à souffrir de la répression dans le cadre de l’occupation illégale de l’Inde depuis plus d’un siècle. Au moment de l’indépendance, a-t-il rappelé, l’Inde et le Pakistan avaient accepté que ces territoires jouissent de leur droit à l’autodétermination. Le Conseil de sécurité a accepté et affirmé par ces résolutions le droit des Kashmiris à l’autodétermination. L’Inde, après avoir accepté ces résolutions, n’a pas tenu ses engagements. Or, si le peuple du Timor oriental a pu exercer son droit à l’autodétermination, pourquoi n’en irait-il pas de même pour les populations de Jammu et Kashmir?

M. AHMED ABOULGHEIT (Egypte) a déclaré que les progrès dans le domaine de la décolonisation garantissant le droit à l’indépendance des peuples coloniaux sont une source de fierté mais qu’il convient de redoubler les efforts visant à appliquer la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux étant donné qu’il reste encore 17 territoires non autonomes. Il a appuyé l’appel pour une deuxième Décennie pour l’élimination du colonialisme et demandé aux Puissances administrantes de coopérer avec le Comité spécial en adoptant un esprit souple marqué par le réalisme politique pour permettre de réaliser les aspirations des peuples des territoires non autonomes. A cet égard, il demande aux Puissances administrantes de permettre à des missions de visites de se rendre dans les territoires pour définir les aspirations réelles de leurs peuples, fournir les renseignements sur l’évolution ainsi que de respecter les droits légitimes des populations quant à leur souveraineté sur les ressources naturelles et d’éviter de mener des activités militaires sur ces territoires qui peuvent être préjudiciables à ces territoires.

L’Egypte qui appuie les efforts de la communauté internationale au Timor oriental souhaite rappeler que nous ne serions pas arrivés à une telle situation si le Président indonésien n’avait pas pris la décision courageuse d’organiser un référendum. Il a ainsi demandé de poursuivre le dialogue avec le Gouvernement indonésien pour améliorer les relations entre le Gouvernement indonésien et le Timor oriental. Concernant la situation au Sahara occidental, la délégation égyptienne attend que la coopération des deux parties soit réelle pour permettre le retour des réfugiés dans le territoire et organiser le référendum. L’Egypte continuera d’apporter sa coopération au Comité spécial dans ses efforts pour atteindre les objectifs de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux peuples et aux pays coloniaux.

M. PETER DONIGI (Papouasie-Nouvelle-Guinée) a informé les membres du Comité qu’en 1999 la France a autorisé une mission de visite à se rendre en Nouvelle- Calédonie et lui a permis d’assister à la première séance du Sénat coutumier dont le représentant faisait partie. La délégation de cette mission voudrait exprimer son appréciation au Commissaire de la France et à son personnel qui ont permis que cette mission soit agréable et utile. Le succès de la visite, a-t-il estimé, a été du à la participation constructive de toutes les parties à l’accord. Il a également informé les membres de la Commission que cette mission a été mentionnée dans le rapport du Comité spécial (A/55/23 part III).

Auditions des représentants des territoires non autonomes

Question de Gibraltar

M. PETER CARUANA, Ministre principal du Gouvernement de Gibraltar, a déclaré que l’Espagne et le Gibraltar sont d’accord sur la nécessité de décoloniser Gibraltar, mais ne le sont pas sur la façon d’y procéder. Nous sommes le peuple d’un territoire qui a été colonisé, il y a plus de 200 ans, et nous figurons sur la liste des territoires de l’ONU et nous avons donc par conséquent le droit d’être décolonisés. Il a expliqué que les habitants de Gibraltar sont les descendants de nombreuses nations européennes, mais constituent toutefois un peuple en tant que tel, contrairement à ce qu’allèguent les Espagnols. Il a rappelé que c’est la doctrine des Nations Unies qui indique qu’il n’y a pas d’autre issue que le processus de décolonisation. Pour sa part, l’Espagne estime que Gibraltar doit en effet être décolonisé en vertu du principe de l’intégrité territoriale. Or, ce principe n’est pas reconnu par la législation internationale. M. Caruana a rappelé que l’Espagne estime qu’il y a une doctrine particulière pour les territoires enclavés. Or, selon Gibraltar, seul le principe d’autodétermination doit s’appliquer. Il a rappelé que l’Espagne se réfère à une disposition du traité d’Utrecht qui stipule que Gibraltar n’a pas le droit à l’autodétermination ou que ce droit est toutefois limité par le traité d’Utrecht. Cela permet à l’Espagne d’exclure la possibilité d’une indépendance ou d’un état de libre association. Le Ministre a estimé que le droit à l’autodétermination contenu dans la Charte des Nations Unies ne peut être limité par aucun autre traité, qu’il ait été conclu avant ou après la Charte des Nations Unies.

M. Caruana a déclaré, au nom des habitants de Gibraltar, que la Commission devrait renvoyer cette question devant la Cour internationale de Justice, et ce, afin de savoir si le droit peut être limité par le traité d’Utrecht, et si oui, de quelle manière. Il a indiqué que le Parlement de Gibraltar a adopté à l’unanimité une résolution en ce sens. Concernant les allégations selon lesquelles le peuple de Gibraltar n’est pas un peuple colonial, le représentant a indiqué que ce peuple, même s’il a des origines diverses, a pu au cours des siècles passés se forger une identité unique et cohérente. Il a rappelé que le territoire dispose d’un système de gouvernance et d’une économie moderne qui fonctionnent correctement. Toutefois, la meilleure façon de savoir si les habitants de Gibraltar forment un peuple en tant que tel, serait la venue d’une mission visite qui pourrait en juger par elle-même.

Enfin, le Ministre a indiqué que la meilleure solution pour Gibraltar passait par un dialogue structuré auquel la population du territoire prendrait part et non par un dialogue bilatéral entre l’Espagne et le Royaume Uni. A cet égard, le représentant a déploré que la résolution de la Commission encourage un dialogue bilatéral entre l’Espagne et le Royaume Uni. Il a regretté que cette résolution ne fasse pas de place au peuple de Gibraltar, rappelant que les discussions bilatérales, qui ont commencé en 1984, n’ont jusqu’à présent pas permis d’avancer sur cette question.

Question de Guam

M. RONALD F. RIVERA, Vice-Président de la Commission pour la décolonisation du Guam, au nom de M. CARL T. C. GUTIERREZ, Gouverneur de Guam, a rappelé que le Président du Comité spécial, M. Donigi, avait été reçu à Guam. Il a eu l’occasion

de rencontrer des représentants élus de Guam et des représentants d’organisations non gouvernementales. La visite, qui a mis l’accent sur le rôle des femmes dans notre société, a été bien accueillie, a-t-il ajouté. M. Rivera s’est félicité que le Comité spécial ait organisé le Séminaire régional aux Iles Marshall et s’est réjoui de la décision du Comité spécial de formuler des méthodes nouvelles et de conduire des consultations avec les Puissances administrantes. Il est important que les Puissances administrantes coopèrent avec le Comité. Mais les intérêts des territoires ne peuvent êtres représentés que par les peuples des territoires eux- mêmes. Concernant la pétition du 2 février 2000 du Gouverneur de Guam, il a indiqué qu’il est essentiel que les discussions commencent le plus tôt possible avec la Puissance administrante. Evoquant la lettre du 6 juin 2000 du Gouverneur de Guam au Président des Etats-Unis, il a informé la Commission qu’elle met en lumière les impasses qui demeurent pour changer le statut politique de Guam et le besoin d’un dialogue bien concret avec la Puissance administrante, soulignant qu’il faut que la communauté internationale soutienne ce processus. Les Nations Unies devraient demander des avis à la Cour internationale de Justice pour aller au-delà du statu quo du colonialisme, a-t-il ajouté, en rappelant que la Charte des Nations Unies et la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux sont tout à fait claires sur le droit à l’autodétermination des peuples des territoires non autonomes. La domination coloniale est un déni des droits fondamentaux reconnus dans la Charte et les Etats Membres doivent agir en conséquence, a estimé M. Rivera.

M. Rivera a expliqué que le Gouvernement de Guam n’est pas libre et relève de la Puissance administrante. Guam est un territoire non incorporé des Etats- Unis qui appartient aux Etats-Unis mais ne fait pas partie des Etats-Unis, a-t-il continué, en indiquant que les règles sont fixées dans l’intérêt de la Puissance administrante. Il a expliqué qu’un tiers des terres de Guam sont destinées à la Puissance administrante, que la démographie de l’île a été changée pour refléter les idéaux multiethniques de la Puissance administrante et qu’ainsi le peuple Chamorro est devenu minoritaire. C’est une domination par les plus puissants, a- t-il déclaré, dénonçant les effets délétères qui touchent le peuple de Guam, notamment sur la famille et leur morale. Comment renoncer à notre patrimoine, a- t-il demandé? Un tiers du budget de l’éducation est destiné à des immigrants qui ne resteront que 7 ans à Guam. On utilise notre terre pour avoir des opérations militaires à moindre frais et ceux qui protestent sont emprisonnés par les tribunaux de la Puissance administrante. Le peuple Chamorro est colonisé et nous sommes déplacés dans notre propre patrie, a-t-il expliqué. Il y a domination, exploitation coloniale et développement étranger au dépend du nôtre, notre sous développement est le prix de la domination coloniale. Ces conséquences doivent être traitées par l’application de l’autodétermination et un statut séparé distinct. Nous avons mis un processus en route pour l’autodétermination mais ce qui manque c’est l’engagement de la Puissance administrante qui doit mettre fin à sa domination avant le processus de décolonisation. M. Rivera s’est enfin félicité de la formulation de la résolution concernant Guam et a appelé la Commission à la vigilance.

Application de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux par les institutions spécialisées et les organismes internationaux associés à l’ONU

Question des îles Vierges américaines

M. CARLYLE CORBIN, représentant du Gouvernement des îles Vierges américaines, a déclaré que la participation de représentants au travail de la Commission permet de favoriser les progrès et d’avancer vers l’autodétermination et l’égalité politique des peuples des territoires. Il s’est félicité du fait que l’ECOSOC ait adopté des mesures relatives à l’aide économique apportée à ces territoires. Il a remercié et félicité la FAO, l’OMI, l’UNESCO, l’UPU et l’OMM d’avoir pris les dispositions nécessaires pour permettre la participation des territoires à leur travail. Des initiatives doivent être prises pour permettre l’accroissement de la participation territoriale dans les organes des Nations Unies, mais aussi pour formuler des programmes d’aide plus appropriés aux territoires. Il a regretté que seuls le PNUD, la CNUCED et le PNUE aient répondu et fourni les informations concernant l’aide apportée aux territoires, tout en mettant l’accent sur l’importance du travail fourni par le PNUD dans les territoires. M. Corbin a estimé que cette assistance aux territoires devrait être restructurée et s’inspirer des critères établis pour les petits territoires insulaires.

Le représentant a regretté ne pas avoir enregistré de progrès dans l’application des résolutions de décolonisation sur les territoires. L’examen de cette question, cette année, par l’ECOSOC, a toutefois permis l’engagement de certains Etats, mais avec des nuances, car cette question de décolonisation continue d’être perçue par certains comme une question politique et non économique. Il a estimé que cette question devait être remise à l’ordre du jour de façon politique, certes, mais surtout économique et social. Il a fait observer que les limites de l’accès à l’aide des Nations Unies rend l’impact de la mondialisation sur les économies de ces territoires plus imprévisible et néfaste, du fait de leur isolement. Ces territoires qui ont une économie en développement ne disposent donc pas de bouclier pour se protéger de la mondialisation et mettre en œuvre un processus de développement durable. Il a rappelé que certains des territoires du Pacifique bénéficient d’un statut d’état associé leur permettant de participer en tant qu’observateurs à certaines conférences mondiales ou à d’autres forum. Le représentant a estimé que la participation des territoires pourrait être optimisée, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre du programme d’action pour les petits territoires insulaires. Il a demandé aux institutions spécialisées de prendre des dispositions souples pour aider ces territoires dans le processus de développement durable.

Auditions de pétitionnaires

Question de Gibraltar

M. JOE BOSSANO, Chef de l’opposition de Gibraltar, a indiqué que les habitants de Gibraltar ne veulent pas être annexés par l’Espagne. Comme ils veulent que soient reconnus leur droit à l’autodétermination, ils estiment que la Puissance administrante ne respecte pas ses obligations. Concernant la position de l’Espagne qui ne reconnaît pas le droit à l’autodétermination, M. Bossano a indiqué que les arguments de l’Espagne selon lesquelles il faut rétablir la situation de 1704 ne sont pas valables et qu’il faudra que l’Espagne accepte et

reconnaisse le droit à l’autodétermination du peuple de Gibraltar. Il faut respecter les droits du peuple de Gibraltar, a-t-il ajouté. Il a expliqué que pour la première fois, à l’occasion de la réunion de Bruxelles, le représentant du Royaume-Uni a reconnu que l’objectif de cette réunion était de discuter du statut politique et constitutionnel de Gibraltar, ce qui revenait à dire qu’il n’y avait pas de décolonisation en dehors de Bruxelles. Il a expliqué que l’opposition au Gouvernement de Gibraltar soutient la vue selon laquelle l’Espagne n’a rien à dire dans ce processus et qu’elle travaille à soumettre une Constitution à la Puissance administrante pour que le peuple de Gibraltar puisse exercer son droit à l’autodétermination et que l’on raye ce territoire de la liste des territoires non autonomes. Il n’y aurait donc plus de processus de Bruxelles, a-t-il continué. Il a indiqué que le Comité de Gibraltar va se réunir vendredi prochain et qu’il compte que l’ONU y participera. Il a expliqué que le Royaume-Uni a dit que dans le cas de Gibraltar, le droit à l’autodétermination est limité par les traités qui lient le Royaume-Uni et que cela revient à condamner le peuple de Gibraltar à une domination coloniale à perpétuité. Il a ainsi appelé les délégations à ne pas rester silencieuses et à ne pas appuyer la résolution sur la question de Gibraltar qu’il a qualifiée de farce. Il a ajouté que ni les menaces voilées de l’Espagne, ni le non respect par le Royaume-Uni de ses obligations en vertu de la Charte, ni l’indifférence de la Commission ne fera dévier le peuple de Gibraltar de la voie vers l’indépendance. Nous sommes un peuple colonial, rien ne nous détournera de la lutte pour obtenir la reconnaissance de notre indépendance, a-t-il ajouté. Il a conclu en dénonçant le fait que deux Etats Membres mettent ensemble leurs propres intérêts nationaux au-dessus des intérêts du peuple de Gibraltar.

Question du Sahara Occidental

Mme REGINE VILLEMONT, Secrétaire générale de l’Association des Amis de la République arabe sahraouie démocratique, a déclaré que l’incapacité à croire en la viabilité d’un état et d’une nation sahraouies qui, a sa place nécessaire dans une dynamique d’unité et d’équilibre maghrébin, est sans doute une des raisons qui explique la volonté française de ne pas envisager une autre politique au Maghreb. Pourtant, a-t-elle continué, la certitude de son bon droit et de son avenir comme nation indépendante, le courage et la maturité à construire un état en exil ne peuvent-ils être retenus en faveur du peuple Sahraoui et de ses dirigeants? Elle a rappelé que le gouvernement du Maroc, comme le roi, continuent d’affirmer la marocanité du Sahara occupé comme un acquis, et ce, en violation des résolutions des Nations Unies et des Accords de Houston signés par ce même gouvernement et le Front POLISARIO. Elle a déploré qu’aucune de ces déclarations ne suscitent l’indignation. Ce durcissement des positions marocaines, a-t-elle continué, intervient au moment où le patient et complexe travail d’identification mené par la Commission de la MINURSO arrive à son terme, avec la publication en janvier dernier des listes provisoires de votants sahraouis.

Mme Villemont a regretté que la publication de ces listes, pourtant élaborées sur la base des critères d’éligibilité acceptés par les parties, ait provoqué des réactions marocaines inadmissibles à l’égard de la MINURSO et des Nations Unies et une nouvelle surenchère de recours imposant, de fait, aux Nations Unies une nouvelle «série» d’identifications. Elle s’est demandé si les Nations Unies qui, dans un passé récent, ont assisté impuissantes à d’effroyables massacres, pouvaient prendre au Sahara occidental un nouveau risque? Mme Villemont a aussi évoqué la rencontre qui doit avoir lieu demain à Berlin, estimant que cette rencontre devait résolument réinventer la dynamique installée par les Accords de Houston en 1997 et imposer, avec les moyens que les Nations

Unies auront la volonté de se donner, l’organisation d’une consultation référendaire ainsi que les moyens pour mettre en œuvre ses résultats. Dans cette perspective, a-t-elle conclu, l’identification déjà bien avancée doit être menée à son terme afin de parvenir à la définition incontestable du corps électoral sahraoui, condition indispensable à la tenue d’un référendum libre et régulier. Le temps presse, la situation est lourde de risques d’une reprise du conflit armé dès l’instant où le Front POLISARIO aura épuisé toutes les formes pacifiques pour faire respecter les droits du peuple sahraoui, a-t-elle averti.

MME KESSLER, Peace for the Sahrawi People, a dénoncé le fait que, depuis décembre 1999, le Secrétaire général présente dans ses rapports, des évaluations négatives de l’avancement du plan de règlement et a déclaré qu’elle craint que les Nations Unies doivent renoncer à leur obligation en ce qui concerne la décolonisation du Sahara occidental. Elle a expliqué que les membres du groupe inter parlementaire dont elle fait partie au Parlement européen ont dénoncé l’attitude obstructionniste du Maroc et a estimé que les Nations Unies doivent agir pour que soit appliqué le plan de règlement. Elle a rappelé que la Cour internationale de justice avait statué sur cette question et avait déclaré que le Maroc n’avait aucune légitimité pour ses aspirations de souveraineté au Sahara occidental. Depuis, aucune sanction n’a été prise contre le Maroc. Les Etats qui ont un siège au Conseil de sécurité ont la possibilité d’éviter le risque de rupture du cessez-le-feu au Sahara occidental.

Mme Kessler a mis en garde le Comité concernant un retour éventuel à la guerre par le Front POLISARIO si le référendum n’est pas fixé en 2001. Elle a indiqué que le Maroc a renouvelé ses installations militaires et a utilisé le temps qui passe pour renforcer sa main mise sur les Marocains dans le territoire. Aujourd’hui il y a un sahraoui pour 7 marocains, a-t-elle expliqué. Le peuple sahraoui ne cesse de manifester contre l’oppression marocaine et le Maroc pratique des arrestations alors qu’ils ne font que revendiquer leur identité sahraouie. La MINURSO ne semble pas en mesure de faire face à cette situation. Les forces de répressions marocaines ont été renforcées à Layoune, a-t-elle continué. Le Maroc déplace des sahraouis vers le Maroc pour répondre au problème du chômage. Elle a indiqué que bien que le HCR présente les quatre camps de réfugiés comme les camps les mieux organisés au monde, ils sont tributaires de l’aide internationale et la situation alimentaire est terrible. Il apparaît que les Nations Unies et d’autres fournisseurs ont réduit leur aide. La coopération entre les fournisseurs est insuffisante. Cette situation désastreuse est la cause de nombreuses maladies et de problème de malnutrition. Il faut que les Nations Unies exercent des pressions pour que le plan de règlement soit appliqué. Nous appelons le Conseil européen, sous présidence française, à exercer des pressions. Le peuple sahraoui doit pouvoir exercer son droit à l’autodétermination.

M. CARMELO RAMIREZ MARRERO, Federacion Estatal de Instituciones Solidarias con el Pueblo Saharaui, a rappelé que des résolutions des Nations Unies ont affirmé à maintes reprises le droit à la décolonisation et à l’indépendance du peuple Sahraoui. La mise en œuvre de ce droit a été bafouée, après le retrait de l’Espagne, par les armées du Maroc et de la Mauritanie. Les gens vivent, depuis ce temps, dans des conditions horribles et misérables, ce qui n’est pas acceptable. M. Ramirez Marrero s’est dit convaincu que seuls le dialogue et la concertation peuvent permettre de parvenir à un accord sur cette question. Il convient aujourd’hui de tenir le référendum, a-t-il affirmé. Pourtant, a-t-il constaté, la situation s’est enlisée malgré la nomination en 1997 de M. Baker

comme représentant du Secrétaire général, mais la partie marocaine a continué d’empêcher la mise en œuvre du plan de règlement.

Toutefois, a-t-il rappelé, le recensement a pu être fait et la liste provisoire des électeurs sera publiée en janvier 2000. Il a accueilli avec satisfaction le fait que l’on dispose pour la première fois d’une liste fiable et a regretté que le Royaume du Maroc n’ait pas la volonté politique de respecter les accords et la législation internationale, et tente d’empêcher la tenue de ce référendum. Il a dénoncé toutes les manœuvres dilatoires auxquelles le Maroc a eu recours pour empêcher le référendum, et a rappelé que le Maroc ne respecterait ce référendum que si ce dernier reconnaissait la marocanité du Sahara occidental. Il a dénoncé l’ambiance de terreur créée par le Maroc au Sahara occidental qui rappelle la situation et l’ambiance qui ont prévalu au Timor oriental. M. Marrero a demandé que des mesures soient prises pour contraindre le Maroc à respecter les engagements qu’il a pris à la table des négociations. Sinon, a-t-il continué, il convient de reconnaître l’échec du processus de paix, avec le risque de revenir au conflit armé. Il a conclu en affirmant qu’il n’y a pas de troisième voie, et que la seule solution est de permettre au peuple du territoire d’exercer son droit à l’autodétermination, avec un référendum qui fournit toutes les garanties d’équité et de démocratie. Tout ce qui s’écarte du cadre des Accords de Houston est une mauvaise piste. Il a enfin engagé, le gouvernement espagnol, en tant qu’ancienne Puissance administrante, à jouer un rôle plus important dans ce processus.

M. WERNER RUF, Université de Kassel (Allemagne), rappelant la dernière résolution du Conseil de sécurité qui invite les deux parties à s’employer à s’entendre sur une solution acceptable à leur différend au Sahara occidental, s’est demandé si cette résolution signifiait que le droit à l’autodétermination d’un peuple doit être renvoyé aux négociations entre deux pays tiers. Il a demandé si cela signifiait que les Nations Unies renoncent à leur responsabilité concernant le droit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental et a fait observer que si tel est le cas, les Nations Unies seraient en train de créer un précédent dangereux en sapant la Charte. On ne peut pas renoncer au plan de règlement, a-t-il ajouté. Quelles seraient les conséquences pour les Nations Unies, pour les camps de Tindouf et pour la stabilité dans la région toute entière? Il est impensable que les Nations Unies cautionnent le retour à l’anarchie dans la région, a conclu le représentant.

Mme GAJMOULA EBBI, ancien membre du Groupe des femmes sahraouies, a indiqué que le Front POLISARIO a, pendant de nombreuses années, commis beaucoup de violences, qui sont d’ailleurs recensées dans le rapport de 1996 d’Amnesty International. Depuis 1988, nombreux sont les Sahraouis qui ont décidé de s’écarter des positions du Front POLISARIO et ont fuit le calvaire des camps de réfugiés. Beaucoup, a-t-elle indiqué, ont créé des associations pour dénoncer les attitudes intransigeantes des parties au conflit. Elle a affirmé que le Front POLISARIO ne recueille pas l’assentiment de la majorité du peuple Sahraoui. Nos familles souffrent aujourd’hui de la misère et de la pauvreté et une grande partie des aides humanitaires est détournée pour enrichir M. Abdelaziz. A cet égard, elle a lancé un appel à toutes les organisations humanitaires leur demandant de veiller à ce que l’assistance arrive bien aux personnes à qui elle est destinée et de faire en sorte d’éviter que souffre ce peuple innocent. Elle a également demandé à l’ONU et à la communauté internationale de faire tout ce qui est en leur mesure pour débloquer et accélérer la mise en œuvre du plan de règlement.

M. JULIO BONIS ALVAREZ, Conseiller au Département de la présidence du Gouvernement des îles Canaries, a indiqué que les îles Canaries qui ont entretenu pendant de nombreuses années de bonnes relations avec le Sahara occidental ont souffert du point de vue économique notamment, à la suite du conflit entre le Maroc et le Front POLISARIO. Il a rappelé qu’en raison de ce conflit long de 15 ans des milliers de personnes ont connu des situations très difficiles. Il a estimé que le conflit au Sahara occidental constitue un grave élément de déstabilisation dans toute la région. Il a rappelé que le plan de paix proposé, il y a 10 ans par les Nations Unies, avait comme premier objectif un cessez-le-feu qui s’est depuis maintenu, tout en déplorant que le plan de règlement ait enregistré de nombreux retards. Il a affirmé que ces retards sont principalement dus aux divergences des parties au conflit et estimé que le statu quo ne peut plus durer. Les îles Canaries craignent une reprise du conflit qui aurait des conséquences désastreuses pour la région. Il a estimé qu’il est important de garantir que le cessez-le-feu ne soit pas rompu. M. Alvarez a affirmé que les îles Canaries appuient le plan de paix des Nations Unies et estime qu’il s’agit de l’unique issue au conflit. Toutefois, ce plan de paix a besoin d’un nouvel élan qui passe par la reprise du dialogue entre les parties. A cet égard, M. Alvarez a demandé à la communauté internationale de faire en sorte que ce processus avance réellement et que l’on progresse par le biais du dialogue.

M. ELFIDIO ALONSO QUINTERO, Député au Parlement des îles Canaries a déclaré que c’est le processus d’autodétermination qui mettra le point final à cette décolonisation. Il a indiqué que les recours du Front POLISARIO représentent seulement 3% des recours marocains. Ne pas conclure ce conflit à cause de l’intransigeance des parties serait prendre le risque de retour à la guerre. Ce serait comme si on en revenait à l’époque de la colonisation des Canaries par l’Espagne, a-t-il déclaré en indiquant que le pays, alors dans une situation de vide du pouvoir, a connu une situation très difficile. Parler de droits historiques et de légitimité de la part de la puissance occupante est sarcastique, a-t-il estimé, tout en rappelant que le monarque espagnol a réaffirmé que seule l’autodétermination apporterait une solution au conflit. Il n’y a d’autres voies pour résoudre le conflit que la voie marquée par les Nations Unies il y a dix ans, il n’y a d’autre solution que la paix, a-t-il conclu.

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