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AG/1028

LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE S'INTERROGE SUR LES MOYENS DE CORRIGER LES EFFETS PERVERS DE LA MONDIALISATION

27 juin 2000


Communiqué de Presse
AG/1028


LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLEE GENERALE S'INTERROGE SUR LES MOYENS DE CORRIGER LES EFFETS PERVERS DE LA MONDIALISATION

20000627

GENEVE, le 27 juin -- La session extraordinaire de l'Assemblée générale consacrée au suivi du Sommet mondial sur le développement social a poursuivi, ce matin, son débat général de haut niveau sur la mise en oeuvre de la Déclaration du Programme d'action de Copenhague cinq après son adoption.

Dans ce cadre, la plupart des chefs d'États et de gouvernement et autres responsables de rang ministériel, qui ont pris la parole, ont souligné la nécessité d'éviter que le phénomène de la mondialisation ne marginalise les pays en développement. À cet égard, il a été souligné que la communauté internationale est responsable de la marche de la mondialisation et dispose des moyens d'en corriger les effets pervers, notamment en développant des institutions internationales fortes, capables de réglementer le marché mondial fondé sur un équilibre des intérêts entre le Nord et le Sud. Le système économique mondial et les marchés internationaux ne tiennent pas suffisamment compte aujourd'hui de la fragilité économique et sociale des pays en développement et la volatilité des capitaux internationaux accroît la vulnérabilité des pays en développement face aux crises mondiales.

Au cours du débat, on a préconisé l'intégration formelle du respect des normes sociales dans le commerce international et la mise en place d'un processus de surveillance multinationale contraignant afin de favoriser l'avènement d'un nouvel ordre mondial plus juste.

L'Assemblée générale a entendu le Roi du Swaziland et le Président du Tadjikistan, ainsi que les Premiers ministres de la Principauté d'Andorre et du Mozambique et le Vice-Président du Burundi. Sont également intervenus le Ministre de la coopération économique et du développement de l'Allemagne; le Ministre de la coopération pour le développement du Danemark; le Ministre d'État la Turquie; le Ministre de l'unité nationale et du développement social de la Malaisie; le Ministre pour l'habitat et le développement social des Bahamas; le Ministre du travail et de la politique sociale de Bulgarie; le Ministre du travail et des affaires sociales de Bahreïn; le Ministre des affaires de la femme, de la jeunesse et de l'enfance du Malawi; le Ministre de la famille, de la solidarité sociale et de la jeunesse du Luxembourg; le Ministre du développement social de la Trinité- et-Tobago; le Vice-Ministre des affaires étrangères de la République démocratique populaire de Corée et le Conseiller spécial pour l'environnement auprès du Sultan d'Oman.

La prochaine séance plénière de l'Assemblée générale se tiendra cet après-midi à 15 heures.

Déclarations

M. MARC FORNÉ MOLNÉ, Premier Ministre de l'Andorre, a déclaré : ‘nous - hommes et femmes de ce nouveau millénaire - sommes bien aveugles, qui ne savons que parler et compter, établir des statistiques et nous lamenter, sans trouver des solutions pour les plus démunis’. Et il a ajouté : ‘Nous ne pouvons nous permettre que notre rôle se voie reléguer à celui d'un simple comptable témoin de l'évolution du marché’. M. Forné Molné a souligné que l'État se doit notamment de veiller à ce que la mondialisation n'enrichisse pas les uns au détriment des autres. Deux mots peuvent résumer les aspirations actuelles de beaucoup d'entre nous, a déclaré le Premier Ministre andorran : responsabilité et solidarité. Le Premier Ministre a précisé qu'en parlant de responsabilité, il s'adresse à ceux qui profitent sans scrupule de la solidarité internationale; ceux - dictateurs, pseudo-démocrates, autocrates - qui emprisonnent les esprits de populations entières dans leurs égoïsmes; ceux qui s'enrichissent indûment au détriment de leurs concitoyens.

Le Premier Ministre andorran a rappelé qu'à Copenhague, son pays a proposé et rédigé l'engagement par lequel les chefs d'État et de gouvernement du monde, encouragent la participation des individus appartenant à tous les groupes d'âge, reconnaissant que leur contribution est également importante et indispensable à l'instauration d'une société harmonieuse, et favorisent le dialogue entre les générations dans tous les secteurs de la société. Cet engagement traduisait le souci d'un pays dont une grande partie de la population est jeune, a précisé le Premier Ministre. L'exode rural auquel nous assistons dans beaucoup de pays en développement - et qui crée de grandes mégalopoles - déracine la famille traditionnelle et aliène les différentes générations qui n'ont ainsi plus de contact entre elles, entraînant un grave problème d'intégration sociale et de marginalisation qui est lui-même très souvent à la base du chômage, alimentant ainsi un véritable cercle vicieux. L'Andorre essaie de construire une politique d'intégration et une politique de jeunesse cohérente mettant notamment l'accent sur l'éducation ainsi que sur la connaissance des langues et des cultures voisines. Avec le Sommet de Copenhague, les États ont promis d'en finir avec la pauvreté, a rappelé le Premier Ministre. Évidemment, en cinq ans, ils n'ont pu qu'entamer cette tâche, a-t-il noté. Pour sa part, l'Andorre a accru et va continuer d'accroître les contributions volontaires qu'elle verse aux Nations Unies en faveur du développement.

Soulignant par ailleurs que l'Afrique continue de souffrir du fléau du sida, de supporter le fardeau de la dette et de subir des conflits armés alors que l'État de droit tarde à se consolider sur le continent, le Premier Ministre a affirmé que la communauté internationale doit user de toute son influence afin de multiplier le nombre de sociétés humaines ayant pour normes le respect d'autrui et les élections libres des représentants du peuple.

Le Roi MSWATI, Chef d'État du Swaziland, a déclaré que le Sommet de Copenhague a permis de jeter les bases d'un nouvel engagement de la communauté internationale à relever les défis en matière sociale, dans un esprit de coopération et de partenariat. Pourtant, a-t-il fait remarquer, les objectifs de Copenhague ne sont toujours pas atteints par nombre de pays en développement. À cet égard, le Roi du Swaziland a regretté le déclin de l'aide au développement dont bénéficie son pays et plus particulièrement le recul de l'aide bilatérale.

Le Swaziland est également préoccupé par la question de la dette des pays en développement. S'il appuie les démarches visant à annuler la dette des pays les plus pauvres, il souhaiterait par ailleurs que les pays qui ne sont pas concernés par le problème de la dette puissent bénéficier de prêts à des conditions avantageuses pour financer des projets de développement.

Le Swaziland a réalisé des progrès sensibles dans certains domaines clés du développement social. Une stratégie de développement pour les 25 prochaines années a été lancée, conformément à l'esprit de Copenhague. La lutte contre la pauvreté, les questions relatives à l'éducation et à la santé sont les axes prioritaires de la politique du Swaziland en matière de développement. La création d'emploi est également au coeur des préoccupations. Dans ce contexte, le Swaziland demande l'appui des investisseurs étrangers.

Le Roi Mswati s'est dit préoccupé par l'ampleur prise par l'épidémie de sida qui représente selon lui une des menaces les plus graves au développement économique et social de son pays. Sans action urgente, a-t-il souligné, près de 22% de la population disparaîtra dans les 10 prochaines années. Aussi, a-t-il insisté sur la nécessité de commercialiser les médicaments à des prix raisonnables. La stratégie de lutte contre le sida mise en oeuvre par le Swaziland ne suffira pas à elle seule à endiguer la maladie. C'est pourquoi le Swaziland lance un appel à tous les États membres afin qu'ils apportent leur soutien.

M. MATHIAS SINAMENYE, Vice-Président du Burundi, a déclaré que malgré quelques progrès dans les efforts pour éradiquer la pauvreté et promouvoir l'emploi, de nombreux pays en développement se heurtent encore à des problèmes d'ordre conjoncturel et structurel. L'écart entre les pays riches et les pauvres continue de se creuser, a-t-il rappelé. La région des Grands Lacs éprouve encore de nombreuses difficultés et certains pays dont le Burundi ont connu des situations de graves crises à l'origine d'une pauvreté extrême, là où souvent les conditions de vie des populations étaient déjà précaires.

Le Burundi, a déclaré le Vice-Président, est gravement touché par le chômage et la pandémie du sida qui affecte la population active et formée, mais de nombreux efforts ont été fournis : les résultats sont encourageants dans le secteur de l'éducation et de la santé publique et peu à peu, le pays retrouve un environnement d'avant la crise. Pour sortir de l'engrenage de la violence, le Burundi s'est engagé dans un processus de paix, dont les négociations qui se déroulent à Arusha en Tanzanie avec Nelson Mandela pour médiateur s'acheminent vers une phase décisive. Le projet d'accord de paix est en train d'être finalisé a-t-il annoncé, accord qui devra viser la fin des violences et de l'impunité.

Le Gouvernement du Burundi souhaite que le projet d'accord de paix soit prochainement discuté entre les parties car il reste encore des questions importantes comme l'éradication du génocide, le système électoral, ou encore le leadership de la transition. Le Burundi a hâte de se ‘remettre sur les rails’, mais a besoin de l'assistance de la communauté internationale. Toute la région des Grands Lacs est stabilisée, mais les événements sont interconnectés et appellent ainsi des règlements régionaux. Le Vice-Président a ajouté que des programmes réalistes et visant la sécurité pour tous ont été élaborés et que des plans d'action doivent être mis en place pour leur mise en oeuvre. Le Burundi a l'espoir de réussir, mais cet espoir serait vain sans la coopération des pays développés.

M. PASCOAL MANUEL MOCUMBI, Premier Ministre du Mozambique, a rappelé que son pays a traversé une période difficile au début de l'année en subissant de plein fouet des pluies torrentielles et des cyclones qui ont provoqué les plus importantes inondations jamais connues en Afrique australe. Ces inondations ont causé des dégâts considérables pour les infrastructures publiques, a-t-il précisé avant d'exprimer, au nom de son peuple, ses plus sincères remerciements à la solidarité exprimée et au soutien apporté à cette occasion par la communauté internationale. M. Mocumbi a par ailleurs souligné que dans son pays, sept à huit cents personnes sont infectées chaque jour par le VIH/sida, ce qui a amené le gouvernement à élaborer un plan de prévention et de lutte contre cette maladie.

Le Premier Ministre du Mozambique a par ailleurs souligné que le Plan d'action adopté il y a cinq ans à Copenhague constitue un important instrument de promotion du développement social qui devrait permettre d'assurer que chacun, à travers le monde, jouit de manière équitable des avantages sociaux de la croissance économique mondiale et des progrès réalisés dans les domaines scientifiques et technologiques. Désormais, a poursuivi M. Mocumbi, il est nécessaire de mettre sur pied un nouveau partenariat mondial qui implique nécessairement de promouvoir des stratégies de développement durable plaçant l'être humain au centre du développement. À cet égard, le Premier Ministre a mis l'accent sur la nécessité d'institutionnaliser le dialogue entre tous les acteurs sociaux dans le but de réaliser l'objectif de lutte contre la pauvreté. Cela implique de placer la question de la réduction de la pauvreté au-dessus de toute contingence ou de tout intérêt politique, tant au niveau national qu'au niveau international. Il est également indispensable de promouvoir la responsabilité vis-à-vis des engagements politiques pris par les États en matière de développement social, a ajouté le Premier Ministre. À cet égard, il pourrait s'avérer important d'adopter aux niveaux national et international des mécanismes efficaces obligeant les gouvernements à mettre en oeuvre les engagements qu'ils ont pris.

Le Mozambique a par ailleurs exhorté les institutions de Bretton-Woods à accélérer la mise en oeuvre d'initiatives viables visant à résoudre de manière durable, efficace et cohérente le problème de la dette. Le Premier Ministre mozambicain a souligné que son pays est engagé à promouvoir les notions de responsabilité et de transparence en tant que moyens efficaces d'allouer rationnellement, dans le meilleur intérêt des pays en développement, les maigres ressources dont ces pays disposent.

M. EMOMALI RAHMONOV, Président de la République du Tadjikistan, a déclaré que la présente session extraordinaire de l'Assemblée générale devrait être, à l'heure de la mondialisation de l'économie, l'occasion de repenser la question du développement social. En effet, ce phénomène constitue une menace pour les pays en développement et ceux qui connaissent une phase de transition économique dans la mesure où ils n'ont pas les moyens d'être compétitifs sur les marchés mondiaux. Dans ce contexte, le Président du Tadjikistan a affirmé que les différents processus de la mondialisation devraient s'accompagner de la mise en oeuvre de politiques sociales aux niveaux national et international.

La réalisation des objectifs de Copenhague au Tadjikistan sera une oeuvre de longue haleine, a affirmé M. Rahmonov. Le programme économique actuellement mis en oeuvre, soutenu par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, vise à promouvoir le bien être de la population et tente d'apporter des réponses aux situations d'urgence, telles que la pauvreté et le chômage. Si la politique mise en oeuvre par le gouvernement a permis de parvenir à la stabilité macroéconomique, la marche vers l'économie de marché a accru le taux de pauvreté. La lutte contre ce phénomène demeure donc le premier combat à livrer, a expliqué le Président. Le Tadjikistan a adopté nombre de lois en matière sociale, conformément aux objectifs de Copenhague. La promotion de l'égalité entre hommes et femmes bénéficie d'une attention particulière. La stratégie de relance de l'économie se concentre principalement sur la réhabilitation des infrastructures, la réintégration des anciens soldats dans la société civile et le développement social.

Les catastrophes naturelles dans les années passées ont provoqué une détérioration de la situation économique et sociale d'un pays qui se trouve par ailleurs dans une situation d'après conflit. Aussi, le Tadjikistan compte-t-il sur l'assistance et le soutien de la communauté internationale. Il espère que les appels à l'aide humanitaire seront entendus. Le Tadjikistan espère que la résolution de l'Assemblée générale relative à l'assistance internationale et à la réalisation de projets en période de reconstruction après la guerre, sera effectivement mise en oeuvre.

Mme HEIDEMARIE WIECZOREK-ZEUL, Ministre de la coopération économique et du développement de l'Allemagne, a déclaré qu'une grande partie de l'humanité n'a toujours pas accès au ‘monde global’, en soulignant à titre d'exemple que 88% des internautes vivent dans les pays développés et que les trois hommes les plus riches du monde disposent d'une fortune qui au total représente le revenu d'environ 600 millions de personnes des pays en voie de développement. La mondialisation, a-t-elle estimé, n'est pas quelque chose de magique mais un phénomène que nous devons maîtriser, auquel nous pouvons donner une forme et dont nous devons assurer la responsabilité. Selon la Ministre, il est nécessaire de développer des règles et des lois globales et, pour ce faire, il faut des institutions internationales fortes, sachant que les mécanismes existants ne suffisent plus à réguler les évolutions au niveau mondial.

Mme Wieczorek-Zeul a souligné l'importance du respect des droits de l'homme et de la mise en place de normes sociales minimum tout en précisant que de telles perspectives de règles valables dans toutes les régions du monde ne pourront être viables que si un équilibre des intérêts entre le Nord et le Sud est trouvé. La Ministre a également estimé que le protectionnisme demeure un facteur de pauvreté et que la libéralisation du commerce peut contribuer à son éradication. Une autre contribution importante afin d'atteindre cet objectif, selon la Ministre allemande, est l'initiative de l'allégement de la dette dont des mesures générales viennent d'être adoptées pour l'Ouganda, le Mozambique, la Bolivie, la Mauritanie et la Tanzanie, allégeant la dette de ces pays d'un montant total de plus de 14 milliards de dollars. La Ministre a également souhaité que des décisions similaires en faveur de l'allégement de la dette d'une quinzaine d'autres pays soient prises d'ici la fin de l'an 2000.

M. JAN TRØJBORG, Ministre de la coopération pour le développement du Danemark, a souligné que, depuis le Sommet de Copenhague, le développement ne peut plus être réduit à la croissance économique et à la stabilité macroéconomique. Le ‘consensus de Copenhague’ remplace peu à peu le ‘consensus de Washington’ qui mettait l'accent sur la déréglementation et sur la libéralisation. ‘Le remède ultra-libéral n'a rien guéri’, a fait observer le Ministre danois. Il ne s'agit pas de remettre en question l'importance du libre marché, de la stabilité économique et de la croissance économique mais il n'existe pas de loi de la nature qui fasse disparaître comme par enchantement la pauvreté et la misère. Reconnaissant qu'une économie de marché dynamique constitue le moteur du développement durable, le ministre a rappelé que les forces du marché doivent être orientées de manière à assurer un maximum d'avantages en matière de bien-être et à éviter la détresse sociale. La croissance économique doit aller de pair avec la pleine et entière reconnaissance des droits du travail et avec le respect de l'environnement. En outre, les investissements dans le secteur éducatif afin d'assurer l'éducation pour tous constituent une condition préalable à la promotion de tous les aspects du développement. ‘Les marchés doivent être au service des êtres humains’, a déclaré M. Trøjborg.

Dans certains domaines, des progrès ont été enregistrés depuis le Sommet de 1995 alors que dans d'autres, il y a eu recul, a noté le Ministre danois. En ce qui concerne l'épidémie de sida, a-t-il poursuivi, la communauté internationale a trop longtemps négligé la nature globale du problème. L'insuffisance du progrès social est due, le plus souvent, à un manque de détermination politique, a ajouté M. Trøjborg. Il ne saurait y avoir de développement social durable sans une gestion transparente et sans contrôle de la corruption, ni sans démocratie, sans la primauté du droit, sans une bonne gouvernance, sans liberté d'expression, a poursuivi le Ministre.

La communauté internationale doit faire en sorte que les avantages de la mondialisation soient plus largement partagés et il convient de libérer les pays pauvres les plus lourdement endettés d'une dette qui les paralyse dans leur action sociale. Il convient également de promouvoir les investissements étrangers dans les pays en développement. Il nous faut en outre renouveler nos efforts afin d'assurer l'intégration des pays en développement dans le système commercial mondial. Il faut également lever les barrières commerciales qui empêchent les biens et les produits des pays les moins développés de pénétrer les marchés des pays développés. Il faut enfin que la communauté internationale des donateurs respecte l'objectif de 0,7% du PNB consacré à l'aide publique au développement.

M. TUNCA TOSKAY, Ministre d'État de la Turquie, a déclaré que, dans le contexte de la mondialisation, la volatilité des capitaux internationaux accroît la vulnérabilité des pays en développement. Si la mondialisation permet d'améliorer le bien-être de la population de certains pays, elle enferme les États dépourvus de capital, de technologie et de main d'oeuvre qualifiée dans le cycle de la pauvreté. La Turquie a déployé des efforts importants ces cinq dernières années afin de mettre en oeuvre les engagements de Copenhague. L'instabilité macroéconomique du pays, due à un taux élevé d'inflation, limite toutefois sa capacité à promouvoir le bien-être de sa population. Des actions importantes ont pourtant pu être réalisées dans les domaines de l'éducation et de la sécurité sociale. Ainsi, 91% des Turcs bénéficient désormais de l'assurance sociale. Des efforts sont également déployés en ce qui concerne le travail des enfants. La Turquie est engagée dans un processus de ratification de la Convention 156 de l'Organisation internationale du travail sur les pires formes de travail des enfants.

Pour la Turquie, le développement social passe notamment par la stabilité macroéconomique, l'élimination de la pauvreté, le renforcement de la coopération entre les secteurs public et privé et les organisations non gouvernementales. La Turquie considère que le développement social est déterminant pour la paix mondiale. Seul un esprit de coopération et de solidarité entre États pourra permettre de parvenir au développement social pour toute l'humanité.

M. SAYID SHABIB BIN TAIMUR AL SAID, Conseiller spécial pour l'environnement auprès du Sultan d'Oman, a déclaré que l'importance de cette réunion réside dans le fait que doivent être discutées les réalisations de ces dernières années en mettant l'accent sur les nouvelles difficultés et contraintes qui se profilent à l'horizon, tels les problèmes liés aux mécanismes de l'économie mondiale et des interactions et relations entre États. Ces nouvelles difficultés et contraintes préoccupent en particulier les pays en voie de développement qui redoutent la marginalisation.

M. Bin Taimur Al Said a souhaité ajouter la voix de son gouvernement à celles de millions de personnes qui vivent dans une pauvreté extrême, qui attendent des efforts concertés et une coopération efficace de tous les pays en vue de réaliser un développement durable pour tous ceux qui sont dans le besoin. Le Gouvernement omanais a appelé les pays industrialisés et les pays développés à fournir une aide aux pays confrontés à la pauvreté, afin de favoriser un ordre politique, économique et social stable et qui servirait les intérêts tant des pays en voie de développement que des pays développés. Il a également appelé les pays industriels et en voie de développement à éviter toute discrimination dans l'offre d'assistance, qu'elle soit motivée par des considérations politiques, économiques ou autres.

Mme SITI ZAHARAH SULAIMAN, Ministre de la cohésion nationale et du développement social de la Malaisie, a souligné qu'en ce début de nouveau millénaire, la lutte contre la pauvreté reste le principal défi auquel la communauté internationale est confrontée. Plus d'un milliard de personnes continuent de vivre dans l'extrême pauvreté; plus de 150 millions d'enfants n'ont pas accès à l'école; la population mondiale augmente de 80 millions d'individus chaque année; le fossé entre riches et pauvres ne cesse de s'élargir alors que la violence sociale contre les femmes, les enfants et les minorités se développe, tout comme l'abus de stupéfiants et les maladies comme le sida. La question est donc de savoir si la mondialisation peut apporter des réponses à de tels défis sociaux. Il faut donc poursuivre le dialogue pour parvenir à un environnement propice à la croissance durable, à l'intégration sociale et à l'éradication de la pauvreté.

Pour sa part, la Malaisie a mis en place dès 1971 une politique de lutte contre la pauvreté. L'accent a été mis sur l'accès aux micro-crédits, à des logements bon marché et à la formation permettant d'accéder à un emploi rémunérateur. Le succès du plan d'action élaboré à Copenhague dépendra de la manière dont les États respecteront les engagements qu'ils ont pris lors du Sommet de 1995, a déclaré la Ministre.

M. ALGERNON S.P.B. ALLEN, Ministre du logement et du développement social des Bahamas, a rappelé que l'homme doit être placé au centre des politiques de développement. En tant que petit État des Caraïbes, les Bahamas considèrent que le système économique mondial et les marchés internationaux ne tiennent pas suffisamment compte de la fragilité économique et sociale des pays en développement.

M. Allen a fait valoir que, depuis cinq ans, les Bahamas s'efforcent de promouvoir la démocratie et d'encourager la participation active de la société civile dans le développement social. Les Bahamas mettent en oeuvre des programmes destinés à améliorer le bien-être de la population, notamment en matière de logement. Les personnes les plus pauvres et les marginaux bénéficient de l'assurance sociale. L'éducation fait l'objet d'une attention particulière. Il s'agit d'adapter les qualifications aux exigences du marché du travail. L'accent est mis par ailleurs sur la formation aux nouvelles technologies dans le cadre de l'enseignement public. Les Bahamas considèrent que le commerce électronique peut permettre de promouvoir l'emploi pour une partie importante de sa population. M. Allen a également fait part des mesures prises par son pays en vue de favoriser l'intégration sociale des personnes handicapées, des personnes âgées et des enfants. Le pays s'efforce en outre de favoriser un accès universel et équitable aux services de santé. Des établissements de soin ont été créés dans les zones rurales. M. Allen a enfin précisé que l'épidémie de sida est la première responsable de la mortalité des personnes âgées de 15 à 44 ans. Il a toutefois souligné que le pays est doté de l'un des meilleurs systèmes de soins dans la région.

M. ABDUL-NABI ABDULLA AL-SHUALA, Ministre des affaires sociales et du travail de Bahreïn, a déclaré que son pays est convaincu de l'importance du développement social pour tous et en particulier du développement humain, sachant que le capital humain est le principal moteur de ce développement social. Les rapports annuels en matière de développement social publiés par le Programme des Nations Unies pour le développement ont révélé que le Bahreïn occupe la première place en matière de développement humain pour les pays arabes et reste parmi les premiers dans le monde. L'État a souligné l'importance de l'éducation, instrument qui doit permettre aux citoyens d'édifier une société juste et stable. L'objectif de la santé pour tous a été atteint officiellement avant la date prévue, une attention particulière est accordée aux personnes qui ont des besoins spéciaux, comme les personnes handicapées et les personnes âgées. La formation occupe également une place importante dans la vision du développement social et donne accès aux progrès scientifiques et techniques. L'équité entre les sexes, les efforts en faveur des femmes notamment en ce qui concerne leur participation au développement social et leur contribution à la vie publique sont favorisés. Afin d'assurer davantage d'efficacité à ces politiques, le Bahreïn souhaite renforcer le rôle des organisations non gouvernementales.

M. Al-Shuala a déclaré que le Sommet de Copenhague a constitué le point culminant de toute une série de conférences mondiales sur le développement social, révélant que la communauté internationale est de plus en plus consciente des enjeux du développement social. Mais il existe encore de nombreux obstacles entravant la réalisation du programme et de la déclaration de Copenhague. Il est nécessaire de poursuivre l'examen des progrès réalisés dans la mise en oeuvre de ces programmes, de renforcer ces efforts, de formuler de nouvelles approches globales pour encourager le développement social pour tous et un nouvel ordre humanitaire qui supprimera les privations et autres maux sociaux, améliorera la qualité de la vie et garantira un environnement sûr et stable.

M. IVAN NEYKOV, Ministre du travail et de la politique sociale de la Bulgarie, a indiqué que, dans le cadre de la mise en oeuvre de la déclaration et du plan d'action de Copenhague, la Bulgarie a mis sur pied un programme national en faveur du développement social. L'élaboration de ce programme a bénéficié d'une vaste participation des représentants de la société civile et son contenu a été largement débattu lors d'une conférence internationale organisée avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).

Pour respecter les engagements pris à Copenhague, la Bulgarie a mis sur pied en 1997 un programme gouvernemental intitulé ‘Bulgarie 2001’ qui envisageait un certain nombre de mesures spécifiques destinées à prévenir tout nouvel appauvrissement de la population ainsi que toute nouvelle déstabilisation de l'économie nationale. Le Gouvernement bulgare est parvenu à surmonter une crise économique et sociale sans précédent. Les mesures prises à cette fin ont reçu le soutien de l'ensemble des partenaires sociaux. Une réforme globale du système de sécurité sociale a été lancée par le gouvernement, a par ailleurs précisé le ministre. Les trois piliers du nouveau système sont : l'assurance sociale publique obligatoire; l'assurance retraite complémentaire obligatoire; l'assurance retraite complémentaire volontaire. Avec l'appui du bureau du PNUD à Sofia, une plan national antipauvreté a été établi dont l'objectif est de prévenir l'apparition de groupes de pauvreté permanents sur la base du sexe, de l'âge ou de l'appartenance ethnique et de stimuler la performance économique individuelle dans le cadre de la lutte contre la pauvreté.

Mme MARY KAPHWELEZA BANDA, Ministre des affaires de la femme, de la jeunesse et des enfants du Malawi, a déclaré que 60% de la population de son pays vit en dessous du seuil de la pauvreté. Cette situation est aggravée par l'épidémie de sida qui frappe 14% de la population. Depuis le Sommet de Copenhague de 1995, le Malawi s'est efforcé de construire et de renforcer ses institutions démocratiques. Un programme de lutte contre la pauvreté a été mis en oeuvre, un Fonds d'action sociale a également été institué, a précisé la ministre. Mais Les indicateurs de santé restent préoccupants en dépit d'actions importantes tel le plan d'action national de lutte contre le sida et les mesures prises en matière d'éducation.

La Ministre malawienne a enfin décrit les mesures prises pour honorer les obligations du Malawi en ce qui concerne la lutte contre l'exclusion sociale. Des mécanismes de protection des droits de l'homme et des groupes vulnérables ont été mis sur pied. Elle a toutefois souligné que le poids de la dette de son pays limite sa capacité d'action en matière de développement social. Elle a également souligné que les politiques d'ajustement structurel ont affecté de façon négative le programme d'allégement de la pauvreté.

Mme MARIE-JOSÉE JACOBS, Ministre de la famille, de la solidarité sociale et de la jeunesse, et Ministre de la promotion féminine du Luxembourg, a déclaré que l'adoption de la déclaration de 1998 sur les droits sociaux minimum a représenté une avancée importante mais il faut aller au delà en intégrant formellement le respect des normes sociales dans le commerce international et instituer un processus de surveillance multinationale aussi contraignant que possible. La ministre a indiqué que cet objectif demande une approche cohérente de l'ensemble des organisations internationales, car il engage notamment la responsabilité collective des chefs d'institutions à Genève et ailleurs. Seule une politique cohérente et volontariste, juridiquement encadrée, peut nous faire avancer vers un ordre mondial avec une économie performante, des démarches actives contre le chômage et des politiques efficaces contre l'exclusion sociale. Il faut que les pays industrialisés augmentent, comme convenu à Copenhague, l'aide publique aux pays en développement. À cet égard, elle a annoncé que, cette année, le Luxembourg avait atteint l'objectif de consacrer 0,7 % PIB à l'aide au développement et que son gouvernement a prévu de porter ce taux à 1% d'ici 2005.

La coopération au développement du Luxembourg se concentre sur un nombre limité de pays choisis parmi ceux qui ont les indices de développement humain les plus faibles, a expliqué la ministre. Cette approche permet au pays de répondre à une aspiration particulière, celle d'établir de véritables partenariats politiques, sociaux, et économiques avec ses interlocuteurs et d'élaborer des programmes répondant directement à leurs problèmes. Ainsi, plus de 60% de la coopération au développement du Luxembourg est consacrée à des programmes sociaux et ainsi dépasse largement l'objectif de l'initiative 20-20.

M. CHOE SU HON, Vice-Ministre des affaires étrangères de la République populaire démocratique de Corée, a déclaré que depuis le Sommet social de Copenhague, les questions de développement social ont largement été portées à l'attention de la communauté internationale, certaines mesures ayant même été prises dans la bonne direction. Cependant, les problèmes comme la pauvreté

et le chômage se sont plutôt aggravés et, dans l'ensemble, le développement économique et social est confronté à de sérieux défis. En témoignent notamment les statistiques qui indiquent que le nombre de personnes vivant dans la pauvreté est passé en cinq ans de 1 milliard à 1,4 milliard. La mondialisation ne profite qu'aux pays développés alors qu'elle impose la pauvreté, le chômage et la soumission économique aux pays en développement. Pour sa part, la République populaire démocratique de Corée s'efforce d'assurer un plus haut niveau de développement socioéconomique à sa population et n'épargne aucun effort pour surmonter les conséquences des catastrophes naturelles graves qui ne cessent de l'accabler depuis plusieurs années tout en faisant face à la tentative d'isolation et au blocus économique menés à son encontre par des forces étrangères. Malgré ces circonstances, le pays n'en continue pas moins d'assurer la gratuité de l'éducation, des soins médicaux et des autres politiques sociales.

Selon le Vice-Ministre, dans le cadre de la mise en oeuvre du programme d'action de Copenhague, il conviendrait d'accorder une attention particulière à la création d'un ordre économique international équitable, au respect de la souveraineté des États et de la non-ingérence dans leurs affaires intérieures, ainsi qu'à la levée des sanctions économiques arbitraires. Il conviendrait en effet de rejeter le recours à la force ainsi que l'intervention dans les affaires intérieures des pays sous prétexte de droits de l'homme et d'affaires humanitaires. De plus, les blocus et les sanctions économiques ont de graves effets négatifs sur le développement socioéconomique non seulement des pays visés mais aussi de leurs voisins.

Mme SHASTRI ALI, Secrétaire permanente du Ministre du développement social et communautaire de la Trinité-et-Tobago, a constaté que, cinq ans après le Sommet de Copenhague le niveau de pauvreté reste alarmant. Elle a affirmé que la pauvreté, la plus grande menace qui pèse sur l'humanité, s'explique par les conséquences injustes des relations économiques mondiales. Il est donc urgent de se saisir de la question de la mondialisation et, notamment, de mettre sur pied des mécanismes aux niveaux national, régional et international pour atténuer les effets néfastes de ce phénomène. Il convient également, a précisé Mme Ali, de créer un environnement permettant aux pays les moins puissants d'être compétitifs au plan international. Afin de donner suite aux engagements pris lors du Sommet de Copenhague, le Gouvernement de Trinité-et-Tobago a mis en oeuvre des stratégies de lutte contre la pauvreté. De façon générale, les exigences liées au développement social ont été intégrées à l'ensemble des secteurs de décision gouvernementale. Mme Ali a affirmé que son pays a réalisé des progrès importants en termes de réduction de la pauvreté. Le gouvernement estime que l'éducation est un moyen important de lutte contre la pauvreté.

Après avoir évoqué d'autres mesures destinées à promouvoir les objectifs de Copenhague, Mme Ali a lancé un appel à la communauté internationale afin qu'elle aide à l'intégration des pays en difficulté dans l'arène internationale. Des efforts doivent être déployés pour permettre aux pays en développement de relever les défis posés par la mondialisation. Elle a également souligné l'importance pour les politiques d'ajustement structurel de tenir compte des exigences du développement social.

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