FEM/1103

CEDAW: DANS UN CONTEXTE ECONOMIQUE DIFFICILE, LA REPUBLIQUE DE MOLDOVA FAIT PART DE SES DIFFICULTES A REALISER L'EGALITE ENTRE LES SEXES

21 juin 2000


Communiqué de Presse
FEM/1103


CEDAW: DANS UN CONTEXTE ECONOMIQUE DIFFICILE, LA REPUBLIQUE DE MOLDOVA FAIT PART DE SES DIFFICULTES A REALISER L’EGALITE ENTRE LES SEXES

20000621

“Il faut que la République de Moldova sorte de son étape d’élaboration et entre dans une phase d’application de mesures concrètes », a déclaré une experte du Comité sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes qui a entendu, ce matin, Mme Anghelina Apostol, Vice-Ministre du travail, de la protection sociale et de la famille de la République de Moldova, qui présentait le rapport initial de son pays sur l’application de la Convention sur l’élimination de la discrimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. La Vice-Ministre a donné les grandes lignes du Plan d’actions primordiales relatif à l’amélioration de la situation de la femme, adopté en 1998, par son Gouvernement et de diverses mesures visant à modifier le Code du travail, le Code de la famille et le régime de sécurité sociale qui sont actuellement en cours d’élaboration. Le Plan d’actions primordiales a pour objectifs principaux d’assurer le développement du système institutionnel pour la coordination de la politique de promotion de la femme, la garantie de ses droits sociaux et économiques, la protection de la santé des femmes, la planification familiale et l’amélioration du système de protection sociale ainsi que la prévention de la violence à l’égard des femmes.

Insistant sur la volonté politique témoignée par son Gouvernement pour appliquer les dispositions de la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, la Vice-Ministre a estimé que l’accroissement de la pauvreté qui touche 80% de la population et le chômage constituent les principaux obstacles à la réalisation de l’égalité entre les sexes. En effet, le salaire moyen, en hausse par rapport à 1998, n’était que de 30 dollars au mois de mars 2000 alors que le panier minimum de consommation était de 75 dollars pour la même période. Elle a expliqué que les transformations profondes survenues dans le domaine du travail pendant la période de transition de l’économie planifiée à l’économie de marché, la restructuration des entreprises et leur besoin de nouvelles compétences et qualifications ont provoqué la diminution continue du niveau d’embauche de la population. Au 1er janvier 2000, les femmes étaient la catégorie la plus affectée par le chômage puisque 61,8% des chômeurs sont des femmes.

Si les expertes ont reconnu la volonté politique du nouveau Gouvernement et se sont félicitées de son intention de ratifier le Protocole facultatif à la Convention, elles ont toutefois exprimé leur préoccupation devant l’écart qui demeure entre le droit et les faits. Nombre d’entre elles ont suggéré de plus amples modifications du cadre institutionnel, notamment de la Constitution, afin d’assurer une réelle égalité entre les hommes et les femmes dans une société qu’elles ont jugé « très patriarcale ». Plusieurs d’entre elles se sont inquiétées de voir tant de femmes disposant d’un haut niveau d’instruction obligées de porter le fardeau de la double charge du travail professionnel et domestique. Observant que nombre de mesures adoptées visent plutôt la famille que les femmes, elles ont appelé le Gouvernement moldave à lutter contre la discrimination directe mais aussi indirecte et à agir plus efficacement pour modifier les mentalités et les comportements socioculturels. En effet, « Ce n’est qu’avec un changement des mentalités que l’on pourra se rendre compte que les situations de crise économique ne doivent pas nécessairement affecter les femmes plus gravement que les hommes », a déclaré, à ce propos, Mme Ayse Feride Achar, Experte de la Turquie.

Le Comité poursuivra, cet après-midi à 15 heures, l’examen du rapport initial de la République de Moldova.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES [4]

Rapport initial des Etats parties: République de Moldova (CEDAW/CMDA/1)

La République de Moldova a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes le 24 avril 1994, année à laquelle le Ministère du travail et de la protection sociale s’est vu confier de nouvelles tâches afin d’améliorer la condition de la femme; de lui accorder un rôle plus important dans la société, ce qui favorisera la création d’un nouvel état d’esprit s’écartant des mentalités traditionnelles.

Au 1er janvier 1998, la population de la République de Moldova était de 4 304 700 habitants, dont 2 247 200 femmes. A partir de 1991, pour la première fois depuis l’ère soviétique, la population a commencé à diminuer, en raison à la fois d’une forte baisse du taux de natalité et de l’émigration. Au cours des 7 dernières années, le taux de natalité est tombé de 18,9 à 11,9 naissances vivantes pour 1 000, tandis que le taux de mortalité est passé de 9,2 à 11,9 pour 1 000. L’un des problèmes les plus récents est la forte mortalité infantile, bien que l’on ait observé une tendance à la baisse, lente mais constante, du nombre de décès d’enfants de moins de 1 an, passé de 22,6 pour 1 000 naissances vivantes en 1994 à 20 en 1997. La période 1990-1997 a été caractérisée par une augmentation de la mortalité liée à des déséquilibres et troubles mentaux. La situation démographique défavorable s’explique par le recul du taux de natalité, l’augmentation de la mortalité et le nombre de divorces. L’espérance de vie en République de Moldova est de 67 ans pour les hommes et de 73 ans pour les femmes. Face à cette situation difficile, l’Etat a adopté des mesures concrètes qui ont contribué à améliorer la protection sociale de certaines catégories de personnes.

La situation économique est en déclin depuis 1991, mais on observe aujourd’hui des conditions propices à un redressement. Toutefois, les difficultés économiques et financières ont eu un effet négatif sur le niveau de vie de la population, surtout sur celui des femmes et des groupes vulnérables.

Les nouvelles institutions démocratiques créées en 1991, la Constitution et les dispositions du Code civil, du Code pénal et du Code du mariage et de la famille assurent également l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes est une réalité en République de Moldova, comme en témoigne la situation en matière d’emploi et l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. En revanche, la double journée de travail est fréquente pour les femmes de Moldova et considérée comme normale. En outre, un nombre important de femmes travaillent dans des conditions dangereuses pour leur santé, en particulier dans l’agriculture. L’instabilité de la situation socioéconomique du pays, la hausse du chômage et l’augmentation du nombre de personnes socialement vulnérables ont des incidences sur le climat familial et sur la femme. C’est pourquoi les cas de violence à l’intérieur de la famille, dont les victimes sont les femmes et les enfants, sont en augmentation constante. Même si le Code pénal prévoit des sanctions, il s’avère très difficile pour les autorités de contrôler la violence au sein de la famille, parce qu’elles ne sont informées que des cas les plus graves, les autres étant toujours considérés comme de simples faits familiaux. On remarque également une forte augmentation du nombre de viols collectifs de mineurs et de viols de mineurs de moins de 16 ans.

De 1994 au premier trimestre 1998, les femmes impliquées dans des crimes ont représenté entre 9 et 11% du nombre de délinquants et, pour certaines catégories d’infraction, notamment les meurtres commis avec la participation de femmes, leur nombre est en augmentation. La participation des femmes au trafic de drogues est de plus en plus préoccupante. Au cours des 10 dernières années, le nombre de personnes faisant un usage illégal des drogues a été multiplié par 20 et le nombre de toxicomanes s’élève maintenant à 50 000. La toxicomanie des femmes et l’exploitation des femmes à des fins de prostitution et de pornographie constituent des fléaux graves qui ont pris des proportions considérables. Face à cette situation, le Ministère de l’intérieur a proposé en 1998 des amendements à la loi prévoyant des sanctions pour les atteintes aux bonnes mœurs, comme la prostitution et le proxénétisme.

Au sujet de la participation des femmes à la vie politique et publique, en dépit de l’existence d’une législation spécifique, la situation des femmes reste complexe et insatisfaisante. Il existe en outre un véritable problème de promotion des femmes dans les organes de décision. Bien qu’elles représentent 52% de la population totale, les femmes ne disposent que de 8 sièges sur 101 au Parlement. Le nombre de femmes vice-ministres est passé de 9 à 6. Le nombre de femmes maires de villages et de villes a augmenté pour atteindre 99, mais la proportion de femmes dans l’administration reste insignifiante. Il n’y a aucune femme ministre et seulement deux départements sont dirigés par des femmes. Le pays doit prendre certaines mesures spécifiques visant à assurer une participation égale et active des femmes et des hommes à la vie politique pendant la période de transition. Compte tenu des recommandations de l’ONU et des dispositions du Plan d’action de Beijing, le Gouvernement a approuvé un plan comportant des mesures hautement prioritaires destinées à faire évoluer la situation des femmes dans la société.

Dans le domaine de l’éducation des mesures ont été prises pour éliminer la discrimination à l’égard des femmes. Au cours des dernières années, on a enregistré une augmentation de la proportion de femmes dans l’enseignement supérieur, de 55,3% en 1996 à 55,7% en 1997. La proportion d’enseignantes dans le primaire et le secondaire, par rapport au chiffre de 1996, a progressé de 1% à 80%. La même année, 52% du nombre total d’étudiants poursuivant des études supérieures étaient des jeunes filles.

Un problème majeur est l’état de santé des femmes qui est plutôt précaire et influe, à son tour, sur l’état de santé des enfants. Ainsi le taux de mortalité maternelle était de 40,2 pour 1 000 naissances en 1996, soit 5,6 fois plus que la moyenne européenne. Le Gouvernement a adopté un programme national pour améliorer les soins de santé pour 1997-2002. Ces mesures ont donné des résultats positifs et en 1997, le taux de mortalité infantile pour 1 000 naissances vivantes a baissé de 2% tout en se maintenant à un niveau élevé de 19,8 pour mille. Pendant la phase de transition, le système de soins gratuits a été confronté à des difficultés dues à la crise économique et financière. Avec le passage à l’économie de marché, le système de santé publique sera réformé et complété par un système de médecine privée et d’assurance médicale. A l’heure actuelle, étant donné que 53,3% de la population moldave vit en zone rurale, les femmes enceintes ne bénéficient généralement que de l’assistance médicale disponible dans leur village. Ainsi en 1997, seules 71,2% des femmes enceintes avant la douzième semaine de grossesse ont-elles bénéficié d’un suivi prénatal et un quart des femmes enceintes ne font l’objet d’aucun examen. Le taux de mortalité maternelle s’est de nouveau élevé en 1997 pour atteindre 48,3 pour mille naissances vivantes. Ce phénomène est dû essentiellement aux maladies de l’appareil génital, aux infections, aux intoxications, aux avortements spontanés et aux hémorragies. Les décès sont particulièrement fréquents parmi les femmes de 20 à 24 ans. Le rapport mentionne les dispositions prises par le Gouvernement en vue de réduire le taux de mortalité maternelle et prénatale, les mesures de planification familiale et d’hygiène de la reproduction, les mesures pour lutter contre les maladies sexuellement transmissibles et le VIH/sida.

Présentation de l’Etat partie

Mme ANGHELINA APOSTOL, Vice-Ministre du travail, de la protection sociale et de la famille de la République de Moldova, après avoir rappelé les faits énoncés dans le rapport, a indiqué qu’en 1998, son Gouvernement a adopté un Plan d’actions primordiales relatif à l’amélioration de la situation de la femme qui a pour objectifs le développement du système institutionnel pour la coordination de la politique de promotion de la femme, la garantie de ses droits sociaux et économiques, la protection de la santé des femmes, la planification familiale et l’amélioration du système de protection sociale ainsi que la prévention de la violence à l’égard des femmes. Au niveau de la mise en œuvre de ce Plan, la Vice-Ministre a observé que la collaboration des structures d’Etat avec les organisations non gouvernementales (ONG) joue un rôle de plus en plus important. Il existe actuellement 38 ONG de femmes nationales et 83 ONG locales.

La Vice-Ministre a fait part de certaines mesures adoptées pour réaliser les objectifs de la Convention, notamment la création, en 1997, de la Direction des politiques sociales et des opportunités égales, rattachée au Ministère du travail, de la protection sociale et de la famille, qui est chargée de la promotion des politiques familiales, de l’amélioration du statut de la femme et de la conception des mesures visant à réaliser l’égalité des chances. En 1999, une Commission sur les problèmes de la femme et de la famille a été constituée auprès du Président de la république. Cet organe a pour fonction d’informer le Président sur les problèmes que rencontrent les femmes dans la société moldave et de coordonner les activités visant à établir l’égalité entre les sexes. Une Commission semblable attachée au Gouvernement est chargée d’élaborer les bases stratégiques et les mécanismes d’application des politiques d’Etat en faveur des femmes.

La Vice-Ministre a identifié nombre d’obstacles à la réalisation de l’égalité entre les sexes parmi lesquels la situation économique du pays est le plus important. Le salaire moyen, en hausse par rapport à 1998, n’était que de 30 dollars au mois de mars 2000 alors que le panier minimum de consommation était de 75 dollars pour la même période. Ainsi le niveau élevé de chômage, la généralisation rapide de la pauvreté et les conditions difficiles pour la création d’entreprises ont provoqué la migration massive de la population, et en particulier des femmes. En outre, la République de Moldova est affectée par la traite des être humains. Pour combattre ce fléau, le Gouvernement a constitué, au mois de mai dernier, un Groupe permanent de travail formé des représentants des divers ministères concernés, de députés et d’organisations non gouvernementales, afin de mener une campagne d’information pour lutter contre la traite des femmes. Des informations sont diffusées sur les modalités de placement légal à l’étranger et le Bureau central d’Interpol vérifie l’habilité des entrepreneurs étrangers à fournir effectivement un travail aux migrants. Un projet de loi sur la traite des êtres humains et l’exploitation de la prostitution est actuellement à l’étude et le Ministère de l’Intérieur organise des raids spéciaux pour dépister les proxénètes et les prostitués. Un nouveau système de contrôle informatisé est introduit aux frontières. La Vice-Ministre a mis l’accent sur le partenariat avec les organisations non gouvernementales dans la campagne menée contre la traite.

Abordant la participation des femmes à la vie politique, la Vice-Ministre a reconnu que malgré l’adoption d’un amendement à la loi sur les partis et autres organisations sociales du pays visant à promouvoir le principe de l’égalité entre les hommes et les femmes, ces dernières ne sont pas représentées sur les listes électorales et influencent très faiblement la politique des partis ou même de l’Etat en général. Toutefois, la Vice-Ministre a indiqué que depuis la rédaction du rapport initial, des femmes ont été promues à des postes d’administration dans le Gouvernement qui compte désormais 1 femme ministre, 1 femme Vice-Premier Ministre, 5 femmes ministres, 2 femmes directeurs de département.

La Vice-Ministre a expliqué que les transformations profondes survenues dans le domaine du travail pendant la période de transition de l’économie planifiée à l’économie de marché, la restructuration des entreprises et ses répercussions sur la demande de nouvelles compétences et qualifications ont provoqué la diminution continue du niveau d’embauche de la population. Au 1er janvier 2000, les femmes étaient la catégorie la plus affectée par le chômage puisque 61,8% des chômeurs sont des femmes. Depuis 1998, la loi sur l’emploi a été modifiée de façon à permettre l’augmentation du nombre de bénéficiaires des allocations chômage à la catégorie “femmes qui ont interrompu leur travail pour les soins aux enfants jusqu’à l’âge de 14 ans”, l’augmentation du quantum de l’allocation chômage pour les chômeurs qui ont 1, 2 ou 3 enfants de moins de 16 ans à charge et l’octroi d’indemnités pour incapacité temporaire de travail, y compris la grossesse et l’accouchement. En 1999, le Service d’Etat pour l’emploi a collaboré avec les institutions d’enseignement pour améliorer la formation des personnes au chômage et 66,3% du total des personnes inscrites à ces cours de formation professionnelle étaient des femmes. On note une légère augmentation du nombre de femmes dans les affaires. Ainsi en 1999, les femmes comptaient pour 2% des chefs de grandes entreprises, 10% des chefs de moyenne entreprises, 40% des chefs de petites entreprises et 48% des chefs de micro-entreprises. La Vice-Ministre a déclaré que des modifications au Code du travail ont été proposées pour accorder aux pères les mêmes indemnités qu’aux mères qui gardent les enfants afin de lutter contre la discrimination indirecte qui pourrait découler des mesures de protection sociale des mères.

Abordant les problèmes relatifs à la santé des femmes, la Vice-Ministre a indiqué que la mauvaise alimentation des femmes enceintes provoque l’augmentation du nombre de femmes atteintes d’anémie et que, par conséquent, 400 nouveau-nés sur 1000 naissent affectés de maladies. En outre, les femmes rurales ont un accès très limité aux services de planification familiale. Pour y remédier, les médecins généralistes des zones rurales suivent une formation spéciale au Centre républicain de planification familiale. En outre, un projet de loi sur la santé reproductive et la planification familiale est actuellement en cours d’examen. La Vice-Ministre a mentionné qu’à la santé précaire s’ajoutent les traumatismes psychiques découlant de la violence domestique qui prend des proportions alarmantes. Ce phénomène de violence domestique est aggravé par les problèmes socio-économiques, par l’alcoolisme, les troubles mentaux et le faible niveau d’éducation. Elle a reconnu que la procédure de recours en justice pour les personnes victimes de violence domestique est encore très compliquée, mais que des projets de réformes du Code pénal et du Code de procédure pénale sont en cours d’examen au Parlement. Elle a reconnu que le système de protection sociale de la famille est inadéquat, mais a indiqué qu’une Stratégie de protection de la famille et de l’enfant est en cours d’élaboration.

Présentant la situation des femmes rurales qu’elle a qualifiée de difficile, la Vice-Ministre a fait part d’un projet de Stratégie de la politique agraire pour 2000-2010 qui a pour objectifs de garantir la sécurité physique des populations rurales, d’assurer la santé reproductive, de garantir le droit à l’éducation et à la protection sociale.

Dialogue avec l’Etat partie

Mme IVANKA CORTI, experte de l’Italie, a estimé que les nouvelles informations fournies par la délégation de Moldova lors de la présentation de son rapport reflètent des changements positifs dans ce pays ainsi que la volonté politique du Gouvernement de Moldova de remplir ses obligations au titre de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Mme Corti a appelé Moldova à sortir de son “étape d’élaboration” et à entamer la phase d’application de mesures concrètes. Ce pays doit faire justice à son extraordinaire potentiel en ressources humaines, et particulièrement aux femmes qui vivent et travaillent pour l’instant dans des conditions très dures, a souligné Mme Corti. L’experte a noté que dans une société moldave très patriarcale, le niveau élevé d’éducation des femmes a entraîné un phénomène de modernisation. Dans ce contexte, il faut que le Gouvernement fournisse aux femmes un accès continu à l’éducation et à la formation, afin qu’elles puissent continuer à améliorer leurs conditions de vie. Les femmes doivent être présentes au niveau de prise de décision pour que ce processus se déroule à un rythme satisfaisant, a également souligné Mme Corti, en regrettant que le taux de participation des femmes au processus de prise de décision soit faible. L’experte a également estimé que la Constitution et les lois qui en découlent doivent être amendées afin de défendre clairement le principe de l’égalité des chances pour tous. Il manque également à la République de Moldova une stratégie de promotion de la femme et de défense de l’égalité des chances suffisamment claire. Il est vrai que la fuite des cerveaux liée à la mauvaise situation économique rend plus difficile la reconstruction, a reconnu Mme Corti. Elle a appelé la République de Moldova à ratifier le Protocole à la Convention.

Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh, a reconnu que les autorités de Moldova tentent de compenser la grave crise économique que traverse le pays par une véritable volonté politique d’améliorer la situation de la population et particulièrement des femmes. Mme Khan a regretté l’écart qui existe entre la situation “de jure” et la réalité. Mme Khan a rappelé que la Convention oblige l’Etat partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour établir l’égalité entre les hommes et les femmes à tous les niveaux. Or il existe encore des discriminations à tous les niveaux en Moldova, et dans l’emploi et la politique. En outre, la violence à l’égard des femmes est en hausse. Mme Khan a déclaré que l’instabilité politique a effectivement une incidence sur la promotion des principes de la Convention, mais elle a estimé que, si des lois sont déjà en place, ce problème a moins de répercussions sur la situation des femmes. Elle a ajouté que, dans les lois, l’accent n’a pas été suffisamment mis sur la situation des femmes mais plutôt sur la famille. Il est nécessaire de créer un mécanisme national spécialisé dans les questions relatives aux femmes. Il faut également créer une coordination entre les comités et les sous-comités qui existent déjà et entre les différents ministères, afin d’établir un ordre de priorité du Gouvernement. Mme Khan a évoqué le problème de la pauvreté, qui touche 80 % de la population de Moldova, et a appelé le Gouvernement à prendre des mesures concrètes pour lutter contre ce phénomène. Le salaire des femmes est très bas et un grand nombre d’indemnités ne sont pas versées, a-t-elle regretté. Des mesures concrètes et pratiques ayant des chances d’avoir un effet immédiat et visible sur la pauvreté dans les zones rurales et urbaines doivent être prises rapidement. Mme AYSE FERIDE ACHAR, experte de la Turquie, s’est dite frappée par l’écart de facto entre l’égalité juridique et l’égalité réelle entre les hommes et les femmes. Elle a été déçue de voir tant de femmes disposant d’un haut niveau d’instruction et prêtes à se sacrifier obligées de porter le fardeau de la double charge du travail professionnel et domestique, aggravé par la violence et la traite. Avec une approche complète, il serait peut-être possible de modifier la situation difficile dans laquelle vivent les femmes de Moldova ainsi que la mentalité qui semble régner actuellement. Il faudrait lutter contre la discrimination directe mais aussi contre la discrimination indirecte. Ce n’est qu’avec un changement des mentalités que l’on pourra se rendre compte que les situations de crise économique ne doivent pas nécessairement affecter les femmes plus gravement que les hommes. L’application de la Convention dépendra d’un tel changement. Il est nécessaire d’adopter des lois défendant les femmes de la violence, du harcèlement sexuel ou de la discrimination. Mme Achar a encouragé Moldova à coopérer avec les organisations non gouvernementales (ONG) dans l’élaboration d’instruments plus efficaces de lutte contre la discrimination. L’Experte a souhaité savoir quelles relations de coopération existent entre ces organisations et si elles ont participé à la présentation du rapport initial de Moldova.

Mme HANNA BEATE SCHOPP-SCHILLING, experte de l’Allemagne, qui assurait ce matin la présidence du Comité, a suggéré que la République de Moldova suive plus précisément les directives sur la présentation des rapports fournies par le Comité. Elle s’est félicitée du fait que Moldova ait entamé le processus de ratification du Protocole relatif à la Convention. L’experte a jugé très préoccupant le taux élevé de chômage parmi les femmes, même lorsqu’elles ont un haut niveau d’éducation. Elle a demandé des renseignements sur la situation des femmes âgées, qui représentent une importante partie de la population.

Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, a déclaré qu’à la lecture du rapport elle a eu l’impression que le statut des femmes est régi par des dispositions éparses, que le statut patriarcal continue de prédominer et que les femmes sont des citoyennes mineures par rapport aux hommes. Mme Manalo a regretté l’absence de projet de loi portant sur les droits fondamentaux des femmes moldaves qui permettrait de mettre fin à cette situation. Elle a demandé à savoir les dispositions prises par les autorités pour abolir ou réformer les lois qui portent atteinte aux droits des femmes. Le processus juridique doit absolument entraîner un changement d’attitude chez les Moldaves, a-t-elle souligné, et le public doit être sensibilisé à la nécessité de réformer les lois.

Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a salué les efforts entrepris par la République de Moldova pour ratifier le Protocole facultatif relatif à la Convention. Les règles sur l’égalité qui se trouvent dans la Constitution et dans d’autres lois sont contredites par les dispositions de nombreuses autres lois qui obligent les femmes à obtenir le consentement de leur mari pour entreprendre certaines démarches. Le nombre de mariage ayant diminué, quels sont les droits des enfants nés hors du mariage? Quel est le statut juridique des membres de cette unité familiale? a souhaité savoir l’Experte. Mme Goonesekere a exprimé sa préoccupation au sujet du “double fardeau” que doivent porter les femmes. Elle s’est demandé si l’absence des femmes de la vie politique ne serait pas liée à l’accent qui est mis sur leur rôle au sein de la famille.

Mme SILVIA ROSE CARTWRIGHT, experte de la Nouvelle-Zélande, a souligné la portée symbolique des dispositions constitutionnelles qui protègent les femmes de la discrimination et l’importance des mécanismes pour lutter contre la prostitution et la traite. Mme MAVIVI MYAKAYAKA-MANZINI, experte de l’Afrique du Sud, a estimé que des mesures spéciales temporaires sont nécessaires pour promouvoir l’égalité entre les sexes en Moldova. Elle s’est interrogée sur le faible taux de représentation des femmes au Parlement et à tous les postes élevés en général. Le Gouvernement moldave a-t-il l’intention d’adopter des lois pour s’assurer que les droits des femmes ne seront pas violés? a-t-elle demandé.

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