LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DE HAUT-RESPONSABLES DU TOGO, DE LA BULGARIE, DE L'INDONESIE, DE CUBA, DU NIGERIA ET DU CHILI
Communiqué de Presse
DH/G/1285
LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DE HAUT-RESPONSABLES DU TOGO, DE LA BULGARIE, DE L'INDONÉSIE, DE CUBA, DU NIGERIA ET DU CHILI
20000330Les représentants spéciaux pour la Guinée équatoriale et le Rwanda présentent leurs rapports
Genève, le 30 mars 2000 -- La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, les allocutions du Ministre de la promotion de la démocratie et de l'état de droit du Togo, du Ministre des droits de l'homme d'Indonésie, du Ministre des relations extérieures de Cuba, du Ministre des affaires étrangères du Nigéria du Vice-Ministre des affaires étrangères de Bulgarie et du Sous-Secrétaire d'État à la justice du Chili. Elle a également poursuivi son débat sur la violation des droits de l'homme partout dans le monde. Dans ce cadre, les représentants spéciaux sur les situations des droits de l'homme en Guinée équatoriale et au Rwanda ont présenté leurs rapports.
M. Harry Olympio, Ministre de la promotion de la démocratie et de l'état de droit du Togo, réaffirmant l'attachement de son pays au respect de la vie et de la dignité humaine, s'est prononcé en faveur de la mise en place d'une commission d'enquête afin que la lumière soit faite sur l'affaire des centaines de cadavres découverts sur les plages du Togo et du Bénin en juin 1998, au moment de l'élection présidentielle.
Le Ministre des droits de l'homme de l'Indonésie, M. Hasballah M. Saad, s'est engagé à traduire en justice les responsables des violations des droits de l'homme au Timor oriental et a indiqué que le Procureur général assure actuellement le suivi des recommandations de la commission indonésienne d'enquête sur les violations des droits de l'homme au Timor. En outre, une cour des droits de l'homme pourra bientôt connaître de cas de violations des droits de l'homme au Timor oriental.
Le Ministre cubain des relations extérieures, M. Felipe Pérez Roque, a déclaré que la Commission des droits de l'homme doit impérieusement se convertir en instrument de tous les pays et veiller pour l'ensemble des droits de l'homme. Il a regretté. à cet égard, qu'il semble encore improbable, cette année, que la Commission adopte une résolution condamnant les États-Unis pour les nombreuses violations des droits de l'homme commises dans ce pays au cours de l'année écoulée.
M. Dubem Onyia, Ministre des affaires étrangères du Nigéria, a indiqué que le nouveau gouvernement de son pays a décidé de mettre sur pied un groupe spécial chargé d'enquêter sur toutes les allégations de violations passées des droits de l'homme. Il a plaidé en faveur de l'allégement du fardeau de la dette de nombreux pays en développement, y compris le Nigéria, et demandé l'aide d'autres pays pour permettre au Nigéria de recouvrer une partie de l'argent illégalement placé à l'étranger par certains régimes antérieurs.
Le Vice-Ministre bulgare des affaires étrangères, M. Marin Raykov, a déclaré que la sécurité démocratique et la stabilité au sud de l'Europe de l'Est sont gravement menacées, aujourd'hui en conséquence des politiques actuelles appliquées par les autorités de Belgrade. Ces politiques de déstabilisation ont trouvé une claire expression dans les conflits potentiels existant dans les quatre régions que sont le Kosovo, le sud de la Serbie, le Monténégro et la Serbie elle-même.
M. Jaime Arellano, Sous-Secrétaire d'État à la justice du Chili, a déclaré que son pays fait du développement et de l'amélioration des systèmes de coopération internationale en matière de droits de l'homme une priorité et appuiera le Haut Commissariat aux droits de l'homme dans ce domaine. M. Arellano a souligné que le nouveau gouvernement portera toute son attention à la question de l'indemnisation des victimes de violations des droits de l'homme, et en particulier au projet de résolution sur la question qui sera présenté à la Commission.
La Commission des droits de l'homme a également entendu dans le cadre de son débat sur les violations des droits de l'homme dans tous les pays les Représentants spéciaux chargés respectivement de la situation des droits de l'homme en Guinée équatoriale et au Rwanda.
Présentant son rapport sur la Guinée équatoriale, M. Gustavo Gallón a déclaré que ce pays connaît une grave situation de violations de droits de l'homme mais a estimé qu'elle peut s'améliorer grâce à la participation de la communauté internationale en général et de la Commission des droits de l'homme en particulier. Le Représentant spécial a déclaré qu'il y a un évident problème de pouvoir et de démocratie dans ce pays, en dépit des signes d'ouverture politique annoncés par le gouvernement, initiatives qui restent insuffisantes pour mettre fin au climat de tension et de violation des droits de l'homme. Le représentant de la Guinée équatoriale a fait une déclaration.
Présentant son rapport sur la situation des droits de l'homme au Rwanda, M. Michel Moussali a rappelé qu'il ne se passe pas de jour sans que l'on ne découvre de nouvelles fosses où sont entassées les restes de victimes du génocide de 1994. Il a souligné la défiance des Rwandais à l'égard de la communauté internationale, et, en particulier, des Nations Unies. Si la sécurité s'est améliorée dans le pays, la crainte, la peur, la méfiance continuent d'exister au sein de la population. Le Représentant spécial s'est dit convaincu de la sincérité des autorités rwandaises s'agissant de l'action en faveur des droits de l'homme mais a souligné l'extrême difficulté de la tâche, compte tenu de l'histoire tragique du pays. Le représentant du Rwanda a également fait une déclaration.
Les représentants du Mexique et des États-Unis sont intervenus dans le cadre du débat.
La Commission poursuivra son débat sur les violations des droits de l'homme dans tous les pays cet après-midi, à 15 heures. La Haut-Commissaire aux droits de l'homme doit notamment présenter ses rapports sur la question des droits de l'homme au Kosovo et au Timor oriental. La Commission doit également entendre les Ministres de la justice du Soudan, du Congo et du Rwanda, ainsi que le Ministre des droits de la personne humaine et des réformes institutionnelles du Burundi et Directeur Général des droits de l'homme du Conseil de l'Europe.
Déclarations
M. HARRY OLYMPIO, Ministre de la promotion de la démocratie et de l'état de droit du Togo, a exprimé l'attachement de son pays aux idéaux de paix et de justice, à la démocratie, à l'état de droit ainsi qu'à la promotion des droits de l'homme. Le Togo a ratifié les principaux instruments relatifs aux droits de l'homme et s'est efforcé de les intégrer progressivement dans sa législation interne. Le Ministre a ainsi précisé que la Constitution du 14 octobre 1992 consacre un Titre et 42 articles aux droits de l'homme. Il a par ailleurs déclaré que la Commission nationale des droits de l'homme a été inscrite dans la constitution. Le Togo a signé un projet de coopération technique avec le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Officiellement lancé le 22 avril 1996, le projet, arrivé à son terme en décembre 1998, a rempli toutes les tâches qui avaient été fixées. Le Ministre a déclaré que la situation des droits de l'homme s'améliore progressivement dans son pays. Le Togo souhaite voir le Haut Commissariat renforcer sa coopération technique en traitant de nouveaux aspects.
Le Ministre a réaffirmé l'attachement de son pays au respect de la vie et de la dignité humaine. Il est favorable à la mise en place d'une commission d'enquête afin que la lumière soit faite sur l'affaire des centaines de cadavres découverts sur les plages du Togo et du Bénin en juin 1998, au moment de l'élection présidentielle. Le Ministre a enfin déclaré qu'il ne saurait y avoir de réel progrès humain sans respect des droits de l'enfant. Dans ce contexte, il a informé la Commission des droits de l'homme de la ratification par son pays de la Convention relative aux droits de l'enfant et de la Charte africaine des droits et du bien être de l'enfant.
M. MARIN RAYKOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de Bulgarie, a déclaré que la sécurité démocratique et la stabilité au sud de l'Europe de l'est sont gravement remises en cause aujourd'hui en raison des politiques actuelles appliquées par les autorités de Belgrade. Ces politiques de déstabilisation ont trouvé une claire expression dans les conflits potentiels existant dans les quatre régions que sont le Kosovo, le sud de la Serbie, le Monténégro et la Serbie elle- même. Le Vice-Ministre a souligné qu'il est de la plus haute importance que le Kosovo se développe en société démocratique et pluri-ethnique. Il a fermement condamné tous les actes de violence perpétrés contre tous les groupes ethniques du Kosovo.
La Bulgarie est très préoccupée par l'augmentation des tensions et, dans bien des cas, de violations des droits de l'homme au sud de la Serbie, notamment par les pressions subies par la minorité bulgare vivant en Serbie. Elle demande aux autorités de respecter et d'appliquer pleinement les droits constitutionnels de ces personnes.
La Bulgarie estime que les réformes politiques en cours au Monténégro est un important facteur de progrès de la démocratie dans la région d'ex-Yougoslavie et soutient les efforts du Monténégro en vue d'édifier les institutions d'une société civile. M. Raykov a également déclaré qu'il faut continuer à soutenir la consolidation de l'opposition démocratique en Serbie avec pour objectif la création d'un état de droit en Serbie, où le modèle de Milosevic ne risque plus de se reproduire à l'avenir.
M. HASBALLAH M. SAAD, Ministre des droits de l'homme de l'Indonésie, a déclaré que son pays est engagé dans un processus sans précédent et en profondeur de réformes politiques, économiques, sociales et juridiques. Ces réformes ont pour but de stimuler la reprise nationale à la suite de la crise économique asiatique. L'accent a été mis sur les droits de l'homme, a précisé le Ministre. Le Gouvernement, agissant de concert avec le Parlement, a mis sur pied une équipe d'experts juridiques afin d'aligner les lois sur l'esprit et les normes juridiques internationales relatives aux droits de l'homme. Nombre de lois ont ainsi été amendées, de nouvelles ont été adoptées. Le Ministre des droits de l'homme a déclaré qu'avec ces réformes le pays compte maintenant 48 partis politiques. La société civile est dynamisée et le nombre d'organisations non gouvernementales travaillant dans le domaine des droits de l'homme ne cesse d'augmenter. Les citoyens se sentent désormais libres de s'exprimer et de critiquer le gouvernement. M. Saad a annoncé que son pays a libéré tous ses prisonniers politiques. Il a affirmé que son pays continuera de renforcer la capacité nationale en matière de promotion et de protection des droits de l'homme. Il a toutefois ajouté que l'impact de la crise asiatique ne facilite pas la tâche.
Le Gouvernement indonésien a engagé le dialogue avec divers groupes qui ont souffert de la négligence des administrations précédentes, a déclaré le Ministre. Il s'efforce de s'attaquer aux causes du mécontentement social. Le Ministre indonésien des droits de l'homme a exprimé sa préoccupation à l'égard de la situation à Aceh et en Papouasie. Il a toutefois estimé que la situation générale en Indonésie s'est améliorée, y compris aux Moluques. Le pays récolte les fruits de la nouvelle approche qui a été adoptée et qui s'appuie sur le dialogue, a-t-il déclaré. L'Indonésie doit toujours faire face au problème du Timor oriental. Nous avons fait la preuve de notre engagement à traduire en justice les responsables des violations des droits de l'homme dans cette région. La Commission indonésienne d'enquête sur les violations des droits de l'homme au Timor a achevé ses travaux. Le Procureur général assure actuellement le suivi des recommandations et constatations présentées par la Commission, a-t-il assuré. Le Ministre a par ailleurs indiqué qu'un projet de loi portant création d'une cour des droits de l'homme est en passe d'être finalisé. La Cour pourra connaître de cas de violations des droits de l'homme au Timor oriental. Les fondements d'une nouvelle relation avec le Timor oriental ont été établis, a souligné M. Saad. Une Commission commune a par ailleurs été établie afin de promouvoir la coopération entre les peuples de l'Indonésie et du Timor oriental.
M. FELIPE PÉREZ ROQUE, Ministre des relations extérieures de Cuba, a déclaré que la Commission des droits de l'homme doit impérativement se convertir en un instrument de tous les pays et veiller au respect de l'ensemble des droits de l'homme. Les pays développés ont, l'an dernier, a-t-il rappelé, présenté 61% de l'ensemble des résolutions et décisions adoptées, ce qui porte un coup évident à cette aspiration au respect de la diversité que nous avons prônée.
Le Ministre a souligné que les pays d'Europe occidentale, les États-Unis et le Canada ont plus de personnels au Bureau de la Haut-Commissaire que l'ensemble des pays en développement. Toutes les résolutions adoptées depuis 1990 signalent des pays en développement comme violateurs des droits de l'homme et elles ont toutes été présentées par des pays développés. Le Ministre a demandé si cela signifiait qu'on ne commet pas de violations des droits de l'homme dans les pays développés ou si ce n'est pas plutôt qu'il est impossible de les examiner devant la Commission.
M. Pérez Roque a également constaté que les ressources destinées à la lutte pour le développement, contre la faim et la pauvreté, causes véritables des crises dites humanitaires dans les pays sous-développés ne cessent de diminuer, que le fondement théorique et politique d'un prétendu *ðdroit d'ingérence humanitaire+ð prend toujours plus de force dans les principales puissances occidentales, d'autant qu'il a déjà connu ses premières applications pratiques.
La Commission serait-elle capable de condamner ne serait-ce qu'une seule fois les États-Unis ? a demandé le Ministre cubain des relations extérieures. Oserait- elle voter une résolution de condamnation de la prostitution et la pornographie infantiles dans ce pays, la violence généralisée, la prolifération des armes à feu, la brutalité policière et l'iniquité du système judiciaire, l'application sans précédent et arbitraire de la peine de mort, les manifestations flagrantes de discrimination raciale ? Cela semble hautement improbable.
Or, les États-Unis prétendent une nouvelle fois accuser Cuba devant la Commission, a noté le Ministre, qui s'est demandé quel intérêt pouvait avoir le Gouvernement tchèque de présenter une résolution contre Cuba. Il a estimé que la République tchèque paie ainsi le prix de son entrée à l'OTAN.
M. DUBEM ONYIA, Ministre des affaires étrangères du Nigéria, a exprimé sa fierté de se présenter aujourd'hui devant la Commission en tant que représentant d'un gouvernement nigérian démocratiquement élu, le premier après près d'une décennie et demi de régime militaire. Il a dit être venu témoigner de l'engagement et de la détermination de l'administration Obasanjo à promouvoir et protéger les droits de l'homme. Il a indiqué que son ministère prendra bientôt les mesures appropriées pour faire appel officiellement à l'assistance technique et aux services consultatifs du Haut Commissariat aux droits de l'homme.
La capacité de promouvoir et protéger les droits de l'homme dépend de la compréhension et la coopération de toutes les parties concernées. Cela requiert une volonté politique de créer un environnement propice dans lequel chacun aurait sa place dans un ordre international permettant le plein épanouissement des droits et libertés reconnus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme
pourraient pleinement. Le paradoxe de notre époque, c'est qu'alors que certaines parties du monde sont devenues riches suite à la mondialisation et aux progrès de la science et de la technologie, près de 1,5 milliard d'individus vivent toujours dans une pauvreté abjecte.
M. Onyia a souligné que depuis son entrée en fonction en mai 1999, le Gouvernement nigérian a pris les mesures nécessaires pour consolider la démocratie naissante tout en assurant l'indépendance de la justice et la liberté de la presse. D'importantes réformes ont également été entreprises en ce qui concerne les prisons. L'administration Obasanjo, consciente de la nécessité de restaurer la confiance des Nigérians en leur gouvernement et conscient des problèmes liés à l'impunité des violations de droits de l'homme perpétrées par les régimes militaires successifs, a décidé de mettre sur pied un groupe spécial chargé d'enquêter sur toutes les anciennes allégations de violation des droits de l'homme. Ce groupe spécial, présidé par un ancien juge de la Cour suprême, a entamé ses travaux et on attend qu'il fasse ses recommandations au gouvernement. On peut espérer que des réparations adéquates seront versées aux victimes pour les torts qui leur ont été causés par le passé.
Le Ministre nigérian des affaires étrangères a par ailleurs rappelé que des mesures pratiques doivent encore être prises pour alléger le fardeau de la dette de nombreux pays en développement. Par le passé, la démocratie, la bonne gouvernance et le devoir de rendre des comptes ont été utilisés comme préconditions pour examiner cette question. Désormais, les statistiques attestent l'augmentation du nombre de pays qui ont démocratisé leur société. Aussi, les citoyens de ces pays, parmi lesquels figure le Nigéria, attendent les dividendes de l'avènement de la démocratie. L'appel en faveur de la réduction de la dette n'est pas un appel à la charité mais une question de justice économique et sociale pour tous, a souligné M. Onyia. Il a par ailleurs exprimé sa préoccupation face à la fuite des capitaux du Nigéria dont sont responsables certains régimes antérieurs et certains individus peu empreints de sentiments patriotiques qui travaillent en collaboration avec leurs partenaires étrangers. Il ne fait aucun doute que le Nigéria pourrait payer une grande partie de ses dettes si seulement il pouvait recouvrir une partie de l'argent illégalement placé à l'étranger. M. Onyia a lancé un appel en faveur de la coopération de tous pour traiter de cette question.
M. Onyia a par ailleurs rappelé que l'administration en place a engagé un programme de réduction de la pauvreté. En termes pratiques, il a indiqué qu'un montant de 100 millions de dollars a été alloué à la création de 200 000 emplois. Le gouvernement a également pris des mesures pour alléger les problèmes particuliers des minorités dans la zone du delta du Niger qui ont été négligées par le passé. Le Ministre a précisé que l'initiative du Président du Nigéria d'établir une commission pour le développement du delta du Niger a reçu l'approbation de l'Assemblée nationale.
M. JAIME ARELLANO, Sous-Secrétaire d'État à la justice du Chili, a déclaré qu'en signant la Déclaration et le Programme d'action de Vienne, son pays s'est engagé à agir en faveur de la promotion du système international de protection des droits de l'homme. Le Chili fait du développement et de l'amélioration des systèmes de coopération internationale en matière de droits de l'homme une
priorité. Dans ce contexte, M. Arellano a exprimé la volonté de son pays de soutenir toutes les initiatives mises en oeuvre par le Haut Commissariat aux droits de l'homme. Il a également plaidé en faveur de la ratification du Statut de Rome afin que la Cour pénale internationale puisse entrer en fonctions le plus rapidement possible.
Le Sous-Secrétire chilien à la justice a fait valoir les efforts déployés par son pays dans le domaine de la justice. Le pays est ainsi passé d'une procédure inquisitoire à une procédure accusatoire, garante des droits des parties et de la société. M. Arellano a par ailleurs indiqué que les conditions de détention ont été améliorées. En accord avec ses obligations internationales, le Chili prépare une loi incriminant la torture. Cette loi permettra de punir plusieurs agents qui ont recouru à de telles pratiques dans l'exercice de leurs fonctions. M. Arellano a ensuite souligné que le nouveau gouvernement portera toute son attention à la question de l'indemnisation des victimes de violations des droits de l'homme. Il a rappelé que le Chili a appuyé un projet de résolution de la Commission des droits de l'homme visant la définition d'un ensemble de règles et de principes reconnaissant un tel droit. Partant, le Chili demande à la Commission des droits de l'homme de soumettre ce projet de règles à l'Assemblée générale pour adoption.
M. Arellano a déclaré que son pays, associé au Canada, propose à la Commission des droits de l'homme un texte sur la promotion des droits de la femme. Il a par ailleurs déclaré qu'un dialogue sérieux s'est engagé entre l'État chilien et les représentants de la population autochtone. Le but, a-t-il précisé, est de fonder une nouvelle relation afin de surmonter les problèmes de discrimination. M. Arellano a enfin souligné l'arrivée d'un nouveau gouvernement au Chili il y a quelques jours, porteur des aspirations du peuple chilien à plus démocratie et de meilleures conditions de vie.
Présentation de rapports
M. GUSTAVO GALLÓN, Représentant spécial pour les droits de l'homme en Guinée équatoriale, présentant son rapport sur la question (E/CN.4/2000/40, à paraître), a déclaré que la Guinée équatoriale connaît une grave situation de violations de droits de l'homme mais a estimé qu'elle peut s'améliorer grâce à l'appui de la communauté internationale en général et de la Commission des droits de l'homme en particulier.
Le Représentant spécial a déclaré que la situation des droits de l'homme en Guinée orientale reste très préoccupante, que des gens sont systématiquement emprisonnés. Il a cité le cas de deux personnes incarcérées pour le simple fait d'avoir reproduit des informations publiées sur l'internet concernant le prétendu état de santé du Président de la République. Les autorités responsables de ces détentions, a-t-il dit, ont tenté de faire croire au Représentant spécial au moment de sa visite dans la prison concernée, comme elles l'avaient fait par le passé avec ses prédécesseurs, que ces personnes n'étaient pas détenues, mais le Représentant spécial a pu constater, sur les registres du commissariat, que ces personnes avaient été détenues sur *ðordre de l'autorité+ð. M. Gallón a ajouté que l'un des détenus lui a personnellement expliqué que l'un de ses compagnons de cellule exécutait des travaux dans la maison d'un important fonctionnaire. Devant
l'évidence du caractère arbitraire de ces détentions, il a verbalement et par écrit, sollicité la remise en liberté de ces personnes mais n'a pas obtenu d'information officielle sur le fait que cette demande ait abouti.
M. Gallón a également évoqué sa visite dans la prison de Malabo où il a personnellement pu constater des signes évidents de tortures commises sur les détenus et les témoignages d'anciens détenus ont corroboré ses propres constatations. Il a estimé que rien ne permet d'affirmer que la torture n'est pas une pratique systématique en Guinée équatoriale, et qu'elle est spécialement, mais non exclusivement, réservée aux prisonniers politiques et aux membres de l'ethnie bubi, deuxième ethnie du pays.
Le Représentant spécial a déclaré qu'il y a un évident problème de pouvoir et de démocratie dans ce pays, en dépit des signes d'ouverture politique annoncés par le gouvernement, ces initiatives restent insuffisantes et le pays vit encore un climat de tension et de violation des droits de l'homme. La persistance de ces graves problèmes relatifs au non-respect des droits de l'homme doivent mener la Commission à se pencher sur l'efficacité de l'assistance technique fournie à la Guinée équatoriale.
M. RUBEN MAYE NSUE MANGUE, Ministre de la justice et des affaires religieuses et Président de la Commission nationale de codification des lois de la Guinée équatoriale, a déclaré que son gouvernement a été étonné de constater que le Représentant spécial considérait les violations des droits de l'homme en Guinée équatoriale comme étant *ðsystématiques+ð, *ðmassives+ð et *ðgraves+ð. Le Représentant spécial admet que la Guinée équatoriale est un pays en paix mais il prédit qu'il va connaître un conflit armé et un soulèvement social. Ce rapport de M. Gustave Gallón emploie un ton très dramatique mais il n'est pas très crédible pour la population équato-guinéenne. La Guinée équatoriale est un petit pays de moins de 500 000 habitants, doté d'un gouvernement qui n'emploie pas plus de 3000 fonctionnaires. Jusqu'à ces dernières années, c'est-à-dire jusqu'à ce que le pays commence à produire du pétrole, la Guinée équatoriale ne disposait que de maigres ressources pour mettre en oeuvre les projets du gouvernement. Aujourd'hui, le Représentant spécial lui-même reconnaît que la Guinée équatoriale est l'une des économiques d'Afrique qui enregistre la plus forte croissance. Aujourd'hui, dans une situation prétendument *ðgrave+ð, il y a 85 personnes emprisonnées dans le pays.
Dans un pays dans lequel M. Gallón prétend que la liberté d'expression n'existe pas, il existe douze journaux et magazines dont cinq au moins représentent les vues des partis d'opposition. L'an dernier, sans la moindre assistance internationale, la Guinée équatoriale a organisé des élections législatives pour lesquelles 12 partis politiques étaient en lice. Des dizaines d'observateurs internationaux de l'Organisation de l'unité africaine, de l'Organisation de la Francophonie et de groupes tels que l'ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) ont été invités à assister à ces élections et ont fait des observations positives en ce qui concerne le processus électoral. Le Ministre équato-guinéen de la justice et des affaires religieuses a par ailleurs indiqué que, conformément à ce que la Commission des droits de l'homme avait demandé l'an dernier, le gouvernement et les partis politiques du pays ont poursuivi leur dialogue et ont annoncé, il y a deux jours, la tenue d'élections municipales le 28 mai de cette année. En réponse au
Représentant spécial qui prétend que la deuxième Commission sur la corruption dans la justice n'est rien d'autre qu'une tentative du pouvoir exécutif d'accroître sa mainmise sur le système judiciaire, le Ministre équato-guinéen a affirmé que la deuxième Commission représente un effort pour mettre un terme à la commercialisation de la justice et restaurer la confiance de la population dans le système judiciaire.
Le Ministre équato-guinéen a par ailleurs rappelé que le Représentant spécial et son prédécesseur ont tous deux souligné la nécessité d'assurer l'autodétermination à la plus grande minorité ethnique du pays, suite à une attaque armée perpétrée par un groupuscule il y a deux ans sur l'île de Bioko. Le Ministre a réaffirmé que le pays ne légaliserait pas les groupes ou les partis politiques qui prônent la violence armée, l'exclusivité ethnique et la destruction de l'unité nationale du pays+ð. La Commission devrait s'assurer qu'elle dispose de preuves concrètes qu'une minorité est persécutée, a estimé le Ministre, qui a souligné que, après l'incident d'il y a deux ans, tous les dirigeants reconnus du groupe ethnique concerné, y compris leur roi traditionnel, ont dénoncé le groupuscule auteur de l'action sur l'île de Bioko. Il a souligné que le Représentant spécial ne cite aucune loi discriminatoire à l'encontre du moindre groupe ethnique. En fait, tous les groupes ethniques de Guinée équatoriale sont totalement libres de pratiquer leurs croyances traditionnelles, de conserver leur culture, de parler leur propre langue et de participer pleinement à la vie politique et économique du pays. Des membres de ce groupe ethnique occupent des postes élevés dans le pays, y compris le poste de Premier Ministre et celui de Président de la Cour suprême, ainsi que plusieurs postes ministériels, plusieurs sièges parlementaires. Ils détiennent plusieurs gouvernements locaux de municipalités et sont bien représentés dans les forces armées et dans la police nationale. Le Ministre a assuré la Commission de l'engagement de son pays à mettre en place une démocratie pluraliste.
M. MICHEL MOUSSALI, Représentant spécial sur la situation des droits de l'homme au Rwanda, présentant son rapport sur la question (E/CN.4/2000/41, à paraître), a indiqué qu'il avait rencontré récemment les nouveaux responsables du pays et a reçu l'assurance de leur détermination à poursuivre la politique de dialogue, de coexistence, de réconciliation et de respect des principes fondamentaux de la personne humaine. Le Représentant spécial a insisté sur le traumatisme subit par la population rwandaise. Il ne se passe pas de jour sans que l'on ne découvre de nouvelles fosses où sont entassées les restes de victimes du génocide de 1994. M. Moussali a fait part de la défiance des Rwandais à l'égard de la communauté internationale, et, en particulier, des Nations Unies. La sécurité s'est améliorée dans le pays. Toutefois, le Représentant spécial relève que la crainte, la peur, la méfiance continuent d'exister au sein de la population. Il s'est dit convaincu de la sincérité des autorités rwandaises s'agissant de l'action en faveur des droits de l'homme. Il a souligné l'extrême difficulté de la tâche, compte tenu de l'histoire tragique du pays.
Pour le Représentant spécial, les efforts principaux des autorités rwandaises et de ceux qui veulent les aider, doivent se concentrer sur la sécurité, la promotion de l'unité et de la réconciliation nationale, la promotion et le respect des droits de l'homme. L'accent doit par ailleurs être mis sur le développement économique, la justice, le développement de la société civile, l'éducation, la santé. Le Représentant spécial a exprimé sa préoccupation s'agissant des enfants. Ils souffrent particulièrement des conséquences du génocide. M. Moussali a souligné la nécessité d'assurer l'éducation de la jeunesse. Il a appuyé l'idée de création d'une équipe spéciale (Task Force) proposée par l'UNICEF, qui regrouperait l'ensemble des activités en faveur des enfants. Le Représentant a enfin insisté sur la nécessité d'un soutien à la société civile et à la Commission nationale des droits de l'homme et à la Commission de l'unité et de la réconciliation nationale. Si la paix et la sécurité ne sont pas rétablies rapidement dans toute la région, y compris les Grands Lacs, le Rwanda s'enlisera dans des conflits perpétuels. La communauté internationale doit mobiliser tous les moyens pour que soient conclus et respectés des accords qui assurent paix, sécurité et développement économique à toutes les populations de la région des Grands Lacs.
M. JEAN DE DIEU MUCYO (Rwanda) a déclaré que son gouvernement se félicite que le Représentant spécial reconnaît les efforts fournis dans tous les domaines en relation avec les droits de l'homme et soutient les recommandations faites à la communauté internationale de continuer à aider le Rwanda dans ses efforts de surmonter toutes les difficultés rencontrées dans l'instauration d'un état de droit.
Le Gouvernement rwandais soutient également l'appel lancé par le Représentant spécial à la communauté internationale pour qu'elle collabore pleinement avec le Tribunal pénal international pour le Rwanda et les juridictions rwandaises pour appréhender les organisateurs et planificateurs, du génocide et des massacres encore en fuite. Il remercie les pays ayant commencé à appréhender les présumés génocidaires se trouvant sur leurs territoires. Le représentant a exhorté tous les autres pays à suivre cet exemple et de montrer leur engagement à la promotion et la protection des droits humains.
Suite du débat sur la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde
M. ANTONIO DE ICAZA (Mexique) a rappelé qu'en très peu de temps, son pays est parvenu à assurer une transformation profonde et irréversible de sa démocratie. La pluralité politique est désormais un fait, la séparation des pouvoirs une réalité et la participation de la société toujours plus grande. Les élections générales approchent et elles devront être le reflet fidèle de la véritable volonté populaire. Mais la démocratie, ce n'est pas seulement de véritables élections équitables ; cela signifie aussi mise en place de l'état de droit et le respect des droits de l'homme. Depuis 1994, le Mexique a introduit dans sa législation des modifications visant à garantir une autonomie totale aux organes judiciaires ainsi que l'indépendance des magistrats et de meilleures conditions de travail au sein du pouvoir judiciaire de la Fédération.
Le représentant mexicain a précisé que la Commission des droits de l'homme pour le District fédéral vient d'indiquer que dans le cadre du Programme de lutte contre l'impunité, 596 cas ont été traités au cours de l'année écoulée et que sur ce nombre, des mesures disciplinaires et pénales ont été imposées sur recommandation de la Commission à 83 fonctionnaires de l'État. En décembre 1998, a rappelé le représentant, le Gouvernement mexicain a lancé le Programme national de promotion et de renforcement des droits de l'homme. Au Mexique, a poursuivi M. de Icaza, les violations des droits de l'homme n'obéissent pas à une politique d'État ou de gouvernement et, lorsqu'elles ont lieu, elles font l'objet d'enquêtes et sont sanctionnées. Le représentant mexicain a assuré que tout le pays - gouvernement et société civile confondus - est engagé en faveur de l'épanouissement d'une culture de promotion et de protection des droits de l'homme. Le Gouvernement mexicain réitère le respect que lui inspire le travail des organisations non gouvernementales avec lesquelles il souhaite maintenir un dialogue constant, respectueux et fructueux. À cet égard, il convient de souligner que la coopération internationale en matière de droits de l'homme aide le Mexique à mettre en place une culture de respect et de promotion de ces droits.
La démocratie ne tolère pas les exclusions, a poursuivi le représentant mexicain. À cet égard, la pauvreté qui persiste encore au Mexique est particulièrement douloureuse : elle touche une part importante de la population, en particulier les populations autochtones, pierre angulaire de l'identité nationale mexicaine. C'est grâce à la démocratie, c'est-à-dire au dialogue, à la concertation et à l'intégration, que l'on pourra surmonter l'héritage et les carences de cinq siècles. M. de Icaza a rappelé que la semaine dernière, sa délégation a fait circuler une brochure traitant des efforts déployés en faveur des services et de l'infrastructure au Chiapas. À cet égard, il a réitéré l'engagement de son gouvernement à atteindre une paix digne et juste par le biais du dialogue et de la négociation. Les institutions de l'État devront s'abstenir de toute violence et protéger l'ordre public conformément à leurs attributions constitutionnelles. Ce n'est pas en une seule année que l'on pourra éliminer au Mexique les violations des droits de l'homme, a reconnu le représentant mexicain : l'important, c'est d'avancer vers le respect des droits de l'homme par une volonté indéfectible des institutions et dans le cadre d'une vigueur démocratique renouvelée, avec le concours vigoureux de la société civile.
M. HAROLD HONGJU KOH (États-Unis), a souligné, en introduction à sa déclaration, qu'étant lui-même issu d'une famille asiatique, il n'a connaissance d'aucune valeur asiatique qui préconise la détention arbitraire à grande échelle, les restrictions à l'encontre des dissidents politiques ou l'ingérence dans les libertés de pensée, de conscience et de religion.
Le représentant des États-Unis a déclaré que les récentes élections au Nigéria et en Indonésie témoignent du lien indissoluble entre droits de l'homme et démocratie politique. En Afrique, le Bénin a été, ces dernières années, un modèle de changement politique pacifique alors que le Botswana reste l'une des démocraties les plus stables du continent. Le Mali, pour sa part, a joué un rôle moteur en matière d'établissement de la démocratie et les États-Unis se réjouissent du transfert pacifique du pouvoir politique au Sénégal. En Europe centrale, les États-Unis sont impressionnés par les mesures déterminées prises par le
Gouvernement de Slovaquie ainsi que par les mesures positives prises l'an dernier par la Lettonie et l'Estonie. Comme le souligne la résolution sur l'ex- Yougoslavie, a poursuivi M. Hongju Koh, les États-Unis sont encouragés par l'engagement du Gouvernement croate nouvellement élu en faveur des principes démocratiques et des droits de l'homme.
Suite aux élections en République islamique d'Iran, les États-Unis ont pris un certain nombre de mesures visant à améliorer leurs relations avec ce pays, mais restent très troublés par le bilan de l'Iran en matière de droits de l'homme, en particulier s'agissant du traitement des minorités religieuses telles que les Baha'is et les Juifs. Les États-Unis sont également très préoccupés par les élections qui se profilent en Haïti et au Pérou et exhortent le gouvernement haïtien à tenir des élections libres et équitables dans les prochaines semaines. En ex-Yougoslavie, le régime de Milosevic poursuit sa campagne de terreur contre ses propres citoyens. Pour assurer un climat de tolérance et de coopération inter-ethnique au Kosovo, il est indispensable de condamner tous les extrémismes et toutes les violations des droits de l'homme, quelle que soit leur origine. C'est pourquoi la résolution des États-Unis sur l'ex-Yougoslavie demande à tous les groupes de la région d'oeuvrer ensemble pour un Kosovo pacifique, démocratique et multi-ethnique. La même combinaison de répression et de violence peut être constatée en ce qui concerne la violation systématique des droits de l'homme en Sierra Leone. De même en République démocratique du Congo, des forces gouvernementales et anti-démocratiques - ainsi que des troupes de gouvernements soutenant chaque partie - ont perpétré des meurtres massifs de civils, des détentions arbitraires, des actes de torture et des viols.
En Afghanistan, a poursuivi le représentant des États-Unis, le traitement répressif auquel se livrent les Taliban à l'encontre des femmes constitue une violation manifeste et systématique de leurs droits humains universellement reconnus. Il a aussi dénoncé les restrictions auxquelles sont soumises les femmes en Arabie saoudite. En Corée du Nord, les politiques mal avisées appliquées par le gouvernement ont laissé des pans entiers de la population dans une situation de malnutrition voire de famine. Dix ans après que le gouvernement eut été élu au Myanmar, le pays reste toujours sous régime militaire et la vie quotidienne reste caractérisée par la répression et l'arbitraire du régime. En Iraq, le régime de Saddam Hussein poursuit sa campagne brutale contre sa population, ignorant les appels du Rapporteur spécial en faveur d'un accès du personnel chargé de surveiller les droits de l'homme. Les États-Unis condamnent par ailleurs dans les termes les plus fermes les pratiques du Gouvernement soudanais en ce qui concerne notamment l'esclavage; la persécution religieuse à l'encontre des chrétiens, des animistes et des musulmans qui rejettent l'Islam radical; et les bombardements aériens de populations civiles, qui se sont intensifiés depuis le début de l'année.
Il faut que la Commission accepte le principe selon lequel aucu