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AG/COL/156

LE COMITE SPECIAL DE LA DECOLONISATION COMMENCE SA SESSION DE FOND, PREVUE JUSQU'AU 2 JUILLET, PAR L'EXAMEN DE LA QUESTION DE GIBRALTAR

21 juin 1999


Communiqué de Presse
AG/COL/156


LE COMITE SPECIAL DE LA DECOLONISATION COMMENCE SA SESSION DE FOND, PREVUE JUSQU'AU 2 JUILLET, PAR L'EXAMEN DE LA QUESTION DE GIBRALTAR

19990621 Le Comité spécial chargé d'étudier la situation en ce qui concerne l'application de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux a entamé ce matin les travaux de fond de sa session annuelle par l'examen de la question de Gibraltar, un des 17 territoires non autonomes inscrits sur sa liste. Le Comité spécial a entendu, dans ce cadre, le représentant de l'Espagne rappeler que l'Assemblée générale a souligné, à maintes reprises, que la décolonisation de Gibraltar doit être gouvernée par le principe de l'intégrité territoriale. Pour l'Espagne, une telle disposition implique que le principe d'autodétermination ne peut s'appliquer à ce territoire. Le représentant a indiqué que la demande de son pays se rapporte d'une part, au rocher cédé au Royaume-Uni conformément à l'article X du Traité d'Utrecht de 1704 et, d'autre part, à l'isthme, qui a été progressivement occupé par le Royaume-Uni au cour du XIXème siècle. Le Traité d'Utrecht stipule qu'en cas de retrait du Royaume-Uni, Gibraltar revient automatiquement à l'Espagne. La validité de ce Traité a été reconnu par le Royaume-Uni, l'Espagne et les Nations Unies. En ce qui concerne le statut futur de Gibraltar, le Gouvernement de l'Espagne a fait ses propositions dans le cadre du processus de négociation avec le Royaume-Uni initié à Bruxelles en novembre 1984.

Procédant à l'audition de pétitionnaires, le Comité spécial a entendu la déclaration du Ministre principal de Gibraltar. Ce dernier, appuyé par le représentant du Groupe pour l'autodétermination de Gibraltar, a rappelé que les Nations Unies ne prévoient aucune disposition de rétrocession d'un territoire. Les prétentions territoriales de l'Espagne constituent donc pour lui l'antithèse de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance. Il a demandé au Comité spécial de cesser d'inviter le Royaume-Uni et l'Espagne à discuter "entre eux" et par des "moyens bilatéraux" du statut futur de Gibraltar, sans juger nécessaire de consulter le peuple de Gibraltar qui s'est montré favorable à une libre association avec le Royaume-Uni.

Ces interventions ont été suivies d'une séance de questions-réponses entre les pétitionnaires et les délégations. Le Comité a également abordé la question de la diffusion d'informations sur la décolonisation. Il a été saisi, pour ce faire, du rapport du Département de l'information qui a été présenté par le Directeur de la Division des affaires publiques du Département. Une représentant du Département des affaires politiques a également pris la parole. Les représentants de Cuba et de la Côte d'Ivoire ont fait des observations. Le Comité spécial a, par ailleurs, décidé de reporter l'examen du projet de résolution sur cette question ainsi que celui du projet de résolution sur les renseignements relatifs aux territoires non autonomes communiqués en vertu de l'alinéa e de l'article 73 de la Charte des Nations Unies. Le Comité spécial a aussi reporté l'examen de la question de l'envoi de missions de visite dans les territoires non autonomes.

Le Comité se réunira demain, mardi 22 juin, à 15 heures pour procéder à l'audition de pétitionnaires sur les questions du Sahara occidental et du Timor oriental.

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Document de travail établi par le Secrétariat sur Gibraltar (A/AC.109/1999/5)

Le document de travail présente tout d'abord un aperçu de la situation politique. Il note ainsi qu'à Gibraltar, la Constitution de 1969 place les affaires locales sous la responsabilité d'un gouvernement local, le Royaume- Uni conservant le contrôle de la défense, des affaires étrangères et de la sécurité intérieure. Le Gouverneur, Sir Richard Luce nommé par la Reine du Royaume-Uni en février 1997, conserve quant à lui le pouvoir d'abroger les lois qui sont adoptées par le corps législatif. A cet égard, les élections législatives qui ont eu lieu en 1996 ont attribué huit sièges au Gibraltar Social Democratic Party et les sept restants au Gibraltar Socialist Labour Party. Le Chef du parti gagnant, M. Peter Caruana a été nommé Premier Ministre et siège donc au Conseil aux côtés du Gouverneur, de quatre membres de droit et de quatre membres élus. Le Livre Blanc sur " La Grande Bretagne et ses territoires d'outre-mer" publié en mars 1999, recommande que contrairement aux autres territoires qui relèveraient désormais d'un département des territoires d'outre-mer, Gibraltar devrait continuer à relever des départements chargés des affaires européennes par sa qualité de seul territoire d'outre-mer à faire partie de l'Union européenne en vertu du Traité de Rome ratifié par le Royaume-Uni.

Du point de vue économique, le document de travail souligne que la réduction des effectifs militaires à 400 hommes a entraîné une baisse de 10 % de l'apport de la défense au produit intérieur brut (PIB) soit 60 millions de livres sterling. L'économie du territoire demeure largement tributaire du tourisme et de la prestation de services financiers tels que services bancaires, assurances, transports maritimes et gestion de portefeuille. Le revenu par habitant est de 17 500 dollars en 1997 et l'inflation était à 2% en 1998. Cette même année, Gibraltar comptait 26 banques qui desservent aussi bien des clients extraterritoriaux que des clients locaux et le solde total de clôture dépasse 6 milliards de livres sterling. Le Gouvernement s'emploie à transposer dans la législation du territoire les directives de l'Union européenne qui imposent aux sociétés extraterritoriales de publier leurs résultats comptables. La nécessité de transposer des directives européennes dans plusieurs domaines a été également invoquée par l'Espagne lorsqu'elle a annoncé qu'elle maintiendrait les contrôles à la frontière, intensifiés depuis février 1999, tant que Gibraltar n'appliquerait pas ces directives contre la fraude fiscale, le trafic de stupéfiants et le blanchiment d'argent. A ce propos, la Puissance administrante a indiqué que Gibraltar avait aligné sa législation de répression du blanchiment d'argent sur les normes britanniques et européennes.

Abordant la situation sociale, le document de travail indique notamment que Gibraltar comptait au premier trimestre de 1999 383 chômeurs, soit 3,8% de la population active. Il s'agit là d'une nette amélioration puisque au premier trimestre de 1998, l'île comptait 580 chômeurs. Selon les informations, la législation du travail est conforme aux directives de l'Union européenne. Outre les chiffres de l'emploi, le rapport donne un aperçu de la situation en matière des droits de l'homme, d'environnement, de logement, de

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protection sociale, d'enseignement et de criminalité. Le rapport se termine par un chapitre consacré à l'examen de la question de Gibraltar par l'ONU au cours de l'année dernière.

Audition de pétitionnaires

M. PETER CARUANA, Ministre de Gibraltar, a rejeté catégoriquement les allégations de l'Espagne selon lesquelles le peuple de Gibraltar n'est pas un peuple colonial et que le territoire ne mérite donc pas d'être inscrit sur la liste des territoires non autonomes de l'Assemblée générale. L'argument selon lequel le peuple de Gibraltar descend du peuple espagnol et qu'il n'est donc pas un peuple autochtone n'est pas non plus valable. La façon dont l'Espagne s'appuie sur ces arguments et allégations pour justifier sa théorie d'intégration de Gibraltar ne peut être prise au sérieux, a estimé le Ministre en se demandant ce que l'Espagne entend exactement par " peuple autochtone". Bon nombre de peuples coloniaux ayant obtenu l'autodétermination, a-t-il rappelé, n'étaient pas indigènes dans leur territoire. Personne, ni même l'Espagne ne peut prétendre aujourd'hui que ce sont les autochtones des Etats- Unis, d'Australie ou d'Amérique latine qui ont obtenu l'indépendance de ces territoires. Si le Comité spécial doute de la spécificité du peuple de Gibraltar par rapport au peuple espagnol, ses doutes se dissiperaient après une première visite sur le territoire. Pendant 295 ans, le peuple de Gibraltar a développé sa propre culture bien distincte de l'Espagne. L'ONU l'a elle- même reconnu au titre de l'article 73. Gibraltar n'a jamais fait partie de l'Espagne, l'Espagne y a renoncé en 1704, au moment de la signature du Traité d'Utrecht. Si l'intégrité de l'Espagne a été violée, elle l'a été à ce moment là, a souligné le Ministre en considérant qu'il serait étrange aujourd'hui d'envisager l'autodétermination de Gibraltar comme une violation de l'intégrité territoriale de l'Espagne. Il est inadmissible que l'Espagne cherche à appliquer le principe de l'intégrité territoriale en se reférant à une époque où le principe n'existait pas, a dit le Ministre.

Il a poursuivi en rappelant que les Nations Unies n'ont adopté aucune disposition prévoyant la rétrocession d'un territoire. Les Nations Unies ne prévoient aucune alternative à l'autodétermination. Tout transfert de territoire à une tierce partie serait donc un affront à la raison d'être du Comité spécial, a insisté le Ministre. Les prétentions territoriales de l'Espagne, a-t-il ajouté, constituent donc l'antithèse de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance. Dans ces conditions, a poursuivi le Ministre, il est regrettable que le Comité spécial continue de recommander à la Quatrième Commission une résolution consensuelle invitant le Royaume-Uni et l'Espagne à discuter "entre eux" et par des "moyens bilatéraux" du statut futur de Gibraltar. Le Ministre a insisté : "Gibraltar n'est pas un territoire destiné à être lâché par le Royaume- Uni et à être obtenu par l'Espagne". La décolonisation de Gibraltar est une question de reconnaissance de l'exercice par son peuple du droit à l'autodétermination. Elle concerne donc d'abord et avant tout le peuple du territoire et la Puissance administrante. L'adoption d'une telle résolution est donc aussi stérile dans la pratique qu'elle est ambiguë dans la théorie, a souligné le Ministre.

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Il a poursuivi en saluant les performances politiques, économiques et sociales de Gibraltar qui a-t-il dit, ont été rendues possibles grâce à la Constitution que le territoire a reçue en 1969 des mains du Royaume-Uni. Le Ministre a ainsi souligné que le territoire est déjà pratiquement autonome. Le désir du peuple, a-t-il ajouté, de garder la souveraineté britannique ne veut pas dire qu'il souhaite qu'une puissance coloniale exerce la souveraineté sur son territoire mais que le pouvoir soit exercé par un Gouvernement autonome. Un tel choix n'est en aucun cas en violation avec les principes de décolonisation des Nations Unies. Aujourd'hui la décolonisation n'implique plus de couper tout lien avec la Puissance administrante. Elle peut impliquer au contraire l'obtention d'une pleine autonomie, le transfert du pouvoir politique et administratif et l'établissement d'une relation moderne non coloniale et librement choisie avec l'ancienne Puissance administrante. Gibraltar peut rester britannique mais d'une manière non coloniale. L'Espagne ne peut pas prétendre comme elle le fait que cette volonté du peuple de Gibraltar montre qu'il ne recherche pas sérieusement l'indépendance. Il s'agit là, a estimé le Ministre, d'un argument curieux qui veut faire croire que la décolonisation n'est légitime que si elle implique l'intégration à un troisième territoire qui a des prétentions que le peuple concerné au premier chef rejette. Gibraltar ne considère pas l'Espagne comme un ennemi au contraire il entretient des relations avec les autorités de ce pays, aux niveaux municipal, provincial, régional et national. Seul le Gouvernement de Madrid refuse jusqu'ici le dialogue. Gibraltar tient à un dialogue constructif avec l'Espagne sur la base d'un ordre du jour souple et souligne bien qu'il s'agit d'une question distincte du droit à l'autodétermination. Ayant dit cela, le Ministre a appelé une nouvelle fois le Comité spécial à s'abstenir de recommander une résolution consensuelle arguant qu'une telle initiative ne saurait servir d'alternative à la reconnaissance du droit à l'autodétermination du peuple de Gibraltar.

M. WILLIAM SERFATY, pétitionnaire s'exprimant au nom du Groupe pour l'autodétermination de Gibraltar, a insisté sur la nécessité de respecter le droit à l'autodétermination du peuple de Gibraltar. La puissance administrante a conclu un accord en ce qui concerne la situation du territoire de Gibraltar. Le processus de décolonisation est en train de stagner car la puissance administrante a réalisé qu'il y avait une opposition du peuple à un changement qui lui serait imposé. La population de Gibraltar n'acceptera pas de changement à moins qu'il ne soit décidé par l'exercice démocratique et libre de son droit à l'autodétermination. Le traité d'Utrecht a été signé entre les deux signataires et est toujours appliqué. Le territoire de Gibraltar doit avoir le droit à l'autodétermination. L'Espagne a essayé d'annexer le territoire. La puissance administrante accorde une importance excessive à ses propres intérêts territoriaux. Le représentant a évoqué l'origine multiculturelle de la population de Gibraltar. L'Espagne a toujours nourri une hostilité à l'égard des descendants des populations qui se sont installées à Gibraltar. La population de Gibraltar subi une pression de la puissance administrante et de l'Espagne et doit pouvoir exprimer son droit inaliénable à l'autodétermination. Le Gouvernement de Gibraltar a réussi à assurer la viabilité de son économie sans aide étrangère. Les droits

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élémentaires des habitants de Gibraltar doivent être respectés. La culture de Gibraltar n'est pas la même que celle de l'Espagne. Gibraltar a en effet un caractère unique. M. Serfati a déclaré qu'il fallait que le Comité puisse visiter le territoire pour pouvoir se rendre compte de la situation. Le Royaume-Uni ne doit pas empêcher une telle visite. La population de Gibraltar a droit à l'autodétermination. Il n'y a qu'un seul moyen de décoloniser et cela doit se faire par un processus démocratique.

Le représentant de la Côte d'Ivoire a déclaré qu'un processus de négociation est mis en place entre les Gouvernements du Royaume-Uni et de l'Espagne pour trouver une solution. Quelle est l'opinion de M. Serfati en ce qui concerne ce processus. Répondant à la question, M. SERFATI, a déclaré qu'il n'était pas en désaccord avec le processus de négociation. La voix du peuple de Gibraltar doit toutefois être présente et déterminante dans le processus.

Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a estimé que les recommandations qui viennent d'être faites au sujet de Gibraltar sont fort utiles pour le Comité. Le peuple de Gibraltar accepterait-il d'être impliqué dans un processus de négociation tripartite? Répondant à la question, a déclaré que la participation du peuple de Gibraltar est indispensable. Toute décision prise doit se fonder sur l'exercice démocratique de l'autodétermination.

M. PETER CAROUANA, Ministre de Gibraltar, a quant à lui reconnu qu'il est légitime que l'Espagne participe à un processus de dialogue. Il ne faut toutefois pas créer une confusion. Le Gouvernement de Gibraltar est disposé à participer à un tel processus à condition que le peuple de Gibraltar puisse faire entendre sa voix. Les intérêts et les aspirations du peuple de Gibraltar doivent être pleinement reconnus.

Relevant l'expression "Gouvernement presque autonome" du Ministre de Gibraltar, le Président du Comité spécial, lui a demandé ce qu'il recommande au Comité spécial pour assurer la pleine autonomie de Gibraltar. Le Ministre de Gibraltar a expliqué que la pleine autonomie ne pourrait venir que d'un amendement de la Constitution de 1969 qui prévoit, en effet, l'exercice par le Royaume-Uni d'un pouvoir de réserve. La voie à suivre serait donc d'éliminer ce pouvoir de réserve, a demandé le Président du Comité spécial avant que le Ministre de Gibraltar ne lui explique que plusieurs autres aspects de la Constitution pourraient être modifiés dont la mesure qui dispose que le Royaume-Uni a un droit d'intervention à Gibraltar. Dans le cadre d'une association librement choisie, a convenu le Ministre, Gibraltar pourrait envisager le maintien de certains mécanismes de dernier recours et "sur une base non coloniale" qui permettraient au Royaume-Uni de prévenir tout acte ou toute mesure pouvant nuire à ses intérêts fondamentaux. A cet égard, le représentant de la Grenade a souhaité savoir si les arrangements constitutionnels en vertu desquels Gibraltar est lié au Royaume-Uni peuvent

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déjà être considérés comme caractéristiques d'une association librement choisie. Non, le modèle appliqué aujourd'hui prévoit en effet une Constitution, mais il ne s'agit pas du point de vue du droit international d'un cas d'association librement choisie, a répondu le Ministre de Gibraltar.

Le représentant de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a demandé s'il existe aujourd'hui au sein du Gouvernement de Gibraltar, une orientation favorable à un autre arrangement constitutionnel que l'association librement choisie. L'idée générale, a répondu le Ministre de Gibraltar est que le Gouvernement et le peuple s'opposent à tous ceux qui chercheraient à leur imposer le choix des autres territoires non autonomes. L'opinion est, de toute manière, très favorable aux propositions visant à moderniser la Constitution pour faire passer le territoire d'un lien colonial à un lien d'association librement choisie. Les résolutions des Nations Unies prévoient trois types d'autodétermination, a souligné le représentant de la Côte d'Ivoire pour demander ce que le Ministre de Gibraltar a voulu dire par "quatrième option". Il ne s'agit pas, a répondu ce dernier, d'une jurisprudence. Les Nations Unies prévoient en effet, l'indépendance, l'association, l'intégration et aussi "l'émergence d'un statut politique librement déterminé par le peuple concerné qui peut constituer un moyen d'appliquer l'autodétermination". Le représentant de la Papouasie-Nouvelle -Guinée est lui revenu sur la question de l'envoi des missions de visite à Gibraltar pour s'entendre dire par le Ministre de Gibraltar que la question dépend de la seule Puissance administrante à laquelle il transmettra la demande. Le Ministre a également répondu à une question d'ordre économique soulevée par le Président du Comité spécial qui souhaitait savoir comment la création de centres financiers off- shore proposées par l'Union européenne affecterait-elle l'économie de Gibraltar. Il s'agit d'une menace considérable, a dit le Ministre de Gibraltar, sans équivoques. C'est une menace non seulement pour les territoires non autonomes mais pour tous les territoires indépendants en particulier les Etats des Caraïbes. Il s'agit d'une mesure politique visant à répondre aux intérêts de certains pays développés sans tenir compte des intérêts des autres. La mise en oeuvre d'une telle mesure constituerait un danger sérieux pour Gibraltar dont le service bancaire représente 20 à 25% de l'économie. Gibraltar entend mobiliser tous les territoires britanniques non autonomes pour qu'ils fassent front commun contre la Puissance administrante.

M. ARTURO LACLAUSTRA (Espagne) a rappelé que les Nations Unies, dans plusieurs résolutions, ont établi que la décolonisation de Gibraltar doit être gouvernée par le principe de l'intégrité territoriale. Le représentant a ainsi évoqué les résolutions 1514 (XV), 2625 (XXV), 2353 (XXII) et 2429 (XXIII) de l'Assemblée générale. Le fait que la décolonisation de Gibraltar doive se faire en respectant le principe d'intégrité territoriale n'est pas le point de vue exclusif du Gouvernement de l'Espagne mais celui de l'ONU. La situation coloniale de Gibraltar détruit l'unité nationale et l'intégrité territoriale de l'Espagne. Elle est incompatible avec la doctrine établie par les Nations Unies. Le principe d'autodétermination n'est pas applicable à la décolonisation de Gibraltar. Lorsque le Royaume-Uni a occupé le rocher, il a expulsé la population espagnole qui vivait à Gibraltar. De ce fait, les

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habitants actuels de Gibraltar ne sont pas colonisés. Il ne s'agit pas d'une population autochtone mais des descendants d'habitants d'un pays colonial. Si le principe d'autodétermination était appliqué, cela ne permettrait pas de mettre fin à une situation coloniale mais au contraire la ferait se poursuivre. La demande de l'Espagne se rapporte d'une part au rocher cédé au Royaume-Uni conformément à l'article X du Traité d'Utrecht et d'autre part à l'isthme, qui n'a pas été cédé par le Traité mais a été progressivement et illégalement occupé par le Royaume-Uni au cour du XIXème siècle. La souveraineté britannique sur Gibraltar est basée sur le Traité d'Utrecht qui stipule que si la Grande Bretagne se retirait de Gibraltar, l'Espagne réintégrerait Gibraltar à son territoire. Le Royaume-Uni, l'Espagne et les Nations Unies ont reconnu la validité de ce traité international. Gibraltar ne peut que continuer à être une colonie britannique ou être réintégré à l'Espagne. Toute autre option est exclue. Le Gouvernement espagnol ne renoncera jamais à son droit d'exercer sa souveraineté sur Gibraltar. L'Espagne dispose de l'appui unanime de toutes les parties politiques ainsi que du peuple espagnol. Le Gouvernement espagnol demeure ouvert à un dialogue permettant de trouver une solution définitive à cette question.

L'Assemblée générale a invité les Gouvernements du Royaume-Uni et de l'Espagne a poursuivre des négociations bilatérales afin de mettre fin à la situation coloniale de Gibraltar. Le processus de négociation est basé sur le Communiqué conjoint de Bruxelles de novembre 1984, signé par les deux Gouvernements. Le Gouvernement espagnol a montré sa volonté de trouver une solution négociée au conflit. Les propositions faites par l'Espagne sont conformes aux recommandations faites par l'Assemblée générale et prennent en compte les intérêts légitimes de la population actuelle de Gibraltar.

Le Gouvernement de l'Espagne propose de : reconnaître les droits démocratiques et les libertés garantis par la Constitution de l'Espagne de 1978; reconnaître un régime d'autogouvernement pour Gibraltar; protéger la singularité culturelle et linguistique de Gibraltar et en particulier sa juridiction; envisager les spécificités du régime fiscal et économique; permettre à la population actuelle de Gibraltar de garder sa citoyenneté britannique et de bénéficier, si elle le désire, d'une double nationalité. Les propositions de l'Espagne garantissent le plein respect de la différence et des droits légitimes de la population vivant sur le rocher. Le Gouvernement de l'Espagne est prêt à garantir tous les points évoqués, dans le cadre d'une solution négociée qui permettra de mettre fin à la controverse relative à Gibraltar. Cette solution doit être conforme aux recommandations et aux résolutions de l'Assemblée générale et permettre de restaurer pleinement l'intégrité territoriale de l'Espagne.

Question de la diffusion d'informations sur la décolonisation (A/AC.109/1999/19)

Le rapport du Département de l'information rend compte des activités du Département, entre juillet 1998 et mai 1999, visant à faire connaître l'action de l'ONU dans le domaine de la décolonisation. Le Département a continué à

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rendre compte des travaux de l'Assemblée générale et du Comité de la décolonisation. Il a également continué à promouvoir la Décennie internationale de l'élimination du colonialisme (1990-2000) et le Séminaire régional sur les territoires non autonomes, en utilisant les moyens à sa disposition et les médias. Il a envoyé au Timor oriental un fonctionnaire de l'information en vue d'une consultation populaire sur le plan d'autonomie, et il a participé activement aux préparatifs de l'installation de la Mission des Nations Unies au Timor oriental (MINUTO), en particulier en ce qui concerne sa composante information.

Le Département a publié, dans le cadre de la couverture courante des activités de l'ONU, 61 communiqués de presse, en anglais et en français, sur des sujets se rapportant à la décolonisation. Ces communiqués de presse ont tous été remis aux médias, au Siège de l'Organisation, et communiqués par voie électronique aux centres et services d'information des Nations Unies dans le monde entier; ils ont aussi été affichés sur le site Web de l'ONU.

Les déclarations du Secrétaire général, notamment son allocution devant le Comité de la décolonisation et son message à l'occasion de la Semaine de solidarité avec les peuples de tous les territoires coloniaux qui luttent pour la liberté, l'indépendance et les droits de l'homme, du 24 au 27 mai 1999, ont été signalées à la presse, à la fois par le porte-parole du Secrétaire général dans son point de presse quotidien, dans les Actualités du jour publiées par le Département et sur Internet.

Le Département a chargé un fonctionnaire de presse de couvrir le Séminaire régional des Caraïbes du Comité de la décolonisation qui s'est tenu à Castries (Sainte-Lucie) du 25 au 27 mai 1999. Des communiqués de presse ont été distribués aux représentants des médias locaux et régionaux à Sainte- Lucie; ils ont également été publiés au Siège de l'ONU et affichés sur Internet. Des dossiers d'information sur la décolonisation ont été établis à l'intention des participants au Séminaire.

En ce qui concerne les publications, la revue trimestrielle Chronique de l'ONU a publié dans son numéro 4 (1998) un article sur le Séminaire régional du Pacifique sur les territoires non autonomes, qui s'est tenu à Nadi (Fidji) du 16 au 18 juin 1998. Un récapitulatif des travaux de la Quatrième Commission, dont une partie portait sur la décolonisation, a été publié dans le numéro 1 (1999) de Chronique de l'ONU. En outre, un aperçu des activités de décolonisation pour l'année 1996 a été établi pour être publié dans l'édition de 1996 de l'Annuaire des Nations Unies. Il en sera de même pour 1997.

Au cours de la période étudiée, le Service radio et vidéo du Département a continué de rendre compte de différentes questions liées à la décolonisation et de questions connexes dans ses bulletins d'information radio et dans ses magazines d'actualité, dans les langues officielles de l'ONU et dans d'autres langues. Par ailleurs, le Service a produit dans différentes langues neuf grandes émissions et émissions de magazine régional sur la décolonisation et

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les questions qui s'y rapportent. Le programme régional pour les Caraïbes du Service radio a également produit des magazines et des programmes d'information pour la radio consacrés au Séminaire régional des Caraïbes sur les territoires non autonomes et aux activités qui ont marqué la Semaine de solidarité, à Sainte-Lucie, cette année.

Les activités de décolonisation menées par les organismes des Nations Unies ont été télévisées et diffusées, en direct ou non, par l'intermédiaire des réseaux et stations de télévision, ou ont figuré dans des assortiments de nouvelles télévisées et d'extraits d'enregistrements vidéo transmis aux agences de presse internationales. L'audiovidéothèque du Département de l'information a continué de produire des bandes et des cassettes sur les questions de décolonisation et de les mettre à la disposition des correspondants, des représentants, des producteurs de programmes radio de l'ONU et des producteurs de l'extérieur. La vidéo de l'ONU intitulée "Sur les Nations Unies : décolonisation", produite par le Département, a été projetée lors du Séminaire régional des Caraïbes, ainsi qu'au Siège de l'ONU à l'occasion de la Semaine de solidarité.

Les centres et services d'information des Nations Unies du monde entier ont continué à diffuser des informations sur la décolonisation. Les directeurs des centres d'information et les fonctionnaires d'information nationaux ont abordé les problèmes de décolonisation dans des conférences qu'ils ont données, en insistant sur le processus historique de la décolonisation et le rôle essentiel joué par l'ONU à cet égard.

Enfin, le Département a continué à diffuser des informations sur la décolonisation à l'occasion des séances d'information à l'intention des organisations non gouvernementales et des visites guidées, ainsi qu'en répondant aux demandes de renseignements du public.

M. MIAN QADRUD-DIN, représentant le Département de l'information, a présenté le rapport du Département portant sur la question de la diffusion d'informations sur la décolonisation (A/AC.109/1999/19). Mme MARIA MALDONADO, représentant le Département des affaires politiques, a précisé que son Département a continué à travailler étroitement avec le Département de l'information pour assurer une large diffusion de l'information en ce qui concerne la décolonisation. Les séminaires régionaux du Comité spécial, et en particulier le plus récent qui s'est tenu à Sainte Lucie, offrent de bonnes occasions au Secrétariat de renforcer leurs contacts avec des experts et des organisations non gouvernementales et de diffuser des informations en ce qui concerne les activités de l'ONU dans les territoires non autonomes.

Le représentant de la Côte d'Ivoire a souligné l'importance de la diffusion de l'information en ce qui concerne la décolonisation. Il est étonnant pour beaucoup de personnes que l'on parle encore de décolonisation à l'heure actuelle. Il faut sensibiliser les populations des puissances administrantes à la question de la décolonisation. M. QADRUD-DIN, a assuré le représentant que le Département de l'information a à coeur de diffuser les

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informations sur la décolonisation. Le Département se sert essentiellement des rediffuseurs constitués par les médias et s'adresse également aux ONG qui ont des rapports avec les Gouvernements. Le représentant de Cuba s'est félicité de la présentation du rapport du Département de l'information sur la diffusion d'informations sur la décolonisation. Il s'est dit satisfait du travail effectué par le Département de l'information lors du séminaire régional pour les Caraïbes chargé d'étudier la situation politique, économique et sociale des petits territoires insulaires non autonomes, qui s'est tenu à Sainte Lucie. Le représentant a rappelé que l'on peut avoir l'impression que les travaux du Comité vont prendre fin à la fin de la décennie internationale de l'élimination du colonialisme. Il faut que le public comprenne que ce n'est pas le cas. L'opinion publique doit être mise au courant de la situation en ce qui concerne la décolonisation. Le représentant a demandé des informations au sujet de l'accès par l'internet de l'information relative à la décolonisation. M. QADRUD-DIN, a informé le Comité qu'il y a une page importante du Web relative à la décolonisation qui entrera en service à partir du mois prochain. Lorsque le Web fonctionnera pleinement on informera le Comité de l'étendue des informations diffusées. M. Qadrud-Din a précisé que le taux d'accès à la page Web des Nations Unies augmente chaque jour de façon exponentielle.

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