CS/1015

LE CONSEIL DE SECURITE TIENT UN DEBAT SUR L'ASSISTANCE HUMANITAIRE DANS LE CADRE DE LA PROMOTION DE LA PAIX ET DE LA SECURITE

21 janvier 1999


Communiqué de Presse
CS/1015


LE CONSEIL DE SECURITE TIENT UN DEBAT SUR L'ASSISTANCE HUMANITAIRE DANS LE CADRE DE LA PROMOTION DE LA PAIX ET DE LA SECURITE

19990121 Pour faire face aux crises, le Conseil doit jouer son rôle central en matière de maintien de la paix et de la sécurité

La seule façon de faire face aux crises humanitaires est que le Conseil de sécurité exerce un rôle central et unique pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, comme l'énonce la Charte des Nations Unies, a déclaré le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaire et Coordonnateur des secours d'urgence, M. Sergio Vieira de Mello, ouvrant le débat, ce matin, sur la promotion de la paix et de la sécurité : l'assistance humanitaire et le Conseil de sécurité. Trop souvent, les agences humanitaires se retrouvent seules face à des situations critiques et les efforts sont vains, a-t-il souligné. De l'avis de M. Vieira de Mello, l'action des Nations Unies doit également porter sur le cadre juridique nécessaire aux activités humanitaires. Le plus grand défi, à cet égard, est de combler l'écart entre les normes internationales existantes et leur respect sur le terrain, qui n'a jamais été aussi profond. Dans ce cadre, le Secrétaire général adjoint a notamment suggéré au Conseil de prendre des mesures concrètes pour protéger les enfants victimes des conflits armés. M. Vieira de Mello a encore plaidé en faveur d'un accès accru à l'assistance humanitaire pour les populations nécessiteuses. Il a souligné le fait que la contribution que les forces de maintien de la paix et la police internationale peuvent apporter dans la prévention des crises humanitaires était souvent peu considérée.

Au cours du débat, les représentants ont défendu une approche globale des situations humanitaires qui assure à la fois un environnement sûr pour les civils et le personnel humanitaire qui leur porte assistance, et comprenne des mesures visant à assurer une transition rapide entre l'aide humanitaire d'urgence et l'aide à la reconstruction à long terme. Plusieurs délégations ont insisté sur la nécessité de garantir l'impartialité et la neutralité de l'action humanitaire. Elles ont également insisté sur la nécessité de renforcer les capacités locales et nationales pour faire face aux crises humanitaires et prévenir les violations des droits de l'homme.

Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration : Etats-Unis, Chine, Argentine, Bahreïn, Fédération de Russie, Pays-Bas, Canada, Namibie, Slovénie, Royaume-Uni, Gambie, Malaisie, France, Gabon, et Brésil. A la fin de la réunion, le représentant des Etats-Unis a faut des observations.

Déclarations

M. SERGIO VIEIRA DE MELLO, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, a fait observer que les guerres éclatent aujourd'hui dans les villes et les villages, dont la population civile est la cible, la propagation de la violence devient une tactique préméditée, et l'élimination physique ou les déplacements massifs de certaines catégories de la population une stratégie globale. Les actes des parties belligérantes dans les récents conflits en ex-Yougoslavie, au Sierra Leone et en Afghanistan illustrent ces affirmations. Les besoins humanitaires sont disproportionnés par rapport à l'ampleur du conflit armé. Trop souvent les agences humanitaires se retrouvent seules face à ces situations critiques et les efforts sont vains. La seule façon efficace de faire face à ces crises est que le Conseil de sécurité exerce un rôle central et unique pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, comme l'énonce la Charte des Nations Unies. Le second aspect du domaine dans lequel les Nations Unies oeuvrent est le cadre juridique nécessaire aux activités humanitaires. Cette année marque le dixième anniversaire de la Convention des droits de l'enfant, le 30ème anniversaire de la Convention de l'OUA sur les réfugiés, le 50ème anniversaire des Conventions de Genève et le Centenaire des Conventions de La Haye, et en particulier la commémoration de la Déclaration de Saint-Pétersbourg. S'ajoutant à d'autres instruments internationaux, notamment la Convention sur le génocide, on dispose aujourd'hui d'un mécanisme juridique plus solide pour réglementer la conduite des parties aux conflits et pour protéger les populations civiles, avant ou après qu'elles deviennent des victimes. Dans la plupart des conflits contemporains, le droit international humanitaire, les droits de l'homme et le droit des réfugiés ne peuvent plus être ignorés. Le fossé qui existe entre les normes internationales existantes et leur respect sur le terrain n'a jamais été aussi profond. Notre plus grand défi est de combler ce vide par la mise en oeuvre du droits international et des principes fondamentaux. Tandis qu'il incombe en premier lieu aux Etats Membres et aux parties aux conflits de respecter le droit humanitaire international et les droits de l'homme, le Conseil de sécurité demeure tenu d'en garantir le respect, conformément à son mandat dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales.

M. Vieira de Mello a fait remarquer que chaque atteinte portée à la population civile ou toute attaque contre le personnel humanitaire constitue une violation du droit et des principes internationaux. Le Statut de la future Cour pénale internationale de 1998 élabore davantage sur les instruments internationaux en définissant les crimes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre relevant de la compétence de la cour. Le processus de ratification de la CPI et la mise en place de la cour doivent être accélérés. L'action des membres du Conseil de sécurité sera cruciale en établissant un modèle pour les autres Etats Membres. En créant deux tribunaux ad hoc pour la Bosnie et le Rwanda, le Conseil de sécurité a en fait reconnu son obligation de faire face à la question de l'impunité et de son lien avec une paix et une sécurité durables.

( suivre)

- 3 - CS/1015 21 janvier 1999

Plus important encore, le Conseil de sécurité a reconnu que les violations massives du droit humanitaire peuvent constituer une menace à la paix et à la sécurité. L'importance du respect des droits de l'homme est de plus en plus reconnue. Dans son rapport sur l'Afrique, le Secrétaire général avait souligné en avril 1998 tous les liens importants entre le respect des droits de l'homme et la prévention des catastrophes humanitaires. Alors que le droit international définit les impératifs moraux et juridiques pour les mesures à prendre, le droit est inefficace s'il n'est pas mis en oeuvre. La Convention des droits de l'enfant de 1989 est le seul instrument qui prévoit des dispositions sur les droits de l'homme, ainsi que sur le droit humanitaire et le droit des réfugiés. A cet égard, M. Vieira de Mello a appuyé fermement les efforts de l'UNICEF visant à fixer à 18 ans l'âge minimum des enfants participant aux forces de maintien de la paix et de la police civile internationale. Le Conseil de sécurité pourrait examiner le sort des enfants victimes des conflits armés et prendre des mesures concrètes pour les protéger à l'avenir.

L'action humanitaire ne peut réussir si l'on n'accélère pas l'accès à ceux qui en ont besoin. Les gouvernements et les responsables de l'opposition des pays affectés par des conflits doivent garantir que toute personne dans le besoin doit recevoir une assistance. En réaffirmant les droits des victimes, les organisations humanitaires doivent également accepter leur obligation de maintenir une action humanitaire non politique et de respecter au plus haut point l'impartialité. La contribution que les forces de maintien de la paix et de la police internationale peuvent et doivent prévenir et contenir les crises humanitaires, est souvent peu considérée. Lorsque les responsables de massacres massifs ou autres criminels s'abritent dans les camps de réfugiés, comme dans l'est du Zaïre en 1994, le gouvernement du pays hôte et ses forces de sécurité sont responsables en premier lieu. Mais les forces de maintien de la paix peuvent jouer un rôle pour renforcer les forces nationales en vue de séparer les combattants des victimes. Le Haut Commissariat pour les réfugiés oeuvre actuellement en étroite coopération avec le Département des opérations de maintien de la paix pour envisager les différentes options concernant un mécanisme international qui assisterait les gouvernements à maintenir la sécurité et un climat humanitaire dans les camps et les établissements humains. L'appui continu du Conseil de sécurité à ces efforts sera essentiel. De l'avis de M. Vieira de Mello, si les sanctions sont bien ciblées pour empêcher les criminels de guerre de jouir des résultats de leurs actes diaboliques, sans porter atteinte aux femmes et enfants innocents, nous disposerons d'un instrument efficace.

M. PETER BURLEIGH (Etats-Unis) a déclaré que la plupart des conflits qui sévissent actuellement dans différentes régions du monde concernent des luttes internes entre factions rivales. Malheureusement, nombre de ces conflits engendrent des violations flagrantes des droits de l'homme, créant des situations humanitaires d'urgence complexes. La population civile - en particulier les femmes, les enfants et les personnes âgées - deviennent délibérément la cible dans ces conflits.

( suivre)

- 4 - CS/1015 21 janvier 1999

Dans le cadre du débat du Conseil de sécurité le 29 décembre 1998 sur la restauration de la paix après les conflits, le Président du Conseil avait déclaré que le Conseil de sécurité est convaincu que la recherche de la paix en Afrique exige une approche globale, concertée et déterminée, englobant l'élimination de la pauvreté, la promotion de la démocratie, le développement durable et le respect des droits de l'homme, ainsi que la prévention et le règlement des conflits, notamment le maintien de la paix et l'assistance humanitaire. Cette approche globale et intégrée ne devrait pas être limitée aux conflits en Afrique. Le Conseil ne peut ignorer le lien inhérent aux situations humanitaires d'urgence. Le Conseil devrait être régulièrement tenu informé des aspects humanitaires des conflits potentiels ou en cours afin de prendre les mesures appropriées. Les Etats-Unis sont d'avis que les efforts de coordination devraient être axés sur l'accès de l'assistance humanitaire aux populations dans le besoin, la protection et la sécurité du personnel humanitaire international et l'amélioration de la transition des missions de maintien de la paix vers la construction de la paix après les conflits. Concernant l'accès humanitaire aux populations souffrant de l'impact des conflits en cours, le Conseil de sécurité pourrait envisager de développer une série d'options visant à faire respecter le droit et l'ordre et à créer un climat propice pour la population civile, y compris le personnel humanitaire. Lorsque les violations du droit international et des droits de l'homme constituent une menace à la paix et à la sécurité internationales, le Conseil de sécurité devrait examiner les moyens de répondre à ces situations, conformément aux mandats propres des autres institutions du système des Nations Unies. Les Etats-Unis estiment que le Conseil de sécurité devrait explorer les moyens d'assurer une transition souple de l'opération de maintien de la paix vers la construction de la paix après les conflits. Il serait souhaitable que le Secrétaire général formule des recommandations à l'intention des organisations concernées pour assister aux efforts de construction de la paix après le retrait des opérations de maintien de la paix.

M. Burleigh s'est félicité de la création par le Secrétaire général du Comité exécutif sur la paix et la sécurité et du Comité exécutif sur les questions humanitaires pour mieux définir les relations entre les représentants spéciaux du Secrétaire général et les coordonnateurs humanitaires, ainsi que les autres éléments des missions des Nations Unies.

M. QIN HUASUN (Chine) s'est déclaré particulièrement préoccupé par les menaces fréquentes à la sécurité du personnel humanitaire et a demandé à toutes les parties concernées d'assurer leur protection. Pour résoudre les problèmes humanitaires, il faut à fois des mesures palliatives et des mesures visant à éliminer leurs causes profondes. Il faut notamment s'efforcer d'encourager la réconciliation nationale, de renforcer la confiance mutuelle et de soutenir le développement économique.

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- 5 - CS/1015 21 janvier 1999

Les sanctions appliquées à l'Iraq depuis plus de 8 ans ont entraîné des souffrances pour la population iraquienne et ont en outre des conséquences sur les pays voisins. La Chine est contre l'application de sanctions qui entraîne des souffrances pour les populations et estime que lorsque des sanctions sont imposées, il faut veiller à fixer un cadre temporel et limiter leur portée afin d'éviter toute dégradation de la situation humanitaire dans les pays intéressés. Le Conseil doit étudier avec sérieux l'effet humanitaire des sanctions, a insisté M. Qin.

A la suite de guerres prolongées et de catastrophes naturelles, de nombreux pays africains connaissent une situation humanitaire très triste. La communauté internationale apportant une aide considérable en ex-Yougoslavie, il est d'autant plus intolérable que nous accordions moins d'attention aux populations africaines. La Chine espère qu'il sera remédié à cette situation. M. Qin a dénoncé la tendance à politiser les questions humanitaires. Le recours fréquent à la menace de l'emploi de la force ou à l'emploi de la force ne résoud pas les problèmes mais complique au contraire les situations. Dans le domaine humanitaire, il importe d'agir dans le cadre de la Charte et du respect de la souveraineté et de l'intégralité territoriale de tous les pays, a-t-il conclu.

M. FERNANDO ENRIQUE PETRELLA (Argentine) a estimé qu'il est tout à fait opportun que le Conseil de sécurité examine la question de la promotion de la paix, en particulier l'assistance humanitaire. Des mesures concrètes doivent être prises pour garantir l'efficacité du respect du droit humanitaire international et du droit régissant les conflits. Il n'est pas possible de négocier un règlement politique efficace des conflits si l'on ne peut au préalable faire face à la situation humanitaire. Il est primordial d'inclure dans les opérations de maintien de la paix une stratégie humanitaire. Le Conseil de sécurité a examiné ces derniers jours plusieurs questions qui comportent ces éléments. Il s'agit notamment de la question liée à l'attaque perpétrée contre les avions des Nations Unies. Les personnes qui tentent de mettre en oeuvre les mandats de maintien de la paix ne peuvent être limitées dans l'accomplissement de leur tâche. Le représentant a souhaité que la Convention sur la protection du personnel des Nations Unies et du personnel associé, entrée en vigueur il y a deux jours, doit être mettre en oeuvre de manière efficace. Il est regrettable de reconnaître qu'au cours des derniers mois, il y a eu une série de violations flagrantes du droit humanitaire. Des actes de violence ont été perpétrés contre la population civile et contre le personnel humanitaire engagé à venir en aide à une population en détresse. Comme le signalait le Secrétaire général, il faudrait établir un lien entre l'indice Dow Jones et l'indice humain. La paix ne pourrait être durable si l'on ne peut prendre de mesures efficaces sur le plan humanitaire.

( suivre)

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M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Bahreïn) a rappelé que l'assistance humanitaire fait partie intégrante des activités menées avant et après les conflits. Elle fait entrer en jeu certains éléments tragiques, a-t-il dit, évoquant la réunion du Conseil, le mois dernier, sur la protection du personnel humanitaire. L'assistance humanitaire ne saurait parvenir à ceux qui en ont en besoin si nous ne faisons pas en sorte de pouvoir assurer la sécurité de ceux qui acheminent cette aide. Il devient de plus en plus nécessaire de protéger le personnel humanitaire, les statistiques à cet égard étant particulièrement inquiétantes. M. Buallay a rappelé que, depuis 1992, 139 membres du personnel civil de l'ONU ont été tués et 143 ont été pris en otage. Entre 1996 et 1997, la Croix-Rouge a perdu, à elle seule, 23 employés dans la région des Grands Lacs, a-t-il dit, mentionnant également les deux avions abattus en Angola. Ces chiffres augmentent chaque année. C'est pourquoi il est urgent de réfléchir à la manière d'assurer la protection du personnel humanitaire. Alors que les situations humanitaires se multiplient, rien n'est fait pour assurer la sécurité du personnel humanitaire.

M. Buallay a demandé à M. de Mello quelles sont les mesures concrètes envisagées ou mises en oeuvre par le Secrétariat en matière de protection du personnel humanitaire. Il a aussi demandé quels étaient les nouveaux obstacles qui se présentent et empêchent l'acheminement de l'aide humanitaire vers ceux qui en ont besoin, ainsi que des précisions sur l'état des contributions volontaires par rapport aux besoins réels.

M. SERGEI LAVROV (Fédération de Russie) a estimé que l'on exige aujourd'hui que le Conseil de sécurité appuie activement l'action humanitaire, pour garantir et protéger le rôle des institutions humanitaires. En coordonnant les activités des organisations humanitaires et celles des opérations de maintien de la paix, il faut assurer une bonne répartition des tâches entre les représentants spéciaux du Secrétaire général et les coordonnateurs de l'action humanitaire. Les consultations qui se multiplient entre le Conseil de sécurité et les institutions humanitaires doivent permettre de développer une coordination dès la première phase d'une opération de maintien de la paix. Il ne faudrait pas prendre à la légère les conséquences humanitaires des sanctions imposées par le Conseil de sécurité car cela risque d'aggraver le conflit. L'action humanitaire ne peut être utilisée comme un moyen de pression sur l'une au l'autre partie au conflit. Le Conseil de sécurité est tenu de respecter toute impartialité. A cet égard, M. Lavrov a estimé qu'il est essentiel de respecter l'intégrité territoriale et la souveraineté nationale de l'Iraq en assurant une action humanitaire. Il a rappelé que la résolution pertinente du Conseil de sécurité invoquée pour les zones d'exclusion aériennes n'a pas été adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et n'envisage pas de manière expresse ces zones. Promouvoir une théorie selon laquelle l'action humanitaire peut ouvrir la voie à des actes unilatéraux de la part d'un Etat Membre est fondamentalement contraire au droit international et en particulier à la Charte des Nations Unies. On ne peut au nom de l'action humanitaire violer la souveraineté nationale d'un Etat.

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M. ARNOLD PERTER VAN WALSUM (Pays-Bas) a estimé que le nombre croissant d'attaques contre le personnel humanitaire remet en cause toute l'idée même de l'aide humanitaire. La nature des conflits armés n'a pas fondamentalement changé. Ce qui a changé c'est le nombre de conflits internes de moyenne et de faible intensité et l'effet de ces conflits sur l'opinion publique à l'étranger, informée par les moyens de communications modernes, et qui fait pression sur les décideurs pour qu'ils agissent. La tragédie du Rwanda a montré que l'action humanitaire ne peut remplacer les solutions politiques qui s'imposent pour empêcher la violence latente. Il faut agir sur divers plans. Certains progrès ont été faits pour développer une approche globale de ces situations, mais il faut en faire davantage pour développer une approche plus coordonnée. A cette fin, M. Van Walsum a préconisé une prise de décision cohérente au sein du Conseil; le renforcement du travail des représentants spéciaux du Secrétaire général en facilitant les échanges avec les autres Envoyés spéciaux, notamment ceux de l'Union européenne et des Etats-Unis; une approche cohérente de toutes les institutions de l'ONU, par l'établissement de cadres stratégiques; le perfectionnement des sanctions afin qu'elles aient un impact minime sur les civils et maximal sur les personnes visées; des actions militaires plus précises qui n'entraînent pas de dommages aux populations civiles; et une meilleure utilisation des instruments du droit humanitaire international, telle la Convention de Genève.

M. Van Walsum a estimé que le centenaire de la première Conférence internationale pour la paix, qui s'est tenue à La Haye, offrait une excellente occasion de réfléchir aux questions à l'ordre du jour. Il a précisé que la Cour permanente d'arbitrage de La Haye célèbre également son centenaire cette année. A cette occasion, des séminaires et des événements seront organisés, auxquels participera le Secrétaire général. Soulignant la nécessité de combler les lacunes du droit, M. Van Walsum a indiqué que des experts se penchaient actuellement sur ces questions en vue de discussions qui se tiendront à La Haye et à Saint-Pétersbourg sur ce thème.

M. ROBERT FOWLER (Canada) a estimé que la situation en Sierra Leone illustre la nécessité pour le Conseil de considérer les menaces à la sécurité dans un contexte plus large - au delà de ce que les Etats se font ou menacent de se faire mutuellement - et dans le contexte des menaces de tout ordre aux individus pris dans les conflits armés. Le banditisme, la violence extrême à l'encontre de civils innocents, le recours à des mercenaires, l'enrôlement d'enfants-soldats, tels sont les défis auxquels la communauté internationale doit faire face en Sierra Leone. Il est triste que le Conseil commence seulement à définir des réponses appropriées. Il est clair que le cadre juridique dont dispose la communauté internationale pour assurer la protection des civils dans les situations de conflits n'est pas utilisé et que les violations sont souvent commises en toute impunité. La création de la Cour pénale internationale et des tribunaux pour le Rwanda et l'ex-Yougoslavie constitue des exemples concrets de la manière dont ces lacunes peuvent être comblées. Mais il reste encore beaucoup à faire. Dans ce cadre, M. Fowler s'est déclaré extrêmement préoccupé par le fait que Mme Louise Arbour n'ait pu s'acquitter de ses responsabilités au Kosovo.

( suivre)

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De l'avis de M. Fowler, on n'a pas examiné de façon adéquate la manière dont les forces de maintien de la paix peuvent être utilisées pour assurer la protection physique des civils. On a, en outre, accordé davantage d'attention à l'acheminement de l'aide humanitaire qu'à la sécurité des populations affectées par la guerre, ou à la manière de réduire les menaces à l'égard du personnel humanitaire et des personnes oeuvrant en faveur de la paix. Le Conseil a commencé à aborder ces questions, mais il reste encore beaucoup à faire. Le Conseil devrait bâtir sur les efforts déjà déployés et concentrer son attention sur la protection des civils dans les conflits armés. En abordant ce problème de manière globale, il commencera à s'acquitter de ses responsabilités en matière de réduction de la vulnérabilité des civils là où la paix et la sécurité internationales sont en péril.

M. MARTIN ANDJABA (Namibie) a jugé impératif de consacrer des efforts à l'élimination des conditions qui provoquent les violations des droits de l'homme. La Namibie est particulièrement préoccupée par les rapports selon lesquels les enfants sont explicitement pris pour cible par les factions belligérantes et appelle instamment ceux qui agissent ainsi à s'abstenir de telles pratiques. La Namibie déplore également l'augmentation de la violence à l'encontre du personnel humanitaire et est préoccupée par le fait que ce personnel se voit régulièrement refuser l'accès à ceux qui sont dans le besoin. Ce non-respect évident du droit international humanitaire ne peut plus être toléré, a déclaré M. Andjaba. Le débat récent du Conseil de sécurité sur la sécurité du personnel humanitaire constitue un pas dans la bonne direction et il faut le poursuivre en pensant à l'adoption de mesures acceptables par toutes les parties concernées. M. Andjaba a toutefois insisté sur la nécessité de maintenir les délibérations du Conseil sur les activités humanitaires dans leur propre contexte. Le rôle technique de coordination des activités humanitaires doit demeurer du ressort du Conseil économique et social.

Il est temps que la communauté internationale passe à l'action concrète et s'assure que les mesures nécessaires sont prises pour protéger ceux qui fournissent l'aide et l'assistance, a-t-il poursuivi. Il faut mettre nos efforts en commun pour assurer que des instruments soient mis en place pour punir ceux qui violent les lois humanitaires au nom de la guerre. A cette fin, les Etats Membres doivent s'assurer que des enquêtes sont menées sur les attaques commises contre le personnel humanitaire et que leurs auteurs sont poursuivis en justice. La Namibie soutiendra, pour sa part, des mesures sérieuses visant à améliorer les conditions d'octroi de l'assistance humanitaire.

M. DANILO TURK (Slovénie) a estimé que l'on ne doit pas avoir peur de rêver si la réalisation de ces rêves n'est pas impossible. Il faudrait insister sur le respect du droit international. L'ensemble des instruments de droit international existant est extraordinaire mais il est essentiel de les mettre en oeuvre. Le Conseil de sécurité doit faire preuve de cohérence et de persistance.

( suivre)

- 9 - CS/1015 21 janvier 1999

Il doit avoir conscience de la non-applicabilité de l'extinction des crimes de guerre car c'est la seule manière par laquelle la lutte contre les violations graves du droit international peut être efficace. Les conflits modernes ont des conséquences humanitaires considérables, notamment en Angola. Le représentant a émis l'espoir que la situation en Sierra Leone permettra d'assurer la réhabilitation des enfants engagés dans le conflit. L'action humanitaire n'est qu'un palliatif et ne peut résoudre à elle seule les conflits. Cela n'en réduit pas pour autant son importance. Le Conseil de sécurité devrait plus souvent examiner l'aspect humanitaire dans le cadre de la prévention d'un conflit. Les principes de la souveraineté nationale et de l'intégrité territoriale d'un Etat sont fondamentaux mais pas absolus. L'action humanitaire doit être rapide et permettre dans certains cas de recourir à la force pour en assurer la mise en oeuvre efficace. On ne doit pas avoir peur de l'apparent impossible pour réussir l'action humanitaire.

M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a appuyé le rôle de M. Vieira de Mello en tant que coordonnateur des secours d'urgence. Les violations flagrantes du droit humanitaire et des droits de l'homme qui se poursuivent dans le monde perpétuent le cycle de la violence. S'agissant de l'état du corps du droit international, il s'est demandé si le problème était son application ou l'existence de lacunes. A t-on besoin de nouveaux instruments pour l'appliquer ? a-t-il demandé, estimant que l'établissement de la Cour pénale internationale constitue certes un pas important mais pas suffisant. De l'avis de M. Greenstock, le Conseil doit s'assurer que les opérations sur le terrain soutiennent également le renforcement des capacités locales. La réhabilitation économique et la réintégration des anciens combattants constituent souvent des éléments clés en ce qui concerne le maintien de la paix après les conflits. Il importe d'examiner comment on peut renforcer la société civile et assurer la protection des droits des hommes, des femmes et des enfants. Pour M. Greenstock, on semble avoir été anesthésié par une suite d'événements horribles, telle la situation au Kosovo ou en Sierra Leone. Comment pouvons-nous assurer le respect des normes humanitaires et le respect de la souveraineté des Etats, notamment lorsque des pays sont dirigés par des régimes d'assassins, des gouvernements qui ont utilisé des armes chimiques contre leur peuple, a-t-il demandé, estimant que ce domaine mérite une analyse plus approfondie.

Le représentant a demandé à M. Vieira de Mello des précisions sur les moyens d'améliorer la coordination des diverses activités dans les situations humanitaires. Rappelant la résolution relative au maintien du caractère civil et humanitaire des camps de réfugiés, il a demandé comment l'on pouvait mieux assurer la protection de ces camps. S'agissant de la sécurité physique du personnel humanitaire, il a interrogé M. Vieira de Mello sur l'état d'avancement des réflexions sur ce thème au sein de son bureau et sur les conclusions déjà tirées. Il est important que le conseil trouve des réponses aux questions soulevées au cours de ce débat et prenne des mesures.

( suivre)

- 10 - CS/1015 21 janvier 1999

M. BABOUCCAR-BLIASE JAGNE (Gambie) a déclaré que le rapport du Secrétaire général sur l'Afrique a de nouveau attiré l'attention sur la situation dans le monde. Lorsque les guerres se déroulent dans les villes et les villages, les enfants en sont souvent la cible. Pour faire face aux situations humanitaires, de nombreux instruments juridiques internationaux ont été élaborés, dont certains sont déjà entrés en vigueur. Il faudrait redoubler d'efforts pour faire face à la question de l'impunité. Avec la création de la Cour pénale internationale, la communauté internationale devrait être en mesure d'agir de manière efficace. Si l'action humanitaire est bien coordonnée cela fera une grande différence dans la vie des populations.

M. AGAM HASMY (Malaisie) a déclaré que les attaques contre le personnel humanitaire devaient être systématiquement condamnées chaque fois et où qu'elles se produisent et que leurs auteurs devaient être tenus pour responsables. Il faut reconnaître le travail remarquable accompli par ce personnel dans des situations souvent difficiles et dangereuses. S'agissant du respect du droit international humanitaire, M. Hasmy a appelé les Etats Membres à réaffirmer les normes existantes afin d'assurer la protection des réfugiés et l'acheminement de l'assistance humanitaire à toutes les personnes touchées par les conflits. Il est également important de mettre fin à la culture de l'impunité et de traduire en justice les auteurs de violations du droit humanitaire international. Ceux-ci doivent être traduits devant les tribunaux nationaux, mais, lorsque cela est pertinent, devant les tribunaux internationaux. Les belligérants devraient être tenus responsables vis-à-vis de leurs victimes, a-t-il estimé.

M. Hasmy a souhaité que les suggestions avancées par M. Vieira de Mello soient examinées rapidement par le Conseil. Il a également souligné la nécessité d'examiner la dimension humanitaire des sanctions imposées par le Conseil. Cette question est pertinente dans toute discussion sur la dimension humanitaire des conflits, a-t-il dit.

M. ALAIN DEJAMMET (France) s'est félicité de l'excellente présentation par M. Vieira de Mello. Il est regrettable que la population civile représente une forte proportion les victimes des conflits modernes. Le relèvement de l'âge de l'engagement des enfants dans les forces armées est essentiel et il constitue un droit fondamental. La protection des personnes réfugiées et déplacées, la séparation des combattants et des victimes dans les camps de réfugiés, la protection des hôpitaux et du personnel humanitaire sont des objectifs essentiels. M. Dejammet a rappelé que 1999 marque l'anniversaire d'une série d'instruments juridiques internationaux dans le domaine humanitaire. Il a souligné que c'est à la communauté internationale de réagir contre ces situations. Les tribunaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda, et plus récemment l'adoption du Statut d'une Cour pénale internationale constituent une étape importante dans cette voie. Au sein du Conseil, on sait déjà qu'il faut s'efforcer de préserver la neutralité de l'action humanitaire.

( suivre)

- 11 - CS/1015 21 janvier 1999

Il incombe au Conseil de sécurité de répondre à la menace à la paix et à la sécurité internationales que pose les déplacements massifs de personnes dans les régions en conflits. Toutefois, le Conseil de sécurité ne peut se décharger complètement de cette tâche pour la confier aux seules institutions humanitaires. Par ailleurs, il faut se demander quelles sont les limites sur le plan local à l'accès de l'assistance humanitaire. Il s'agit là d'une question d'éthique. Du fait que la population civile est la principale victime, il convient de rappeler les principes du droit humanitaire et d'envisager les moyens efficaces de les faire appliquer.

M. DENIS DANGUE REWAKA (Gabon) a plaidé en faveur d'une meilleure coordination et d'une meilleure distribution de l'aide humanitaire aux populations nécessiteuses. Il déploré qu'en dépit de tous les efforts visant à régler les conflits par des moyens pacifiques, le bilan des souffrances humaines et des destructions matérielles causées par les guerres ne cesse de s'alourdir. L'ONU et la communauté internationale disposent d'un ensemble de règles et d'instruments importants visant à protéger les populations civiles et le personnel humanitaire dans les zones de conflits armés.

L'an dernier, lors de l'examen du rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits en Afrique, une série de dispositions ont été adoptées par le Conseil, notamment en ce qui concerne la protection du caractère civil et humanitaire des camps de réfugiés, a poursuivi M. Dangue Rewaka. Il a estimé que le Conseil devait envisager d'autres mesures plus concrètes qui permettraient de renforcer la protection du personnel humanitaire et des civils, dans le respect de la Charte. Il a appuyé les mesures proposées par M. Vieira de Mello et estimé qu'elles devaient pouvoir trouver une réponse satisfaisante au Conseil.

M. CELSO AMORIM (Brésil) a fait remarquer que ce que l'on attend des Nations Unies dans le domaine humanitaire, c'est l'adoption d'une stratégie politique. Très souvent, il existe des analyses qui notent des changements dans les conflits. Les conflits internes ne sont pas plus violents aujourd'hui que dans le passé, notamment en Amérique latine et au Nigéria dans les années 60. Avec la fin de la guerre froide, les conflits internes se poursuivent plus longtemps. Le Conseil de sécurité intervient souvent en dernier recours pour mettre fin aux violences commises dans le cadre de ces conflits internes. Les organisations humanitaires elles-mêmes craignent que le recours à la force pour faciliter l'accès à l'assistance humanitaire puisse mettre en jeu l'impartialité et la neutralité de leur action. Conformément à l'Article 51 de la Charte des Nations Unies, l'approbation du Conseil de sécurité est essentielle pour le recours à la force. Pour que le Conseil de sécurité puisse préserver son autorité, il faudrait éviter que cette autorité ne soit sapée par des actions unilatérales prises en dehors du Conseil de sécurité. Le Brésil espère qu'il sera possible d'adopter dans un proche avenir des recommandations dans ce sens.

( suivre)

- 12 - CS/1015 21 janvier 1999

M. BURLEIGH (Etats-Unis) a déploré le bon et le mauvais usage qui est fait de la notion de souveraineté et a suggéré la tenue d'une discussion sur cette question au sein du Conseil. Il existe des circonstances, comme la crise humanitaire au Kosovo ou la répression de la population civile en Iraq, où la communauté internationale doit être disposée à agir pour protéger les civils contre leur gouvernement. L'argument de la souveraineté est utilisé comme une excuse par des gouvernements répressifs et meurtriers qui violent les droits de leur peuple, ce qui provoque l'incapacité d'agir de la communauté internationale.

Répondant aux observations formulées par les délégations, M. VIEIRA DE MELLO a déclaré que dans le domaine humanitaire, l'accent doit être placé sur la prévention. La réduction des courants d'armes est essentielle et elle constitue une préoccupation des organisations internationales. Il a souligné que la coopération et le consentement des parties sont également essentiels. Concernant les obstacles à l'action humanitaire, M. Vieira de Mello a mentionné notamment le problème des ressources financières. Il a espéré que les contributions des Etats Membres seront versées, conformément au calendrier établi. Il a indiqué qu'une stratégie pour appuyer le développement de la société civile en Afghanistan a été mise en place. Il a souligné qu'il faudrait élargir la coopération et la coordination pour inclure d'autres protagonistes. En Sierra Leone l'action doit être immédiate. Il a rappelé que les forces multilatérales constituent une variante des opérations de maintien de la paix, mais qu'elles n'ont pas toujours vu le jour, en particulier dans l'est du Zaïre. Par ailleurs, différentes catégories de réfugiés et de personnes déplacées, qui n'ont rien à voir avec des criminels réfugiés dans les camps ou avec les membres des Forces armées rwandaises, doivent bénéficier de l'assistance humanitaire. Les instruments juridiques existants doivent être perfectionnés. Il est crucial de garantir le respect du droit. La Conférence de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge qui se tiendra à Genève en novembre 1999, examinera cette question. Le Conseil de sécurité peut compter sur le Département des affaires humanitaires, dans le cadre de son rôle de coordination, pour faire l'impossible et empêcher le mal de vaincre.

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( suivre)

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