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AG/SHC/331

LA COMMISSION ENTEND LES RAPPORTEURS SPECIAUX SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU MYANMAR, EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO, EN AFGHANISTAN ET EN HAITI

12 novembre 1997


Communiqué de Presse
AG/SHC/331


LA COMMISSION ENTEND LES RAPPORTEURS SPECIAUX SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU MYANMAR, EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO, EN AFGHANISTAN ET EN HAITI

19971112 Elle entend également le Rapporteur spécial sur l'élimination de l'intolérance religieuse et le Représentant spécial sur les personnes déplacées

La Commission des questions sociales, humanitaires et culturelles (Troisième Commission) a poursuivi ce matin l'examen des questions relatives aux droits de l'homme. Elle a entendu, ce faisant, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, M. Rajsoomer Lallah; le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans la République démocratique du Congo (ex-Zaïre), M. Roberto Garreton; et l'Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, M. Adama Dieng. La Commission a également entendu le Rapporteur spécial sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse, M. Abdel Fattah Amor; et le Représentant spécial du Secrétaire général sur les personnes déplacées, M. Francis Deng. Le Rapport sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan, établi par M. Choong-Hyun Paik, a été présenté par le représentant du Haut Commissaire aux droits de l'homme.

Les représentants du Myanmar, de la République démocratique du Congo, de l'Afghanistan, du Venezuela, d'Haïti, du Koweït et des Emirats arabes unis ont commenté les observations des Rapporteurs spéciaux. Le représentant de la Grèce a présenté une motion d'ordre pour rappeler la décision de l'Assembléé générale de remplacer le nom de "Macédoine" par "ex-République yougoslave de Macédoine".

La Commission se réunira de nouveau demain, jeudi 13 novembre, à 10 heures pour entendre la présentation des rapports concernant la situation des droits de l'homme en République de Bosnie-Herzégovine, en République de Croatie et en République fédérative de Yougoslavie (Serbie et Monténégro), au Soudan, à Cuba, au Cambodge et au Rwanda. Elle devrait en outre poursuivre son débat sur toutes les questions relatives aux droits de l'homme.

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Documentation

Les rapports suivants sont transmis à l'Assemblée générale par une note du Secrétaire général :

Situation des droits de l'homme au Myanmar (A/52/484)

Ce rapport a été établi par M. Rajsomer Lallah, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial souligne d'emblée qu'il n'a toujours pas été autorisé à se rendre au Myanmar malgré les demandes formulées par l'Assemblée générale et la Commission des droits de l'homme. En dépit du manque de coopération de la part du gouvernement de ce pays, il a obtenu dans le cadre de ses missions et de ses consultations une assistance auprès des sources gouvernementales, intergouvernementales et non gouvernementales. Il a en outre reçu un certain nombre de rapports touchant les questions auxquelles l'Assemblée et la Commission aurait exprimé des préoccupations. Le Rapporteur s'est lui-même rendu en Thaïlande afin d'évaluer la situation des personnes déplacées originaires du Myanmar.

D'après les informations reçues et analysées, le Rapporteur fait une série de recommandations. Il suggère que toutes les mesures nécessaires soient prises pour accélérer le processus de transition vers la démocratie et pour y faire participer effectivement les représentants élus de manière régulière en 1990. Le gouvernement doit entamer un dialogue avec les responsables de la Ligue nationale pour la démocratie et avec d'autres dirigeants politiques. Les mesures que le SLORC, parti au pouvoir, aurait prises en juillet pour intensifier le dialogue doivent être intensifiées. Tous les prisonniers politiques doivent être traduits en justice et jugés par un tribunal civil indépendant dans le cadre d'un procès ouvert. Il faut rétablir la constitutionnalité des lois et la primauté du droit et les décrets et ordonnances du SLORC ne doivent plus constituer la base du droit.

En ce qui concerne la jouissance des libertés fondamentales, le Rapporteur recommande notamment au Gouvernement de dépénaliser l'expression d'avis divergents et abandonner les contrôles de l'Etat sur les médias et les oeuvres littéraires et artistiques. Pour ce qui est des règles du travail, le gouvernement doit veiller à garantir le fonctionnement de syndicats libres et est prié de s'acquitter de ses obligations en vertu de la Convention n.29 de l'OIT interdisant la pratique du portage forcé et du travail forcé. Le Rapporteur recommande, par ailleurs, qu'il prenne sur le champ des mesures pour mettre fin aux déplacements forcés de populations et créer les conditions nécessaires pour empêcher l'exode de réfugiés vers les pays voisins. En outre, les lois sur la nationalité devraient être remaniées de façon à être exemptes de tout aspect discriminatoire fondé sur la religion, l'origine ethnique, l'inégalité ou de toute entrave à l'exercice du droit des enfants à avoir une nationalité. Le Rapporteur spécial recommande que tous les membres de l'armée et des forces de l'ordre soient informés et formés quant à leurs

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responsabilités, en plein accord avec les normes fixées dans le droit international humanitaire et les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le gouvernement doit mettre fin aux pratiques d'immunité qui règne actuellement dans les secteurs militaire et celui des fonctionnaires publics.

Elimination de toutes les formes d'intolérance religieuse (A/52/477)

Ce rapport a été établi par M. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme. Le poste de Rapporteur spécial sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance religieuse a été créé en 1986. Le Rapporteur spécial est chargé d'examiner les incidents et les mesures gouvernementales dans toutes les parties du monde incompatibles avec les dispositions de la Déclaration sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, et de recommander les mesures à prendre pour remédier aux situations ainsi créées. Au cours de la période considérée, le Rapporteur spécial a porté son analyse sur les visites in situ et leur suivi, l'élaboration d'une culture de la tolérance ainsi qu'un bilan des communications reçues.

Depuis 1994, le Rapporteur spécial a effectué des missions en Chine, au Pakistan, en Iran, en Grèce, au Soudan, en Inde, en Australie et en Allemagne. Des demandes de visites adressées à la Turquie et au Viet Nam en 1995 et à l'Indonésie et à Maurice en 1996 n'ont toujours pas abouti. Une demande de visite a également été adressée en 1997 à Israël, mais aucune réponse n'est parvenue à ce jour. Concernant les visites à venir, le Rapporteur spécial devrait se rendre aux Etats-Unis. En parallèle de ces visites, le Rapporteur spécial a souhaité engager une procédure de suivi. A cet effet, des courriers ont été adressés en 1996 aux Missions permanentes de la Chine, l'Iran et le Pakistan auprès de l'ONU à Genève, et en 1997 à celles de Grèce, de l'Inde et du Soudan, afin de recueillir leurs commentaires ainsi que toutes informations sur les mesures entreprises ou envisagées afin de mettre en oeuvre les recommandations formulées par le Rapporteur spécial. Celui-ci remercie les Etats concernés pour leur accueil favorable à la procédure de suivi.

Le Rapporteur spécial a décidé, en outre, d'entreprendre une enquête en 1994 par le biais d'un questionnaire aux Etats, sur les problèmes relatifs à la liberté de religion et de conviction vus à travers les programmes et manuels des institutions d'enseignement primaire ou de base et secondaires. Les résultats d'une telle enquête pourraient permettre d'élaborer une stratégie internationale scolaire de lutte contre toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion et la conviction, stratégie qui pourrait être axée autour de la détermination et la réalisation d'un programme minimum commun de tolérance et de non-discrimination. Dans ce cadre, le Rapporteur spécial a obtenu des réponses de 79 Etats. Il déplore cependant l'absence de moyens financiers et humains mis à sa disposition et

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insiste afin que le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme fasse preuve d'une réelle volonté afin qu'un minimum de moyens soient mis à sa disposition de sorte que les nombreuses informations reçues des Etats soient enfin, après leur exploitation en cours, analysées et mises au service des objectifs poursuivis.

Le Rapporteur spécial a, par ailleurs, adressé des communications à 48 Etats. Parmi ces communications, des appels urgents ont été adressés à la Chine et aux Emirats arabes unis. Concernant l'analyse des communications, le Rapporteur spécial établit une classification très générale des communautés faisant l'objet d'allégations d'atteintes à la liberté religieuse. Dans l'analyse des communications par thème, le Rapporteur spécial retient six catégories : atteintes aux principes de non-discrimination dans le domaine de la religion et de la conviction; atteintes au principe de tolérance dans le domaine de la religion et de la conviction; atteintes à la liberté de pensée, de conscience et de religion ou de conviction; atteintes à la liberté de manifester sa religion ou sa conviction; atteintes à la liberté de disposer de biens religieux; atteintes au droit à la vie, à l'intégrité physique et à la santé des personnes (religieux ou croyants).

Dans ses conclusions et recommandations, le Rapporteur spécial souligne l'importance d'un dialogue interconfessionnel afin de lutter contre tout extrémisme de quelque religion que ce soit et afin d'assurer la tolérance religieuse aux niveaux tant interne qu'international. La mise en place de bases solides pour la tolérance religieuse doit impliquer, en outre, une action particulière dans le domaine de l'éducation. Il est, en effet, primordial de prévenir ce phénomène par l'élaboration d'une culture de tolérance par le biais d'une stratégie internationale scolaire de lutte contre toutes les formes de discrimination fondées sur la religion ou la conviction. Le Rapporteur spécial attire, par ailleurs, l'attention sur la question des femmes et de la religion. Afin de disposer davantage d'informations et en particulier de sources d'informations sur la question, et notamment des femmes victimes de l'intolérance et de la discrimination fondées sur la religion et la conviction et de contribuer à la promotion des droits de la femme, le Rapporteur spécial entend porter, à l'avenir, une attention particulière à la condition de la femme au regard de la religion et espère bénéficier, à cet égard, de la coopération des Etats et des ONG. Le Rapporteur spécial estime, en outre, que le renforcement des ressources assignées au mandat, tant humaines, financières que technologiques, est primordial pour la crédibilité de ses activités et pour les droits de l'homme. Il souligne encore que les initiatives tant des Etats et d'organisations interétatiques que d'ONG apportent une contribution utile au mandat sur la liberté religieuse.

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Situation des droits de l'homme dans la République du Zaïre (actuellement République démocratique du Congo) (A/52/496)

Ce rapport a été établi par le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme chargé d'enquêter sur la question. Le Rapporteur spécial indique qu'il ne traitera pas des violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire qui relèvent du mandat de la mission conjointe chargée d'enquêter sur les massacres commis dans l'est du Zaïre. Il indique également qu'il n'a pas pu se rendre en République démocratique du Congo, ce qui lui aurait permis de se faire une image plus exacte de la réalité et, surtout, de s'entretenir des questions abordées dans le présent rapport avec les autorités gouvernementales. Le Rapporteur spécial reste préoccupé par le climat de crainte qui entoure la communication de renseignements, même à l'étranger, ce qui n'avait pas été le cas entre 1994 et 1996.

Le Rapporteur précise que les autorités de l'AFDL lorsqu'elles étaient des forces rebelles ont décliné toute forme de coopération avec lui à la suite de la publication de l'un de ses rapports sous prétexte qu'il manquait d'objectivité et contenait des informations fallacieuses. Par la suite, après avoir pris le pouvoir, les autorités de l'AFDL ont ajouté que le Rapporteur spécial était persona non grata et qu'il ne foulerait plus jamais le territoire congolais. Le refus de collaborer avec le Rapporteur spécial s'est traduit par une absence totale de réponse aux communications et requêtes pressantes adressées au Gouvernement.

Analysant la mise en place d'un nouveau régime et le pouvoir dans les territoires dits libérés, le Rapporteur spécial note que lors de leur avancée, les rebelles ont fait savoir qu'après la libération, ce seraient l'Alliance et les "véritables opposants", à savoir ceux qui s'étaient ralliés à elle, qui gouverneraient. Les dirigeants locaux qui avaient été à la tête du mouvement de résistance pacifique contre le régime de Mobutu en pleine débandade ont été systématiquement écartés. Après la chute des villes, les responsables politiques et militaires ont été remplacés mais, de manière générale, les fonctionnaires subalternes sont restés en poste. On leur a toutefois demandé de suivre des cours d'endoctrinement politique puis de devenir membres des comités de défense de la révolution, ou Tshembe-Tshembe. Au Kivu et dans les zones frontalières avec le Rwanda, le remplacement des chefs traditionnels par des Batutsis, a provoqué l'indignation des ethnies dites autochtones. Certains chefs traditionnels ont été remplacés dans des conditions humiliantes. Certains responsables d'organisations de base étaient élus, processus démocratique discutable, à main levée, en présence des dirigeants politiques. Certaines puissances étrangères ont, de fait, reconnu le nouveau gouvernement avant son triomphe final : le 17 avril, les forces rebelles ont, agissant en tant qu'Etat souverain, signé des contrats pour l'exploitation du cuivre, du zinc et du cobalt avec des entreprises privées des Etats-Unis.

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Le Rapporteur spécial rappelle que le jour de la prise de Kinshasa, M. Kabila a annoncé à Lubumbashi qu'il accédait à la présidence de la République, conformément à la constitution de l'Alliance d'octobre 1996. Cet acte a servi de texte constitutionnel jusqu'au 28 mai, date à laquelle a été promulguée le décret-loi No. 3 de 1997 qui est entré en vigueur le jour même. Les accords issus de la Conférence nationale souveraine (CNS) et l'Acte constitutionnel de la transition en date du 9 avril 1994 ont été ignorés. Le Rapporteur estime que le texte constitutionnel a toutes les caractéristiques de l'autoritarisme : l'organisation et l'exercice du pouvoir dépendent du chef de l'Etat.

Le texte dispose que les institutions de la République sont le Président, le Gouvernement et les cours et tribunaux. Le Président de la République est le chef de l'Etat, mais rien ne précise la façon dont il est élu, ni par qui, ni pour combien de temps. Le pouvoir législatif revient au chef de l'Etat qui l'exerce par le biais de décrets-lois examinés en conseil des ministres; les ministres sont nommés et révoqués par le chef de l'Etat lui-même et sont responsables devant lui. Le fonctionnement de la magistrature rend bien compte de la soumission politique au régime. tous les cas de violations des droits de l'homme mentionnés bénéficient de la plus totale impunité et seuls les opposants sont jugés. Dans la pratique, le pouvoir judiciaire ne fonctionne qu'à Kinshasa et dans les villes de quelque importance, ce qui fait que les trois quarts de la population n'ont pas accès à la justice.

L'armée se compose, outre des soldats de l'AFDL et des ex-Forces armées zaïroises rééduqués, d'anciens gendarmes katangais, et combattants may-may, de mercenaires de pays limitrophes et de militaires des ex-Forces armées zaïroises. La structure militaire de l'armée actuelle se caractérise par prépondérance très nette non seulement des Tutsis, mais surtout des Tutsis nés au Rwanda. La nationalité "transfrontière" tutsie permet à la police et aux forces armées d'agir tant en République démocratique du Congo qu'au Rwanda. Cette façon de procéder garantit l'impunité des violations des droits de l'homme. Des différends ont déjà surgi entre les différents groupes de militaires : l'AFDL et les ex-Forces armées zaïroises; les Rwandais, les Katangais et les personnes originaires du Kasai. En juin, en outre, des différends ont opposé les Batutsis qui reçoivent à titre de soldes 100 dollars E.-U. et les autres qui reçoivent l'équivalent de 20 dollars en nouveaux zaïres. Toutes les nouvelles recrues - 40 000 soldats ont été recrutés récemment - devront suivre des cours d'endoctrinement militaire et idéologique.

L'AFDL est le véritable détenteur du pouvoir dans le pays. Les autres partis peuvent s'associer à lui, mais non agir pour leur propre compte. Les ministres des autres partis détiennent leurs fonctions à titre personnel. Dans la pratique, le Conseil des ministres est présidé, en l'absence de Kabila, par le Secrétaire de l'AFDL, Deogratia Bugera. Les autorités civiles

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prennent des décisions que l'AFDL laisse parfois sans effet. Chaque ministre est assisté par un conseiller de l'AFDL en qui chacun voit l'autorité réelle, ce qui a fait croire à la population que chaque jour l'AFDL ressemble davantage à ce que fut le MPR. Au sein de l'Alliance, les membres de l'ethnie tutsie - entre autres, les banyamulengues - et ceux qui ont vécu durant la dictature en exil, aux Etats-Unis, en Belgique ou en Afrique du Sud (la "diaspora"), occupent le premier rang. L'opposition pacifique à Mobutu n'accepte pas d'être marginalisée. L'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) a protesté dès le début. Le Ministre de l'intérieur a prorogé l'interdiction des partis le 28 août sine die. Le Rapporteur spécial indique également que les congolais voient dans l'ascendance des batutsis - qui furent toujours des étrangers à leurs yeux - une atteinte à l'honneur national. Le Rapporteur spécial rappelle que depuis sa première résolution sur le Zaïre de 1994 la Commission des droits de l'homme (CDH) s'est préoccupé des progrès ou des reculs du processus de transition à un régime démocratique. Selon lui, malheureusement, l'avènement d'une nouvelle équipe dirigeante après la guerre, loin de constituer un progrès, a marqué à cet égard un recul sensible. Le 19 mai, le Secrétaire général de l'AFDL a annoncé qu'une Assemblée constituante serait convoquée dans un délai de 60 jours. Pourtant, dès le 29 mai, la Présidente Kabila tenait un autre langage en présentant un calendrier électoral qui débouche au terme de 24 mois sur les premières élections législatives et présidentielles. Rien de ce qui avait été proposé ne s'est fait.

Outre les conflits qui découlent des séquelles de la guerre et de l'avènement d'un nouveau gouvernement, il existe d'autres foyers de lutte armée, soit en voie d'extinction, soit en cours, soit en préparation. C'est notamment la poursuite de la guerre dans le Nord-Kivu où les guerrilleros formés dans les camps de réfugiés hutus n'ont pas déposé les armes et continuent de se cacher dans le parc Virunga. Les "autochtones", notamment les may-may, ont réagi avec violence et, unis aux interahamwe et aux ex-FAR, ont attaqué les troupes tutsies dans plusieurs localités en juillet et août. Ce sont aussi l'activité du Conseil de la résistance et libération de Kivu formé en Tanzanie par d'anciens hauts dignitaires du régime de Mobutu, dont la majorité appartiennent à l'ethnie bembe; les appels à la résistance de généraux des ex-FAZ; la violence contre les dirigeants de Cabinda dans le Bas- Congo dont les auteurs semblent être des soldats de l'Alliance, mais, curieusement, parlant portugais, ce qui donne à penser qu'il s'agit d'un conflit proprement angolais importé en République démocratique du Congo.

Le Rapporteur présente également la situation des droits de l'homme sous le régime du maréchal Mobutu. Il conclut que les dernières années du règne du maréchal Mobutu ont été marquées par un processus de transition vers une ouverture démocratique à laquelle aspiraient la société civile, les églises et les organisations non gouvernementales mais qui ne souhaitaient pas celui qui a exercé le pouvoir pendant 32 ans et sa cour non plus que la classe politique en général. Le rejet par tous de la dictature et l'espoir que l'AFDL

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appliquerait les accords de la Conférence nationale souveraine, expliquent en grande partie la popularité dont le mouvement rebelle a joui dans beaucoup de secteurs. Malheureusement, le régime a fait table rase des droits à la vie, à la liberté, à l'intégrité physique, etc. Il prévaut une logique des vainqueurs et des vaincus, aggravée par l'idée fort répandue que les étrangers gravitent autour des premiers, ce qui suscite un profond sentiment d'humiliation.

Le Rapporteur spécial estime que l'arrivée de l'Alliance au pouvoir a révélé quelques aspects positifs : fin des exactions et des pillages; une plus grande sécurité dans les villes; la baisse de la criminalité. Le Rapporteur spécial recommande au gouvernement d'entamer au plus tôt le processus de démocratisation.

Situation des droits de l'homme en Afghanistan (A/52/492)

Le rapport rappelle que le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, M. Choong-Hyun Paik, s'est rendu en Afghanistan du 27 juillet au 3 août dernier. Il indique que la situation politique et militaire dans le pays est demeurée extrêmement tendue pendant la période considérée et que les droits de l'homme en ont souffert. La crise humanitaire est chronique et l'économie tributaire de l'aide internationale et le conflit qui continue de faire rage empêche le peuple afghan d'exercer son droit à l'autodétermination et au développement. Le Rapporteur spécial poursuit en soulignant que selon ce que lui ont affirmé des sources compétentes, la politique appliquée par les Taliban dans les zones qu'ils tiennent n'est pas le reflet d'une interprétation correcte de la charia (loi islamique) mais tout au plus un code de conduite en honneur chez certaines tribus et dans certaines zones rurales du pays.

Le Rapporteur spécial recommande vivement d'affecter sur le terrain un spécialiste des droits de l'homme qui aurait pour tâche essentielle de conseiller aussi bien les représentants de la communauté internationale que les acteurs afghans. Il invite les autorités de toutes les régions de l'Afghanistan à veiller au respect des droits fondamentaux et de la dignité du peuple afghan en rappelant que les règles élémentaires de protection des droits de l'homme s'appliquent aux êtres humains et transcendent les croyances religieuses, les systèmes de valeur, les traditions et les coutumes, indifféremment des systèmes politiques. Le Rapporteur invite les autorités partout en Afghanistan à lever les restrictions qui frappent les afghanes et qui font obstacle à l'aide internationale. Il estime qu'il faudrait aussi rétablir immédiatement dans tout le pays l'éducation pour tous sans discrimination aucune et estime qu'il serait avantageux pour les Taliban d'accepter l'offre du Gouvernement norvégien concernant le financement des écoles de garçons et de filles.

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En demandant la demande de reconnaissance internationale du mouvement des Taliban, il juge que les Nations Unies et tous les Etats Membres de l'ONU devraient passer au peigne fin le bilan du mouvement en matière de droits de l'homme. Il précise qu'il faudrait en particulier mûrement réfléchir aux actions d'un groupe prêt à fusiller tout Afghan désireux de quitter la capitale et dont la ligne de conduite revient à effacer plus de la moitié de la population de la carte économique, sociale, culturelle, civile et politique du pays. Il recommande également que le CICR soit autorisé à visiter les prisonniers détenus en Afghanistan, ceux-ci devant être traités conformément aux normes internationales admises et ne devraient servir ni de monnaie d'échange ni de boucliers humains.

Situation des droits de l'homme en Haïti (A/52/499)

Ce rapport a été établi par M. Adama Dieng, Expert indépendant désigné le 31 juillet 1995 par le Secrétaire général. Lors de sa désignation, M. Dieng a été chargé d'apporter une assistance au Gouvernement haïtien dans le domaine des droits de l'homme, d'étudier l'évolution de la situation dans le pays à cet égard et de vérifier qu'Haïti s'acquitterait de ses obligations en la matière. Le rapport a été établi à la suite de la mission que l'Expert indépendant a effectuée en Haïti du 28 août au 5 septembre 1997.

Dans ses conclusions, l'Expert indépendant souligne que la situation des droits de l'homme s'est considérablement améliorée si l'on se réfère aux indicateurs du respect des droits civils et politiques. Bien qu'il y ait encore de la violence "politique" et des cas de violations, ils ne revêtent pas un caractère massif comme par le passé. Quant à la jouissance effective des droits économiques, sociaux et culturels, les obstacles qui se dressent sont énormes mais pas insurmontables. Ils sont la conséquence des dictatures civiles et militaires qui, pendant des décennies, ont abusé du pouvoir politique et économique, estime l'Expert indépendant.

Les acteurs politiques d'aujourd'hui, poursuit-il, ont également leur part de responsabilité du fait de la confrontation dans laquelle ils sont engagés et qui pourrait plonger le pays dans une crise politique sans précédent. Des efforts louables ont été enregistrés pour améliorer le fonctionnement de la police et les conditions dans les prisons, mais il y a encore beaucoup à faire. Toutefois, les progrès enregistrés pourraient être annihilés si une réforme en profondeur n'est pas introduite pour mettre un terme à l'anachronisme du système judiciaire haïtien. La détérioration des conditions politiques et socio-économiques liée à un éventuel retrait de la Mission de transition des Nations Unies en Haïti (MITNUH) et de la Mission civile internationale en Haïti (MICIVIH) pourraient avoir des conséquences tragiques sur l'avenir du pays et de son processus de démocratisation. Quoique la police se professionnalise, elle n'est pas encore à même d'assurer toute seule le maintien de la loi et de l'ordre. Si les Nations Unies

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devaient se retirer fin novembre, il conviendrait de trouver une formule pour une assistance qui pourrait être accordée dans le cadre d'arrangements bilatéraux, notamment avec la France, les Etats-Unis d'Amérique et le Canada.

Pour l'Expert indépendant, le désarmement en Haïti ne peut pas être qualifié de succès. Il voit d'ailleurs un risque réel de voir resurgir, après le départ du dernier soldat de l'ONU, les démons du passé avec leur cortège de malheurs. Il est possible de l'éviter, affirme l'Expert indépendant, à la condition que chacun y mette du sien, à commencer par les Haïtiens eux-mêmes. L'appui de la communauté internationale gagnerait à être plus coordonné pour des raisons d'efficacité, de gains de temps et d'argent. Présentement, l'urgence des urgences devra être la mise en place d'un système judiciaire compétent et efficace, conclut l'Expert indépendant.

Question des personnes déplacées dans leur propre pays (A/51/506)

Le Représentant du Secrétaire général, M. Francis Deng, a pour double mission de sensibiliser l'opinion sur le sort des déplacés et de contribuer à l'élaboration de mesures efficaces à leur profit. Dans le cadre de son mandat, il a axé son activité sur trois domaines : a) l'élaboration d'un cadre normatif visant à donner aux personnes déplacées l'aide et la protection dont elles ont besoin; b) la promotion d'arrangements institutionnels permettant de répondre efficacement aux besoins des déplacés; c) les missions dans les pays afin d'examiner les cas de déplacements internes et faire en sorte qu'ils soient pris en charge grâce au dialogue avec le gouvernement et les autres acteurs concernés. Le présent rapport donne une vue d'ensemble du travail accompli dans ces trois domaines et identifie les principaux problèmes qui restent à résoudre. Il conclu sur l'idée qu'à l'avenir, la communauté internationale aura pour tâche principale de s'assurer que l'amélioration des cadres normatifs et institutionnels visant à offrir aux déplacés la protection et l'assistance dont ils ont besoin se traduira par une amélioration du sort de ces personnes. Il faudra davantage tenir compte, dans les cas de déplacements de population, des particularités de la situation qui est à l'origine du phénomène, pour que les améliorations apportées à l'échelle internationale aux arrangements juridiques et à la politique suivie se traduisent par une action plus efficace sur le terrain. Bien entendu, il faudra assurer une large diffusion aux principes directeurs qui sont actuellement mis au point et encourager une meilleure coordination dans le cadre des arrangements institutionnels, tant au niveau de l'établissement des politiques que sur le terrain, pour que ces principes soient dûment appliqués. Le suivi des situations de déplacements internes de population et la défense de leur cause continueront d'exiger une attention, des compétences et des efforts accrus de la part de toutes les organisations internationales, régionales, gouvernementales et non-gouvernementales.

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Situation des droits de l'homme à Cuba (A/42/479)

Ce rapport, présenté par le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme, M. Carl-Johan Groth, est transmis à l'Assemblée générale par une note du Secrétaire général.

Il est rappelé que le 3 mars 1992 la Commission des droits de l'homme a prorogé d'un an le mandat du Rapporteur spécial chargé de la question. La Commission a demandé au Gouvernement cubain de laisser le Rapporteur spécial accomplir intégralement son mandat, en particulier en lui donnant l'autorisation de se rendre à Cuba. Le Rapporteur spécial a donc prié une fois de plus le Gouvernement cubain de l'autoriser à se rendre dans le pays. Cette requête, de même que les requêtes précédentes formulées depuis sa nomination, est jusqu'à présent restée sans réponse. Devant l'absence de collaboration du Gouvernement, le Rapporteur a continué de fonder son rapport sur des informations reçues de sources non gouvernementales; une grande partie tirent leur origine de Cuba et sont diffusées par des groupes de Cubains exilés aux Etats-Unis, dont le Rapporteur spécial apprécie les efforts de collecte d'informations. Le Rapporteur spécial a rencontré quelques-uns de ces groupes, de même que des personnes parties de Cuba récemment et qui vivaient en exil aux Etats-Unis. Le Rapporteur spécial a également rencontré à Washington des universitaires et des membres du Congrès. Il a également reçu d'abondantes informations d'Amnesty International.

Dans ses conclusions, le Rapporteur spécial affirme qu'il n'a constaté aucun progrès sensible ni aucun changement dans les méthodes répressives employées par les forces de sécurité. Tous ceux dont le comportement s'écarte un tant soit peu de la ligne officielle continuent d'être la cible de mesures de harcèlement incessantes, qui débouchent parfois sur des inculpations et des condamnations à des peines d'emprisonnement. Bien que les peines prononcées actuellement soient plus légères, elles s'appliquent aux mêmes délits qu'auparavant, comme la désobéissance civile ou la propagande ennemie, aucune modification n'ayant été apportée au code pénal à cet effet. Dans la situation actuelle telle qu'il l'a analysée, le Rapporteur spécial n'a rien trouvé qui lui permette de déceler une tendance vers une plus grande tolérance à l'égard de ceux qui n'approuvent pas totalement le système en vigueur.

Le Rapporteur spécial estime d'autre part que le maintien de l'embargo imposé par les Etats-Unis contribue à l'immobilisme du système en vigueur. Les autorités cubaines disposent ainsi d'un bon prétexte pour maintenir leur emprise sur la population et réprimer ou poursuivre à l'aide de différents moyens ceux qui réclament des changements politiques ou une place pour l'individu dans la société. Or, l'embargo contribue dans une large mesure à la grave pénurie de biens de consommation qui sévit à Cuba depuis le début des années 90 et qui crée une situation extrêmement difficile pour la population. Cette situation suscite d'ailleurs une vive inquiétude dans différents secteurs de la société aux Etats-Unis. Des élus au Congrès se sont préoccupés

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des conséquences de l'embargo pour la population. Plusieurs représentants ont présenté un projet de loi intitulé "Loi de 1997 sur le commerce de produits humanitaires destinés à Cuba", dont l'objectif essentiel est d'introduire une dérogation à l'embargo commercial en autorisant l'exportation à Cuba de denrées alimentaires, de médicaments et de matériel médical. Le Rapporteur spécial suit avec intérêt les débats sur ce projet dont les objectifs sont louables. Un appui majoritaire audit projet serait conforme à la tradition humanitaire et à la sensibilité dont a fait preuve le peuple américain en maintes occasions.

Le Rapporteur spécial reste également préoccupé par la situation qui prévaut dans le monde du travail. Dans toute société, l'existence de syndicats indépendants est nécessaire au maintien d'un certain équilibre sur le marché du travail. Les Cubains pouvant se procurer de moins en moins d'articles à très bas prix au moyen du carnet de rationnement, il est devenu vital pour eux de disposer d'argent pour acheter des biens de consommation, et le niveau des salaires a pris une importance beaucoup plus grande que par le passé. D'autres phénomènes apparus ces dernières années, comme le chômage ou les conditions d'emploi dans les entreprises étrangères, rendent plus nécessaire encore la création de syndicats indépendants. Par ailleurs, le travail indépendant, qui reste vital pour un grand nombre de Cubains, continue d'être régi par des critères d'ordre idéologique. La Direction municipale du travail et de la sécurité sociale gère les demandes ayant trait à ce type d'activité et doit obtenir l'approbation du Président du Conseil populaire de la circonscription dans laquelle réside le postulant quant à la faisabilité du travail indépendant. Celle-ci est évaluée en fonction notamment des caractéristiques socioprofessionnelles du postulant. Selon l'interprétation donnée par les autorités cubaines, ce dernier critère sert à évaluer l'"intégration révolutionnaire" du postulant, c'est-à-dire le fait qu'il appui ou non les politiques gouvernementales et qu'il est ou non membre d'organisations politiques ou de masse.

Le Rapporteur spécial formule une série de recommandations. Il recommande notamment au Gouvernement cubain de : prendre sans tarder les dispositions nécessaires pour remettre en liberté sans conditions toutes les personnes qui purgent actuellement une peine de prison pour atteinte à la sûreté de l'Etat ou autre infraction du même ordre, ou pour avoir essayé de quitter le pays clandestinement; légaliser les associations indépendantes, en particulier les groupements politiques, les associations syndicales et professionnelles et les organisations de défense des droits de l'homme; ratifier les principaux instruments protégeant les droits de l'homme, auxquels Cuba n'est toujours pas partie, en particulier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, y compris ses Protocoles facultatifs; supprimer de la législation toutes les dispositions qui établissent une discrimination pour motif politique, en particulier dans l'emploi et dans le domaine de l'enseignement; supprimer les dispositions légales qui restreignent l'entrée ou la sortie du territoire national; réviser les règles de procédure

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afin d'instituer dans l'administration de la justice les garanties légales requises, entre autres, l'indépendance du pouvoir judiciaire.

Le Rapporteur spécial consacre un chapitre de son rapport aux observations sur certains éléments des droits de l'homme à Cuba faites récemment par des organismes des Nations Unies. Il contient un extrait du rapport de l'American Association for World Health intitulé "Refus de fournir des aliments et des médicaments : impact de l'embargo des Etats-Unis sur la santé et la nutrition à Cuba". Il est indiqué qu'après une enquête d'une année, l'American Association for World Health a déterminé que l'embargo avait été extrêmement préjudiciable à la santé et à la nutrition d'un grand nombre de citoyens cubains ordinaires. Les experts médicaux pensent que l'embargo américain a entraîné une augmentation sensible des privations, et même des décès à Cuba.

Déclarations des Rapporteurs et Représentants spéciaux

M. RAJSOOMER LALLAH, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, regrettant le refus des autorités du Myanmar de le recevoir, a déclaré qu'une décision contraire démontrerait clairement l'engagement de ce pays à coopérer avec les Nations Unies conformément à ses obligations découlant de la Charte. Sur le plan politique, le Rapporteur a fait part d'un fait positif en indiquant que le Comité d'Etat pour la restauration de la loi et de l'ordre public (SLORC), au pouvoir, a repris des initiatives tendant à entamer des discussions avec la Ligue nationale pour la démocratie (NLD). La réunion prévue n'a toutefois pas eu lieu, les autorités refusant que la Secrétaire générale prenne part aux discussions. Le climat de confiance nécessaire à un changement du jeu politique n'a pas encore été établi. Après sa libération, la Secrétaire générale fait encore l'objet de harcèlements et de restrictions. Il faut tout de même signaler qu'après l'annulation de la réunion, près d'un million de délégués de la NLD ont été autorisés à participer à des réunions qui se sont déroulées au domicile de la Secrétaire générale.

Dans d'autres régions en revanche, la NLD n'a pas été autorisée à tenir des réunions. Plusieurs lois existent au Myanmar qui pénalisent l'exercice des droits fondamentaux. En ce qui concerne l'exercice des droits politiques et civiques, il faut constater une paralysie que les autorités expliquent par la poursuite des travaux concernant l'élaboration d'une Constitution. Ces travaux ont commencé il y a cinq ans et rien ne permet aujourd'hui de penser qu'ils sont sur le point d'aboutir. De nombreuses violations des droits de l'homme continuent à se produire dans le pays que ce soit au niveau de l'octroi de la nationalité ou du droit du travail. A cet égard, une commission d'établissements des faits de l'Organisation internationale du Travail (OIT) mène une enquête et un nombre innombrable de rapports continuent à faire état des pratiques de travail forcé. La loi sur les villages et la

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loi urbaine datant du début du siècle sont encore en vigueur. Le Myanmar doit s'attacher à rétablir la démocratie, à mettre fin à la paralysie politique et l'élimination des lois d'exceptions.

U PE THEIN TIN (Myanmar) a déploré que le fait que le Rapporteur spécial ne donne la priorité qu'à des accusations émanant de personnes qui ont leur propre motivation politique. Le rapport du Rapporteur ne peut être vu que comme une tentative d'exercer une pression injustifiée sur le pays. Le Myanmar a toujours coopéré en matière des droits de l'homme et il fournit régulièrement des informations au rapporteur thématique de la Commission des droits de l'homme. Le rapport ne reflète que les points de vues des opposants qui s'expriment pour des raisons éloignées des droits de l'homme. Pour le Myanmar, le droit au développement, à la paix et à la sécurité sont des droits fondamentaux en l'absence desquels aucun droit ne peut être respecté. Or, les succès du Myanmar dans ces domaines ne sont pas mentionnés dans le rapport. Ce rapport dénote un manque de compréhension de l'évolution du Myanmar. Ses conclusions et recommandations sont donc inacceptables.

Faut-il le rappeler ici, le Myanmar n'a jamais accepté la nomination d'un rapporteur spécial mais, dans un esprit de coopération, il a reçu des représentants de la Commission des droits de l'homme. L'ancien rapporteur s'est rendu cinq fois dans le pays. Ses rapports partiaux ont gravement porté atteinte à la situation du pays et du peuple. Un rapport de cette nature doit être précis, équilibré et complet. Le Rapporteur actuel aurait dû respecter le principe de non sélectivité et d'objectivité. Il faut être faire preuve de prudence et de modération dans l'examen de ces questions et éviter tout action qui irait à l'encontre des intérêts du pays. Le Myanmar entend continuer à coopérer avec la Commission des droits de l'homme tout en préservant sa souveraineté et le Rapporteur pourra se rendre dans le pays au moment voulu. Le Myanmar entend diffuser, au cours de cette session, un mémorandum sur la situation des droits de l'homme en tant que document officiel de l'Assemblée générale.

M. ABDELFATTAH AMOR, Rapporteur spécial sur l'élimination de toutes les formes d'intolérance et de discrimination fondées sur la religion ou la conviction, a indiqué que des atteintes, de la par d'Etats, de groupe extrémistes, de communautés religieuses ou de simples individus agissant au nom de la religion ou se parant de religiosité, ont été commises aux dépens de la religion chrétienne dans 22 Etats, de la religion musulmane dans 7 Etats, du bouddhisme dans 2 Etats, des autres groupes religieux et communautés dans 23 Etats.

M. Amor a souhaité attirer l'attention des délégations sur trois questions en particulier, et tout d'abord sur les discriminations à l'égard des femmes fondées sur des considérations tenant à la religion ou imputées à la religion. L'exemple extrême en la matière est fourni aujourd'hui par la politique des Taliban en Afghanistan, a-t-il souligné. Il a estimé que le

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phénomène des sectes devait également être observé avec une grande attention et beaucoup d'objectivité et de sang froid de manière à éviter deux écueils, l'écueil d'atteinte à la liberté de religion ou de conviction d'une part et l'écueil d'exploitation de la liberté de religion et de conviction à des fins autres que celles pour lesquelles elle avait été reconnue et protégée, d'autre part. La question est fort complexe et interpelle la condition de l'homme d'aujourd'hui, une condition faite assez souvent d'uniformisation, d'anonymat, de dépersonnalisation et parfois de vide que les organisations sociales et religieuses n'ont pas toujours pu ou su combler, a-t-il déclaré. Le Rapporteur spécial a plaidé en faveur d'un examen approfondi de ce phénomène, notamment par des études et des enquêtes à réaliser dans le cadre du mandat sur l'intolérance religieuse, mais il a souligné que ceci ne pouvait être fait avec les moyens actuellement mis à sa disposition. Il est fondamental de dépassionner le débat dans ce domaine et d'ouvrir la voie à des prises de position qui épargneraient à la liberté de religion ou de conviction d'être piège pour les uns ou alibi pour les autres ou d'être encore l'élément incorporel d'un fond de commerce ou d'une entreprise politique ou partisane, a-t-il ajouté.

La troisième question sur laquelle le Rapporteur spécial a souhaité attirer l'attention concerne l'extrémisme religieux, qui constitue une atteinte inadmissible tant à la liberté qu'à la religion. L'extrémisme n'épargne aucune société et aucune religion. Mais lorsqu'il verse dans le délire terroriste et gratuit, le silence devient complicité et l'indifférence complaisance active, a-t-il déclaré. La tolérance de l'extrémisme est une tolérance de l'intolérable. Les Etats et la communauté internationale ne peuvent pas, dès lors, ne pas le condamner sans ambivalence et le combattre sans concession, a-t-il conclu.

Mme MARIAM AL-AWADI (Koweït) a déclaré que le rapport contenait des informations incorrectes concernant le Koweït. Elle a réfuté les allégations du Rapporteur spécial selon lesquelles les non musulmans ne peuvent recevoir la citoyenneté koweïtienne. Ceci est incorrect, a-t-elle déclaré, citant en exemple l'ambassadeur koweïtien à Tokyo qui est chrétien. Elle a demandé au Rapporteur spécial d'être plus précis sur ses affirmations concernant l'interdiction pour les musulmans d'accéder à une autre religion. La représentante a également rejeté les allégations selon lesquelles le Koweït interdit la publication de tout matériel religieux non islamique et a souligné à cet égard, la liberté totale de pratique religieuse dans le pays, en indiquant qu'il y a plusieurs églises chrétiennes au Koweït. Elle a aussi réfuté le fait que le Gouvernement koweïtien ne donnerait pas de permis de modernisation ou transformation des églises et autres lieux religieux non musulmans, en indiquant que l'une des églises du pays était actuellement en cours de rénovation. La représentante a demandé au Rapporteur spécial d'être plus précis sur ses informations et a indiqué que son pays présenterait une réponse écrite aux allégations contenues dans le rapport.

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M. OMAR OBEID AL-SHAMSI (Emirats arabes unis) a lui aussi rejeté certaines allégations contenues dans le rapport du Rapporteur spécial concernant les Emirats arabes unis et a indiqué que son pays donnerait sa réponse à travers le bureau de la Commission des droits de l'homme à Genève.

M. ROBERTO GARRETON, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la situation en République démocratique du Congo, a précisé que le rapport comprend des informations allant jusqu'au 8 septembre. Le Rapporteur spécial et la Mission conjointe créée par la Commission des droits de l'homme ont demandé l'autorisation aux autorités du pays de se rendre sur le terrain mais en vain, l'AFDL imposant des exigences inadmissibles à l'ONU. Afin d'empêcher l'impunité, le Secrétaire général a créé une équipe d'enquête qui au bout de quatre mois n'a toujours pas démarré ses travaux en raison des conditions imposées par le pays. Le Rapporteur et la Mission conjointe présente un rapport à partir d'informations obtenues de sources diverses dont de nombreux témoignages sur des massacres et autres violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international. D'après les informations reçues, toutes les parties au conflit ont commis des atrocités. Selon les chiffres, 60% des violations sont imputables à l'AFDL, aux Banyamulenge et leurs alliés, 16,75%, aux forces armées zaïroises, 9,64%, aux anciens militaires rwandais et aux milices interhamwe, 2,03% au FPR et un nombre égal aux forces burundaises, et enfin 1,52%, aux mercenaires qui ont combattu aux côtés des forces zaïroises. Le processus de démocratisation avait bien débuté dans l'ancien Zaïre mais il a été découragé par Mobutu et sa classe politique. Il est donc possible d'expliquer le popularité des rebelles de l'AFDL par un rejet de la dictature mobutiste et l'espoir d'en finir qu'a fait naître l'AFDL. Malheureusement les premiers mois du pouvoir de l'AFDL ne sont pas satisfaisants en matière des droits de l'homme. Aucune des conditions des droits et libertés fondamentales n'existe.

Le régime en place a fait table rase de tous les droits de l'homme comme dans les périodes les plus dures du mobutisme. L'annonce d'élections libres est contradictoire. Il n'existe plus de liberté de la presse et les journaux de la capitale ne peuvent pas être vendus dans le reste du pays. Les anciens dignitaires du régime précédent sont emprisonnés sans jugement. Il semble aujourd'hui que le peuple perçoit les vainqueurs comme des étrangers qui agissent avec mépris envers des Congolais. L'AFDL méconnaît les revendications des sept dernières années. Le pouvoir est exercé par un Etat omniprésent. Les organisations des droits de l'homme ont été victimes de harcèlement. L'instabilité du pays a été aggravée par la décision du Gouvernement de suspendre les activités des partis politiques, des syndicats et des ONG. L'Etat n'est pas pacificateur, il prend parti. Le Président Kabila peut encore renverser la tendance. La communauté internationale ne réclame pas des élections immédiatement mais un démarrage du processus démocratique pour ne pas perdre l'élan de la Conférence nationale. Les échéances électorales doivent être proposées et non imposées. Pour conclure,

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M. Garreton a souligné la nécessité pour la communauté internationale de défendre les mandats des Rapporteurs spéciaux. Il a regretté la tendance selon laquelle lorsqu'un Etat refuse un certain rapporteur, on lui présente des solutions de rechange ou une liste d'autres noms. Il s'est demandé, dans ces conditions, si l'ONU a répondu aux aspirations des Congolais en ajoutant, à l'instar du Haut Commissaire des droits de l'homme, que la communauté internationale doit en finir avec le cycle de l'impunité dans la région des Grands Lacs.

M. MWABANGA KAPANGA (République démocratique du Congo) s'est déclaré choqué par la "déclaration scandaleuse" de M. Garreton d'autant plus, a-t-il dit, qu'une équipe d'enquête est déployée actuellement dans le pays. Il est intéressant de noter qu'une personne qui s'est rendue pour une seule journée dans un pays vienne dans cette Commission présenter un rapport sans fondement, en particulier, après qu'un accord consécutif à des négociations ardues a été conclu en matière des droits de l'homme. De l'avis de la République démocratique du Congo, la présentation de ce rapport doit être considérée comme une tentative de sabotage. Elle se réserve le droit de donner dès demain une réponse détaillée aux allégations avancées aujourd'hui.

M. JOHN PACE, représentant du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, présentant le rapport du Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan, a déclaré que la situation des droits de l'homme en Afghanistan continuait d'être l'une des plus graves dans le monde et s'était encore détériorée sous certains aspects depuis la finalisation du rapport à la mi- septembre. Ainsi, quelque 70 civils appartenant à l'ethnie Hazara, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées, auraient été sommairement exécutés par les Taliban le 14 septembre dernier dans le village de Qezelabad dans le nord du pays. D'autres atrocités auraient été commises sur les cadavres. Certaines sources parlent même de 150 victimes, alors que les Taliban ont nié tout implication dans le massacre. Le 13 octobre, les corps de quatre soldats Taliban accusés de trahison ont été pendus à des poternes dans le centre de Kaboul pendant au moins 4 heures. La crise alimentaire, résultat de mauvaises récoltes et du blocage de l'aide alimentaire depuis le mois d'août par les Taliban dans les zones qu'ils détiennent, a été aggravée par les pillages massifs par des groupes armés appartenant à l'alliance des Taliban des entrepôts du Programme alimentaire mondial. Le représentant a encore indiqué que le 2 octobre dernier, 4 femmes afghanes travaillant pour le bureau du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés et une employée du Ministère Taliban du rapatriement ont été arrêtées à Kaboul par la police religieuse des Taliban parce que selon les autorités Taliban, seules trois femmes avaient été autorisées à travailler pour le HCR.

Le représentant a encore attiré l'attention sur une étude publiée par l'UNICEF le 7 octobre dernier et réalisée à Kaboul auprès de 300 enfants entre 8 et 18 ans. Selon cette étude, 90% des enfants afghans pensent qu'ils mourront au cours du conflit. Entre 1992 et 1996, 72% des enfants ont

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expérimenté la mort dans leur famille, pour 40%, il s'agissait d'un parent. Pratiquement tous les enfants ont été témoins d'actes de violence durant les combats. Près de la moitié d'entre eux ont vu des personnes tuées par des balles ou des bombes et deux tiers ont vu des cadavres ou des parties de cadavres. La majorité des enfants souffrent de traumatismes graves, cauchemars, anxiété et problèmes de concentration et d'appétit. Près de la moitié ont cité la peur comme la plus forte émotion et près de trois quarts d'entre eux ont affirmé qu'ils ne pensaient pas vivre jusqu'à l'âge adulte.

M. RAVAN FARHADI (Afghanistan) a remercié le Rapporteur spécial pour s'être acquitté de son mandat avec persévérance, courage, objectivité et dans le but de servir les droits de l'homme. L'étude de ce rapport en Troisième Commission correspond de manière dramatique avec la visite de Mme Angela King, Conseiller spécial du Secrétaire général sur les questions de sexospécificité et de promotion de la femme, à Kaboul où elle doit rencontrer des dirigeants Taliban dont le statut politique au sein du régime dictatorial des Taliban n'est pas très clair et le sera moins encore à l'avenir, a déclaré le représentant. Il a rappelé qu'il y a deux ans, M. Peter Hansen, ancien directeur du Département des affaires humanitaires avait obtenu la promesse verbale des Taliban qu'ils réouvriraient les écoles pour filles. Ce fut une fausse promesse et la violation du droit des femmes et des fillettes à l'éducation est bien pire que lors de la visite de M. Hansen en Afghanistan. Les Taliban sont de grands experts quant il s'agit de ne pas honorer leurs promesses, a-t-il déclaré.

Le représentant a souligné l'intensification des violations des droits de l'homme par les Taliban. L'occupation de Kaboul l'an dernier leur à livré un vaste domaine où exercer leur loi, de même que les incursions militaires dans le nord du pays leur ont ouvert de nouveaux terrains où violer les droits de l'homme. Depuis la finalisation du rapport, il y a encore eu d'autres violations des droits de l'homme, a déclaré le représentant, en attirant l'attention sur le rapport d'Amnesty international intitulé "Afghanistan, poursuite des atrocités contre les civils".

Avant l'invasion militaire des Taliban à Kaboul, les filles fréquentaient les écoles et l'université. Il y avait deux associations de femmes, ainsi que des associations d'avocats, de journalistes et d'écrivains qui ont été interdites et dissoutes par les Taliban. Environ 30% des lecteurs à l'Université de Kaboul étaient des femmes et plus de 4 000 femmes travaillaient dans les services publics. Les femmes représentaient 70% des enseignants, environ 50% des fonctionnaires publics et 40% des médecins. Il y a environ 45 000 veuves de guerre avec des enfants à Kaboul dont beaucoup travaillaient encore l'année dernière. L'apartheid fondée sur le sexe imposée par les mercenaires Taliban a créé une situation de privations et d'appauvrissement désespérante, en particulier à Kaboul, a-t-il déclaré. Les Taliban ont une vision hautement idiosyncratique de l'Islam qui a été rejetée

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par de nombreuses personnalités islamistes sunnites en tant que "code tribal rural de comportement appliqué seulement dans certaines parties de l'Afghanistan dont un seul aspect est exploité", a-t-il souligné.

M. ADAMA DIENG, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, a souligné que malgré les progrès en matière de droits de l'homme en Haïti, le travail qui reste à accomplir est titanesque, notamment en raison de l'instabilité qui continue à régner dans le pays. Il a insisté sur la nécessité d'un effort concerté dans tout le pays afin que toutes les composantes de la société civile soient associées au processus visant à la réalisation progressive des droits économiques et sociaux, en mettant un accent particulier sur le droit à la santé et le droit à l'éducation. D'un point de vue sanitaire, les conditions optimales pour le bien-être de la population sont loin d'être atteintes, a-t-il souligné. Le ministère de la santé publique a fait part d'une volonté réelle d'élargir l'accessibilité aux soins des populations, en établissant notamment un cadre institutionnel. Mais ceci peut s'avérer insuffisant si les ressources financières adéquates ne sont pas allouées au domaine de la santé.

A cette situation, a poursuivi l'Expert indépendant, viennent s'ajouter des problèmes de politique interne : d'un côté le conflit ouvert entre l'Organisation politique lavalas (OPL) et Fanmi Lavalas et de l'autre une crise gouvernementale. Le premier contentieux est davantage exacerbé par la crise qui a suivi les élections sénatoriales et locales du 6 avril 1997 qui auraient été entâchées de multiples irrégularités. A cet égard, l'Expert indépendant s'est inquiété, en particulier, des impacts potentiels que la question électorale pourrait avoir sur le processus de démocratisation et sur l'avènement d'un Etat de droit. Il y a une dizaine de jours, le Président Préval a annoncé une série de mesures destinées à mettre un terme à la crise électorale et gouvernementale. Il a en outre désigné M. Hervé Denis pour former le prochain gouvernement. Il faut espérer que le Parlement approuvera le choix du Président Préval, a déclaré l'Expert indépendant, en soulignant le fait que le Président Préval avait eu le souci d'une concertation préalable la plus large possible. Dans le court terme, il faut que l'Etat prête oreille aux revendications de la majorité de la population. Pour ce faire, il est nécessaire qu'Haïti mette de l'ordre dans l'administration publique et les entreprises d'Etat, a recommandé M. Dieng, en appelant au soutien de la communauté internationale.

Mme SAYED DURAN (Venezuela) a remercié le Rapporteur spécial pour son excellent rapport et le fait qu'il donne la priorité aux droits économiques et sociaux, sans oublier les droits civils et politiques.

Mme NICOLE ROMULUS (Haïti) a estimé que l'Expert indépendant avait rempli son mandat avec autorité et bienveillance. Le rapport donne une vue détaillée de la situation des droits de l'homme qui permet de juger de son évolution et formule des recommandations judicieuses. La problématique actuelle en Haïti est liée à la situation socio-économique qui a elle-même été

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aggravée par les événements politiques créant des répercussions sur la situation des droits de l'homme. Des améliorations considérables ont été réalisées et des avancées indéniables ont été enregistrées notamment en ce qui concerne les droits civils et politiques. Le Gouvernement haïtien s'est engagé dans une politique sanitaire visant à améliorer la situation. La représentante a aussi cité les efforts d'alphabétisation, ainsi que les mesures prises pour améliorer la situation et le fonctionnement des prisons. Le nombre insuffisant de policiers ne permet pas de faire face à la criminalité et la violence dans le pays, a-t-elle déclaré, indiquant que des sanctions étaient prévues pour les arrestations illégales, la torture et la mort à la suite de ces arrestations. Elle a affirmé qu'il y avait une véritable volonté politique de mettre fin à l'impunité. La représentante a encore évoqué la crise de sécurité provoquée par la présence de réfugiés criminels haïtiens refoulés vers Haïti alors que le pays n'a pas encore les infrastructures nécessaires pour faire face à ces criminels. Le Gouvernement est démissionnaire mais l'Etat demeure et le pays n'est pas tombé dans le chaos. Le Gouvernement ne tolérera plus les violations des droits de l'homme. Les améliorations dans ce domaine doivent se poursuivre, a-t-elle assuré.

M. FRANCIS M. DENG, Représentant du Secrétaire général sur les personnes déplacées, a indiqué que contrairement au cas des réfugiés, il existe des lacunes juridiques et institutionnelles en matière de protection et d'assistance aux personnes déplacées. Si la solution à la question incombe aux Etats, il est largement reconnu que la plupart des pays touchés n'ont pas la capacité de répondre aux besoins urgents et importants de leurs personnes déplacées. La situation se complique si l'on tient compte du fait que c'est une crise identitaire qui sépare les populations victimes de leur Gouvernement ou des autorités dont elles dépendent. Partant, les personnes déplacées ne sont pas protégées parce qu'elles sont identifiées aux ennemis et dépossédées par ceux qui précisément doivent leur fournir assistance et protection.

Faisant part de ses activités, le Représentant spécial a attiré l'attention des délégations sur les efforts déployés dans le domaine juridique. Ces efforts ont consisté à compiler et analyser, de manière exhaustive, les normes juridiques existantes; à identifier les vides et les zones d'ombre en matière de protection et d'assistance aux réfugiés; et à développer une série de directives pour répondre complètement aux besoins des personnes déplacées. Ces directives feront l'objet d'un examen au cours de la réunion internationale d'experts qui doit se tenir en Autriche en 1998.

En l'absence d'une organisation expressément chargée des personnes déplacées, la collaboration entre les organisations et institutions pertinentes demeure la meilleure solution. En effet, au cours des dernières années, nombre d'organisations gouvernementales et non gouvernementales ont accru leur participation en la matière.

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Par ailleurs, dans son programme de réformes, le Secrétaire général confie au Coordonnateur pour les secours d'urgence toutes les questions humanitaires dont celles qui ne relèvent d'aucun mandat existant comme l'illustre parfaitement la question des personnes déplacées. Etant entendu qu'un Comité permanent interinstitutions est appelé à remplacer l'Equipe de travail interinstitutions sur les personnes déplacées, le Représentant spécial est disposé à travailler avec le Comité et à s'assurer que les personnes déplacées auront leur place dans les accords humanitaires. Sur le terrain, le Représentant spécial estime qu'il serait utile de sélectionner une institution comme point focal pour les personnes déplacées là où aucune institution n'opère. Abordant la question des missions de visite, le Représentant spécial a indiqué qu'il en a effectué douze jusqu'ici profitant de l'occasion pour s'entretenir avec les gouvernements, les pays donateurs, les organisations humanitaires et de défense des droits de l'homme et parfois les médias. Il est apparu que lorsqu'un gouvernement manque de la volonté nécessaire à régler la question de ses personnes déplacées, il attire une attention accrue de la communauté internationale et une intervention des organisations humanitaires. C'est donc en faisant appel à la communauté internationale qu'un Gouvernement est mieux à même de protéger sa souveraineté.

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