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SG/SM/5993/Rev.1

L'OBJECTIF D'HABITAT II EST D'AFFIRMER QUE LES ETABLISSEMENTS HUMAINS SERONT AU CENTRE DE LA CROISSANCE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE

3 juin 1996


Communiqué de Presse
SG/SM/5993/Rev.1


L'OBJECTIF D'HABITAT II EST D'AFFIRMER QUE LES ETABLISSEMENTS HUMAINS SERONT AU CENTRE DE LA CROISSANCE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE

19960603

On trouvera ci-après le texte du discours inaugural prononcé par le Secrétaire général, M. Boutros Boutros-Ghali, à l'ouverture de la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains (HABITAT II), à Istanbul, le 3 juin 1996 :

J'ai le plaisir de déclarer ouverte la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains, Habitat II. Ce n'est pas un hasard si cette conférence consacrée à la ville est organisée dans la ville par excellence qu'est Istanbul, une ville de plus de 20 siècles d'histoire.

Venus des cinq continents pour représenter grandes capitales et villes de province, mégalopoles et petites agglomérations, nous nous sommes retrouvés à Istanbul, qui nous a accueillis à bras ouverts. Pendant les prochains jours, délégations, observateurs et journalistes vont élire domicile dans cette ville qui est à la croisée de deux continents et où ruelles et maisons anciennes côtoient avenues et immeubles modernes.

Je tiens à remercier, en mon nom propre et en celui de l'ONU, les habitants d'Istanbul et de toute la Turquie, qui nous ont accueillis si chaleureusement dans cette ville superbe.

Je voudrais témoigner ma reconnaissance, et celle de l'ONU, au Président Suleiman Demirel et au maire d'Istanbul, M. Tayyip Erdogan.

Depuis qu'Istanbul a été choisie pour accueillir cette grande conférence des Nations Unies, nous avons eu la chance de pouvoir compter sur la coopération, la cordialité et la générosité du Gouvernement comme de la population. Permettez-moi donc, Mesdames et Messieurs, de souligner la profonde dette de reconnaissance que nous avons à leur égard.

- - SG/SM/5993/Rev.1 3 juin 1996(à suivre) Le comité préparatoire et les délégations des États Membres travaillent depuis de longs mois au succès de la Conférence. Quelques désaccords subsistent, mais ils témoignent de l'importance que les États attachent aux établissements humains et de leur volonté de mettre en oeuvre le programme d'action.

Enfin, je voudrais remercier au nom de tous le secrétariat du Centre des Nations Unies pour les établissements humains, dirigé par le Secrétaire général de la Conférence, M. Wally N'Dow, pour les efforts inlassables qu'il déploie afin que nos travaux soient couronnés de succès.

La Conférence des Nations Unies sur les établissements humains, Habitat II, est la dernière de la série de conférences des Nations Unies qui se sont tenues au cours des années 90 et dans le cadre desquelles un agenda pour le développement a pris corps. De par sa conception novatrice, cette conférence est aussi un nouveau départ pour l'ONU. Nous devons tous avoir conscience que les décisions qui seront prises à Istanbul auront une importance non seulement sur le monde d'aujourd'hui, mais aussi sur le monde dans lequel nos enfants seront appelés à vivre et à prospérer.

Ne voulant pas préjuger des débats qui se tiendront dans les prochains jours, je n'aborderai pas toutes les questions sur lesquelles ils porteront. Je voudrais cependant insister sur trois points qui, à mon sens, contribueront utilement à les guider :

1. Habitat II : le maillon d'une chaîne.

2. Habitat II : une conférence internationale qui innove.

3.Le programme pour l'habitat : comment assurer le suivi de la Conférence.

Habitat II : le maillon d'une chaîne

Depuis que j'ai pris mes fonctions de Secrétaire général en 1992, je me suis consacré à la mise en oeuvre du programme de développement de l'Organisation des Nations Unies. Dans cette perspective, j'ai souligné qu'en cette période d'après-guerre, il était important de considérer le développement comme une activité de coopération, une entreprise où tous les partenaires pouvaient bénéficier des fruits de la croissance.

Cette vision s'oppose diamétralement à la conception du développement comme un "jeu à somme nulle", dans lequel ce que l'un gagne est nécessairement ce que l'autre perd. Elle part du principe qu'il ne saurait être question d'agir isolément et que, dans un contexte de mondialisation rapide, la gestion de la croissance et le développement sont l'affaire de tous.

Partant de ce principe, et donc d'une vision coopérative du développement, l'Organisation des Nations Unies a lancé une série de conférences et de sommets mondiaux ayant tous trait au développement. Il me semble utile de les rappeler ici :

-La Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, tenue en juin 1992 à Rio de Janeiro;

-La Conférence mondiale sur les droits de l'homme, tenue en juin 1993 à Vienne;

-La Conférence des Nations Unies sur le développement durable des petits États insulaires en développement, tenue en avril 1994 à la Barbade;

-La Conférence mondiale sur la prévention des catastrophes naturelles, tenue en mai 1994 à Yokohama;

-La Conférence internationale sur la population et le développement, tenue en septembre 1994 au Caire;

-Le Sommet mondial pour le développement social, tenu en mars 1995 à Copenhague;

-La quatrième Conférence mondiale sur les femmes, tenue en septembre 1995 à Beijing;

-La Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement

(CNUCED IX), tenue en avril 1996 à Johannesburg. A cette liste, il faut ajouter la Conférence des Nations Unies sur les établissements humains (Habitat II), qui s'ouvre aujourd'hui, 3 juin 1996, à Istanbul.

On a critiqué le coût de ces conférences. Certains en ont également critiqué l'absence de résultats. Je tiens à saisir l'occasion qui m'est offerte à cette tribune pour dire bien haut qu'à mon sens, les conférences des Nations Unies sont indispensables aux travaux de l'Organisation, indispensables à l'exercice de son mandat et indispensables aussi à la survie de notre planète.

Vous êtes des milliers à être venus à Istanbul pour cette conférence. Près de 50 000 personnes sont allées à Beijing pour fixer de nouvelles normes définissant le rôle des femmes dans la société et quelque 47 000, à Rio de Janeiro, se sont employées à mieux équilibrer la croissance économique et le respect de l'environnement. Lors du Sommet mondial pour le développement social à Copenhague, 118 chefs d'État et de gouvernement ont exprimé leurs préoccupations devant la montée du chômage, la marginalisation et la désintégration sociale.

Les conférences des Nations Unies, ainsi que les plans et calendriers d'action qu'elles ont arrêtés, forment ensemble un programme de développement adopté par la communauté mondiale. Grâce à elles, la coopération pour le développement sera revitalisée et réinventée. Avec l'Organisation des Nations Unies et ses États Membres, c'est vous, les délégués à ces conférences, qui décidez des modes de développement qui seront ceux des générations à venir. C'est vous qui décidez du type de coopération pour le développement que l'Organisation devra adopter; et c'est vous qui établissez les critères selon lesquels l'action des États, des organisations et des particuliers sera jugée.

C'est en cela que les conférences internationales des Nations Unies sont importantes. Et c'est dans ce contexte que la Conférence d'Istanbul va se dérouler dans les jours qui viennent.

Habitat II : une conférence internationale qui innove

Mais votre présence parmi nous aujourd'hui ne marque pas seulement la volonté de poursuivre un processus engagé lors du Sommet planète Terre en 1992. Loin de là. Chaque conférence est unique en elle-même; ses qualités propres la distinguent de toute autre. Avec Habitat II, vous allez plus loin, vous reconnaissez le caractère universel de la question des établissements humains.

La diversité des participants présents aujourd'hui est la preuve, s'il en faut, que cette conférence réunit véritablement des partenaires. Les représentants de toutes ls institutions et organisations de la société civile rassemblés à Istanbul vont exposer leurs programmes, exprimer leurs engagements.

Des comités nationaux largement représentatifs ont mis au point plus de 120 plans d'action nationaux, qui définissent les priorités nationales en vue du développement durable et de la croissance des établissements humains. Les autorités locales, dont dépend la mise en oeuvre d'Habitat II, ont uni leurs forces avec celles des organisations non gouvernementales pour être des partenaires à part entière de cette conférence. Qui plus est, le secteur privé, moteur de la croissance, sera représenté dans tous les aspects des travaux d'Habitat II.

L'ONU est avant tout une Organisation d'États. Mais, la contribution de plus en plus importante d'acteurs non étatiques est essentielle au succès de sa mission. Leur participation à ses activités est un aspect essentiel de la démocratisation du système international.

Je suis heureux de constater qu'à cet esprit de partenariat s'ajoutent non pas simplement de bonnes intentions mais un souci de rechercher des

solutions réalistes. Plus de 100 comités nationaux ont participé à l'Initiative des meilleures pratiques pour améliorer le cadre de vie et formulé plus de 700 propositions à cette fin. Nombre d'entre elles nous montrent, par des exemples concrets, comment nous pouvons donner suite aux questions déjà définies dans Action 21 et dans les programmes d'action sur la population et le développement, le développement social, les petits États insulaires et les femmes adoptés par les précédentes conférences des Nations Unies.

Mais, et c'est là le plus important, ces meilleures pratiques prouvent que les êtres humains sont capables d'être à la hauteur de situations difficiles et qu'ils ont en eux les ressources et l'esprit d'invention voulus pour renforcer nos sociétés et les renouveler.

Le programme pour l'habitat : comment assurer le suivi de la Conférence

Nous avons parcouru bien du chemin depuis Vancouver et la première Conférence des Nations Unies sur les établissements humains. En 20 ans, le monde a considérablement changé. Mais les problèmes auxquels nous nous heurtions dans les années 70 - la pauvreté, la faim, la maladie, les déséquilibres de population, l'inégalité - n'ont pas disparu.

La série de conférences des Nations Unies a permis à la communauté mondiale d'examiner ces problèmes persistants dans le cadre d'une nouvelle approche et dans un nouvel esprit de coopération à l'échelle planétaire et avec un dessein commun. C'est ainsi que j'interprète le sens de la Conférence qui s'ouvre aujourd'hui. Les établissements humains, et notamment les villes, deviennent en effet un facteur clef dans ces équations complexes que sont la croissance et le développement, l'environnement, les droits de l'homme et l'élimination totale de la pauvreté.

D'ici à l'an 2000, près de la moitié de la population mondiale vivra dans des centres urbains. Les problèmes d'emploi, de logement, d'infrastructure et de sécurité de l'environnement prendront de plus en plus un visage urbain. D'ici à l'an 2025, les villes rassembleront au total quelque 5 milliards de personnes, dont 80 % dans les pays en développement.

Dans tous les États, riches ou pauvres, le développement urbain suscite des crises. Mais ce sont dans les pays en développement qu'elles sont les plus graves. Les habitants des centres-villes, ceux des taudis insalubres, des favelas, des ghettos ou des barrios ont en commun la même misère, les mêmes problèmes de santé, les mêmes perspectives désespérantes de chômage et de marginalisation. Mais ces problèmes communs sont aussi la base d'une action commune, d'un apprentissage mutuel, d'une coopération pour trouver des solutions.

Avoir un dessein commun ne nous autorise pas, toutefois, à fermer les yeux sur la réalité. Dans certaines régions du monde, nous devons trouver un équilibre entre notre intérêt pour les villes et la nécessité de créer des établissements ruraux et de développer l'économie rurale. Dans d'autres, l'urbanisation rapide, accompagnée par une croissance économique elle aussi rapide, a entraîné d'énormes retards d'infrastructure et une hausse du prix des terres, précipité la dégradation de l'environnement et rendu le logement inaccessible à la majorité. Dans la plupart des régions urbanisées du monde, les villes deviennent l'axe de la politique nationale. Ce qui nous réunit, c'est la conscience que les établissements humains seront au centre de la croissance et du développement durable. C'est aussi ce que nos politiques doivent refléter. Notre réponse collective sera le programme pour l'habitat - un plan mondial d'action qui reflète ce que doivent être, à notre avis, les établissements humains dans les villes et les villages, viables, sûrs,

prospères, sains et équitables. Voilà notre vision de l'avenir commun, et tel doit être l'esprit d'Istanbul.

Que nos discussions et nos débats pendant les deux prochaines semaines soient inspirés par l'esprit d'Istanbul. L'esprit d'Istanbul, c'est tirer la leçon du passé, des précédentes conférences des Nations Unies et des priorités fixées dans leurs plans et leurs programmes. L'esprit d'Istanbul, c'est la coopération et la concertation entre les délégations gouvernementales et les acteurs non gouvernementaux. L'esprit d'Istanbul, c'est la priorité donnée à l'être humain. Les porte-parole de la société civile nous disent que ce que l'être humain veut avant tout c'est un emploi, un logement et un quartier sûr, un accès plus équitable à la terre et au crédit et un environnement plus sain pour ses enfants.

Mes derniers mots s'adressent au monde au-delà des deux prochaines semaines. Je suis convaincu qu'avant la clôture, vous parviendrez à un consensus sur ce qui s'appellera le Plan d'action d'Istanbul. En ce sens, le succès n'est pas mis en doute, mais comme dans toutes les autres conférences mondiales des Nations Unies, le véritable succès dépendra des engagements pris à Istanbul. Les gouvernements des Etats et les collectivités locales, les autorités municipales, les organisations civiques et toutes les autres organisations non gouvernementales, auront la lourde tâche de mettre en oeuvre, de bonne foi, les décisions prises à Istanbul.

La famille des institutions et programmes des Nations Unies partage cette responsabilité et jouera un rôle central dans ce processus de suivi et de responsabilité. Les populations du monde surveilleront et nous tiendront tous responsables.

Une fois encore, merci et bonne chance dans vos délibérations.

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