En cours au Siège de l'ONU

Session de 2025, Forum de la jeunesse,
4e & 5e séances – matin & après-midi
ECOSOC/7199

ECOSOC: le Forum de la jeunesse s’achève sur des appels à renforcer l’accès et les compétences numériques des jeunes

L’édition 2025 du Forum de la jeunesse du Conseil économique et social (ECOSOC), qui s’achève aujourd’hui après trois jours de débats, a vu 105 jeunes délégués représenter leurs gouvernements respectifs, a constaté avec joie la Sous-Secrétaire générale à la coordination des politiques au Département des affaires économiques et sociales (DESA), à la clôture de l’événement.  Une session durant laquelle les jeunes ont voulu montrer qu’ils sont les moteurs des progrès du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Mme Bjørg Sandkjær a reconnu que l’engagement des jeunes va au-delà des « problèmes de jeunesse », car ils contribuent à tous les objectifs de développement durable (ODD) -aux niveaux local, national et mondial- de manière essentielle et originale.  Les actions qu’ils mènent dans le monde entier en sont la preuve et ils étaient nombreux à les présenter au cours de la session. 

Une autre certitude martelée pendant ces trois jours: il est essentiel d’inclure les jeunes de manière significative dans tous les processus qui façonnent leur vie, et donc dans l’élaboration des politiques. Ce à quoi le DESA contribue par le biais du Programme des délégués de la jeunesse des Nations Unies, qui veille à ce que leurs idées soient prises en compte dans les décisions de l’ONU, a fait valoir Mme Sandkjær.  Elle a d’ailleurs espéré que les jeunes seront nombreux à participer au deuxième Sommet mondial pour le développement social, en novembre à Doha (Qatar).

Les différentes sessions de la journée ont illustré notamment le besoin de former les jeunes aux technologies -le numérique et l’intelligence artificielle (IA) en particulier- pour leur donner plus de chances d’accéder à un emploi décent, dans le secteur formel.  Les universités, en tant que partenaires, ont ainsi été invitées à créer un espace d’apprentissage et de réflexion éthique sur les outils technologiques.  L’importance des partenariats avec les différentes parties prenantes a aussi été soulignée, dans l’une des discussions.

Garantir un travail décent aux jeunes

La discussion du matin était axée sur les moyens de contribution des jeunes au développement durable par le biais de l’objectif de développement durable (ODD) no 8 relatif au travail décent et la croissance économique.  D’emblée, le modérateur, M. Siam Yabili, a appelé à bâtir des systèmes économiques qui soient en adéquation avec le potentiel créatif des jeunes.  Celui qui est Président de Congo Connexion et Président du Conseil des jeunes de la diaspora congolaise a prôné des partenariats multipartites pour avancer. Et surtout, « personne ne doit prendre la parole au nom des jeunes », a-t-il insisté en rappelant la bravoure et la résilience des jeunes du monde entier.  Il a lui-même grandi dans un camp de réfugiés du fait du conflit qui ravage l’est de la République démocratique du Congo (RDC) depuis des décennies.

Plantant le décor du débat, la Directrice du Bureau de l’Organisation internationale du Travail (OIT) auprès des Nations Unies a constaté qu’un jeune sur cinq évolue dans le secteur formel dans les pays en développement, contre quatre sur cinq dans les économies avancées.  Selon Mme Cynthia Samuel-Olonjuwon, il faut doter les jeunes de compétences pour qu’ils puissent prospérer dans un monde du travail en perpétuelle mutation.  De même, a-t-elle ajouté, « on ne peut parler de travail décent sans veiller à l’équité, la dignité et la justice sur le lieu du travail ». C’est pourquoi l’ONU a lancé en 2016 l’Initiative mondiale en faveur de la création d’emplois décents pour les jeunes au cours du Forum de la jeunesse.  Aujourd’hui, a-t-elle salué, cette initiative est devenue une alliance mondiale avec plus de 100 acteurs multipartites qui entendent changer l’environnement du travail en faveur des jeunes.

Miser sur le numérique et les partenariats

Le numérique est arrivé en tête des secteurs sur lesquels miser afin d’intégrer les jeunes au monde de l’emploi, selon plusieurs jeunes ayant pris la parole.  L’emploi décent pour les jeunes passe par les compétences numériques, a affirmé notamment une jeune entrepreneuse jordanienne.  Pour ne pas creuser davantage la fracture numérique, elle a recommandé d’autonomiser les jeunes femmes et les jeunes les plus vulnérables.

Une jeune du Zimbabwe a aussi expliqué comment la formation dans le numérique permet d’accompagner les jeunes à développer leurs compétences.  Une autre jeune, qui est fondatrice de Frontlines Foundation, une organisation à but non lucratif promouvant une utilisation sûre de l’intelligence artificielle, a plaidé pour la formation des jeunes en la matière afin de promouvoir l’innovation et l’équité dans le monde de l’emploi.

En Afrique du Sud, a indiqué la délégation, les autorités ont déjà investi dans l’innovation et les technologies numériques pour préparer les jeunes aux emplois décents dans le secteur.  L’Inde a quant à elle soutenu des programmes ciblant les jeunes ruraux en leur permettant d’accéder aux outils financiers grâce au numérique.  Ainsi, la plupart des jeunes ont un compte bancaire et le Gouvernement favorise l’essor des start-up.  Une jeune de Samsung Electronics America a évoqué une initiative du groupe Samsung qui a permis à 2,8 millions de jeunes dans 60 pays de renforcer leurs compétences numériques.  Un partenariat est d’ailleurs en cours avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans cette optique.

Ces efforts ne doivent pas oublier les réfugiés, a rappelé un jeune réfugié, cofondateur de l’ONG Unleashed-Potentials in Motion (Ouganda), en expliquant combien il est important d’autonomiser et éduquer les jeunes et les femmes des communautés de réfugiés en libérant leurs capacités de leadership et leurs potentiels cachés.  Un autre, jeune colombien, a proposé d’investir dans les entreprises de jeunes.  Et au Tchad, le Gouvernement a lancé un programme en 2022 visant à créer 50 000 emplois décents en faveur des jeunes.

Un jeune fonctionnaire américain travaillant à la Maison Blanche a milité pour que les jeunes tirent profit d’opportunités d’organisations internationales et des programmes gouvernementaux les ciblant, alors qu’une jeune kurde d’Iraq a invité les jeunes à ne pas rêver d’être fonctionnaires, mais plutôt de créer leurs propres emplois car ils ont l’énergie et l’enthousiasme en leur faveur.

Sur un autre plan, une jeune de Türkiye a déploré le fait que le monde de l’emploi continue de penser qu’il faut que les jeunes aient de l’expérience avant de parvenir à des emplois décents.  Elle a préconisé des stages pour les aguerrir, même si ceux-ci ne bénéficient qu’aux classes privilégiées du fait qu’ils sont généralement non rémunérés.  Elle a donc plaidé pour que les stages soient payés.  Un jeune slovène a aussi décrié le système de stages non rémunérés.  Loin de cette problématique, une jeune étudiante de la George Washington University a amené la discussion sur le terrain des zones de conflit, où le débat sur les emplois décents n’a pas lieu d’être, car on pense d’abord à survivre.  Il faudrait donc penser, a-t-elle dit, au renforcement des compétences des jeunes dans les sociétés postconflit en transition.

Transition vers des emplois décents et verts

Les emplois verts et décents ont également été présentés comme un bon avenir pour les jeunes.  Un jeune canadien a rappelé qu’il faut mettre en œuvre l’Accord de Paris sur les changements climatiques et promouvoir l’économie verte qui est à même de créer de tels emplois.  Une autre jeune activiste climatique a appelé les dirigeants politiques à soutenir le développement des compétences des jeunes dans le cadre de la transition écologique.

Dans un exposé sur la question des emplois verts, M. Marcos Neto, Administrateur assistant et Directeur du Bureau des politiques et de l’appui aux programmes du PNUD, a résumé les avantages de la transition écologique pour les jeunes.  Il a rappelé que cette transition pourrait créer près de 100 millions d’emplois avant l’année 2030, mais a prévenu qu’il fallait aider les jeunes à accéder aux compétences y afférentes.  Conscient des besoins en la matière, le PNUD a créé près de 100 laboratoires dans de nombreux pays.  En partenariat avec l’OIT, l’agence onusienne organise des ateliers sur la transition écologique et les emplois verts.  « Il faut faire de la transition écologique une révolution qui permette de créer des emplois décents pour les jeunes », a-t-il souhaité.

L’autonomisation des jeunes par la science et la technologie

Dans l’après-midi, une session thématique a mis l’accent sur le rôle de la science et de la technologie dans la promotion des ODD, en mettant en évidence les opportunités pour les jeunes à l’ère numérique et les défis qui se posent, tels que la fracture numérique, la cybersécurité et l’utilisation éthique de l’IA.

Le postulat, selon la modératrice, Mme Sinead Bovell, fondatrice de WAYE, c’est que les jeunes doivent pleinement bénéficier des technologies émergentes, en ayant accès à des outils numériques abordables et adaptés, ainsi qu’à une infrastructure Internet fiable.  Parallèlement, l’accès à la technologie doit s’accompagner des compétences nécessaires pour naviguer dans le monde numérique, a-t-elle précisé.  Forte de ce constat, elle a mis en lumière le rôle de premier plan que doit jouer l’éducation dans ce contexte en demandant aux intervenants de réfléchir à la manière avec laquelle les universités et écoles pourraient contribuer à mieux préparer les jeunes à l’avenir technologique. 

En tant que pôles de formation du capital humain, les universités doivent continuer à jouer un rôle central dans la préparation des jeunes à un environnement technologique en rapide évolution: elle doivent dispenser une formation technique et en même temps créer un espace propice à la réflexion éthique et à la recherche interdisciplinaire, a répondu M. Alexander Schrier, étudiant à la University of Pennsylvania.  Lorsque les cours sont étroitement alignés sur les défis mondiaux, les étudiants acquièrent non seulement les compétences nécessaires pour utiliser les outils numériques, mais aussi le jugement nécessaire pour en faire bon usage. 

Par conséquent, pour préparer les jeunes à l’avenir numérique, les universités devraient, selon l’étudiant, promouvoir la culture numérique dans toutes les disciplines, et pas seulement dans les STIM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques).  Elles devraient proposer davantage de cours qui associent la maîtrise technique à des bases en éthique des données, en cybersécurité et en développement durable.  À titre d’exemple, il a mentionné l’un de ses cours intitulé « Intelligence artificielle et sécurité internationale » qui fait le lien entre la théorie des relations internationales, l’informatique et l’économie afin d’examiner les risques et les opportunités que représente l’IA sur la scène mondiale.

Utiliser l’IA pour atteindre nos objectifs plus rapidement

Une spécialiste de la cybersécurité, Mme Zino Haro, cofondatrice de Youth for Privacy (Mexique), a estimé que quand on parle d’alphabétisation numérique, le véritable enjeu est de savoir comment intégrer nos capacités et préoccupations en tant que personne aux capacités de la technologie.  Aujourd’hui, la distinction entre ce qui est strictement humain et ce qui est strictement machine est de moins en moins nette et à l’avenir, il faudra veiller à utiliser de la manière la plus appropriée les technologies émergentes et à en faire des amplificateurs plutôt que des substituts de l’action humaine, a-t-elle fait valoir.  En d’autres termes, comment utiliser des technologies telles que l’IA pour atteindre nos objectifs plus rapidement ou avec des bases plus solides au lieu de centrer nos objectifs sur l’IA? 

Elle a toutefois relevé que, de nos jours, de nombreux systèmes scolaires accusent un retard administratif important ou ne disposent pas des ressources nécessaires pour exposer leurs élèves aux nouvelles technologies autant qu’ils le devraient.  « Si votre école ou votre lieu de travail n’a pas encore trouvé le moyen d’intégrer correctement ces nouvelles technologies, il est possible que les gens les utilisent à mauvais escient et n’apprennent pas ce qu’ils devraient apprendre », a-t-elle mis en garde.  Sur ce point, la modératrice a apporté une précision car, contrairement à l’idée que « tous les jeunes sont en ligne aujourd’hui », dans le monde en développement, seuls 43% d’entre eux le sont. 

Les technologies, un bien public devant être mondialisé

Mettant sa casquette du « Sud mondial » Mme Joyati Das, chercheuse au Melbourne Centre for Cities, a confirmé que les infrastructures numériques de ces pays ne sont pas robustes et que l’accès à Internet reste une aspiration pour la plupart des citoyens et en particulier les groupes vulnérables.  À ses yeux, les technologies doivent être considérées comme un bien public et leur démocratisation est impérative, notamment à travers des partenariats public-privé. 

Pour Mme Das, il ne fait pas de doute que la technologie est un facteur de développement, y compris de développement social, et un outil de plaidoyer puissant.  Les jeunes d’aujourd’hui sont sensibilisés aux questions locales et mondiales grâce aux outils numériques, a-t-elle relevé, mais en même temps, ces technologies ont rendu les jeunes plus visibles et mis en exergue leur pouvoir d’influence. Sur ce point, elle a rappelé qu’ONU-Habitat est en train de concevoir une initiative de plaidoyer -« Villes de jeunes 2030 »- qui cherche à positionner les jeunes comme source de données sur la gouvernance et les ODD en vue de promouvoir une responsabilité commune entre les gouvernements et les communautés en termes de développement urbain.

L’innovation et la technologie doivent se fonder sur des objectifs afin d’être visionnaires et non pas réactionnaires, a soutenu l’un des intervenants au débat interactif.  Abondant en ce sens, un jeune colombien a précisé qu’il faut un objectif économique pour construire des économies durables, et il faut que l’innovation puisse donner lieu à des initiatives positives.  Son organisation utilise par exemple l’IA dans la lutte contre la déforestation.  Enfin, son homologue du Danemark a observé qu’une éducation numérique inclusive permet aux jeunes de jouer un rôle de « défenseurs de la paix et du bien-être numériques ».

Suivez toutes les délibérations sur: 
En direct de l’ONU | Couverture des réunions & communiqués de presse

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.