Vingt-quatrième session,
3e séance plénière – matin
DH/5490

Autochtones: appels lancés aux États Membres pour qu’ils respectent les droits et connaissances de ces peuples sur leurs terres et leurs ressources

Aujourd’hui, l’Instance permanente sur les questions autochtones a commencé sa discussion sur le thème « L’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones dans les États Membres de l’ONU et le système des Nations Unies, y compris la détermination des bonnes pratiques et la résolution des difficultés ».  Ces difficultés sont notamment les taux élevés de marginalisation et de discrimination, qui ont été reconnus par l’ensemble des intervenants, à commencer par les cinq panélistes qui, dans leurs exposés, ont abordé différents angles de cette question en s’appuyant sur les principes érigés dans la Déclaration.  Adopté en 2007, ce texte constitue une véritable « boussole » pour les politiques publiques, selon le Groupe des Amis des peuples autochtones. 

Dans un appel à l’action, M. Francisco Cali Tsay, ancien Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, a demandé que ces peuples poursuivent leur combat et ne se laissent pas griser par les succès obtenus jusque-là, ni endormir par la monotonie.  Il a notamment évoqué le paradoxe des peuples autochtones qui sont les plus engagés dans la conservation des ressources naturelles mais qui sont aussi ceux qui souffrent le plus de leur mésusage.  Pour M. Cali Tsay, il est impératif de veiller au respect de leurs droits et de tenir les États Membres responsables à ce propos.  Le soutien du Fonds de développement pour les peuples autochtones d’Amérique latine et des Caraïbes (FILAC) s’inscrit dans cette volonté, a expliqué sa représentante, puisqu’il accompagne les processus nationaux et régionaux de mise en œuvre de la Déclaration ainsi que les dialogues interculturels afin de construire des sociétés plus inclusives.

Reconnaissant également que les peuples autochtones sont les « gardiens de la biodiversité », M. Freddy Mamani Machaca, Coordonnateur des affaires autochtones de l’Organisation du Traité de coopération amazonienne, a réaffirmé qu’ils sont les véritables gardiens de la forêt amazonienne, puisque les territoires de ces peuples sont mieux conservés que les aires protégées modernes.  La région de l’Amazonie compte environ 50 millions d’habitants, dont 420 à 511 peuples autochtones.  Parmi eux, 346 ont des titres de propriété sur leurs terres.  Les directives de l’Organisation du Traité de coopération amazonienne recommandent d’ailleurs à la communauté internationale de s’appuyer sur les connaissances des peuples autochtones pour lutter contre les changements climatiques, notamment pour les moyens d’adaptation et d’atténuation. 

Un moyen a justement été trouvé pour donner plus de visibilité à leurs connaissances traditionnelles, a signalé le représentant du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, faisant savoir qu’il a été décidé cette année de mettre en place un organe permanent dédié aux communautés et peuples autochtones.  C’est une instance internationale où les parties prenantes autochtones pourront élaborer des outils et des politiques pour respecter les engagements de la Convention.

Revenant sur la responsabilité des États Membres, Mme Katie Kiss, Commissaire à la justice sociale des peuples aborigènes et peuples insulaires du détroit de Torres, a expliqué que veiller au respect des droits des autochtones signifie notamment militer pour que les gouvernements reconnaissent les droits intrinsèques des peuples autochtones et, à défaut, aient des comptes à rendre.  On a besoin d’identifier ce qui doit changer, a-t-elle relevé, insistant pour que les gouvernements participent à ce processus.  Pour la Commissaire, les engagements des gouvernements envers les peuples autochtones ne doivent pas se faire au compte-gouttes, mais être constants et réguliers. 

Encore faut-il que les politiques publiques puissent se baser sur des données fiables, a relevé Mme Robie Halip, du consortium du Navigateur autochtone, en citant des exemples concrets d’initiatives lancées par les communautés autochtones pour collecter de telles données. Elle a parlé notamment d’études communautaires et nationales encadrées par son organisation pour surveiller le niveau de reconnaissance et de mise en œuvre des droits consacrés dans la Déclaration. Actuellement, avec le soutien continu de l’Union européenne, le Navigateur autochtone est mis en œuvre dans 29 pays d’Asie, d’Arctique, d’Afrique et d’Amérique latine, s’est-elle félicitée.

Pour donner un aperçu du chemin qui reste à parcourir, Mme Halip a pointé que, selon les enquêtes communautaires menées, il y a toujours un manque de reconnaissance des droits collectifs des peuples autochtones sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources, ainsi qu’une non-application du principe de consentement libre, préalable et éclairé sur les questions qui les concernent.  Dans les enquêtes nationales, 62% des personnes interrogées ont répondu que la Constitution de leur État ne reconnaissait pas le droit des peuples autochtones à déterminer librement leur statut politique et à poursuivre leur développement économique, social et culturel. 

Au niveau des enquêtes communautaires, 82% des personnes interrogées ont déclaré être confrontées à des conflits liés à la terre ou aux ressources, notamment à l’exploitation forestière illégale ou à d’autres activités illégales, à des litiges au sein des communautés ou entre celles-ci, aux colons, aux industries extractives et aux plantations à grande échelle, entre autres.  L’accès à la justice et aux voies de recours reste insuffisant pour de nombreuses communautés autochtones, 66% des personnes interrogées déclarant que les auteurs de violations commises sur leur territoire n’ont pas été traduits devant la justice nationale.  En matière d’éducation, les données disponibles révèlent que l’enseignement dans la langue maternelle reste un défi et que seul un petit nombre de jeunes autochtones ont accès à l’enseignement supérieur et aux études supérieures. 

Inscrite dans la même démarche, Mme Alison Kelliher, de la Bloomberg School of Public Health Center for Indigenous Health Family and Integrative Medicine, est venue présenter une étude ayant permis d’identifier « le caractère autochtone de la santé ».  S’appuyant sur 16 facteurs de risque et 17 actions de protection identifiées, cette étude devrait permettre d’améliorer la réponse aux problèmes de santé touchant les personnes autochtones et de déterminer dans quelle mesure les aspects d’équité et les droits autochtones sont reconnus dans les cadres de santé.  L’intervenante a encouragé les participants à la discussion à répliquer cette étude dans leurs communautés et pays respectifs.

Suivez toutes les délibérations: En direct de l’ONU | Couverture des réunions & communiqués de presse

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.