SC/15815

Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés en Iraq

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à l’occasion de l’examen du cinquième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé en Iraq (S/2024/247), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de sa présidente, les messages suivants:

À toutes les parties au conflit en Iraq:

  • Condamne fermement toutes les violations et exactions qui continuent d’être commises contre les enfants en Iraq et se déclare préoccupé par l’augmentation des faits relevant de cinq des six violations graves; demande instamment à toutes les parties au conflit de prévenir et de faire cesser immédiatement toutes les exactions et les violences commises contre les enfants, notamment les meurtres ou les atteintes à l’intégrité physique d’enfants, le recrutement et l’utilisation d’enfants, le viol et d’autres formes de violence sexuelle, les attaques contre des écoles et des hôpitaux, les enlèvements et le refus d’accès humanitaire, et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international;
  • Demande à toutes les parties de poursuivre l’application des conclusions précédentes du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et le conflit armé en Iraq (S/AC.51/2022/3);
  • Compte tenu de la réduction des effectifs et du retrait de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes (UNITAD), souligne qu’il importe de faire appliquer le principe de responsabilité concernant les violations et les exactions commises contre des enfants en temps de conflit armé, de faire traduire en justice les personnes qui en sont responsables et de leur demander des comptes sans plus attendre, notamment de procéder à des enquêtes systématiques et diligentes et, s’il y a lieu, d’engager des poursuites judiciaires et de prononcer des condamnations;
  • Insiste sur le fait que, lors de la planification et de la mise en œuvre des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale et les vulnérabilités et les besoins particuliers des filles et des garçons doivent être dûment pris en compte, notamment ceux des enfants qui sont touchés de manière disproportionnée;
  • Se déclare préoccupé par l’augmentation considérable des cas de recrutement et d’utilisation d’enfants par les parties au conflit armé dont il est question dans le rapport et note avec inquiétude que des cas ont été attribués aux Forces de défense du peuple du Parti des travailleurs du Kurdistan (HPG/PKK) et à l’EIIL (Daech); note également que de nombreux cas ne sont pas signalés par crainte de représailles ou ne peuvent être confirmés en raison de difficultés d’accès ou de problèmes de sécurité; note en outre que des enfants ont été employés comme combattants ou comme auxiliaires, notamment pour garder les points de contrôle, collecter des renseignements ou porter des messages; exhorte vivement toutes les parties à libérer immédiatement, sans conditions préalables, tous les enfants qui pourraient leur être associés, à les remettre aux acteurs civils chargés de la protection de l’enfance et à prévenir et à faire cesser le recrutement et l’utilisation d’enfants, conformément aux obligations imposées par le droit international, notamment le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;
  • Se félicite de la diminution du nombre d’enfants détenus par les forces de sécurité iraquiennes; se déclare toutefois profondément préoccupé par le fait que des enfants continuent d’être privés de liberté, notamment en raison de leur association réelle ou présumée à des groupes armés, dont des groupes désignés comme terroristes par le Conseil de sécurité, principalement l’EIIL (Daech); prend note des difficultés rencontrées par les personnes détenues pour accéder à des services juridiques, éducatifs, sociaux ou autres; exhorte toutes les parties au conflit à traiter avant tout les enfants, y compris ceux qui pourraient avoir commis des crimes, comme des victimes qui ont été recrutées et utilisées, à œuvrer à leur libération, à leur rétablissement et à leur pleine réintégration dans la société au moyen de programmes de réintégration familiale et locale qui tiennent compte des questions liées au genre, à l’âge et au handicap, notamment en leur assurant l’accès, dans des conditions d’égalité, à des soins de santé, y compris des soins de santé mentale, à un soutien psychosocial et à des programmes éducatifs inclusifs, équitables et de qualité, ainsi qu’en sensibilisant les populations et en travaillant avec elles en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants et de faciliter leur retour, en prenant note à cet égard des Principes et lignes directrices sur les enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (Principes de Paris), et à permettre à l’Organisation des Nations Unies, en coordination avec les autorités iraquiennes concernées, d’accéder à tous les centres de détention et à tout autre établissement dans lequel des enfants sont détenus;
  • Se déclare gravement préoccupé par le nombre d’enfants tués ou mutilés, constate que la majorité des victimes ont été touchées par des engins explosifs et des engins explosifs improvisés ou blessées après avoir accidentellement déclenché des dispositifs en les ramassant ou en marchant dessus alors qu’elles gardaient du bétail autour de villages ou jouaient principalement dans des zones qui étaient auparavant sous le contrôle de l’EIIL (Daech); se déclare également préoccupé par le nombre de décès et de blessures causés chez les enfants par des combats au sol et des frappes aériennes; demande instamment à l’ensemble des parties de prendre les mesures possibles pour prévenir et réduire au minimum les atteintes et mieux protéger les enfants, y compris pendant les opérations militaires, ainsi que contre les risques inhérents aux restes explosifs de guerre et à l’emploi d’armes explosives et contre leurs effets, notamment dans les zones habitées; exhorte toutes les parties à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier les principes de distinction et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter ou, en tout état de cause, réduire autant que faire se peut les dommages causés aux civils ou aux biens de caractère civil;
  • Se déclare profondément préoccupé par les cas de viols et d’autres formes de violence sexuelle perpétrés contre des enfants, constatant que les cas de violence sexuelle continuent d’être sous-estimés; exhorte toutes les parties à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants, en particulier de filles; souligne qu’il importe que les responsables de violences sexuelles et de violences fondées sur le genre commises contre des enfants répondent de leurs actes; souligne qu’il importe de fournir aux personnes rescapées de violences sexuelles liées au conflit des services spécialisés, intégrés et non discriminatoires, notamment dans le domaine psychosocial et dans les domaines de la santé mentale et de la santé, y compris de la santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’une assistance juridictionnelle et des aides à des moyens de subsistance;
  • Félicite la police iraquienne d’avoir évacué d’autres écoles; se déclare vivement inquiet des attaques commises contre des écoles et des hôpitaux et des cas de détournements d’écoles à des fins militaires, ce qui perturbe l’éducation des enfants; demande à toutes les parties au conflit armé de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des établissements scolaires et des hôpitaux, et le personnel qui y travaille, et, en s’appuyant sur la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, signée par l’Iraq en mai 2015, de prévenir et de faire cesser les attaques ou menaces d’attaques contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et d’hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international; demande à toutes les parties de prendre des mesures concrètes pour faciliter la continuité de l’éducation des enfants, comme demandé par le Conseil de sécurité dans sa résolution 2601 (2021);
  • Se dit vivement préoccupé par l’enlèvement d’enfants et demande à toutes les parties concernées, y compris l’EIIL (Daech), d’y mettre un terme et de remettre immédiatement tous les enfants enlevés aux acteurs civils chargés de la protection de l’enfance;
  • Se félicite de la diminution des cas avérés de refus d’accès humanitaire au cours de la période considérée et de l’absence de toute situation confirmée en 2023; se déclare préoccupé par les cas de refus d’accès humanitaire en 2021 et 2022, qui étaient principalement liés à des restrictions administratives qui ont limité ou ralenti la circulation du personnel et des biens humanitaires, entravant ainsi les opérations humanitaires, ou au refus de passage aux points de contrôle et à l’interdiction de l’accès à certaines zones; demande à toutes les parties de continuer à permettre et à faciliter un accès sûr, rapide et sans entrave aux enfants, notamment à ceux qui se trouvent en détention, quel que soit leur statut juridique, conformément aux principes d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance qui régissent l’action humanitaire, ainsi qu’aux principes directeurs de l’ONU relatifs à l’aide humanitaire, de respecter la nature exclusivement humanitaire et impartiale de l’aide humanitaire et de respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire et le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires sans discrimination;
  • Condamne dans les termes les plus fermes les violations et atteintes odieuses et les violences extrêmes perpétrées par l’EIIL (Daech) contre des enfants, notamment des enfants appartenant à des minorités religieuses et ethniques, en particulier les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, le recrutement et l’utilisation d’enfants, l’enlèvement et le viol et d’autres formes de violence sexuelle, soulignant que ces violations et atteintes peuvent constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité; réaffirme que le terrorisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, constitue l’une des menaces les plus graves contre la paix et la sécurité internationales et que tous les actes de terrorisme sont criminels et injustifiables, quels qu’en soient les motivations, le moment et les auteurs;
  • Demande instamment à l’EIIL (Daech) de prendre immédiatement les mesures suivantes:
    • mettre un terme à toutes les attaques visant des civils et des installations civiles, en particulier celles qui font des morts et des blessés parmi les enfants, respecter pleinement le droit international humanitaire, notamment en cessant de prendre pour cible des populations civiles, en particulier des enfants, et en mettant fin à toute attaque disproportionnée et indiscriminée dans des zones habitées, notamment aux attentats-suicides et aux attaques perpétrées au moyen de tactiques terroristes et à toute autre forme de violence extrême, et cesser d’utiliser des armes sans discrimination, en particulier des engins explosifs improvisés ainsi que toute arme interdite par le droit international;
    • faire cesser et prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants dans le conflit armé, mettre fin à l’enlèvement et à la formation militaire d’enfants et libérer sans conditions préalables tous les enfants qui demeurent sous son contrôle;
    • mettre fin aux viols et aux autres formes de violence sexuelle sur la personne d’enfants, comme les mariages d’enfants, les mariages précoces et forcés, l’esclavage sexuel et la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, notamment sur la personne d’enfants appartenant à des minorités ethniques ou religieuses;
    • mettre un terme aux enlèvements d’enfants et à toutes les violations et atteintes commises contre les enfants enlevés, en particulier les filles, qui courent plus le risque d’être enlevées en Iraq, libérer sans conditions préalables tous les enfants enlevés et permettre à ceux-ci, dans leur intérêt supérieur, de retrouver rapidement leur famille, ou donner des informations sur leur sort s’ils ne sont plus en vie.

Aux notables locaux et aux chefs religieux:

  • Souligne le rôle majeur que jouent les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;
  • Les exhorte à renforcer la protection au niveau local et à condamner publiquement les violations et les exactions commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, les meurtres ou atteintes à l’intégrité physique, le viol et les autres formes de violence sexuelle, les attaques et les menaces d’attaque visant des écoles et des hôpitaux, les enlèvements et le refus de l’accès humanitaire, tout en continuant de se mobiliser pour prévenir et faire cesser ces violations et atteintes, et à se concerter collectivement avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les parties prenantes pour favoriser la réintégration, au sein de leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par des activités de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.

 

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.