SC/15808
Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés en Somalie
Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à l’occasion de l’examen du sixième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé en Somalie (S/2022/397), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de sa présidente, les messages suivants:
À toutes les parties au conflit armé en Somalie mentionnées dans le rapport du Secrétaire général:
- Condamnant fermement toutes les violations et exactions qui continuent d’être commises contre les enfants en Somalie dans des proportions alarmantes, notant que la majorité des violations et des exactions vérifiées au cours de la période couverte par le rapport ont été attribuées aux Chabab, et notant avec inquiétude les conséquences négatives disproportionnées qu’ont sur les enfants l’insécurité alimentaire omniprésente, la pandémie de COVID-19 et la situation humanitaire désastreuse, qui ont davantage accentué les problèmes existants, exigeant que toutes les parties au conflit fassent cesser et préviennent immédiatement toutes les violences et les exactions commises contre les enfants, notamment les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique d’enfants, le recrutement et l’utilisation d’enfants, le viol et d’autres formes de violence sexuelle, les attaques contre des écoles et des hôpitaux, les enlèvements et le refus d’accès humanitaire, notant que les cas liés aux six violations graves commises contre des enfants ne sont pas tous signalés en raison de problèmes d’accès, et exigeant que toutes les parties s’acquittent des obligations que leur impose le droit international;
- Demandant à toutes les parties de continuer d’appliquer ses conclusions précédentes sur les enfants et le conflit armé en Somalie (S/AC.51/2020/6);
- Soulignant qu’il importe de faire appliquer le principe de responsabilité concernant l’ensemble des violations et exactions commises contre des enfants en temps de conflit armé, de faire traduire en justice toutes les personnes qui en sont responsables et de leur demander des comptes sans plus attendre, notamment de procéder à des enquêtes exhaustives, indépendantes, systématiques et diligentes et, s’il y a lieu, d’engager des poursuites judiciaires et de prononcer des condamnations;
- Insistant sur le fait que, lors de la planification et de la mise en œuvre des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale et les vulnérabilités et les besoins particuliers des filles et des garçons doivent être dûment pris en compte, notamment ceux qui sont touchés de manière disproportionnée;
- Exprimant sa profonde préoccupation quant au nombre élevé d’enfants recrutés et utilisés dans le conflit armé, dont la majorité a été recrutée et utilisée par les Chabab, condamnant ces pratiques, notant que certains enfants n’avaient pas plus de 10 ans et que des enfants ont été utilisés comme combattants et dans des rôles de soutien comme gardes du corps ou chargés des tâches de nettoyage ou du fonctionnement des points de contrôle, et demandant instamment à toutes les parties au conflit, en particulier aux Chabab, de libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants qui leur sont associés, de les remettre aux acteurs civils compétents en matière de protection de l’enfance et de cesser et empêcher tout nouveau recrutement et toute nouvelle utilisation d’enfants, y compris le réenrôlement d’enfants qui ont été libérés, conformément aux obligations que leur impose le droit international et, le cas échéant, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;
- Se déclarant gravement préoccupé par le nombre toujours élevé d’enfants privés de liberté pour association ou association présumée avec des groupes armés ou des forces armées, par les poursuites engagées contre des enfants devant des tribunaux militaires et par les cas de peine de mort infligée à des enfants, exhortant toutes les parties au conflit à traiter ces enfants avant tout comme des victimes qui ont été recrutées et utilisées, exhortant le Gouvernement fédéral somalien à respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant, en particulier l’obligation de ne recourir à l’arrestation, à la détention et à l’emprisonnement d’enfants qu’en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, et à donner la priorité à la réintégration de ces enfants, conformément aux Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (Principes de Paris), qu’il a approuvés, exhortant le Gouvernement fédéral somalien à appliquer systématiquement les instructions permanentes relatives à la prise en charge et à la remise d’enfants séparés des groupes armés, approuvées par la Somalie en 2014;
- Se déclarant profondément préoccupé par le nombre toujours élevé d’enfants tués ou victimes d’atteintes à leur intégrité physique en Somalie et par l’augmentation significative du nombre de meurtres ou d’atteintes à l’intégrité physique d’enfants en raison du conflit, la multiplication des attaques au moyen d’engins explosifs improvisés, principalement par les Chabab, ainsi que des tirs croisés de tous les groupes, l’absence de précautions adéquates pour protéger les enfants pendant le conflit armé et les attaques aveugles au moyen d’engins explosifs, y compris des engins explosifs improvisés, des mines et des restes explosifs de guerre, les agressions physiques et les tirs, et demandant instamment à toutes les parties de prendre des mesures spéciales pour protéger les enfants et de respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, en particulier les principes de distinction et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter et, en tout état de cause, réduire au minimum les dommages causés aux civils et aux biens de caractère civil;
- Se déclarant profondément préoccupé par le nombre élevé de cas de viols et d’autres formes de violence sexuelle perpétrés contre des enfants, principalement par des auteurs non identifiés et par les Chabab, y compris des tentatives de viol, et de mariages forcés, notant que les cas de violence sexuelle en Somalie ne sont pas suffisamment signalés, et exhortant vivement toutes les parties au conflit armé à prendre des mesures immédiates et spécifiques pour mettre fin à la perpétration de viols et d’autres formes de violence sexuelle contre des enfants et pour les prévenir, en particulier dans les camps de personnes déplacées à l’intérieur du pays où les enfants courent un risque accru, soulignant qu’il importe que les responsables de violences sexuelles et fondées sur le genre visant des enfants rendent compte de leurs actes, compte tenu en particulier du fait que la plupart des auteurs sont toujours en liberté ou ont été libérés lorsque les communautés ont choisi de recourir à des mécanismes locaux de règlement des différends plutôt qu’au système de justice formel, soulignant qu’il importe de fournir aux victimes et aux personnes rescapées de violences sexuelles des services spécialisés, intégrés et sans distinction, comme dans les domaines psychosocial, de santé mentale et des soins de santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’une assistance juridictionnelle et des aides à des moyens de subsistance;
- Condamnant fermement les attaques contre les écoles et les hôpitaux perpétrées en violation du droit international, dont la majorité a été attribuée aux Chabab, et se déclarant préoccupé par le fait que les Chabab continuent d’exercer des pressions sur les communautés pour qu’elles adoptent son programme et que les allégations de non-respect à cet égard ont entraîné la fermeture d’écoles et l’enlèvement d’enseignants, appelant toutes les parties au conflit armé à se conformer au droit international et à respecter le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, en tant que tel, et à mettre fin aux attaques ou aux menaces d’attaques contre ces institutions et leur personnel en violation du droit international et à les prévenir, notant l’effet que les attaques contre les écoles et leur utilisation peuvent avoir sur l’exercice du droit à l’éducation, se déclarant préoccupé par l’utilisation vérifiée d’une école à des fins militaires qui a mis les élèves en danger et a compromis leur éducation et leur protection, appelant toutes les parties à prendre des mesures concrètes pour faciliter l’accès à l’éducation et à la formation professionnelle, et demandant à toutes les parties de prendre des mesures concrètes pour faciliter la continuité de l’éducation des enfants somaliens, comme demandé dans la résolution 2601 (2021);
- Condamnant fermement le nombre élevé d’enlèvements d’enfants, y compris le recours aux enlèvements collectifs comme tactique de recrutement et d’utilisation, principalement par les Chabab, et exhortant toutes les parties, en particulier les Chabab, à mettre fin aux enlèvements d’enfants et à toutes les violations des droits humains et autres violations et atteintes perpétrées sur la personne d’enfants enlevés, y compris le viol et d’autres formes de violence sexuelle et sexiste, notamment le mariage forcé de filles avec des combattants des Chabab, et à libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants enlevés qui sont en captivité et à les remettre aux acteurs civils compétents en matière de protection de l’enfance;
- Condamnant vigoureusement tous les cas de refus d’accès humanitaire, notamment les attaques visant du personnel humanitaire et le pillage de biens humanitaires, dont la majorité est attribuée aux Chabab, demandant instamment à toutes les parties de permettre et de faciliter l’acheminement rapide, sans entrave et en toute sécurité de l’aide humanitaire aux enfants, conformément aux obligations que leur impose le droit international humanitaire, de respecter les principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, ainsi que les principes directeurs de l’ONU relatifs à l’aide humanitaire, et de respecter la nature exclusivement humanitaire et l’impartialité de l’aide humanitaire, ainsi que les travaux de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans aucune distinction défavorable;
- Saluant les efforts déployés par le Gouvernement fédéral somalien depuis les précédentes conclusions du Groupe de travail pour mettre fin aux six violations graves commises à l’encontre des enfants touchés par le conflit armé et les prévenir, en particulier l’engagement continu et la signature par le Gouvernement fédéral d’une feuille de route visant à accélérer la mise en œuvre du plan d’action destiné à mettre fin au recrutement et à l’utilisation d’enfants par l’Armée nationale somalienne et à les prévenir, et du plan d’action visant à mettre fin aux meurtres et aux atteintes à l’intégrité physique d’enfants par l’Armée nationale somalienne, tous deux signés en 2012, ainsi que la création d’un groupe de travail sur les enfants touchés par le conflit armé au niveau fédéral et au niveau des États Membres, et appelant à la mise en œuvre rapide et effective de ces plans d’action et de la feuille de route, signée en octobre 2019, par toutes les forces de sécurité gouvernementales, y compris l’Armée nationale somalienne et la Police somalienne, ainsi qu’au niveau des États membres de la fédération;
- Rappelant que le Conseil de sécurité, dans sa résolution 2498 (2019), a rappelé les mesures financières et les mesures en matière de déplacements imposées par la résolution 2002 (2011), qui s’appliquent aux personnes et entités désignées par le Comité du Conseil de sécurité faisant suite à la résolution 2713 (2023) concernant les Chabab conformément au paragraphe 43 de la résolution 2093 (2013), dont les actions menacent la paix, la stabilité ou la sécurité de la Somalie, notamment:
- Le recrutement ou l’utilisation d’enfants dans le conflit armé en Somalie par des dirigeants politiques ou militaires en violation du droit international applicable;
- Les violations du droit international applicable en Somalie commises contre des civils, y compris des enfants ou des femmes touchés par le conflit armé, telles que meurtres et mutilations, violences sexuelles ou sexistes, attaques d’écoles ou d’hôpitaux, enlèvements et déplacements forcés;
- Le fait de faire obstacle à l’apport de l’aide humanitaire destinée à la Somalie, à l’accès à cette aide ou à sa distribution dans le pays;
- Déclarant qu’il se tient prêt à communiquer au Conseil de sécurité et au Comité toutes informations utiles pour les aider à adopter des mesures ciblées contre les auteurs de violations;
- Se déclarant gravement préoccupé par le nombre élevé de cas relevant des six violations graves commises sur la personne d’enfants dans le conflit armé attribués aux Chabab, principaux auteurs de ces violations, ainsi qu’aux milices de clan et à des auteurs non identifiés, et par le niveau d’insécurité en Somalie lié aux activités des Chabab, qui ont des effets dévastateurs sur les enfants;
- Demandant à tous les groupes armés non étatiques d’exprimer leur engagement et de prendre des mesures actives pour faire cesser et prévenir toutes les violations et toutes les exactions commises contre les enfants et d’entamer un dialogue avec l’Organisation des Nations Unies pour élaborer, adopter et mettre en œuvre sans délai des plans d’action visant à faire cesser et prévenir toutes les violations et toutes les exactions commises contre les enfants, conformément aux résolutions 1539 (2004), 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011) et 2225 (2015) du Conseil de sécurité;
Aux notables locaux et aux chefs religieux:
- Soulignant le rôle majeur que jouent les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;
- Les exhortant à renforcer le dialogue et la protection au niveau local et à condamner publiquement les violations et les exactions commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, les meurtres ou atteintes à l’intégrité physique, le viol et les autres formes de violence sexuelle sur la personne d’enfants, les attaques et les menaces d’attaque visant des écoles et des hôpitaux, les enlèvements et le refus de l’accès humanitaire, tout en continuant de se mobiliser pour prévenir et faire cesser ces violations et atteintes, et à se concerter avec le Gouvernement fédéral somalien, l’Organisation des Nations Unies et les parties prenantes pour favoriser la réintégration, au sein de leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment grâce à des activités de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.