SG/SM/22040

Le Secrétaire général souhaite que le Conseil de sécurité soit au cœur de la coopération vitale en faveur de la paix et du développement

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée à l’occasion du débat du Conseil de sécurité sur le thème intitulé « Maintien de la paix et de la sécurité internationales: mettre le développement commun au service de la pérennisation de la paix », à New York, aujourd’hui:

Je remercie le Gouvernement chinois d’avoir organisé le présent débat sur le lien vital qui unit le développement et la pérennisation de la paix.

Ce lien définit depuis le tout début l’Organisation des Nations Unies.

Elle repose sur les trois piliers de la paix, du développement et des droits humains, qui ont été réaffirmés à maintes reprises.

Il a été déclaré au Sommet mondial de 2005 que « le développement, la paix et la sécurité et les droits humains étaient inséparables et se renforçaient mutuellement ».

Le développement, à lui seul, ne suffit pas à garantir la paix, mais demeure essentiel. Aucune paix n’est garantie en l’absence d’un développement inclusif et durable qui ne laisse personne de côté.

Il va de soi que ce constat définit aussi le Programme 2030 et ses 17 objectifs de développement durable.

Tout comme la progression d’un objectif entraîne tous les autres, l’échec dans un domaine risque d’effacer toutes les avancées.

Aucun échec n’est plus calamiteux que l’impossibilité de prévenir un conflit. Les acquis du développement sont souvent les premières victimes de la guerre.

Ce schéma se reproduit partout au monde: plus un pays est proche d’un conflit, plus il s’éloigne d’un développement durable et inclusif.

Neuf des dix pays ayant les indicateurs de développement humain les plus faibles au monde ont connu des conflits ou des violences pendant la décennie écoulée.

Les inégalités et l’absence de perspectives, d’emplois décents et de liberté peuvent engendrer la colère et soulever le spectre de la violence et de l’instabilité.

La faiblesse des institutions et la corruption augmentent le risque de conflit.

Le chaos climatique et la dégradation de l’environnement amplifient les crises. L’aggravation constante des urgences climatiques, les records de chaleur et la rivalité croissante autour de ressources qui s’amenuisent entraînent des déplacements de population, ce qui les fragilise et les insécurise davantage.

La criminalité organisée, l’extrémisme violent et les groupes terroristes trouvent un terreau fertile dans ces environnements, effilochant le tissu social, accentuant davantage les insécurités et affaiblissant une gouvernance effective.

Tout comme l’absence de développement nourrit les griefs qui peuvent accroître le risque de conflit, le contraire est tout aussi vrai.

Le développement humain éclaire la voie de l’espoir et favorise la prévention, la sécurité et la paix.

C’est pourquoi l’avancée de la paix et la progression d’un développement durable et inclusif vont de pair.

Édifier la paix signifie garantir la sécurité alimentaire, l’accès à l’éducation, le renforcement des compétences, les soins de santé, la protection sociale et la dignité pour tous.

Cela signifie renforcer la résilience, face aux chocs climatiques, et investir dans l’adaptation.

Cela signifie réduire la fracture numérique et exploiter les avantages de l’inclusion numérique, tout en se protégeant contre les dangers des nouvelles technologies.

Cela signifie concilier la fin des inégalités de pouvoir et la participation égale des femmes, et créer des possibilités pour les jeunes.

Et cela signifie augmenter massivement des financements à long terme abordables pour les pays en développement afin qu’ils puissent investir dans les biens et services publics pour leurs populations.

À un moment où 85% des cibles liées aux objectifs de développement durable ne sont pas en bonne voie, nous devons, sur la base de ce constat, agir de façon beaucoup plus urgente et plus ambitieuse.

Les pays en développement et en particulier les pays les moins avancés sont pris dans une convergence de crises, une dette écrasante, une marge de manœuvre budgétaire réduite et l’envolée des prix, l’intensification des catastrophes climatiques, le creusement des inégalités et l’aggravation du chômage et de la pauvreté, et les effets persistants de la pandémie de COVID-19 et l’inégalité de la reprise.

Cela mène tout droit aux conflits sociaux, à l’instabilité politique, voire à un conflit ouvert.

Nous devons en faire plus pour aider les pays qui sont dans une mauvaise passe.

J’ai préconisé des mesures audacieuses visant à rendre nos institutions mondiales, dont le dispositif financier international, plus représentatives des réalités actuelles et plus réactives aux besoins des économies en développement.

J’ai proposé une série de mesures concrètes à prendre dès aujourd’hui, notamment un plan de relance des objectifs de développement durable à hauteur de 500 milliards de dollars par an, pour réduire le fardeau de la dette et libérer des ressources en vue d’un financement à long terme et abordable provenant de sources multilatérales et privées, car investir dans le développement aujourd’hui signifie investir dans un avenir plus pacifique.

Chaque jour, les fonctionnaires des Nations Unies concrétisent le lien entre la paix, le développement et la justice dans leurs activités, partout au monde.

Nos équipes de pays des Nations Unies sont le fer de lance de l’action visant à accompagner les priorités nationales en matière de développement durable et inclusif. 

Nos opérations de maintien de la paix aident les États Membres, tandis qu’ils gèrent et règlent les conflits.

Mes envoyés et nos missions politiques spéciales facilitent les processus politiques par la médiation, empêchant l’éclatement d’un conflit ouvert.

La Commission de consolidation de la paix réunit la communauté internationale autour de la notion d’un renforcement mutuel de la paix et du développement.

Je demande aux États Membres de renforcer la Commission, ainsi que l’efficacité de ses travaux.

Le Conseil de sécurité pourrait en particulier solliciter plus systématiquement son avis sur les aspects de consolidation de la paix des mandats des opérations de paix.

Nos opérations de paix devraient être habilitées à jouer un plus grand rôle dans la pérennisation de la paix, à toutes les étapes du conflit et dans toutes ses dimensions.

Nous sommes fiers de nos travaux.  Mais nous savons qu’il faut en faire davantage pour relier l’action humanitaire et l’action de paix et de développement.

J’ai formulé des propositions en vue d’un Nouvel Agenda pour la paix à une époque de tensions croissantes et de prolifération des conflits.

Ces idées s’articulent autour des principes fondateurs de la Charte des Nations Unies et d’un monde stable.

Nous proposons des réflexions approfondies, conscients de la nature interdépendante des nombreux problèmes auxquels nous faisons face, ce qui reflète clairement notre attachement à arrimer plus fermement l’action pour la paix dans les objectifs de développement durable.

Il faudra, à cette fin, agir plus résolument pour renforcer la prévention, ancrée dans le plein respect de tous les droits humains: civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

Il faudra également transformer les dynamiques de pouvoir genrées et intergénérationnelles dans tous les domaines, y compris la paix et la sécurité.

Il est grand temps d’agir pour garantir le rôle moteur des femmes et des jeunes et leur participation réelle aux prises de décision, afin d’éliminer toutes les formes de violence à l’égard des femmes et de faire respecter leurs droits.

Le Nouvel Agenda pour la paix présente une vision pour prévenir les conflits, pérenniser la paix et promouvoir le développement qui s’applique à toutes et tous, dans tous les pays, à chaque instant.

En tant que communauté internationale, nous devons prendre conscience que nous ne sommes qu’aussi forts que notre maillon le plus faible.

Ce sentiment d’une vulnérabilité partagée doit se traduire en un objectif commun pour sauver des vies et préserver les avancées en matière de développement, à tout moment et partout où ces avancées sont menacées.

Aussi, je me félicite de l’adoption en septembre dernier de la déclaration politique issue du Sommet sur les Objectifs de développement durable et de l’engagement commun pris par les États Membres de mettre en œuvre – et je cite – « des mesures audacieuses, ambitieuses, régulières, justes et transformatrices, ancrées dans la solidarité internationale et une coopération efficace à tous les niveaux ».

Aujourd’hui, j’invite tous les États Membres à aborder le Sommet de l’avenir dans ce même esprit de solidarité et d’ambition.

Pour garantir la paix et faire progresser le développement, nous devons abandonner la logique de la concurrence à somme nulle, qui est vouée à l’échec, nous réengager dans la voie de la coopération et trouver le courage de faire des compromis.

Le Conseil de sécurité doit être au cœur de cet effort vital.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.