SG/SM/21985

Le Secrétaire général présente le projet de budget-programme 2024 qui « dénote l’accent accru que nous mettons sur les résultats »

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée devant la Cinquième Commission de l’Assemblée générale, à New York, aujourd’hui:

Je me réjouis de l’occasion qui m’est donnée ici de présenter le projet de budget-programme pour 2024.  Ce budget est présenté à un moment où nous faisons face à des problèmes sur tous les fronts.  Des conflits perturbent la vie et les moyens d’existence de millions de personnes.

La menace nucléaire prend de l’ampleur.  Les droits humains sont mis à mal.  Les besoins humanitaires atteignent des niveaux record.  Les inégalités se creusent et la perspective d’atteindre les objectifs de développement durable s’éloigne.  Et les catastrophes climatiques sont de plus en fréquentes, de plus en plus meurtrières et de plus en plus coûteuses.

Un pays sur trois présente un risque élevé de crise budgétaire, et près de la moitié des personnes touchées par l’extrême pauvreté vivent dans des pays aux prises avec de graves problèmes budgétaires.  Le rôle de l’Organisation des Nations Unies n’a jamais été plus déterminant – et nous intensifions nos efforts.

Nous avons proposé Notre Programme commun pour aider à accélérer la réalisation des objectifs de développement durable et forger un multilatéralisme plus inclusif, plus solide et plus efficace pour le XXIe siècle.

J’ai proposé un plan de relance des objectifs de développement durable pour accroître massivement les financements à long terme abordables en faveur des pays en développement afin d’aider à sauver les objectifs de développement durable.  Je tiens à rendre hommage à tous les États membres pour le consensus atteint dans la déclaration sur les ODD, que je considère comme l’un des documents les plus importants jamais adoptés par l’Assemblée générale.

Nous plaidons en faveur d’un pacte de solidarité climatique et d’un programme d’accélération afin d’aider à s’attaquer à la crise climatique avant qu’il ne soit trop tard. Sur ces fronts et sur bien d’autres encore, nous sommes déterminés à œuvrer pour la paix, le développement durable et les droits humains.

Les propositions du projet de budget-programme pour 2024 reflètent notre engagement à améliorer la vie des populations et ériger une culture de progrès constant pour pouvoir exécuter nos mandats de manière efficace et rationnelle.  Nos investissements dans la réforme sont en train de porter leurs fruits.  Le système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents apporte un soutien renforcé et concerté aux pays pour la mise en œuvre du Programme 2030.

Pas moins de 88% des gouvernements hôtes ont indiqué que les coordonnatrices et coordonnateurs résidents assurent un leadership efficace et stratégique à l’appui de leurs plans et priorités nationaux.  Tous les pays les moins avancés et les pays en développement sans littoral interrogés ont indiqué que les activités du système des Nations Unies étaient étroitement alignées sur leurs besoins et leurs priorités.  Et tous les petits États insulaires en développement ont indiqué que la collaboration entre les entités des Nations Unies s’était améliorée depuis la mise en place des réformes.

Cela étant, le maintien de l’efficacité du système des Nations Unies pour le développement dépendra de la mesure dans laquelle nous pourront garantir un financement suffisant et prévisible.  Les réformes menées dans le domaine de la paix et de la sécurité nous ont permis de commencer à mettre en œuvre des stratégies régionales intégrées – et ainsi mieux coordonner notre action avec les organisations régionales et sous-régionales et d’autres parties prenantes. 

Il y a désormais un seul point de contact pour les missions de maintien de la paix et les missions politiques spéciales opérant dans une même région et ayant des mandats distincts mais complémentaires.  Le Bureau d’appui à la consolidation de la paix, qui a été renforcé, est maintenant chargé d’assurer la jonction avec le pilier Développement.

Ces progrès peuvent être consolidés si cette Commission accueille favorablement ma demande de financement prévisible et durable du Fonds pour la consolidation de la paix à travers des contributions statutaires.

Et je tiens à souligner que tous les pays qui bénéficient de ce fonds sont unanimes à reconnaître l’efficacité du fonds, la rapidité de l’action du fonds et surtout l’effet multiplicateur, notamment, en permettant que d’autres instruments financiers, y compris les banques internationales de développement puissent aussi joindre les efforts du fonds.  Cet effet multiplicateur est extrêmement important pour les pays en développement qui n’ont pas un accès facile à d’autres sources de financement. 

Nos réformes de gestion répondent à une logique d’amélioration constante.  Le soutien politique et opérationnel est plus ciblé et plus adapté.  Nous sommes davantage concentrés sur notre action sur le terrain et ses résultats – et sommes devenus de plus en plus prestes et agiles.  Et nous simplifions nos règles et procédures.  Nous renforçons également les contrôles internes et à améliorons la transparence en matière d’utilisation des ressources.

Davantage d’informations ont été mises à la disposition des États Membres et du Comité consultatif sur des portails – à savoir le système pilote d’information budgétaire et le tableau de bord des résultats « results.un.org » – dotés de meilleurs outils permettant d’extraire et d’analyser des informations sur les ressources et les programmes.

Nous avons mis en service un système intégré de gestion de la performance et de communication de l’information qui, à l’avenir, rendra plus visibles les résultats des programmes à mesure que nous élargirons son champ d’application et veillerons à ce qu’il soit adopté de manière cohérente.

Les États Membres ont accès à davantage d’informations sur le personnel et les données démographiques connexes grâce au nouveau portail du Secrétariat consacré au personnel.  Le portail des États Membres relatif au personnel en tenue permet aux pays fournisseurs de contingents et de personnel de police de s’informer sur le versement des remboursements et la conclusion de mémorandums d’accord.

Mais nos efforts visant à améliorer l’exécution des programmes ne peuvent aboutir que si nous disposons de liquidités.  Notre situation de trésorerie a empiré cette année, les recouvrements jusqu’à la fin du troisième trimestre ayant diminué.  Plus précisément, nous avons collecté seulement 64% des contributions mises en recouvrement cette année contre 71,9% en 2022 et 82,7% en 2021.

La tendance à effectuer les paiements plus tard dans l’année commence à être très inquiétante, et engendre, comme vous pouvez l’imaginer, un problème de gestion extrêmement difficile.  En août, nous avons dû emprunter la totalité du solde du Fonds de roulement.  En octobre, il nous faut emprunter au Compte spécial.  En novembre, nous serons près d’épuiser l’excédent de trésorerie des tribunaux internationaux fermés, ce qui entraînera une crise de paiements à moins que la situation ne s’améliore sur le plan de la collecte des contributions mises en recouvrement.

Afin d’aligner les sorties de fonds avec les réserves, des mesures temporaires de gestion de la trésorerie ont été prises à la mi-juillet dans l’espoir de pouvoir les lever avant la fin septembre.  Malheureusement, nous avons dû mettre en place des mesures supplémentaires en septembre.

Comme ils l’ont fait récemment, les gestionnaires de programme s’efforceront de réduire les effets négatifs sur l’exécution des programmes.  Toutefois, la prolongation des mesures d’économie, notamment le gel des recrutements, compromettra l’exécution de certains mandats.  Même dans le meilleur des cas, nous commencerons l’année 2024 avec moins de liquidités que pour l’année 2023, parce que nous avons restitué des crédits au début de 2023. 

Cela illustre l’absurdité de nos règles budgétaires: nous devons restituer l’argent que nous n’avons pas pu dépenser pendant l’année parce que nous ne l’avons pas reçu à temps.  Par conséquent, sans une amélioration drastique de la situation de trésorerie avant la fin de l’année, l’exécution des programmes en 2024 sera probablement plus fortement compromise encore.

Je remercie les 137 États Membres qui ont acquitté l’intégralité de leurs quotes-parts.  Je suis encouragé par le fait qu’un plus grand nombre d’États Membres versent maintenant l’intégralité de leurs quotes-parts plus tôt que durant les 20 dernières années et j’engage tous les États Membres à faire de même.

En décembre 2022, l’Assemblée générale a mis un terme à la période d’essai et officialisé le passage à l’exercice budgétaire annuel.  Nous sommes reconnaissants de ce soutien et nous continuerons d’appliquer toutes les orientations données par l’Assemblée générale.

La formule retenue pour la présentation du budget-programme de 2024 s’est stabilisée. Les projets de plan-programme pour 2024 dénotent l’accent accru que nous mettons sur les résultats.  Nos 350 cadres de résultats continuent de s’améliorer et tendent de plus en plus à démontrer l’incidence de notre travail sur le terrain et les changements positifs apportés à ce travail.

Plus de 60% des cibles quantitatives prévues visent désormais une augmentation de 10% au moins des résultats.  Ce chiffre est en hausse par rapport à 2023, où il s’établissait à 45%, et par rapport à l’exercice biennal 2018-2019, où il était inférieur à 30%.  Nous avons réduit les doublons dans les stratégies et les produits, tout en conservant le même volume d’informations données.

Notre message est clair: chaque gestionnaire de programme doit examiner attentivement chaque dollar qui est dépensé ou qu’il est prévu de dépenser.  Et chaque gestionnaire de programme doit réexaminer et ajuster les activités relatives aux programmes pour atteindre les résultats prévus.  Cela nous permettra d’utiliser au mieux les ressources pour exécuter les mandats et de nous concentrer encore plus efficacement sur les résultats.

Permettez-moi à présent d’aborder les prévisions de dépenses globales du projet de budget-programme pour 2024.  Pour exécuter l’intégralité de nos mandats, nous aurons besoin d’un montant total de 3,3 milliards de dollars.  Ce montant couvre 10 334 postes, soit une augmentation nette de 199 postes, sans compter les missions politiques spéciales.  La plupart des postes supplémentaires sont nécessaires pour exécuter les nouveaux mandats intergouvernementaux.

Nous proposons également la transformation de postes jusqu’à présent financés au moyen de ressources extrabudgétaires, afin d’assurer un financement adéquat, pérenne et prévisible des activités prescrites, essentiellement dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et des droits humains.

Par ailleurs, vous examinerez plus tard durant la session, des propositions supplémentaires pour des travaux de construction, des prévisions révisées – notamment au titre de l’action que nous menons pour lutter contre la discrimination raciale au Secrétariat – et les incidences sur le budget-programme.

Nous n’avons ménagé aucun effort pour trouver des gains d’efficacité qui nous permettraient de consacrer plus de ressources à l’exécution directe des activités relatives aux programmes qui sont prescrites.  Dans le même temps, les besoins en ressources des départements d’appui ont atteint la limite de ce qui est nécessaire pour assurer un soutien adéquat et continu en matière de politiques, d’opérations et de communication dans les domaines programmatiques.

Dans l’ensemble, si l’on exclut l’actualisation des coûts, les projets de construction et les nouveaux mandats, le budget-programme que je propose reste globalement au niveau de 2023 et, en termes réels, il est inférieur au niveau du budget de 2019, qui a précédé mon premier budget-programme annuel.

Je voudrais souligner quatre éléments en particulier.  Premièrement, nous proposons de continuer à investir dans le développement durable.  Nous proposons une augmentation de 4 millions de dollars pour les programmes du pilier Développement.  Il s’agit de la cinquième augmentation consécutive demandée pour le développement. De ce fait, les ressources relatives au programme ordinaire de coopération technique ont augmenté de 30% par rapport aux ressources approuvées en 2019.

Je dois dire que je suis un fervent partisan de ce programme régulier.  Dépenser des fonds avec nos propres postes, c’est une chose, pouvoir dépenser des fonds en apportant un soutien direct aux gouvernements dans leur action pour promouvoir le développement de leurs pays, c’en est une autre.  Je pense que nous devrions progressivement disposer d’une organisation budgétaire dans laquelle cette capacité à soutenir les gouvernements devrait augmenter de manière substantielle.

Nous proposons également d’augmenter de 25% le nombre de postes dans le Bureau de la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement afin d’accroître notre capacité à soutenir les pays les moins avancés et les pays sans littoral ainsi que les petits États insulaires en développement.

Je propose également une augmentation de 700 000 dollars pour le Département des affaires économiques et sociales afin de mettre en œuvre le nouveau mandat sur l’amélioration des dispositifs de gestion de l’information géospatiale à l’échelle mondiale. Je propose une modalité de financement du Compte de l’ONU pour le développement, qui garantira que les ressources futures s’élèveront à 0,5% du budget approuvé de l’année antérieure.  Cela garantira une plus grande prévisibilité et moins de fluctuations d’une année sur l’autre, ce qui facilitera la planification des projets et améliorera les taux d’exécution.

Deuxièmement, nous nous efforçons de dégager un financement supplémentaire au titre du budget ordinaire pour les droits humains et l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient.

Sur la base des orientations données l’année dernière par l’Assemblée générale, nous proposons un montant supplémentaire de 15 millions de dollars, afin de convertir en financement au titre du budget ordinaire les coûts opérationnels liés aux fonctions exécutives et de gestion de l’UNRWA, qui dépendaient jusqu’à présent de ressources extrabudgétaires.  Je ne saurais insister davantage sur les besoins de l’UNRWA.  Nous savons tous à quel point le travail de l’UNRWA est d’une importance capitale pour le peuple palestinien et pour la paix et la stabilité.

En outre, sur la base des orientations de l’Assemblée, nous avons inclus de nouvelles propositions de consolidation des ressources pour les mandats du Conseil des droits de l’homme dans le projet de budget-programme, afin de réduire la fragmentation des projets de budget, et d’engendrer une plus grande prévisibilité et de permettre une meilleure planification de l’utilisation des ressources par l’Office.

Nous prévoyons également un financement au titre du budget ordinaire pour répondre aux demandes croissantes dans le cadre des mandats existants, pour soutenir les processus intergouvernementaux, pour renforcer l’évaluation et pour réduire l’arriéré de travail du système des organes créés en vertu d’instruments relatifs aux droits de l’homme.

Troisièmement, nous proposons d’aider davantage les États Membres à lutter contre le terrorisme.  Dans le cadre du budget-programme, nous demandons 4,3 millions de dollars supplémentaires pour le Bureau de lutte contre le terrorisme, notamment la transformation de 24 postes financés par des ressources extrabudgétaires, en s’appuyant sur les propositions de l’année dernière.  Ceci est conforme aux orientations de l’Assemblée générale.

Quatrièmement, il faut renforcer la protection des données et de la vie privée, et garantir la circulation, l’utilisation et le partage responsables des données personnelles par les entités du Secrétariat à l’appui des mandats de l’ONU.  À cet effet, je propose la création d’un petit bureau technique de la protection des données et de la vie privée qui serait chargé de superviser et de coordonner les questions relatives à la gestion de la protection des données et de la vie privée et de définir des orientations techniques en la matière.

En outre, nous nous sommes engagés à renforcer le multilinguisme, comme l’a demandé l’Assemblée générale, en rendant possible la diffusion simultanée des communiqués de presse dans les six langues officielles de l’ONU.  Cela nous permettra de faire davantage entendre notre voix, d’atteindre des publics plus larges et de renforcer notre présence sur les médias sociaux et sur le Web.

Notre projet de budget pour 2024 témoigne de notre attachement à renforcer les compétences de notre personnel et à les adapter à l’objectif visé.  Par exemple, le taux d’augmentation du nombre de postes aux classes P-2 et P-3 est plus de 10 fois supérieur au taux d’augmentation des postes de la classe D-1 et des postes de classe supérieure, ce qui contribuera à rajeunir le Secrétariat.

Il s’agit d’une inversion significative des tendances passées.  De ce fait, la structure de l’Organisation des Nations Unies deviendra moins surchargée au sommet.  Sur les 10 334 postes proposés dans le projet de budget pour 2024, moins de 5% sont de la classe D-1 ou de rang supérieur.

Dans le cadre de notre budget, nous proposons de nous doter de nouvelles compétences, notamment dans les domaines des données, de l’innovation, du numérique, de la prospective et de l’expertise en sciences du comportement, conformément à ma stratégie pour l’exploitation des données et à l’initiative ONU 2.0.

Nous ne ménageons aucun effort pour faire en sorte que notre personnel reflète le caractère international des membres de l’ONU.  Je salue la décision de l’Assemblée générale d’augmenter le nombre de postes soumis au principe de la répartition géographique.  Cela est essentiel pour tous les aspects de notre travail.  Nous révisons actuellement notre stratégie de représentation géographique afin d’attirer davantage de personnel issu de pays non représentés ou sous-représentés, et il s’agit pour moi d’une priorité absolue dans les orientations que je donne à notre département de gestion et à nos directeurs en général.

Grâce à nos centres d’information des Nations unies, nous lançons des stratégies de sensibilisation ciblées dans ces pays.  Dans le même ordre d’idées, nous nous efforcerons d’élargir les possibilités de recrutement sur une base géographique aussi large que possible pour tous les postes.  N’oublions pas que si les postes géographiques ont une indication spécifique, ce n’est pas le cas des autres.  Pour ces derniers, nous demandons donc à tous nos cadres d’avoir comme priorité claire de garantir une répartition régionale équilibrée, ce qui, pour être honnête, n’a pas été le cas dans le passé.

Nous avons maintenu en place la parité des genres aux échelons supérieurs et, sur la base des projections actuelles, nous atteindrons la parité au niveau de l’Organisation d’ici 2028, avec quelques difficultés particulières en ce qui concerne les opérations sur le terrain.  Il reste donc beaucoup à faire pour atteindre la parité dans toutes les entités et à tous les niveaux.  Il reste cependant beaucoup à faire pour parvenir à la parité dans chaque entité et à chaque échelon.

Dans ce contexte, je compte sur votre soutien dans le cadre du projet de budget pour 2024, au moment où nous préparons l’Organisation à mieux répondre aux besoins et aux demandes des gouvernements et des populations.  Je me félicite de l’occasion qui m’est offerte de dialoguer avec vous aujourd’hui et vous assure que mes hauts responsables continueront de vous accompagner dans vos délibérations sur mes propositions.

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