SG/SM/21696

Pour le Secrétaire général, le premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie rappelle qu’il n’y a plus un « instant à perdre » pour parvenir à une paix véritable

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée lors de la session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale consacrée à l’Ukraine, à New York, aujourd’hui:

Le premier anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie est un triste jalon, pour la population de l’Ukraine et pour la communauté internationale.  Cette invasion est un affront à la conscience collective.  C’est une violation de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Ses conséquences sur les plans humanitaire et des droits humains sont dramatiques.  Les effets s’en ressentent, bien au-delà de l’Ukraine. 

Comme je l’ai dit au premier jour, l’attaque de la Russie contre l’Ukraine remet en cause les principes et valeurs fondamentaux de notre système multilatéral.  La Charte des Nations Unies ne comporte aucune ambiguïté à cet égard: « Les Membres de l’Organisation s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ».

L’Assemblée générale a abordé, on ne peut plus clairement, la tentative de la Fédération de Russie d’annexer illégalement quatre régions de l’Ukraine: Kherson, Zaporijia, Donetsk et Louhansk.  Ce faisant, elle a réaffirmé les principes de droit international établis de longue date figurant dans sa Déclaration historique sur les relations amicales entre États de 1970.  À savoir que « le territoire d’un État ne peut faire l’objet d’une acquisition par un autre État à la suite du recours à la menace ou à l’emploi de la force » et « que nulle acquisition territoriale obtenue par la menace ou l’emploi de la force ne sera reconnue comme légale ».

La position de l’Organisation des Nations Unies est sans équivoque: nous sommes attachés à la souveraineté, à l’indépendance, à l’unité et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, dans ses frontières internationalement reconnues.

L’ONU est restée sur le terrain, travaillant avec les partenaires humanitaires.  Quatre Ukrainiens sur dix ont besoin d’une aide humanitaire.  Des infrastructures vitales ont été prises pour cible: des systèmes d’eau, d’énergie et de chauffage ont été détruits, en plein hiver.  Les organismes des Nations Unies coopèrent également avec les pays d’accueil, qui ont reçu plus de huit millions d’Ukrainiens, ce qui constitue la pire crise de réfugiés depuis la Seconde Guerre mondiale. 

La semaine dernière, l’Organisation des Nations Unies a lancé un appel d’aide humanitaire à hauteur de 5,6 milliards de dollars pour la population ukrainienne.  Je vous exhorte à apporter un soutien sans faille.  Depuis le début de la guerre, je me suis rendu en Ukraine à deux reprises et j’y ai entendu des témoignages de graves violations du droit international humanitaire et des droits humains.  Dans ce conflit comme ailleurs, l’Organisation des Nations Unies est déterminée à veiller au respect de la justice et du principe de responsabilité.

Même en pleine brutalité de la guerre, nous avons travaillé de manière concertée et créative pour trouver des solutions.  À Marioupol, l’Organisation des Nations Unies a aidé à évacuer des civils qui étaient pris au piège à l’aciérie Azovstal.  L’Initiative sur l’exportation de céréales par la mer Noire a montré qu’il était possible pour l’Ukraine et la Russie de contribuer à faire avancer la sécurité alimentaire mondiale, avec l’aide du Gouvernement turc et de l’ONU.

Malgré les difficultés en cours, l’initiative visant à transporter des céréales et d’autres produits alimentaires d’Ukraine fait la différence.  Nous travaillons sans relâche pour lever tous les obstacles qui subsistent à la mise en œuvre du Mémorandum d’accord entre la Fédération de Russie et le Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies pour faciliter les exportations de produits alimentaires et engrais russes sur les marchés mondiaux.  Il s’agit également d’une importante contribution à lutte contre l’insécurité alimentaire mondiale.

Nous continuerons d’appuyer ces initiatives, pour le bienfait de millions de personnes dans le monde, notamment dans les pays du Sud.  Malgré la profonde méfiance, les parties au conflit ont également procédé à des échanges réguliers de prisonniers de guerres, facilités par des acteurs régionaux.  Ces efforts peuvent et doivent continuer et s’étendre autant que possible.

Au cours de l’année écoulée, nous avons non seulement vu la souffrance et la dévastation s’accroître; il devient aussi de plus en plus évident à quel point la situation pourrait encore empirer.  Les conséquences qui pourraient découler d’une intensification des conflits constituent un danger manifeste et bien réel.  Jour après jour, nous vivons dans la hantise de cette grave menace, alors que des opérations militaires irresponsables se poursuivent autour de la centrale nucléaire de Zaporijia – la plus grande installation nucléaire d’Europe.

Je félicite l’Agence internationale de l’énergie atomique de s’être engagée auprès des parties en présence pour faire en sorte que la zone demeure sûre.  Il est indispensable de garantir la sécurité et la sûreté de toutes les centrales nucléaires ukrainiennes.

La guerre attise également l’instabilité régionale et alimente les tensions et les dissensions mondiales, tout en détournant l’attention et les ressources d’autres crises et problèmes mondiaux urgents.  Par ailleurs, nous avons entendu des menaces implicites d’emploi d’armes nucléaires.  L’emploi dit « tactique » de l’arme nucléaire est totalement inacceptable.  Il est grand temps de s’éloigner du précipice.  La complaisance ne fera qu’aggraver la crise et éroder davantage nos principes communs proclamés dans la Charte.

La guerre n’est pas la solution.  Elle est le problème.  La population ukrainienne souffre énormément.  Les Ukrainiens, les Russes et bien d’autres peuples ont besoin de paix.  Si les perspectives peuvent aujourd’hui sembler sombres, nous savons qu’une paix véritable et durable doit être fondée sur la Charte des Nations Unies et le droit international.  Plus longtemps les combats durent, plus notre tâche sera difficile.  Nous n’avons pas un instant à perdre.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.