SG/2264

Appel conjoint du Secrétaire général de l’ONU et de la Présidente du CICR demandant aux États d’énoncer de nouvelles interdictions et limitations pour les systèmes d’armes autonomes

Dans un appel conjoint aujourd’hui, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, et la Présidente du Comité international de la Croix-Rouge, Mirjana Spoljaric, demandent aux dirigeants politiques d’imposer d’urgence de nouvelles règles internationales sur les systèmes d’armes autonomes, afin de protéger l’humanité.

Aujourd’hui, nous unissons nos voix pour répondre à une priorité humanitaire urgente.  Les Nations Unies et le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) appellent les États à imposer l’interdiction des systèmes d’armes autonome et des limitations, afin de protéger les générations actuelles et futures des conséquences de leur utilisation.  Dans le paysage sécuritaire actuel, définir clairement des lignes rouges à l’échelle internationale profitera à tous les États. 

Les systèmes d’armes autonomes –généralement définis comme des systèmes d’armes qui sélectionnent des cibles et exercent la force contre elles sans intervention humaine– posent de graves problèmes sur les plans humanitaire, juridique, éthique et sécuritaire. 

Leur développement et leur prolifération peuvent considérablement modifier la façon dont les guerres sont menées et contribuer à l’instabilité mondiale et à l’aggravation des tensions internationales.  En donnant l’impression que les forces militaires et les civils courent moins de risques, ils peuvent abaisser le seuil d’engagement dans les conflits, entraînant involontairement une escalade de la violence. 

Nous devons agir dès maintenant pour préserver le contrôle humain sur l’emploi de la force. Le contrôle humain doit être conservé dans les décisions de vie ou de mort.  Le fait que des machines visent de manière autonome des êtres humains est une ligne morale à ne pas franchir.  Les machines ayant le pouvoir discrétionnaire d’ôter la vie sans intervention humaine devraient être interdites par le droit international. 

Nos préoccupations n’ont pu qu’être renforcées par la disponibilité et l’accessibilité croissantes de technologies nouvelles et émergentes sophistiquées, telles que la robotique et l’intelligence artificielle, qui pourraient être intégrées dans les armes autonomes. 

Les scientifiques et les patrons d’industrie responsables de telles avancées technologiques ont eux-mêmes tiré la sonnette d’alarme.  Si nous voulons exploiter les nouvelles technologies pour le bien de l’humanité, nous devons d’abord remédier aux risques les plus urgents et éviter des conséquences irréversibles. 

Cela veut dire interdire les systèmes d’armes autonomes qui fonctionnent de telle sorte que leurs effets sont imprévisibles.  Par exemple, laisser à des algorithmes d’apprentissage automatique, donc à des logiciels foncièrement imprédictibles qui se programment tout seuls, le contrôle des armes autonomes est une proposition dangereuse et inacceptable.

Il faut en outre des limitations claires pour tous les autres types d’armes autonomes, afin de garantir le respect du droit international et l’acceptabilité éthique. Il faut, par exemple, limiter l’endroit, le moment et le temps pour l’utilisation de ces armes, leurs types de cibles et la force utilisée, tout en assurant une supervision humaine efficace, ainsi que des interventions et des désactivations à temps. 

Malgré la multiplication des informations sur des essais et l’emploi de divers types de systèmes d’armes autonomes, il n’est pas trop tard pour agir.  Après plus d’une décennie de discussions aux Nations Unies, notamment au Conseil des droits de l’homme, dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques, et à l’Assemblée générale, les bases ont été jetées pour l’adoption d’interdictions et de limitations explicites.  Les États doivent désormais s’appuyer sur ces travaux de fond et s’unir de manière constructive pour négocier de nouvelles règles contre les menaces concrètes posées par ces technologies d’armement. 

Le droit international, en particulier le droit international humanitaire, interdit certaines armes et fixe des limites générales à l’emploi de toutes les autres, les États et les individus demeurant comptables de toute violation.  Toutefois, en l’absence d’un accord international spécifique régissant les systèmes d’armes autonomes, les États peuvent avoir des points de vue différents sur la manière dont ces règles générales s’appliquent.  De nouvelles règles internationales sur les armes autonomes sont donc nécessaires pour clarifier et renforcer le droit existant. Elles constitueront une mesure préventive, une occasion de protéger les victimes potentielles de ces armes et un élément essentiel pour éviter à l’humanité des conséquences terribles.

Nous appelons les dirigeants du monde à lancer des négociations sur un nouvel instrument juridiquement contraignant visant à établir des interdictions et des limitations claires pour les systèmes d’armes autonomes et à les mener à terme d’ici à 2026. 

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