Cinquante-sixième session,
6e séance plénière – matin
POP/1107

La Commission de la population et du développement examine les atouts de l’investissement dans l’éducation et l’apprentissage à long terme

Poursuivant les travaux de sa cinquante-sixième session, commencée lundi, la Commission de la population et du développement a abordé aujourd’hui son thème central « population, éducation et développement durable » sous l’angle des bénéfices à long terme de l’investissement dans l’éducation, notamment l’éducation sexuelle des jeunes, au cours d’une table ronde modérée par son vice-président, M. Fnu Immanuel, de l’Indonésie. 

Le développement durable dépend de la participation de tous à la vie en société.  C’est le postulat qu’a posé la première intervenante, Mme Anastasia Gage, professeure au Département de la santé et du développement durable de l’Université de Tulane, pour qui cette participation commence à l’école: l’éducation doit susciter chez les élèves une prise de conscience des problèmes sociaux.  Selon l’experte, l’éducation doit aussi aider les jeunes à comprendre les tenants et aboutissants des problèmes environnementaux.  Si l’on arrive à éduquer la moitié de la population adulte d’un pays, le produit intérieur brut (PIB) augmente de 10% par an, a-t-elle calculé avant de mentionner d’autres avantages: la participation renforcée des femmes aux décisions et, en conséquence, la réduction des pratiques nocives aux femmes.  « C’est maintenant qu’il faut agir », a-t-elle lancé!

L’éducation sexuelle a été le sujet de l’intervention de M. John Santelli, professeur de santé de la population et de la famille et de pédiatrie à l’Université de Columbia, qui y a vu une « question complexe ».  Participant à la table ronde par visioconférence, il a énoncé les atouts à en tirer: l’éducation sexuelle des adolescentes leur permet de s’intégrer socialement; elle contribue au déclin des mariages et des grossesses précoces; elle protège contre les violences sexuelles et sexistes.  Le professeur a toutefois conseillé de prendre en compte les contextes culturels et les résistances à l’éducation sexuelle, en réponse à une question de l’Égypte qui a souligné l’importance de la diversité culturelle.  Soucieux lui aussi de l’importance du sujet, le Soudan a demandé l’organisation de rencontres internationales sur l’éducation dans les pays se trouvant dans des situations spécifiques. 

Les programmes d’enseignement doivent être fondés sur la science, a aussi préconisé le professeur de l’Université de Columbia en invitant la communauté scientifique à s’engager avec les communautés locales sur la question de l’éducation sexuelle.  « Nous sommes plus forts lorsque nous agissons de concert. »  Il a, sur cette même ligne, recommandé aux parents de transmettre les bonnes informations sur l’éducation sexuelle à leurs enfants, même lorsqu’ils sont à l’université.  Le Ghana a ajouté à ces recommandations en disant attendre des gouvernements qu’ils prennent des décisions avisées en matière d’éducation au niveau national.  Il faut ensuite mettre en œuvre les plans nationaux adoptés, a renchéri l’Indonésie avant qu’une représentante des jeunes ne rappelle l’importance des partenariats entre les gouvernements et le secteur privé en matière d’éducation. 

Le professeur Santelli a aussi abordé la question du financement de l’éducation, en sensibilisant aux efforts à consentir pour cela, une question soulevée également par Cuba qui a dénoncé le non-respect par les pays donateurs de leurs engagements au titre de l’aide publique au développement (APD) ainsi que la diminution des investissements dans l’éducation de base. 

Interrogée sur l’importance de l’éducation pour le relèvement après la pandémie de COVID-19, Mme Christina Williams, de la Jamaïque, Porte-parole du Conseil de la jeunesse du Commonwealth, a informé la Commission du rôle de son organisation auprès des jeunes jamaïcains durant la pandémie en leur offrant des plateformes d’apprentissage en ligne, du soutien psychosocial et des opportunités d’engagement social.  Les enseignements tirés de cette expérience sont l’importance d’une formation qui répond aux besoins du marché du travail, de l’accès à Internet et de la participation des jeunes à l’élaboration des programmes scolaires.  Plus important encore, a-t-elle estimé, l’éducation doit être préservée de toute forme d’instabilité et tenir compte de la diversité des jeunes. 

La Guinée a voulu savoir si les étudiants jamaïcains sont accompagnés par le Gouvernement de la Jamaïque dans leurs initiatives.  Le Gouvernement nous a soutenus dans les négociations avec les compagnies de télécommunication sur l’accès à Internet, a répondu Mme Williams ajoutant que 40 000 tablettes ont été offertes aux jeunes.  La République dominicaine a souligné l’importance des matériels didactiques en particulier l’accès aux livres et aux infrastructures pour la pratique du sport scolaire y compris pour les jeunes filles.

Intervenant de nouveau, la professeure de l’Université de Tulane a énuméré ce qu’il faut faire pour que le secteur de l’éducation aide à réaliser le quatrième objectif de développement durable (ODD4) qui vise l’enseignement de qualité pour tous.  Elle a donc insisté sur l’importance de rendre l’éducation obligatoire pour tous, de s’assurer que les enfants terminent au moins le cycle secondaire, d’adopter des programmes qui bénéficient directement aux enfants comme les repas scolaires et les bourses d’études pour les méritants.  Plus concrètement, elle a suggéré la prise en charge des frais de scolarité pour les enfants des ménages démunis, le suivi de la scolarité des enfants, l’amélioration des infrastructures scolaires et leur localisation géographique.  Elle a même préconisé de programmer des cours du soir, de prolonger l’année scolaire, de rendre plus accessible les matières scientifiques et technologiques pour répondre aux besoins du marché de travail et d’améliorer la formation pédagogique des enseignants.  Pour elle, les écoles doivent être des endroits sûrs, dotés de toilettes séparées pour les filles et prémunis de toute forme de violence. 

Spécialiste du droit du travail, M. Juan Alfaro López, de l’Institut national de l’apprentissage, du Costa Rica, devait répondre à la question de savoir s’il y a des considérations spéciales à prendre en compte pour favoriser l’emploi des femmes dans les sociétés vieillissantes.  Il a plaidé pour la mise en place de formations techniques et professionnelles adaptées et a encouragé l’emploi décent pour cette catégorie de population qui doit bénéficier d’un horaire de travail réduit (4 heures par jour), d’une formation à l’emploi vert et à l’autonomie.  Cet apprentissage doit tenir compte des formations acquises depuis l’école primaire, a ajouté M. Alfaro López en signalant les niches d’emplois pour cette population, à savoir les secteurs de l’énergie renouvelable, l’agriculture durable et l’écotourisme.

Quels sont les liens entre l’éducation et les migrations? était la question posée à M. Ayman Zohry, expert des populations et des migrations, de l’Université américaine du Caire (Égypte).  Intervenant par visioconférence, il a dit que ces liens opèrent dans les deux sens: les migrations entraînent une fuite des cerveaux pour les pays d’origine et des gains de capacité et de compétences pour les pays d’accueil.  Il a attiré l’attention sur le fait que les migrants doivent pouvoir continuer d’étudier dans les pays de destination, car ils doivent pouvoir effectuer des envois de fonds et rentrer un jour chez eux.  Pour répondre à l’Égypte qui l’interrogeait sur les politiques d’éducation efficaces pour l’intégration des migrants, M. Zohry a insisté sur l’importance des systèmes éducatifs accessibles à tous les migrants dans le but qu’ils s’intègrent au marché du travail.  Il faut parallèlement régulariser les différents canaux migratoires, a-t-il réagi à une demande de conseil de l’Égypte sur la lutte contre les migrations clandestines. 

La Commission poursuivra ses travaux jeudi 13 avril, à partir de 10 heures.

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