Cinquième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés,
Table ronde thématique de haut niveau no 8 - Matin
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Conférence LDC5: une dernière table ronde explore les voies et moyens d’une sortie « durable et irréversible » de la catégorie des pays les moins avancés

DOHA, 9 mars -- La dernière journée de la cinquième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés (PMA) s’est ouverte, ce matin à Doha, sur une nouvelle table ronde de haut niveau, la huitième de cette réunion décennale, centrée cette fois sur les moyens de « soutenir une sortie durable et irréversible de la catégorie des PMA ».  Une question d’autant plus centrale que l’objectif fixé en 2011 par le Programme d’action d’Istanbul, à savoir que la moitié des PMA satisfassent aux critères de reclassement, n’a pas été atteint.

Au total, ce sont 20 PMA qui ont atteint les seuils de reclassement depuis l’adoption, en 2011, du Programme d’action d’Istanbul, prédécesseur du Programme d’action de Doha, adopté en 2022.  Quatre de ces pays ont été reclassés, sept ont été désignés pour être reclassés d’ici à 2026, tandis que neuf autres ont rempli les critères de reclassement au moins une fois.  Un progrès en demi-teinte que n’a pas manqué de relever la Vice-Présidente du Bénin, Coprésidente de cette table ronde, qui a invité les États Membres à redoubler d’efforts pour que la trentaine de pays qui ne remplissent pas les conditions atteignent le seuil de sortie. 

Alors que la quasi-totalité des PMA de la région Asie-Pacifique ont entrepris le processus de retrait de la catégorie, il convient, selon Mme Mariam Chabi Talata Zime Yerima, de concentrer ces efforts sur les défis qui empêchent encore les PMA d’Afrique d’atteindre le seuil de reclassement.  Des défis essentiellement liés à des obstacles structurels, a expliqué la dirigeante béninoise, dont le pays s’est approché, lors du dernier examen triennal du Comité des politiques de développement en 2021, de deux des trois critères exigés pour le reclassement, le revenu national brut par habitant et l’indice de vulnérabilité économique et environnementale. 

Rappelant pour sa part que le Programme d’action de Doha entend permettre à 15 PMA supplémentaires de satisfaire aux critères de reclassement d’ici à 2031, la Vice-Ministre de la coopération au développement et de l’aide humanitaire de la Belgique, autre Coprésidente de ce dialogue, a appelé à un processus de transition « sans heurt », assorti de mesures de soutien spécifiques aux pays reclassés.  « Nous devons éviter toute réduction brutale de l’aide publique au développement (APD), des préférences commerciales spécifiques aux PMA, des traitements spéciaux et différenciés, de l’aide pour le commerce ou d’autres formes d’assistance technique et financière », a plaidé Mme Heidy Rombouts.

Son appel a résonné favorablement aux oreilles de PMA en instance de sortie de la catégorie mais aussi de pays déjà reclassés.  Parmi ces derniers, Cabo Verde a reconnu que sa transition vers la catégorie de pays à revenu intermédiaire inférieur, débutée en 2007, a « coûté très cher » à son économie.  Seize ans plus tard, « nous ne demandons pas seulement des financements, nous souhaitons avoir plus de facilités pour continuer à mettre en œuvre nos réformes », a expliqué sa Ministre des affaires étrangères et de la coopération.  Confirmant que les pays reclassés souffrent encore de leurs vulnérabilités dans les premiers stades de la transition, elle s’est prononcée pour la création d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle, complémentaire des autres critères d’accès aux financements concessionnels. 

Sur cette même ligne, la Vice-Ministre du plan et des investissements de la République démocratique populaire lao, dont le pays a atteint le seuil de reclassement en 2021 aux côtés du Bangladesh et du Népal, a appelé de ses vœux une prolongation, après la sortie, des mesures d’appui accordées aux PMA, en concertation avec la communauté internationale et les partenaires de développement.  « Le reclassement ne doit pas être une punition », a renchéri son homologue népalais, demandant en outre que soit pris en compte son statut de pays en développement sans littoral. 

En voie de reclassement cette année, le Bhoutan s’est, lui, déclaré préoccupé par le « chemin semé d’embuches » qui l’attend après cette étape, anticipant une baisse des financements et des subventions potentiellement préjudiciables à sa croissance et à son développement, alors que son économie se remet difficilement de la pandémie et doit maintenant faire face aux retombées du conflit en Ukraine.  Dans ces conditions, il serait judicieux de prolonger de six ans la période de transition après reclassement, a appuyé la responsable de l’ONG Third World Network, non sans regretter que certains membres de l’Organisation mondiale du commerce s’y soient opposés. 

Appuyés par le Secrétaire général du Forum des îles du Pacifique, le Ministre de la planification nationale des Îles Salomon et son homologue des finances du Vanuatu ont tous deux réclamé le report de leur reclassement au-delà de décembre 2024.  Motif invoqué: leur vulnérabilité extrême aux chocs externes, notamment aux catastrophes naturelles qui se succèdent sur leur territoire, et la fragilité de leur économie de petits États insulaires en développement (PEID). 

De son côté, le Burundi a souhaité que les indices de reclassement reflètent de façon plus fine la réalité des difficultés auxquelles se heurtent les PMA, notamment ceux en situation de postconflit, tandis que l’Angola, représenté par son ministre de l’économie et de la planification, invitait le Programme d’action de Doha à prendre en considération le phénomène de l’économie parallèle, qui concerne près de 80% de la population active des PMA.  Le secteur informel, a relevé ce dernier, contribue très peu à l’assiette fiscale, ce qui nuit à la mobilisation des ressources pour le développement. 

Compte tenu des défis multiples que doivent relever les PMA, un soutien dédié au renforcement de la résilience des « sortants » ou de ceux déjà reclassés est plus important que jamais, a soutenu à son tour la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, selon laquelle le changement de catégorie ne doit aucunement perturber le développement durable de ces pays.  Pour appuyer cette « transition en douceur », les coordonnateurs résidents des Nations Unies ont un rôle crucial à jouer dans l’identification des besoins, a estimé Mme Amina Mohammed, soulignant à ce propos l’importance du mécanisme iGRAD de soutien au reclassement, conçu par le Département des affaires économiques et sociales (DESA) en collaboration avec le Bureau de la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés, les pays en développement sans littoral et les petits États insulaires en développement (OHRLLS). 

La plateforme iGRAD, a expliqué M. Taffere Tesfachew, membre du Comité des politiques de développement, propose différentes offres de service pour les PMA et sélectionne des partenaires capables de fournir des solutions de renforcement des capacités dédiées en réponse aux besoins spécifiques de ces pays.  L’approche a été validée par un état des lieux des besoins en capacités réalisé dans 11 pays, a indiqué le Directeur de DESA.  La Directrice du Centre de développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a quant à elle déclaré utiliser ce mécanisme, entre autres pour examiner le potentiel du Bangladesh en matière d’industrialisation et d’innovation, à la demande du pays. 

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