SC/15148

Déclaration publique de la Présidente du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à l’occasion de l’examen du sixième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé aux Philippines (S/2022/569), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de sa présidente, les messages suivants:

À toutes les parties au conflit armé aux Philippines, et notamment aux chefs du Front de libération islamique Moro, des Combattants islamiques pour la libération du Bangsamoro, de la Nouvelle Armée populaire, du Groupe Abou Sayyaf, du Front de libération nationale Moro et du Groupe Daoula Islamiyé-Maute, ainsi qu’au Gouvernement philippin 

·       Se félicite de la diminution du nombre de violations et d’atteintes commises contre des enfants confirmées par l’équipe spéciale de pays (surveillance et information) par rapport à la période précédente, mais exprime sa vive préoccupation et sa condamnation la plus énergique face aux violations et aux atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants aux Philippines, et engage instamment toutes les parties à prévenir et faire cesser immédiatement toutes les violations, notamment le recrutement et l’utilisation d’enfants, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, le viol et d’autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, l’attaque d’écoles et d’hôpitaux et le refus d’accès humanitaire, ainsi qu’à honorer leurs obligations au regard du droit international ; 

·       Demande à toutes les parties de poursuivre l’application de ses conclusions précédentes concernant les Philippines ; 

·       Insiste sur le fait que, lors de la planification et de la mise en œuvre des mesures en faveur des enfants dans les situations de conflit armé, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale et les vulnérabilités et les besoins particuliers des filles et des garçons, ainsi que des enfants en situation de handicap et des enfants originaires des communautés autochtones, doivent être dûment pris en compte ; 

·       Souligne qu’il importe d’établir les responsabilités dans toutes les violations et atteintes commises contre des enfants dans les situations de conflit armé, que tous leurs auteurs doivent en répondre en justice sans retard indu, dans le cadre d’enquêtes exhaustives, indépendantes, impartiales, rapides et systématiques et, le cas échéant, de poursuites, de condamnations et de fixation de peines à l’aide des mécanismes de justice appropriés, afin de lutter contre l’impunité et qu’il importe de veiller à ce que toutes les victimes aient accès à la justice et aux services médicaux et d’accompagnement dont elles ont besoin ; 

·       Note avec préoccupation que les difficultés rencontrées par l’équipe spéciale de pays pour accéder aux zones reculées en proie au conflit, ainsi que les problèmes de sécurité et les mesures de riposte à l’épidémie de COVID-19 au cours de la période considérée ont rendu difficile la vérification des six graves violations commises contre des enfants et que les informations figurant dans le rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé aux Philippines (S/2022/569) ne reflètent donc pas pleinement l’ampleur des violations commises contre des enfants dans ce pays ; 

·       Condamne le recrutement et l’utilisation d’enfants comme combattants ou auxiliaires, demande instamment à toutes les parties, en particulier aux groupes armés, de libérer immédiatement et sans conditions tous les enfants qui leur sont associés et de les remettre aux civils chargés de la protection de l’enfance ; les prie de faire cesser et de prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants de moins de 18 ans, conformément aux obligations qui leur incombent au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, s’il y a lieu ; 

·       Constate avec préoccupation que des enfants sont privés de liberté en raison de leur association, réelle ou présumée, à des groupes ou des forces armés ou du fait que des membres de leur familles appartiennent à des groupes armés ; exhorte toutes les parties au conflit armé à considérer les enfants associés à des groupes armés, y compris ceux qui auraient commis des crimes, avant tout comme des victimes de ceux qui les ont recrutés et utilisés, à s’employer à assurer leur libération et à contribuer à leur pleine réinsertion et réadaptation au moyen de programmes spécialisés de protection de l’enfance, notamment de réintégration familiale et locale qui tiennent compte des questions de genre, en prévoyant un accès aux soins de santé, aux soins de santé mentale et au soutien psychosocial et des programmes d’éducation, ainsi qu’en sensibilisant les populations, en travaillant avec elles, en vue de prévenir la stigmatisation de ces enfants et de faciliter leur retour, et à veiller à ce que les poursuites engagées contre eux soient menées dans le respect des droits de l’enfant, à ce que la détention ne soit envisagée qu’en dernier ressort et pour une durée aussi brève que possible, et à ce que les mesures de substitution à la détention soient privilégiées, conformément au droit international ; prie instamment le Gouvernement, en outre, de respecter les obligations que lui fait la Convention relative aux droits de l’enfant et de son protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés ; 

·       Exprime sa profonde préoccupation devant les meurtres d’enfants et les atteintes à leur intégrité physique causés, notamment, par des attaques contre les populations, des tirs croisés, des restes explosifs de guerre et des engins explosifs improvisés, remarquant que près d’une victime sur cinq est âgée de moins de 5 ans, exhorte toutes les parties à prendre des mesures pour prévenir et faire cesser ces meurtres et ces atteintes, à mettre fin immédiatement et définitivement à l’utilisation aveugle de mines terrestres, d’engins explosifs et de restes explosifs de guerre, et leur demande de respecter les obligations que leur fait le droit international, en particulier le droit international humanitaire ; 

·       Exprime sa vive préoccupation au sujet des viols et autres formes de violence sexuelle, confirmées ou non, qui sont commis contre la personne d’enfants, tout en notant que les viols et autres formes de violence sexuelle continuent d’être peu signalés par crainte et en raison du risque de stigmatisation ; engage instamment toutes les parties à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et les autres formes de violence sexuelle que subissent les enfants ; souligne qu’il importe que les auteurs de violences sexuelles et de violences fondées sur le genre commises contre des enfants aient à répondre de leurs actes et reconnaît à cet égard que la loi interdisant la pratique du mariage d’enfants et imposant des sanctions (loi de la République no 11596) de 2021 est une mesure importante prise par le Gouvernement philippin face aux actes pouvant conduire à des violences sexuelles ; souligne également qu’il importe de garantir aux personnes rescapées de violences sexuelles liées au conflit l’accès à des services spécialisés, intégrés et sans distinction, notamment dans les domaines psychosocial, de santé mentale et de santé, y compris de santé sexuelle et reproductive, ainsi qu’une assistance juridictionnelle et des aides à des moyens de subsistance ; 

·       Condamne fermement les attaques contre les écoles, commises en violation du droit international, et les menaces contre le personnel éducatif, la détention d’enseignants et la démolition d’écoles communautaires en raison de l’association présumée de ces écoles avec des parties au conflit, note que les communautés autochtones ont été particulièrement touchées, demande à toutes les parties de se conformer aux dispositions applicables du droit international, de respecter le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et faire cesser immédiatement les attaques ou menaces d’attaque contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et d’hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international applicable, et note l’effet que les attaques contre les écoles et leur utilisation peuvent avoir sur l’exercice du droit à l’éducation, demande à toutes les parties de prendre des mesures concrètes pour atténuer et éviter l’utilisation des écoles à des fins militaires, conformément à la résolution 2601 (2021), et note à cet égard la Déclaration sur la sécurité dans les écoles ; 

·       Condamne vigoureusement les enlèvements d’enfants et exhorte toutes les parties concernées à mettre un terme aux enlèvements d’enfants et à libérer immédiatement tous les enfants enlevés ; 

·       Exhorte toutes les parties à autoriser et à faciliter, dans le respect du droit international, y compris le droit international humanitaire, un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave, y compris un accès aux enfants, en particulier ceux des communautés autochtones, et rappelle les principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire adoptés par l’Assemblée générale dans sa résolution 46/182 ainsi que les principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, afin de faire respecter le caractère exclusivement humanitaire et impartial de l’aide humanitaire et de faire respecter également le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans distinction préjudiciable ; 

·       Exprime sa profonde préoccupation face à l’ampleur des violations et des atteintes dont sont l’objet les enfants autochtones dans le conflit qui oppose les Forces armées des Philippines à la Nouvelle Armée populaire, et au fait que les populations autochtones, en particulier les responsables locaux et les établissements scolaires, aient été davantage prises pour cibles pendant la période considérée ; 

·       Encourage les parties à inscrire les questions de protection de l’enfance au programme des négociations et des accords de paix en cours et à venir, avec le concours de l’Organisation des Nations Unies et en s’inspirant, entre autres, du Guide pratique à l’intention des médiateurs pour la protection des enfants dans les situations de conflit armé ; 

·       Salue la prolongation de la période de transition de l’Autorité de transition du Bangsamoro, demande à l’Autorité de transition de continuer à mettre en œuvre l’accord de paix avec le Front de libération islamique Moro et de tirer parti des enseignements tirés du Bureau de la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés ainsi que de ses meilleures pratiques pour prévenir les violations contre les enfants ; 

·       Demande à toutes les parties qui ne l’ont pas encore fait de renforcer leur dialogue avec l’Organisation des Nations Unies en vue d’élaborer et d’adopter des instructions permanentes aux fins de la libération et de la réintégration des enfants associés aux parties au conflit, et de coopérer avec les acteurs civils de la protection de l’enfance pour faciliter la libération et la réintégration de ces enfants dans la société, ce qui est essentiel pour leur avenir, ainsi que celui de leur famille, et pour prévenir les risques de nouvel enrôlement ; 

·       Demande à tous les groupes armés inscrits sur la liste d’engager un dialogue avec l’ONU afin d’adopter des plans d’action visant à prévenir et faire cesser le recrutement et l’utilisation d’enfants. 

Aux notables locaux et aux chefs religieux 

·       Souligne la contribution importante des notables locaux, des chefs religieux et des dirigeants autochtones dans le renforcement de la protection des enfants touchés par les conflits armés, et se dit conscient du rôle important qu’ils jouent dans la mobilisation destinée à mettre fin aux violations et aux atteintes commises contre les enfants et de leur influence dans les efforts de réconciliation ; 

·       Les encourage à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le viol et autres formes de violence sexuelle, les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, les enlèvements, les attaques et les menaces d’attaques visant des écoles et des hôpitaux et le refus de l’accès humanitaire, tout en continuant de se mobiliser pour faire cesser et prévenir ces violations et atteintes, et à se concerter avec le Gouvernement, l’ONU et les autres parties prenantes compétentes pour favoriser la réintégration, au sein de leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par des activités de sensibilisation et par une action visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.

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