Session de 2022,
5e et 6e séances plénières – matin & après-midi
ECOSOC/7070

Débat de l’ECOSOC sur la coordination: les discussions du premier jour illustrent les efforts conjoints des acteurs du développement durable, l’ONU au centre

Alors que le monde reconnaît l’ampleur de la tâche pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19, qui va coûter 13 800 milliards de dollar à l’économie mondiale d’ici à 2024, et atteindre les objectifs de développement durable pour 2030, les membres du Conseil économique et social (ECOSOC) ont discuté avec des nombreux experts, aujourd’hui, sur les moyens de « tirer parti de l’ECOSOC pour une reprise inclusive et résiliente guidée par le Programme 2030 », selon le thème fixé pour les deux jours de débats de la session de coordination. 

Maximiser l’impact du système des Nations Unies pour le développement est le but du nouveau débat consacré aux questions de coordination (créé en juin 2021), a expliqué le Président de l’ECOSOC, en rappelant le rôle crucial de cet organe pour soutenir les efforts déployés en vue de la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, du Programme d’action d’Addis-Abeba et de l’Accord de Paris.  M. Collen Kelapile a précisé qu’en offrant une orientation politique et en promouvant la coopération multilatérale, l’ECOSOC insuffle une direction et accroît la coordination au sein de l’ONU. 

M. Kelapile a demandé aux participants de s’appuyer sur les idées « audacieuses » discutées hier, lors du forum des partenariats de l’ECOSOC, pour élaborer des recommandations novatrices.  Les deux priorités pour l’amélioration de la coordination sont l’assistance prêtée aux populations les plus défavorisées et le domaine de l’autonomisation des femmes, a déclaré M. Suriya Chindawongse, le Vice-Président de l’ECOSOC chargé de ce débat. 

Les gains en matière d’égalité entre les sexes sont en péril, a reconnu la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, se disant particulièrement inquiète des indicateurs sur la pauvreté, la faim, l’éducation et l’emploi qui « évoluent tous dans le mauvais sens ».  Mme Amina Mohammed n’a pas oublié la « triple crise planétaire » des changements climatiques, de la perte de biodiversité et de la pollution, qui menacent partout des vies et des moyens de subsistance. 

« Nous ne sommes ni désespérés, ni impuissants », a-t-elle cependant lancé aux participants en les appelant à se baser sur le rapport du Secrétaire général « Notre Programme commun » pour remédier à des problèmes créés par l’Homme.  Adoptant les mots d’ordre « ambition et accélération de l’action », la Vice-Secrétaire générale a misé sur le nouveau système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents qui permet de transformer les orientations de l’ECOSOC en des résultats tangibles sur le terrain. 

« Relèvement inclusif et centré sur les personnes après la pandémie, notamment par le renforcement de la protection sociale » était le thème de la première table ronde de la journée, qui a été lancée par le Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT).  M. Guy Ryder a avancé à la fois des chiffres alarmants et des motifs d’espoir.  Il a signalé que la pandémie de COVID-19 a fait perdre l’équivalent de 258  millions d’emplois à temps plein en 2020, mais a parié sur les 100  millions de nouveaux emplois qui pourraient être créés grâce à une transition vers des économies sobres en carbone et circulaires d’ici à  2030.  Il a invité à répondre à l’appel du Secrétaire général, lancé en septembre 2021, en faveur d’un accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale, qui vise à accroître le niveau et la coordination des efforts du système multilatéral pour aider les pays à créer 400 millions d’emplois décents. 

De même que M. Ryder a souligné le rôle crucial de la protection sociale, mis en évidence par la pandémie, la Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a plaidé pour des socles de protection sociale « complets » et la Présidente de la Commission de la condition de la femme pour une « protection sociale universelle ».  La représentante de l’Argentine, qui présidera la semaine prochaine la Commission du développement social, a apprécié à ce sujet les importantes mesures de protection sociale prises pendant la pandémie: plus de 3 000 au total à travers le monde entre le 20 mars 2020 et le 14  mai 2021. Les États Membres participant à cette discussion n’ont pas manqué de défendre en particulier la cause de l’équité vaccinale, le Liban appelant à faire du vaccin contre la pandémie de COVID-19 un « bien public mondial ».  L’Union européenne a, pour sa part, annoncé la construction en  2022 d’une usine de production de vaccins ARN afin de cibler d’autres maladies telles que la tuberculose et le VIH. 

« Une seule santé », qui intègre santés humaine, animale et planétaire, a été ensuite demandée lors de la discussion visant à « Protéger la planète ».  La Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a évoqué à cet égard la mise en place de nouvelles structures au sein du système des Nations Unies, tels que le Groupe d’experts de haut niveau pour l’approche Une seule santé (OHHLEP) et le Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens.  Le PNUE collabore avec l’OMS, la FAO et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), entre autres, pour promouvoir des solutions qui feront progresser plusieurs ODD en même temps, a-t-elle fait valoir. 

De son côté, l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI) a souligné l’importance de l’Alliance mondiale pour une économie circulaire et une utilisation efficace des ressources (GACERE), qui travaille avec des alliances régionales et des partenaires stratégiques du savoir, et qui bénéficie d’un appui du PNUE et de l’ONUDI.  La Présidente du Forum des Nations Unies pour les forêts (FNUF) a, quant à elle, appelé les gouvernements, l’ONU et les autres partenaires à prendre des mesures décisives pour intégrer des solutions basées sur les forêts dans leurs réponses immédiates et à long terme. 

Les deux autres discussions, tenues dans l’après-midi, ont exploré les « voies à suivre pour une reprise économique résiliente et inclusive », ainsi que les « moyens d’exploiter la science, la technologie et l’innovation, y compris les technologies numériques ».  L’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a encensé les différentes composantes de l’ONU qui sont à pied d’œuvre dans 170 pays - du déploiement d’équipements médicaux et de vaccins en passant par le soutien aux transferts d’argent numériques, à l’aide aux petites entreprises et à l’assistance fournie aux gouvernements pour qu’ils adoptent des politiques sensibles au genre dans leurs réponses à la pandémie.  L’aide technique « revigorée » de la CNUCED a été évoquée, tandis que le FMI a vanté son futur fonds « résilience et durabilité » qui aidera les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire à relever les défis structurels à plus long terme. 

Le débat consacré aux questions de coordination de l’ECOSOC se poursuivra demain, vendredi 4 février, à partir de 10 heures, toujours en format hybride. 

DÉBAT CONSACRÉ AUX QUESTIONS DE COORDINATION

Déclarations d’ouverture

Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC), M.  COLLEN VIXEN KELAPILE (Botswana), a relevé que la tâche de reconstruire en mieux après la COVID-19 est ardue, d’où l’importance pour l’ECOSOC de jouer son rôle en fournissant l’orientation politique et en promouvant le renforcement de la coopération multilatérale et la mobilisation de la solidarité internationale pour soutenir la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, ainsi que le Programme d’action d’Addis-Abeba et l’Accord de Paris.  Le Président a rappelé que l’ECOSOC est la seule et unique plateforme capable de fournir une vue d’ensemble du travail des organes et organisations du système des Nations Unies sur la question du développement durable.  C’est donc le lieu où les entités du système des Nations Unies, les présidents des commissions fonctionnelles et des organes d’experts, et les parties prenantes se réunissent avec les États Membres pour discuter des questions politiques majeures qui ressortent de leurs délibérations, analyses et expérience. 

L’ECOSOC, a-t-il souligné, est donc l’organisme qui peut insuffler une direction, créer des synergies et accroître la coopération et la coordination au sein du système des Nations Unies dans son ensemble.  Et c’est ce pour quoi le nouveau débat consacré aux questions de coordination a été conçu: améliorer le rôle de leadership, de supervision et de coordination de l’ECOSOC afin de maximiser l’impact du système des Nations Unies dans son ensemble.  Il a relevé que le forum des partenariats qui s’est achevé hier avait fourni un riche ensemble d’idées et de nouvelles actions sur lesquelles les délibérations de ce jour peuvent s’appuyer. 

Pour ce débat consacré aux questions de coordination, M. Kelapile a demandé aux participants de s’appuyer sur les idées « audacieuses » discutées la veille et d’élaborer des recommandations novatrices sur des questions qui devraient être examinées par l’ECOSOC, ses organes subsidiaires et le système des Nations Unies.  Il a demandé également de tenir compte de l’impact des solutions coordonnées du système des Nations Unies pour faire progresser les ODD, tout en favorisant la reprise.  Il a insisté sur les aspects du Programme  2030 qui reçoivent peu d’attention, tels que les ODD et les cibles orphelins.  Et surtout, il faut raviver un esprit de solidarité entre les peuples et les pays, a-t-il dit. 

M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande), Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) et responsable de son débat consacré aux questions de coordination, a déclaré que la coordination permet de faire fond sur les atouts des uns et des autres et de créer des synergies au sein même de l’ECOSOC, mais aussi du système des Nations Unies et des institutions financières internationales.  Selon lui, les deux priorités à examiner sont l’amélioration de la coordination dans le cadre de l’assistance prêtée aux populations les plus défavorisées et dans le domaine de l’autonomisation des femmes. 

Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a noté que le thème des échanges des deux jours à venir répond à l’ambition nécessaire pour « reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19 tout en faisant progresser la mise en œuvre intégrale du Programme 2030 ».  Alors qu’il reste moins de neuf ans pour réaliser les objectifs de développement durable (ODD), « nous sommes loin d’être là où nous devrions être » et la pandémie nous a poussés « encore plus loin », a-t-elle admis, constatant que les indicateurs sur la pauvreté, la faim, l’éducation et l’emploi « évoluent tous dans le mauvais sens ».  Parallèlement, la « triple crise planétaire » des changements climatiques, de la perte de biodiversité et de la pollution s’aggrave, ce qui menace des vies et des moyens de subsistance partout.  Dans ce contexte, les plus vulnérables et les plus marginalisés souffrent le plus et les gains en matière d’égalité entre les sexes sont également en péril. 

Pourtant, a assuré Mme Mohammed, « nous ne sommes ni désespérés ni impuissants ».  Les défis auxquels nous sommes confrontés ayant été créés par l’humanité, celle-ci « peut les résoudre », a-t-elle affirmé, y voyant finalement « des échecs de la gouvernance mondiale ».  À ses yeux, le rapport du Secrétaire général sur « Notre Programme commun » peut aider à tracer la voie à suivre pour accélérer l’action vers les ODD et le nouveau débat consacré aux questions de coordination de l’ECOSOC peut contribuer à cet effort en vue du forum politique de haut niveau qui se tiendra en juillet prochain. 

Pour la Vice-Secrétaire générale, réaliser une reprise inclusive et atteindre les ODD requiert ambition et accélération de l’action.  Cela nécessite tout d’abord de calibrer soigneusement les synergies politiques et de porter les partenariats à une échelle sans précédent dans la réponse mondiale à la COVID-19. Cela nécessite aussi des institutions renforcées capables de faire face efficacement aux « défis croisés », de faire participer le public et d’adopter une vision à long terme.  Dans ce cadre, a-t-elle poursuivi, il convient de faire renaître le système financier mondial pour s’assurer que tous les pays, pas seulement les économies avancées, disposent de ressources budgétaires suffisantes pour investir dans les personnes et la résilience.  Il faut également renforcer l’allégement de la dette et concevoir une nouvelle restructuration du mécanisme de la dette; réorienter les droits de tirage spéciaux (DTS) et renforcer les ressources des banques multilatérales de développement; revoir le rôle des agences de notation de crédit; assurer un système fiscal mondial plus juste et lutter contre les flux financiers illicites; et, enfin, aller au-delà du PIB pour inclure d’autres indicateurs de vulnérabilité. 

En travaillant ensemble, les commissions, les forums et les organes subsidiaires de l’ECOSOC peuvent accélérer la mise en œuvre des ODD, a soutenu Mme Mohammed, avant de reconnaître que cela demandera un effort collectif pour s’assurer que nous maximisons les synergies entre les organismes et que « nous visons haut ».  Il importe pour cela d’identifier les domaines où les commissions fonctionnelles peuvent déclencher et soutenir de manière constructive une reprise durable et équitable guidée par le Programme 2030, a-t-elle précisé.  Il faut en outre aller plus loin dans l’intégration des changements climatiques, de l’égalité des sexes et des préoccupations des pays en situation particulière dans les travaux des organes subsidiaires de l’ECOSOC. 

Faisant état d’un « nouvel élan » pour faire avancer les transitions économiques critiques de manière « plus intégrée », la Vice-Secrétaire générale a relevé que le nouveau système des coordonnatrices et coordonnateurs résidents offre de nombreuses opportunités pour garantir que le travail et les orientations de l’ECOSOC se traduisent par des résultats tangibles sur le terrain.  En rassemblant les dirigeants des agences spécialisées, y compris les institutions financières internationales, ce débat consacré aux questions de coordination peut donner plus d’impulsion à nos efforts pour assurer une réponse onusienne « intégrée et percutante » dans les pays, a conclu Mme Mohammed. 

Discussions

Reprise inclusive et centrée sur les personnes après la pandémie, notamment par le renforcement de la protection sociale

Animée par le Vice-Président de l’ECOSOC, M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande), cette première discussion a permis aux intervenants de mettre l’accent sur le besoin d’une reconstruction post-COVID tenant compte des principes du développement durable et soucieuse de ne laisser personne de côté. 

Selon M. GUY RYDER, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui intervenait par visioconférence, la COVID-19 a fait perdre l’équivalent de 258  millions d’emplois à temps plein en  2020 et 125  millions en  2021.  La reprise de l’emploi a été inégale, a affirmé M.  Ryder qui a évoqué une reprise beaucoup plus rapide dans les économies avancées que dans les pays en développement, et des progrès inégaux au sein des pays, ce qui affecte particulièrement les personnes qui étaient déjà défavorisées comme les femmes, les jeunes et les travailleurs informels.  De nombreuses économies à revenu faible et intermédiaire en particulier ont du mal à revenir à la situation d’avant la pandémie, a-t-il noté en s’inquiétant que ces inégalités accrues entravent la reprise économique et sociale, dont les perspectives restent faibles et incertaines en  2022 et au-delà.  Il a expliqué que la réalisation d’une reprise inclusive et riche en emplois nécessite de placer des emplois décents au centre des efforts de relèvement, avec des liens étroits avec la protection sociale et un investissement accru dans les domaines ayant un potentiel particulier de création d’emplois comme les économies vertes, le numérique et le secteur des soins. 

Selon le Directeur général de l’OIT, l’un des « points lumineux » de la pandémie a été le rôle crucial que la protection sociale a joué dans une réponse politique sans précédent dans le monde entier.  En effet, les pays qui disposaient déjà de solides systèmes de protection sociale ont pu les utiliser pour garantir l’accès aux soins de santé, assurer la sécurité des revenus et protéger les emplois.  Cependant, les pays dépourvus de systèmes aussi solides ont dû adopter des mesures rapidement, mais manquaient souvent de gouvernance et de ressources nécessaires pour assurer un déploiement rapide et étendu, et donc une réponse protectrice adéquate.  Il a rappelé la situation précaire dans laquelle se trouvent 4,1  milliards de personnes qui n’ont aucune protection sociale.  La COVID-19 a été une crise terrible, mais elle nous a également donné une fenêtre politique unique pour suivre un chemin tout à fait différent, a-t-il toutefois reconnu.  Il a recommandé de bâtir des systèmes de protection sociale universels pour pouvoir emprunter la « voie royale » vers une approche centrée sur l’humain. 

M. Ryder a constaté que pas moins de 1,2 milliard d’emplois, soit 40%  de la main-d’œuvre mondiale, dépendent d’écosystèmes sains et d’un environnement stable.  « De ce fait, la réponse à la COVID-19 et la réponse à la crise climatique ne peuvent être dissociées. »  Il a souligné qu’il peut y avoir 100  millions de nouveaux emplois grâce à une transition vers des économies sobres en carbone et circulaires d’ici à  2030.  De même, il a misé sur l’appel du Secrétaire général en faveur d’un accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale, lancée en septembre  2021, qui vise à accroître le niveau et la coordination des efforts du système multilatéral pour aider les pays à créer 400  millions d’emplois décents, y compris dans les secteurs de l’économie verte, du numérique et des soins.  Il a fait valoir que cela permettrait aussi d’étendre la couverture de la protection sociale aux quatre  milliards de personnes qui en sont actuellement exclues, tout en accélérant les progrès vers une économie neutre en carbone.  C’est dans cette optique que l’OIT convoque un forum mondial du 22 au 24  février pour développer des propositions concrètes pour un multilatéralisme plus réseauté, inclusif et efficace, dans le cadre d’une reprise centrée sur l’humain. 

Pour la Directrice générale adjointe de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le docteur ZSUZSANNA JAKAB, la pandémie a mis en évidence plus que jamais à quel point la santé et le développement économique et social sont interdépendants.  Le docteur Jakab, qui intervenait également par visioconférence, a déploré le fait que plus de la moitié de la population mondiale n’a toujours pas accès aux services de santé essentiels.  Chaque année, 930  millions de personnes risquent la pauvreté en raison des dépenses personnelles en soins de santé, a-t-elle alerté, en soulignant que la COVID-19 a gravement perturbé la fourniture de nombreux services de santé essentiels alors que les systèmes de santé continuent d’être débordés. 

Même s’il y a des signes d’augmentation des dépenses publiques pour la santé pendant la COVID-19, c’est encore inégal, a-t-elle constaté.  Pour étayer cette propension inégalitaire, elle a relevé qu’en décembre 2021, sur les huit  milliards de doses de vaccin COVID-19 administrées à l’échelle mondiale, les 9%  de la population mondiale se trouvant dans les pays à faible revenu n’avaient reçu que 0,6% de ces vaccins.  Elle a souligné que la pandémie a également mis à rude épreuve la gestion des déchets médicaux à travers le monde, menaçant la santé humaine et environnementale. 

Une reprise inclusive après la pandémie nécessite de redynamiser nos engagements pris dans les objectifs de développement durable (ODD) pour des socles de protection sociale complets, a plaidé la Directrice générale adjointe de l’OMS.  Elle a dit que son organisation insiste sur la couverture sanitaire universelle tout en souscrivant à l’appel de l’OIT en faveur d’une protection sociale universelle pour tous. 

À sa suite, la Représentante permanente de l’Argentine, Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF, a pris la parole en tant que Présidente de la Commission du développement social qui entame sa soixantième session le 7  février prochain.  Elle a également insisté sur les mesures de protection sociale prises pendant la pandémie, plus de 3 000 au total à travers le monde entre le 20  mars 2020 et le 14  mai 2021.  Selon elle, la crise actuelle et la perspective de relèvement est l’occasion de faire mieux en matière de protection sociale.  Il faut surtout mettre l’accent sur un relèvement respectueux de l’égalité des sexes, a—t-elle plaidé.  Dans ce cadre, des mesures contre la violence contre les femmes, la promotion de l’emploi féminin et l’autonomisation économique des femmes sont prioritaires. 

Débat interactif

Au cours de la séance interactive qui a suivi les déclarations des panélistes, la Colombie, s’exprimant au nom du Groupe des pays à revenu intermédiaire, a jugé crucial, en ce moment précis, de parvenir à l’équité vaccinale en appuyant les initiatives visant à faciliter l’accès des pays en développement aux vaccins contre la COVID-19.  La Chine a souscrit à cet appel, tout en promettant de continuer à fournir des vaccins contre la COVID-19 aux pays en développement.  Même son de cloche du côté des États-Unis qui ont dit avoir, globalement, consacré 4  milliards de dollars à des initiatives similaires.  Le pays entend d’ailleurs fournir 500 millions de doses de vaccin au Mécanisme COVAX en 2022.  L’observateur de l’Union européenne (UE) a rappelé que c’est grâce au travail des chercheurs européens qu’on a pu produire des vaccins à ARN contre la COVID-19.  Il a dit qu’en 2022, l’UE envisage de construire une usine de production de ce type de vaccins afin de cibler d’autres maladies telles que la tuberculose et le VIH. 

Pour reconstruire en mieux, il faut tenir compte de la sécurité humaine, a insisté le Japon qui a promis de rester l’un des chefs de file de la protection sanitaire universelle.  Pour mieux se préparer aux urgences sanitaires, il serait de bon ton d’investir dans la couverture sanitaire universelle, a acquiescé l’OMS en soulignant que la moitié de l’humanité n’a pas accès aux services de santé essentiels.  C’est pourquoi le Guatemala a mis l’accent sur l’amélioration de la protection sociale des familles.  Pour la délégation, il est tout aussi important d’encourager les investissements étrangers directs et de continuer de travailler ensemble, dans un esprit de coopération.  C’est pour magnifier cet esprit de coopération que le Liban a appelé à faire du vaccin contre la COVID-19 un « bien public mondial » afin de vacciner tout le monde, y compris par le biais de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire.  Le Saint-Siège a également plaidé en faveur de l’équité vaccinale. 

Selon le Mexique, les défis pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 requièrent de nouveaux engagements.  C’est pour cette raison que les organes onusiens comme l’ECOSOC doivent offrir des données de haute qualité aux pays afin que ces derniers prennent des mesures appropriées pour un relèvement efficace.  Le Maroc a parié sur l’esprit de coordination qui doit être présent dans tous les travaux de l’ECOSOC et de ses organes subsidiaires.  M.  Ryder, de l’OIT, a dit qu’il faut davantage de coordination d’action au niveau international.  C’est aussi le vœu du Malawi qui a parlé au nom des pays les moins avancés (PMA).  La délégation a relevé que la pandémie a exacerbé les problèmes des PMA en raison des vulnérabilités préexistantes.  La délégation a souhaité que la pauvreté et la faim soient au cœur des travaux de l’ECOSOC, et il en va de même pour la question de la dette.  Dans le même temps, les pays en développement sont appelés à respecter leur promesse de consacrer 0,7% de leur revenu national brut à l’aide publique au développement (APD), a-t-il ajouté. 

Protéger la planète

Mme INGER ANDERSEN, Directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), a considéré que les impacts sanitaires de la triple crise que traverse la planète –changements climatiques, perte de biodiversité, pollution et déchets– sont évidents, relevant notamment que la perte de biodiversité dégrade les services écosystémiques essentiels à la santé humaine, tels que l’eau douce, les aliments sains et les médicaments.  Des particules de plastique chargées de produits chimiques nocifs tourbillonnent dans nos océans, tandis que les changements climatiques, la pollution et la consommation non viable favorisent la propagation des maladies qui sont transmises des animaux aux humains.  Et la pollution atmosphérique tue des millions de personnes chaque année, s’est inquiétée la haute fonctionnaire. 

Dans ce contexte, elle a attiré l’attention sur l’importance de l’approche « Une seule santé », qui intègre santés humaine, animale et planétaire, évoquant la mise en place de nouvelles structures au sein du système des Nations Unies, tels que le Groupe d’experts de haut niveau pour l’approche Une seule santé (OHHLEP) et le Groupe de direction mondial sur la résistance aux antimicrobiens.  Dans le cadre de ces initiatives, a-t-elle indiqué, nous pouvons mettre en œuvre des actions visant à créer des systèmes coordonnés de surveillance et d’alerte rapide sur les zoonoses, la résistance aux antimicrobiens et autres menaces sanitaires émergentes.  « Des actions qui améliorent la science pour des interventions plus coordonnées.  Des actions qui créent des incitations à améliorer les pratiques agricoles durables et le commerce viable des animaux domestiques et sauvages.  Des actions qui garantissent une bonne gestion de la nature et de la biodiversité à l’échelle mondiale », a-t-elle ajouté, exhortant en outre à veiller à ce que le cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 soit bien conçu. 

Elle a également expliqué que le PNUE collabore avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) et d’autres organisations afin de déterminer comment intégrer les données environnementales dans les processus existants d’alerte précoce dans le secteur de la santé.  Ces efforts s’accompagnent d’un renforcement conjoint des capacités et d’une formation afin que les professionnels de la santé publique, les vétérinaires et les praticiens de l’environnement puissent mieux comprendre et élaborer des réponses multisectorielles coordonnées qui s’attaquent véritablement aux problèmes.  Ce sont les types de solutions qui feront progresser plusieurs ODD en même temps, a-t-elle assuré. 

Pour réussir, cependant, nous avons besoin d’un soutien financier solide pour Une seule santé, a-t-elle fait savoir.  Or, seuls 220  millions de dollars ont été engagés pour financer les activités dans 13  pays en 2020.  « Pourtant, les investissements à prévenir les futures pandémies sont estimés à environ 3,4  milliards de dollars par an.  Cela peut sembler beaucoup d’argent.  Mais comparez cet investissement au coût de la pandémie de COVID-19, qui pourrait coûter plus de 18 000 milliards de dollars à l’économie mondiale », a fait observer la Secrétaire générale adjointe, en encourageant la communauté des donateurs à se mobiliser. 

M. STEPHAN SICARS, Chef de la Direction générale de l’environnement et de l’énergie de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), a souligné l’importance de l’Alliance mondiale pour une économie circulaire et une utilisation efficace des ressources (GACERE) pour promouvoir une transition juste vers une économie circulaire économe en ressources.  Mettant l’accent sur les effets positifs d’une utilisation plus efficace des ressources, il a cité la possibilité de freiner l’augmentation de la consommation et de réduire l’impact de la production et du gaspillage des ressources sur le climat, la pollution et la biodiversité.  M. Sicars a expliqué que cette démarche est liée à l’ODD 9 sur l’industrialisation inclusive et durable, les infrastructures résilientes et l’innovation, et l’ODD 12 sur la consommation et la production durables. 

Il a indiqué que GACERE est une alliance de gouvernements lancée le 22 février 2021 pour promouvoir une transition juste vers une économie circulaire économe en ressources en s’appuyant sur des alliances régionales et des partenaires stratégiques du savoir.  « Actuellement, les membres de GACERE se composent de 15 pays, plus la Commission européenne qui représentent les 27 États membres de l’Union européenne », a-t-il précisé avant d’ajouter que le PNUE et l’ONUDI fournissent un soutien opérationnel à cette alliance.  Notant que la croissance démographique mondiale et l’objectif d’un niveau minimum de développement pour tous ont rendu le modèle économique linéaire actuel insoutenable, le représentant d’ONUDI a jugé indispensable une transition vers des économies circulaires, garantissant une croissance économique durable inclusive et respectueuse de l’environnement. 

Enfin, il a précisé que les membres du GACERE ont produit un certain nombre de documents de travail pour faire progresser l’économie circulaire, en phase avec les priorités actuelles du financement de la relance.  Ces réflexions soulignent que les initiatives d’économie circulaire peuvent créer de nouveaux emplois décents et de nouvelles opportunités d’investissements dans une reprise verte.  Et si les interventions de l’économie circulaire peuvent cibler des secteurs déjà inclus dans les plans de relance, tels que l’énergie, l’efficacité énergétique pour le logement, la mobilité et les infrastructures, elles peuvent également apporter des avantages significatifs dans d’autres secteurs tels que les TIC, les textiles, les plastiques, l’assainissement et la construction. 

Mme MIRIAM MAC INTOSH, Présidente du Forum des Nations Unies pour les forêts (FNUF), a indiqué que la COP26 a effectivement placé les forêts et d’autres solutions fondées sur la nature au centre des discussions sur la sauvegarde de la planète, le Pacte de Glasgow pour le climat reconnaissant la nécessité d’exploiter le potentiel des forêts pour atténuer les changements climatiques et s’y adapter plus efficacement.  Elle a également relevé que la déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres a été signée par plus de 142 pays, représentant plus de 90% des forêts de la planète, afin de stopper et d’inverser leur perte et la dégradation des terres d’ici à  2030. 

En inversant la déforestation et en gérant durablement ce patrimoine -qui inclut le boisement, le reboisement et la restauration des paysages forestiers-, les écosystèmes forestiers peuvent soutenir et aider à sortir des millions de personnes supplémentaires de l’extrême pauvreté, ainsi qu’à bâtir des économies et des sociétés résilientes, à sauvegarder la biodiversité et à lutter contre les changements climatiques.  Ils constituent également un tampon naturel contre la transmission des maladies zoonotiques et réduisent le risque de futures pandémies, a ajouté Mme  Mac Intosh. 

« Aussi, pour se remettre pleinement de la pandémie et faire face aux crises climatiques et naturelles, nous devons inverser la tendance négative actuelle en plaçant des écosystèmes sains et des communautés résilientes au centre de nos efforts pour nous relever mieux et plus vert », a-t-elle plaidé.  Pour cela, il est essentiel que les gouvernements, le système des Nations Unies et les autres partenaires prennent des mesures décisives pour intégrer des solutions basées sur les forêts dans leurs réponses immédiates et à long terme, et profitent de cette occasion pour accélérer les actions visant à réaliser le Programme 2030 et le plan stratégique des Nations Unies sur les forêts. 

Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud), Présidente de la Commission de la condition de la femme, a commencé par rappeler que les crises et les catastrophes climatiques et environnementales affectent de manière disproportionnée les moyens de subsistance des femmes et des filles.  Elles rendent nécessaires pour elles de fournir des soins et d’assumer des tâches domestiques supplémentaires, rémunérés ou non, et réduisent ainsi leur capacité à agir sur l’orientation politique et économique de leur propre pays, a constaté la panéliste.  « Il est donc important de faciliter l’accès des femmes à des emplois décents, verts et bleus dans le cadre de la relance économique de COVID-19 », a-t-elle noté, en soulignant que cela devrait se faire dans des secteurs tels que l’énergie durable, l’agriculture, la sylviculture et la pêche.  Cela permettra, selon elle, de faire progresser à la fois l’égalité des sexes et la viabilité environnementale. 

Il faut également se concentrer sur la protection sociale universelle et les systèmes et politiques de soins afin de permettre aux femmes et aux filles de participer et de diriger les actions en matière de climat, d’environnement et de catastrophes.  Soulignant que l’ECOSOC a l’obligation d’intégrer une perspective de genre dans tous les aspects de son travail, Mme  Joyini a précisé que cela signifie que toutes les discussions doivent tenir compte de l’impact des politiques sur les femmes et les filles, les hommes et les garçons.  « La documentation destinée à nos organes doit donc inclure une analyse de genre et fournir des recommandations pour faire progresser l’égalité des sexes », a-t-elle préconisé.  Et tous les panels et événements interactifs doivent inclure un mélange d’intervenants et experts – femmes et hommes.  Si le Conseil et tous ses organes subsidiaires intègrent systématiquement une perspective de genre dans leurs travaux, il sera possible de surmonter l’inégalité systémique entre les sexes et d’obtenir des résultats tangibles pour toutes les femmes et les filles.  

Débat interactif

« Protéger notre planète n’est pas une option, mais une nécessité », a indiqué le Kenya, dont le Gouvernement a entrepris de rétablir l’intégralité écologique des écosystèmes dégradés et adopté des mesures de reboisement « agressives ».  La République de Corée a convenu que le système des Nations Unies devrait tenir compte des distorsions provoquées par les pandémies, en faisant observer que 130 milliards de masques chirurgicaux se trouvent « éparpillés dans la nature » et que nous utilisons beaucoup de plastique pour la nourriture, « y compris ici à l’ONU ».  Dans ce contexte, l’ECOSOC doit prendre des mesures concrètes pour promouvoir la biodiversité marine, a poursuivi le Pérou, pour qui cela est indispensable pour des États côtiers comme le sien.  Cette délégation a également considéré que la protection des terres, de la biodiversité et des forêts doit devenir plus importante à l’avenir. 

Le plus grand défi qui se pose au développement durable sont les changements climatiques, ont affirmé les États-Unis, qui ont fait valoir un projet de coopération lancé par Washington visant à quadrupler les moyens alloués à l’action climatique au cours de la décennie à venir.  Si la Convention-cadre sur les changements climatiques (CCNUCC) est l’organe majeur en la matière, la délégation américaine a souhaité cependant que l’ECOSOC assure la coordination avec elle pour tirer pleinement parti de leurs synergies.  De son côté, la Chine a déclaré qu’il faut respecter les principes de l’Accord de Paris et de l’aide différenciée entre pays en développement et pays développés. 

La Colombie a souligné l’importance de renforcer la transition énergétique, et de promouvoir les énergies renouvelables pour qu’elles représentant au moins 60% des bouquets énergétiques.  Elle a également insisté sur la promotion de modèles de consommation et de production efficaces et durables.  Il faut replacer l’homme au cœur de notre système, a exhorté le Sénégal, qui s’est posé la question de savoir comment passer d’une transition juste à une transition soutenable et durable, en rappelant les besoins différenciés qu’ont pays en développement et pays développés.  Pour la Bolivie, une approche intégrée axée sur la personne, « en harmonie avec la nature », et assortie de modes de production et de consommation durables doit être privilégiée, si nous voulons relever tous les défis environnementaux. 

Mesures pour une reprise économique résiliente et inclusive

Au cours de cette troisième table ronde consacrée aux « mesures pour une reprise économique résiliente et inclusive », il a été question des efforts requis pour garantir un relèvement durable et inclusif des économies, créer les conditions de travail décent pour tous, promouvoir l’égalité, y compris l'égalité des sexes, réduire les risques et renforcer la résilience aux chocs futurs, et accroître la capacité de production par la diversification, l’innovation technologique et les investissements dans les ODD.  Autant de questions qui donnent suite aux échanges de la matinée, a noté, en ouverture, M. SURIYA CHINDAWONGSE, Vice-Président de l’ECOSOC et responsable du débat consacré aux questions de coordination

Premier intervenant à s’exprimer, M. ACHIM STEINER, Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a tout d’abord constaté que la pandémie ne fait pas de pause et qu’il reste « une montagne à gravir » avant de passer au « statut endémique » à travers le monde. Déplorant que seulement 11% des personnes vivant dans les pays à faible revenu aient reçu au moins une dose de vaccin, il s’est dit préoccupé par le fait que plus de vaccins aient été administrés sous forme de rappels dans les pays les plus riches que de premières doses dans les pays pauvres au cours des six derniers mois. Multiplier les rappels dans un petit nombre de régions ne mettra pas fin à une pandémie alors que des milliards des personnes ne sont absolument pas protégées, a-t-il averti.  

L’Administrateur du PNUD a ensuite relevé que de nombreux pays en développement ont des difficultés à accéder aux financements nécessaires pour alimenter la reprise, tandis que d'autres sont surendettés. Selon ses calculs, 82 pays en développement sont « fiscalement vulnérables » et il devient de plus en plus difficile pour leurs gouvernements de fournir aux populations le soutien dont elles ont besoin.  Si on ajoute les « défis croissants », tels que la hausse des prix de l’énergie et des aliments, la hausse des taux d’intérêt et les problèmes de chaîne d'approvisionnement, les conditions sont réunies pour plonger encore plus de personnes dans la pauvreté et creuser les inégalités.  De fait, a-t-il souligné, nous devons faire face à la menace d'une « divergence mondiale » en termes de reprise économique, avec d’un côté les pays en développement et de l’autre les pays développés, ce qui met en péril les promesses du Programme 2030. 

Pour M. Steiner, tout n’est pourtant « pas si sombre ».  En premier lieu, la réponse à la COVID-19 a démontré que le système de développement des Nations Unies est « plus que la somme de ses parties ».  Rappelant que les différentes composantes de l’ONU sont à pied d’œuvre dans 170 pays - de l'approvisionnement au déploiement d’équipements médicaux vitaux et de vaccins en passant par le soutien aux transferts d'argent numériques, à l’aide aux petites entreprises, qui représentent 70% du l’emploi dans le monde, et à l’assistance fournie aux gouvernements pour qu’ils adoptent des politiques sensibles au genre dans leurs réponses à la pandémie-, il a estimé que ce qui manque à l'Organisation en termes de puissance budgétaire est compensé par un « soutien efficace et opportun » sur le terrain.  Il a d’autre part relevé que les réponses qui fonctionnent sont adaptées aux divers contextes nationaux.  L’ONU, a-t-il ajouté, est en mesure d’offrir cette attention politique, institutionnelle et budgétaire pour répondre aux besoins différents des petits États insulaires en développement (PEID), des pays les moins avancés (PMA), des pays à revenu intermédiaire ainsi qu’aux contextes de crise et de fragilité. 

Avant de conclure, il a cité trois priorités clefs pour mieux construire après la COVID-19. Il convient, premièrement, de « terminer la course » pour vacciner la population mondiale rapidement. Deuxièmement, le système multilatéral doit élargir l'espace budgétaire et stimuler les flux financiers alignés sur les ODD en 2022. Selon lui, cela doit également impliquer une action multilatérale sur l'allégement de la dette, le financement concessionnel, les droits de tirage spéciaux (DTS) et des investissements concertés pour les ODD.  Enfin, il faut aussi penser à l’avenir.  Malgré la hausse des prix de l’énergie et des taux d'intérêt, nous ne devons pas laisser tomber l’accès à l'énergie, ni relâcher les transferts technologiques et financiers nécessaires pour faire avancer la transition vers un monde de l’économie verte, a-t-il affirmé, souhaitant qu’on ne parle plus d’une flambée de COVID-19 en 2023. 

Intervenant depuis Genève, Mme REBECA GRYNSPAN, Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a relevé que, l'année dernière, le PIB mondial a rebondi, sans que cette reprise soit inclusive ni qu’elle renforce la résilience. « Une reprise comme celle-ci, dans un monde plus inégalitaire, est une voie vers la fragilité et ne mérite pas d'être appelée reprise », a-t-elle martelé, avant de préciser que la CNUCED estime le coût total de cette pandémie pour les pays en développement à 13 000 milliards de dollars. Étonnamment, a-t-elle constaté, dans de nombreux pays avancés, l’impact sur le taux de croissance à long terme est presque négligeable. On prévoit ainsi que le PIB américain en 2025 sera plus important que celui prévu en 2019 avant la pandémie. 

Dans le même temps, des risques supplémentaires se profilent à l'horizon, a noté Mme Grynspan, selon laquelle la hausse de l'inflation et le resserrement monétaire dans le monde riche pourraient entraîner une fuite des capitaux et une volatilité financière dans les pays du Sud, rendant la gestion de la dette encore plus difficile. De plus, les perturbations sans précédent des chaînes d'approvisionnement mondiales devraient se poursuivre et accroître encore l'inflation, en particulier dans les PEID, où la CNUCED évalue cet effet à 7,5% de leur niveau de prix.  Et même si ces risques ne se matérialisent pas, il y aura encore 50 millions de personnes extrêmement pauvres en plus en 2023 par rapport à 2019, a-t-elle averti, mettant en garde contre une « autre décennie perdue » pour de nombreux pays en développement. 

Face à ces risques, la réponse de la communauté internationale va, selon elle, « dans le bon sens », la plus grande émission jamais enregistrée de DTS en étant un « exemple clair ». Toutefois, a-t-elle jugé, il manque l'élan et l'ampleur appropriés. Si nous n'augmentons pas le soutien financier, si nous ne trouvons pas de vraies solutions pour l'allègement de la dette, si on ne recapitalise pas les banques multilatérales de développement, l'élan positif actuel finira par être à nouveau trop faible et trop tardif, a prévenu Mme Grynspan. Dans ce contexte, le « Pacte de Bridgetown », adopté lors de la quinzième session de la CNUCED en octobre dernier à La Barbade, traduit la volonté des États Membres de voir la capacité de recherche et l’aide technique de la CNUCED revigorées, a-t-elle souligné, notant que de nombreux problèmes liés au commerce et au développement doivent être abordés dans le cadre de cette pandémie. Parmi eux, elle a cité l’équité vaccinale ; l’investissement pour le commerce et la résilience des infrastructures ; le financement de la durabilité dans les pays en développement, notamment en luttant contre les flux financiers illicites ; et la gestion de la dette et le financement du redressement, y compris par le recyclage des DTS. Le Pacte, a-t-elle ajouté, reconnaît également que les effets combinés de la pandémie et des changements climatiques entraînent des défis mondiaux qui nécessitent des solutions globales et coordonnées et que l'ONU est le forum de dialogue multilatéral idoine pour y répondre. 

La reprise mondiale à cette « crise pas comme les autres » se poursuit mais elle est perturbée, a observé depuis Washington M. BO LI, Directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI).  En effet, a-t-il expliqué, la dynamique tend à ralentir.  Les décideurs sont confrontés à un « parcours d’obstacles » dus au variant Omicron mais aussi aux perturbations des chaînes d’approvisionnement, à la progression de l’inflation et à l’endettement record. En conséquence, notre mise à jour des perspectives de l’économie mondiale prévoit une croissance mondiale de 4,4% en 2022, soit un demi-point de moins que ce que nous avions prévu en octobre dernier. Et l'inflation est révisée à la hausse, avec des pressions sur les prix qui sont plus généralisées et qui devraient durer plus longtemps. 

De fait, a indiqué M. Li, la pandémie devrait coûter à l’économie mondiale 13 800 milliards de dollars d’ici à 2024.  Même si la reprise se poursuit, la divergence inquiétante des perspectives d’un pays à l’autre persiste.  À ses yeux, la communauté internationale peut néanmoins agir pour favoriser la reprise et veiller à ce que celle-ci soit résiliente et inclusive sur le long terme. Pour cela, il faut tout d’abord accélérer la vaccination.  À l’heure actuelle, a-t-il constaté, seulement 4% de la population des pays à faible revenu est entièrement vaccinée, contre 70% dans les pays à revenu élevé. Il convient ensuite d’ouvrir la voie à une reprise transformationnelle.  Le FMI s’y emploie en développant un nouveau fonds « résilience et durabilité » pour aider les pays à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire à faire face aux défis structurels à plus long terme.  Enfin, il importe d’assurer une transition juste qui favorise une croissance inclusive, a plaidé M. Li.  À cette fin, le FMI collabore avec des partenaires pour améliorer ses conseils, notamment sur le climat et la protection sociale, et œuvre de concert avec l'OIT et les États fragiles et touchés par des conflits, où les partenariats avec l'ONU seront essentiels pour mettre en œuvre sa nouvelle stratégie. 

Dans une liaison depuis Budapest, Mme GABRIELLA VUKOVICH, Présidente de l'Office central hongrois des statistiques et Vice-Présidente de la cinquante-deuxième session de la Commission de statistique, a rappelé que cette session a permis l’adoption du Système de comptabilité environnementale et économique intégrée - comptabilité écosystémique (SEEA EA).  Le SEEA EA, a-t-elle précisé, est un cadre intégré sur le lien économie-environnement qui soutient un large éventail d’ODD et permet aux utilisateurs de données d’aller « au-delà du PIB ».  Il traite les données sur les habitats et les paysages, mesure les services écosystémiques, suit les changements dans les actifs écosystémiques et relie ces informations aux facteurs économiques et aux autres activités humaines. Il complète en outre le PIB en tenant compte du capital naturel, ce qui permet de comprendre les immenses contributions de la nature à notre prospérité et notre bien-être, et l’importance de la nature pour la reprise économique.  

La Vice-Présidente de la Commission de statistique a indiqué que le SEEA EA s’appuie sur cinq comptes principaux qui analysent l’étendue des écosystèmes ; l’état des actifs écosystémiques; les flux de services écosystémiques et l’utilisation de ces services par les unités économiques, y compris les ménages ; et les changements dans les stocks d’actifs écosystémiques.  Le Système prend également en charge la « comptabilité thématique », qui organise les données autour de thèmes environnementaux spécifiques pertinents pour les politiques, tels que la biodiversité, les changements climatiques, les océans et les zones urbaines. Plus de 35 pays compilent les comptes écosystémiques du SEEA et leur nombre devrait croître dans les années à venir, a-t-elle ajouté, notant que, dans le rapport sur « Notre Programme commun », le Secrétaire général exhorte les États Membres à commencer la mise en œuvre de la comptabilité des écosystèmes du SEEA en permettant aux systèmes comptables nationaux et mondiaux d'utiliser les statistiques officielles au-delà du PIB. 

En outre, a poursuivi Mme Vukovich, le SEEA EA fournit une norme statistique qui sous-tend plusieurs initiatives internationales. Grâce à ses capacités d’analyse intégrées, il devrait figurer en bonne place dans le cadre de suivi de la biodiversité mondiale post-2020 et contribuer à la Décennie des Nations Unies pour la restauration des écosystèmes, a-t-elle affirmé. L’experte a d’autre part relevé que plusieurs ODD, notamment l’ODD 6 sur l’eau propre et l’assainissement, l’ODD 11 sur les villes durables et l’ODD 15 sur la vie terrestre, sont associés à des indicateurs dérivés directement du SEEA EA.  Selon elle, la connaissance des services fournis par les écosystèmes est essentielle pour atteindre les cibles des ODD 1 sur l’absence de pauvreté, 2 sur l’éradication de la faim, 7 sur une énergie abordable et propre, et 12 sur une consommation et une production responsables. 

Pour Mme Vukovich, la mise en place de programmes transversaux tels que le SEEA EA nécessite une coordination et une collaboration avec les ministères de tutelle et d’autres fournisseurs de données, ce qui s’est révélé difficile pendant la pandémie de COVID-19. Une plus grande collaboration interinstitutionnelle et des partenariats seront donc essentiels pour créer des politiques efficaces pour une reprise économique résiliente et inclusive, a conclu la responsable. 

Débat interactif

Au cours du débat interactif qui a suivi, l’Indonésie a souhaité que les efforts de reprise permettent de renforcer le dispositif économique et social mondial afin que la communauté internationale dans son ensemble puisse mieux faire face aux crises futures.  À cette fin, elle a appelé à renforcer les infrastructures sanitaires mondiales pour mieux se préparer à la prochaine crise et faciliter la réalisation des ODD. Elle a aussi jugé crucial d’investir dans les compétences numériques et de mettre en œuvre une transition énergétique juste, avec des technologies propres et intelligentes, notamment dans les pays n’ayant pas de capacités de développement des énergies durables.  Enfin, la délégation s’est engagée à tout faire pour renforcer les synergies entre l’ECOSOC et le G20. 

La représentante de la Grenade a, elle, estimé qu’avec le soutien des États Membres, le forum de l’ECOSOC sur le suivi du financement du développement de cette année peut contribuer à une reprise équilibrée et permettre d’avancer sur certains problèmes cruciaux, notamment les questions de dette et de liquidité, la numérisation, le financement climatique, la fiscalité, le commerce et l'investissement.  Elle a ajouté que son pays, en tant que cofacilitateur, exhorte les États Membres à participer à ce processus et à soumettre avant le 18 mars leurs contributions écrites à l’avant-projet de document final, celui-ci devant être adopté le dernier jour du forum prévu du 25 au 28 avril. 

Le Nigéria a confirmé la nécessité de prendre au sérieux le financement durable pour les pays en développement. Il n’y aura pas de reprise résiliente si ces pays sont étouffés par la dette, a-t-il averti, estimant que la règle doit être la même pour tous. Pour ce faire, les pays les plus pauvres doivent pouvoir profiter du commerce et du développement alors qu’il se relèvent de la pandémie. 

À une autre échelle, les États-Unis ont dit voir dans la croissance inclusive un « catalyseur du développement ».  Rappelant leur appui aux pays à revenu faible ou intermédiaire confrontés à des problèmes de liquidités, ils ont indiqué qu’ils mobilisent des financements du secteur privé dans les économies en développement, notamment en renforçant la confiance dans les marchés et en apportant des garanties contre les risques politiques. Pour la délégation, l’un des grands défis est d’édifier des partenariats durables avec le secteur privé tout en protégeant l’environnement et les droits humains.  Il faut aussi que les efforts soient exempts de corruption et promeuvent une déontologie économique.  

« Au-delà de la crise liée à la pandémie, nous continuons à livrer bataille contre les changements climatiques », a signalé le Belize, non sans préciser que son statut de pays à revenu intermédiaire la prive en outre d’un accès aux financements concessionnels. Se disant favorable à l’adoption d’un indice multidimensionnel de vulnérabilité pour l’octroi de tels financements, elle a jugé que cela lui permettrait de garantir une utilisation efficace de ses ressources. Sur le même sujet, le Pérou a appelé de ses vœux l’abandon du PIB comme seul « baromètre » et a souhaité savoir comment la Commission de statistique soutient le principe d’un indice de vulnérabilité pour les pays fragiles. 

Soulignant le rôle central joué par l’ONU pour aider les pays en développement à se relever de manière résiliente, le Kazakhstan a demandé à la Secrétaire générale de la CNUCED de préciser le contenu du « Pacte de Bridgetown » et sa contribution à la réalisation des ODD. 

Après avoir réitéré son appel à la vaccination universelle contre la COVID-19, le Bangladesh a estimé que les technologies devraient être transférées de toute urgence dans les pays en développement pour que la production monte en puissance.  Il a également soutenu que les mesures de relance doivent aller de pair avec l’action climatiques pour faire face aux chocs futurs. Pour cela, les partenaires technologiques et les donateurs privés doivent faire de leur mieux pour renforcer les capacités des pays en développement, a-t-il plaidé, avant d’exprimer l’espoir que le futur programme d’action de Doha pour les PMA soit suivi d’effets. 

La répartition équitable des richesses n’est pas prise en compte par le système financier mondial, a déploré le Costa Rica, appelant à son tour à l’adoption d’un indice de vulnérabilité pour mesurer les besoins en développement, à l’image de l’indice de développement ajusté du PNUD.  À cette fin, il a souhaité que l’ECOSOC se fasse le « fer de lance » d’un système de développement progressif, où personne ne serait laissé pour compte.

En réponse à ces commentaires et questions, l’Administrateur du PNUD a salué le « degré d’unanimité » sur le caractère urgent du défi et l’ampleur de la relance. Pour que celle-ci soit envisagée de manière synchrone, il importe avant tout, selon lui, que les efforts portent sur l’accès aux vaccins contre la COVID-19.  Il faut ensuite que la riposte à cette crise sans précédent soit à la hauteur de la tâche, faute de quoi les conséquences seront lourdes et nous devrons y faire face pendant des années.  Aujourd’hui, a souligné M. Steiner, « nous n’en sommes pas encore à reconstruire en mieux ».  De plus, les outils de relance sont très inadéquats et les mesures mises en place ignorent, par exemple, les effets profonds de la crise pour le secteur informel.  Il est donc urgent de « changer de paradigme » pour tenir compte des vulnérabilités des pays fragiles, de leur manque d’accès à l’énergie et de leurs besoins en investissements pour sortir de la crise, tout en substituant à l’approche « réactive » actuelle une approche « proactive ». 

La Secrétaire générale de la CNUCED est pour sa part revenue sur le « Pacte de Bridgetown », qui appelle à envisager le défi du développement et de prendre cette problématique « très au sérieux ». En ce qui concerne l’investissement, la question est de savoir comment en faire profiter les PMA, notamment en augmentant leurs capacités à attirer des fonds publics et privés.  Elle a ajouté que la CNUCED s’emploie également à répondre à des questions urgentes comme la dette, le financement climatique et la lutte contre les flux illicites.  Mais l’un de ses principaux objectifs est de rendre ses programmes véritablement transformateurs dans les PMA, les PEID et les pays sans littoral. 

De son côté, le Directeur général adjoint du FMI a insisté sur la coopération entre le Fonds et l’ONU. Il a indiqué à cet égard qu’un groupe de membres de l’ECOSCOC rencontrera des responsables du FMI le 10 février prochain pour approfondir le débat et travailler à une économie plus juste et durable. Ces échanges se poursuivront en avril lors du forum sur le suivi du financement du développement, a-t-il ajouté. Il a d’autre part relevé que le FMI travaille à la création d’un fonds de résilience dont l’objet est de faire en sorte que les pays vulnérables soient associés à des projets de transformation au service du climat, de la numérisation et de la riposte à la pandémie. 

La Présidente de lOffice central hongrois des statistiques a, quant à elle, souligné la nature transversale des statistiques, qui servent à la fois à la surveillance et à la gestion de la crise mais aussi à la planification des efforts de riposte. À ses yeux, un élément essentiel est la qualité des données. Il faut notamment collecter des données sur les personnes les plus vulnérables afin qu’elles ne soient plus invisibles, a-t-elle préconisé, avant d’appeler les États Membres à investir dans ce domaine pour « y voir plus clair et améliorer les vies ».

En conclusion de cette table ronde, le Vice-Président de l’ECOSOC s’est félicité de la convergence de vues des intervenants sur le diagnostic.  Selon lui, il convient désormais de travailler à la convergence des moyens permettant d’agir pour la relance économique et le relèvement durable. 

Tirer parti de la science, de la technologie et de l’innovation, y compris des technologies numériques

M. HOULIN ZHAO, Secrétaire général de l’Union internationale des télécommunications (UIT), a expliqué que pour l’UIT, l’impératif de ne laisser personne de côté signifie avant tout ne laisser personne hors ligne.  Les chiffres de l’UIT montrent une forte croissance mondiale de l’utilisation d’Internet depuis le début de la pandémie, alors même que 96% des 2,9  milliards de personnes qui sont toujours hors ligne vivent dans les pays en voie de développement.  De larges écarts entre les sexes subsistent dans les pays les moins avancés et enclavés en termes d’accès et d’utilisation de l’Internet et à l’échelle mondiale, les habitants des zones urbaines sont deux fois plus susceptibles d’utiliser l’Internet que ceux des zones rurales.  « En bref, il sera très difficile d’atteindre les ODD tant que la capacité de se connecter restera profondément inégale au sein des pays et entre eux », a concédé M.  Zhao.  Il a ensuite parlé du projet Giga, une initiative mondiale UIT-UNICEF visant à connecter chaque école à Internet.  Giga a déjà cartographié plus d’un million d’écoles dans 41  pays, et ce n’est que le début, a-t-il affirmé, avant d’indiquer que l’UIT et l’UNICEF proposent de lancer une obligation de connectivité de 5  milliards de dollars pour accélérer les investissements dans les infrastructures. 

S’agissant des changements climatiques, M. Zhao a expliqué que l’UIT cherche à s’aligner sur la trajectoire d’une réduction de 45% des émissions de gaz à effet de serre du secteur des TIC.  Pour y arriver, il est important de s’engager dans de nouvelles formes de collaboration, a-t-il dit.  Dans cet esprit, l’UIT a lancé plusieurs projets communs avec des agences sœurs des Nations Unies, notamment l’UNESCO pour l’apprentissage en ligne et l’OIT pour les compétences numériques des jeunes en Afrique.  L’Union a aussi mobilisé ses États membres, certains secteurs de l’industrie et le milieu universitaire autour de projets TIC mondiaux, régionaux et nationaux qui impliquent des agences régulatrices et administratives.  Le Secrétaire général a précisé que les efforts de l’UIT pour accélérer les progrès vers la réalisation des ODD s’inscrivent dans le cadre d’un engagement plus large visant à faire progresser les technologies nouvelles et émergentes pour tous, qu’il s’agisse d’aider à développer des réseaux 5G ou des partenariats avec l’OMS pour exploiter la puissance de l’intelligence artificielle au service de la santé. 

Mme CATHERINE M. RUSSEL, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a déclaré que plus de 600 millions d’enfants sont touchés par la fermeture totale ou partielle des écoles deux ans après le début de la pandémie.  Face à cette situation, elle a appelé à aider les pays à maintenir les écoles ouvertes, en vaccinant en priorité les enseignants et personnels scolaires.  Elle a également souligné la nécessité d’aider les enfants à retrouver leur éducation, de réduire le risque de décrochage et de combler le déficit d’apprentissage et de compétences.  Il faut aussi investir dans le rétablissement du bien-être physique et émotionnel des enfants gravement touchés pendant la pandémie, a-t-elle insisté en soulignant la valeur ajoutée des programmes de nutrition, WASH, de protection sociale et de soutien psychosocial.  La panéliste a également appelé à redoubler d’efforts pour atteindre les enfants les plus marginalisés, notamment les filles, les enfants qui grandissent dans la pauvreté, les enfants pris dans des crises humanitaires, les enfants handicapés, ou membres de minorités ethniques. 

Mme Russel a alerté que les perturbations de l’éducation dans les pays à revenu faible ou intermédiaire ont laissé jusqu’à 70% des enfants de 10 ans incapables de lire.  Illustrant les efforts de l’UNICEF en matière de programmes de rattrapage, Mme  Russel a cité le lancement en étroite collaboration avec le Gouvernement du Pakistan, de Teleschool, une chaîne de télévision éducative qui dispense une éducation à des millions d’enfants.  Et en Afghanistan, nous avons uni nos forces avec le Partenariat mondial pour l’éducation, Education Cannot Wait et la Fondation Gates pour étendre l’apprentissage communautaire dans les zones difficiles d’accès, en particulier pour les filles, dont l’accès à l’éducation continue d’être compromis, a-t-elle indiqué. 

La Cheffe de l’UNICEF a ensuite relevé que la pandémie a suscité la plus grande « réponse numérique » de l’histoire.  Elle a cité un partenariat entre l’UNICEF et l’Union internationale des télécommunications (UIT) et d’autres partenaires sur l’initiative Giga, qui vise à connecter toutes les écoles du monde à Internet et a permis de cartographier plus d’un million d’écoles dans 41 pays pour suivre la connectivité en temps réel.  Elle a aussi cité l’exemple du Learning Passport, une plateforme d’apprentissage numérique développée par l’UNICEF avec Microsoft qui permet à 227  millions d’enfants d’accéder à des programmes scolaires en ligne dans leur langue nationale.  La collaboration avec le secteur privé pour développer des produits basés sur l’intelligence artificielle peut aussi améliorer l’éducation d’étudiants marginalisés, dont les enfants handicapés. 

En sa qualité de Président de la Commission de la science et de la technique au service du développement (CSTD), M.  MANSOUR AL-QURASHI (Arabie saoudite) a appelé à assurer un accès égal aux avantages offerts par la science, la technologie et l’innovation dans les soins de santé pour une récupération durable après la pandémie de COVID-19 et des futures crises sanitaires.  Conformément à l’ambition de « ne laisser personne de côté », il a exhorté les décideurs politiques à tenir compte du potentiel des innovations pour répondre aux besoins de la diversité des communautés, en particulier des groupes vulnérables, tels que les peuples autochtones, les minorités et les personnes extrêmement pauvres.  

Notant que l’intégration de la perspective de genre est essentielle pour construire des sociétés équitables, M. Al-Qurashi a appelé à éviter les préjugés sexistes dans le domaine des nouvelles technologies.  Pour ce faire, il faut développer des capacités institutionnelles, des plans d’action et des outils pratiques pour élargir l’accent mis sur le genre et la participation et la consultation des femmes et des groupes de femmes concernant les changements climatiques. 

Le panéliste a ensuite appelé à renforcer la coopération aux niveaux mondial, régional et national dans le domaine de la science, la technologie et l’innovation pour assurer une « mondialisation à visage humain » inclusive et durable dans le contexte de la pandémie de COVID-19.  Alors que les communautés du monde entier, en particulier dans les pays les moins avancés (PMA), les pays en développement sans littoral (PDSL), les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays à revenu intermédiaire sont aux prises avec l’impact de la crise sanitaire, il a dit l’urgence de « formes améliorées de coopération internationale au développement et de nouveaux modèles de partage des connaissances ».  La réponse mondiale à la pandémie nous a offert une liste d’exemples significatifs de la manière dont le partage international des connaissances sur la science, la technologie et l’innovation peut faire la différence entre la vie et la mort, a-t-il relevé. 

M. TAKESHI HIKIHARA, Président de la Commission pour la prévention du crime et la justice pénale, a souligné d’emblée que l’innovation technologique, y compris les technologies numériques, est une épée à double tranchant dans la lutte contre la criminalité.  Elle fournit des outils efficaces pour prévenir les crimes et renforcer les systèmes de justice pénale, mais elle offre également de nouvelles opportunités et de nouveaux moyens aux criminels.  La pandémie de COVID-19 n’a aiguisé qu’un seul tranchant de l’épée, « malheureusement ce dernier », a-t-il dit.  Il a indiqué que la Commission cherche à relever ce défi en jouant un rôle actif dans l’élaboration d’orientations politiques pour lutter contre les crimes nouveaux et émergents, et en promouvant l’utilisation de l’innovation technologique, y compris les technologies numériques. 

L’un des plus grands accomplissements à cet égard a été l’adoption, en mars dernier, lors du quatorzième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et la justice pénale, de la Déclaration de Kyoto qui, a affirmé M.  Hikihara, marque un jalon pour la communauté internationale dans ses efforts collectifs de prévention du crime et de justice pénale.  Elle démontre clairement la reconnaissance partagée des États Membres que les systèmes de justice pénale doivent être améliorés en promouvant une utilisation appropriée de la technologie, y compris la numérisation, en tenant dûment compte de l’expérience actuelle de la pandémie, a-t-il ajouté.  Il a cité les engagements pris pour renforcer la coordination et la coopération en vue de prévenir et combattre efficacement la cybercriminalité, notant que la promotion des partenariats public-privé avec l’industrie numérique est particulièrement efficace à cet égard.  Les États Membres ont aussi convenu d’intégrer la perspective de genre dans la prévention du crime et les systèmes de justice pénale, s’engageant en outre à répondre aux besoins sexospécifiques et à promouvoir l’autonomisation des femmes dans ce domaine.  Avant de conclure, M.  Hikihara n’a pas manqué de rappeler que la Commission a également préparé une résolution consacrée au renforcement des systèmes de justice pénale pendant et après la pandémie de coronavirus qui a été adoptée par l’Assemblée générale en décembre dernier. 

Débat interactif

Si tout le monde s’est accordé à dire que la pandémie de COVID-19 a forcé beaucoup de personnes à se mettre en ligne, les intervenants ont aussi insisté sur l’impératif et l’urgence de veiller à ce que les 3,7 milliards de personnes qui ne sont toujours pas connectées ne soient pas laissées pour compte.  Il faut combler la fracture numérique afin de réduire les inégalités croissantes, a insisté Singapour alors que le Chili a plaidé pour plus de coopération pour renforcer les infrastructures numériques et donner à tous accès à l’Internet.  La Lettonie a souligné qu’il y va de la résilience de nos sociétés, tandis que la Slovénie a appelé à prendre conscience des disparités dans le développement de l’intelligence artificielle entre les pays, insistant en outre sur l’impératif de veiller à ce qu’elle soit mise au service des ODD. 

Les intervenants se sont également accordés à dire que les sciences, technologies et innovations sont des outils incontournables pour relever les défis actuels et réussir le pari du développement durable, mais que leur accès demeure trop inégalitaire, un état de fait amplifié par la pandémie.  Pourtant, a dit la Chine, le succès et la durabilité de la relance post-COVID-19 vont en dépendre. Dès lors, il importe que l’ONU joue un rôle de coordination dans ce domaine et facilite la promotion d’un environnement non discriminatoire et juste pour les sciences, technologies et innovations.  La proposition d’un pacte numérique mondial avancée par le Secrétaire général a d’ailleurs été appuyée à plusieurs reprises. 

L’éducation en ligne, privilège des pays développés pendant la pandémie a, elle aussi, souvent été évoquée, la Directrice exécutive d’UNICEF notant que 616 millions d’enfants ont subi les effets de la fermeture des écoles pendant la pandémie COVID-19, et que seuls les pays développés ont pu passer à l’éducation numérique.  Aujourd’hui, toutes les nations se doivent de réduire l’analphabétisme numérique, mais ce pari ne pourra être relevé que collectivement, a estimé le Guatemala.  Pour le Secrétaire général de l’UIT, l’une des voies à explorer à cette fin est l’appui aux PME dans les pays en développement car, « dans ces pays, les ingénieurs sont parfaitement au fait de la 4G et de la 5G ».  Il a également insisté sur l’importance de réduire la fracture numérique entre les genres en encourageant des initiatives pour orienter les filles et les femmes vers les sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM) car, comme il l’a constaté, même à l’UIT les déléguées femmes sont toujours sous-représentées. 

Comme l’a noté le Vice-Président de l’ECOSOC, alors que l’ambiance était à l’optimisme à l’aune de la quatrième révolution industrielle, la pandémie a mis en lumière la fracture numérique et les inégalités dans ce domaine.  Étant donné ces inégalités incontestables et l’immense potentiel des sciences et des technologies pour la relève post-COVID-19, que faut-il faire pour surmonter les difficultés à court et long terme et réaliser les ODD sans laisser certains pour compte?  Voilà la grande question d’aujourd’hui.  Autrement dit, a renchéri le Secrétaire général de l’UIT, comment connecter plus de trois milliards de personnes? 

M. CHINDAWONGSE (Thaïlande),Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC) et responsable du débat consacré aux questions de coordination, a, en fin de séance, fait une synthèse des discussions et des différentes tables rondes qui se sont tenues aujourd’hui.

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