SC/14530

Le Conseil de sécurité s’inquiète du lourd tribut payé par les civils dans les conflits armés

Réuni cet après-midi en visioconférence pour examiner, sous la présidence chinoise, le thème de la protection des civils en période de conflit armé, le Conseil de sécurité a fait l’amer constat que les populations civiles continuent, chaque jour, chiffres à l’appui, à essuyer les conséquences des opérations militaires.  Une situation exacerbée par la pandémie de COVID-19, cinq ans après l’adoption de la résolution 2286 (2016) sur la protection du personnel de santé et des installations médicales. 

En 2020, près de 100 millions de personnes ont été confrontées à des niveaux de crise ou pire d’insécurité alimentaire aiguë en raison d’un conflit, a alerté à l’ouverture du débat public le Secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. Mark Lowcock.  Un chiffre largement en hausse comparé à 77 millions de personnes l’année d’avant. 

Et que dire des personnes tuées par l’utilisation d’armes explosives dans les zones urbaines, en majorité des civils, et des personnels de santé qui continuent d’être la cible d’attaques, a  déploré  M. Lowcock.  L’année dernière, ces attaques dans 22 pays touchés par des conflits ont tué 182 agents de santé, les chiffres les plus élevés ayant été enregistrés au Burkina Faso, en République démocratique du Congo, en Somalie et en Syrie. 

« L’origine de nombreux conflits se trouve en partie dans les questions environnementales, notamment celles liées à l’eau », a également averti M. Lowcock.  Dès lors ce «  Conseil  aura à faire face à davantage de conséquences de ce phénomène dans les années à venir », a prédit le haut responsable dont la mission au sein du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) s’achève bientôt. 

Il est clair que l’on n’en fait pas assez pour protéger le personnel et les centres de santé et traduire dans les faits la résolution 2286 (2016), a réagi le Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), M. Peter Maurer.  Il a réclamé un changement fondamental dans le comportement des parties belligérantes, une meilleure protection des civils et un appui plus robuste à l’action humanitaire.  

Les années de conflit ont fait de l’Afghanistan un pays dur à vivre pour les civils, a témoigné Mme Orzala Nemat de l’Unité de recherche et d’évaluation de l’Afghanistan (AREU).   Mme Nemat a évoqué une « atmosphère de terreur » pour les femmes en Afghanistan.  « Le pays ne doit pas céder à l’obscurantisme », a-t-elle plaidé. 

Dans le cadre de ce débat public, les délégations étaient saisies du rapport annuel* du Secrétaire général sur la question et d’une note de cadrage** distribuée par la Chine.  Dès lors, comment s’attaquer efficacement aux causes profondes des conflits et les prévenir, afin d’éviter la souffrance humaine ?  

Un premier élément de réponse pour M. Mauer, c’est l’action des membres du Conseil de Sécurité qui ne peuvent pas appeler au respect du droit s’ils se soustraient eux-mêmes, ou leurs alliés, à tout regard critique en la matière. 

Plusieurs délégations, dont la Chine et le groupe A3+1 (Kenya, Niger, Tunisie et Saint-Vincent-et-les Grenadines), se sont inquiétées de la récente escalade du conflit israélo-palestinien qui a fait un nombre élevé de victimes civiles, dont des femmes et des enfants.  Comme le Royaume-Uni et l’Irlande, les intervenants ont également mis l’accent sur le cercle vicieux entre conflit et insécurité alimentaire.  Pour sa part, la Norvège a dénoncé les violences sexuelles. 

Il faut aussi miser sur les réponses locales et donner la priorité à l’engagement des communautés et à l’instauration de la confiance, pendant et après les crises, ont estimé plusieurs États Membres à l’instar de l’Inde pour qui « il ne peut y avoir de substitut aux efforts nationaux pour créer un environnement où les civils sont en sécurité ». 

Pour les États-Unis, le plein respect du droit international par toutes les parties à un conflit est essentiel pour la protection des civils.  « En Syrie, le régime d’Assad a, pendant des années, lancé des attaques qui ont tué d’innombrables civils », ont-ils accusé.  Le Conseil de sécurité doit appeler à la coopération avec les missions d’établissement des faits, les commissions d’enquête et les instruments de la justice pénale internationale, au premier rang desquels la Cour pénale internationale (CPI) pour les crimes les plus graves, a renchéri la France. 

En ce qui la concerne, la Fédération de Russie a mis fermement en garde le Conseil  contre  toute « tentation d’inventer de nouveaux concepts juridiques internationaux » censés combler les lacunes du régime de protection des Conventions de Genève.  À son tour, la Chine a souhaité éviter toute « politisation » des missions humanitaires.  Il faut désamorcer les tensions par le dialogue, a-t-elle préconisé avant d’appeler toutes les parties à un conflit à répondre à l’appel du Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu mondial. 

*S/2021/423 

**S/2021/468 

M. MARK LOWCOCK, Secrétaire général adjoint de l’ONU aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a regretté que malgré le soutien apporté à l’appel lancé l’année dernière par le Secrétaire général pour un cessez-le-feu mondial, des conflits meurtriers se sont poursuivis en Syrie, au Yémen, en République démocratique du Congo et ailleurs.  De nouveaux conflits ont éclaté ou se sont aggravés en Éthiopie, au Mozambique et entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. 

En Éthiopie, a continué M. Lowcock, nous avons entendu des rapports choquants sur des viols et des meurtres de masse.  En Israël et dans les territoires palestiniens occupés, l’escalade des hostilités a tué et blessé des dizaines de civils et causé d’importants dégâts aux habitations et aux infrastructures vitales.  En Afghanistan, un lycée a été attaqué au début du mois, tuant et blessant des dizaines de civils, dont des écolières.  

Dans de nombreux pays, les conflits ont rendu plus difficile le contrôle de la propagation du virus et la prise en charge des personnes infectées, a témoigné le haut responsable.  

L’année dernière, les conflits ont contribué à l’augmentation du nombre de personnes déplacées de force, portant le total à 80 millions en milieu d’année.  En revanche, 2020 a également vu une forte réduction du nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays qui ont pu retourner dans leurs foyers.  Dans le même temps, l’insécurité, les sanctions, les mesures de lutte contre le terrorisme et les obstacles administratifs ont entravé les opérations humanitaires, a-t-il déploré.  La pandémie a ajouté de nouvelles difficultés d’accès, avec la suspension des vols, la fermeture des frontières, les mesures de quarantaine et les fermetures. 

Mais aujourd'hui, M. Lowcock a voulu concentrer son propos sur cinq domaines: l’interaction entre les conflits et la faim ; les effets de l’utilisation d’armes explosives dans les zones habitées; la protection de l’environnement; la protection des soins médicaux ; et le renforcement du respect du droit humanitaire international et la responsabilité en cas de violations graves. 

S’agissant du premier point, M. Lowcock a indiqué que l’année dernière, la menace de la famine est réapparue, notamment dans le nord-est du Nigéria, dans certaines parties du Sahel, le Sud-Soudan et le Yémen.  En 2020, près de 100 millions de personnes ont été confrontées à des niveaux de crise ou pire d’insécurité alimentaire aiguë en raison d’un conflit.  Un chiffre en hausse par rapport à l’année précédente, où l’en on comptait 77 millions.  À cet égard, il a rappelé aux membres du Conseil la création par le Secrétaire général d’un groupe spécial de haut niveau chargée de la prévention de la famine, en vue de porter une attention coordonnée aux pays les plus susceptibles de basculer dans la famine et de mobiliser le soutien aux personnes les plus vulnérables. 

Abordant son deuxième point, M. Lowcock a relevé que près de 90% des personnes tuées par l’utilisation d’armes explosives dans les zones urbaines sont des civils.  Ce chiffre est inférieur à 20% lorsque ces armes sont utilisées dans les zones rurales.  L’année dernière, nous avons constaté un nombre élevé de victimes civiles résultant de l’utilisation de ces armes dans des pays comme l’Afghanistan, la Libye, la Syrie et le Yémen, sans compter leur impact dévastateur sur les infrastructures civiles essentielles, a-t-il ajouté. 

Pour illustrer ensuite l’impact des conflits sur l’environnement, il a cité le cas de l’Iraq où les frappes aériennes ont détruit des terres agricoles et provoqué des incendies de forêt, notamment dans des zones riches en biodiversité et en espèces menacées d’extinction.  Dans le nord de la Syrie, la détérioration des infrastructures a entraîné des marées noires qui ont pollué l’eau nécessaire à l’agriculture, à la santé et à l’hygiène de base.  

« L'origine de nombreux conflits se trouve en partie dans les questions environnementales, notamment celles liées à l’eau », a souligné le Coordonnateur des secours d’urgence.  Ce Conseil aura à faire face à davantage de conséquences de ce phénomène dans les années à venir, a-t-il prédit. 

Le personnel médical, les transports et les installations de santé continuent d’être la cible d’attaques, a rapporté M. Lowcock.  L’année dernière, ces attaques dans 22 pays touchés par des conflits ont tué 182 agents de santé, les chiffres les plus élevés ayant été enregistrés au Burkina Faso, en République démocratique du Congo, en Somalie et en Syrie. 

Il y a quatre jours, un médecin sud-soudanais dévoué travaillant pour l’International Rescue Committee (IRC) a été tué à l’intérieur d’un établissement sanitaire public au Soudan du Sud.  Presque au même moment, à quelques kilomètres de là, un convoi de l’IRC, comprenant une ambulance et transportant 10 travailleurs humanitaires, a été la cible de tirs d’hommes armés inconnus.  Le personnel humanitaire a réussi à échapper à l’attaque. 

Rien qu'au Myanmar, 109 incidents de violence contre les soins de santé ont été recensés en l’espace de deux mois cette année, accélérant l’effondrement du système de santé public au moment où de nombreuses personnes en ont le plus besoin. 

Dans certains conflits, s’est encore indigné M. Lowcock, les mesures antiterroristes criminalisent la fourniture de soins médicaux aux membres de groupes désignés comme terroristes, voire aux personnes vivant sous leur contrôle. Cela a conduit à la détention, à la poursuite et à l’emprisonnement du personnel médical.  Les conséquences sur les soins de santé sont catastrophiques, privant des millions de personnes de soins vitaux et réduisant gravement le traitement de maladies comme le choléra, la rougeole et la COVID-19. 

Lorsque les hostilités se sont aggravées dans la province mozambicaine de Cabo Delgado, plus d’un tiers des établissements de santé ont été endommagés ou détruits, et les agents de santé ont fui.  «  Lorsque les soins médicaux cessent, des vies sont perdues », a résumé le haut responsable onusien, insistant sur la nécessité de s’inspirer des meilleures pratiques et des recommandations formulées dans la résolution 2286 (2016).  

Abordant le dernier volet de son intervention, M. Lowcock a demandé que le comportement des belligérants soit conforme au droit international humanitaire, regrettant qu’au cours de ses presque quatre années en tant que Coordonnateur des secours d’urgence, il ait constaté une détérioration significative dans ce domaine, tant de la part des États que des groupes armés non étatiques.  Le droit international humanitaire doit être intégré dans le droit national, les manuels militaires et les règles d’engagement. 

Pour finir, il a souligné à nouveau l’importance cruciale de la responsabilité qui « doit être systématique et universelle », car pour lui, « ce qui n'est pas puni est encouragé ». 

M. PETER MAURER, Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que la fragilité mondiale en ce qui concerne la protection des civils s’est aggravée en raison des conflits armés, de la pandémie, de la récession économique, des inégalités grandissantes et des changements climatiques.  Il a aussi mentionné la fragmentation et prolifération des acteurs, la privatisation de la guerre avec des entreprises de sécurité privées, la circulation des armes et les violences urbaines.  

Le Président a fait état du dernier rapport du CICR sur les effets de la COVID-19 qui se sont ajoutés aux effets des conflits.  « La pandémie a intensifié les besoins de protection », a-t-il dit, en citant les besoins des enfants, des migrants, des personnes en détention ou des personnes ayant perdu un être cher. 

Cinq après la demande faite par le Conseil de mettre fin à l’impunité pour les attaques contre les centres de soins, M. Maurer a indiqué que ces attaques se sont poursuivies à un rythme inchangé, faisant fi du droit international.  « Il est clair que l’on n’en fait pas assez pour protéger le personnel et les centres de santé et traduire dans les faits la résolution 2286 (2016) ».  Le Président a réclamé un changement fondamental dans le comportement des parties belligérantes, une meilleure protection des civils et un appui plus robuste à l’action humanitaire.  Il a insisté sur cinq messages clefs. 

« Premièrement, toutes les parties à un conflit et les acteurs ayant une influence sur elles doivent respecter le droit international et protéger les civils. »  M. Maurer a estimé que le respect des droits humains est un aspect fondamental mais oublié de la pandémie, avant d’appeler à un accès humanitaire sans entraves.  Si les organisations humanitaires impartiales et neutres doivent respecter le droit, les États doivent faciliter leurs tâches et non pas les entraver, au nom de références « vagues et douteuses » à la souveraineté et à la sécurité. 

« Deuxièmement, nous demandons aux États de donner la priorité à la résolution précitée en prenant des mesures concrètes pour protéger les soins de santé », a-t-il affirmé, en demandant notamment que les doctrines militaires nationales incluent cet aspect. 

« Troisièmement, nous attendons plus précisément des membres de ce Conseil qu’ils agissent plus vigoureusement et usent de leurs relations avec leurs alliés et partenaires aux fins de respecter le droit », a déclaré M. Maurer.  Il a estimé que ces membres ne peuvent pas appeler au respect du droit s’ils se soustraient eux-mêmes, ou leurs alliés, à tout regard critique en la matière.  Soumettre ses propres alliances et opérations militaires à un tel regard est crucial pour le respect du droit, a-t-il dit. 

« Quatrièmement, les États doivent miser sur les réponses locales et donner la priorité à l’engagement des communautés et à l’instauration de la confiance, pendant et après les crises. »  Il a donc plaidé pour des réponses inclusives, y compris un accès égal aux vaccins. 

« Cinquièmement, nous appelons les États à renforcer leurs services d’approvisionnement en eau, d’assainissement et de santé et de les protéger en toutes circonstances, conformément au droit. » 

En conclusion, le Président du CICR a jugé possible, avec une forte volonté politique, de transformer les bonnes pratiques et idées progressistes ayant émergé de la pandémie en politiques durables visant à remédier aux facteurs structurels de vulnérabilité.  Il y a tellement de choses que l’on peut faire mais cela dépend beaucoup de la volonté politique, a insisté M. Maurer. 

Mme ORZALA NEMAT, Chef de l’Unité de recherche et d’évaluation de l’Afghanistan (AREU), s’est exprimée au nom de la société civile afghane qui, après 2001, a émergé, à la suite de l’assistance apportée par la communauté internationale, dans un mouvement propice à l’essor de la liberté d’expression. C’est aujourd’hui un ensemble d’entités religieuses et laïques s’efforçant de consolider la paix, de protéger les droits des femmes et de promouvoir des réformes juridiques.  L’ensemble des associations de femmes  afghanes plaident en faveur de l’application du principe de responsabilité aux auteurs de crimes et de la protection des femmes. 

Les années de conflit ont fait de l’Afghanistan un pays dur à vivre pour les civils, a témoigné Mme Nemat.  Hélas, si ce sont des forces ennemies de la communauté internationale qui ciblent les civils, les bombardements d’hôpitaux peuvent aussi être imputables à la force internationale.  En Afghanistan, les morts de civils, notamment des femmes, sont en augmentation par rapport au premier trimestre de l’an dernier.  Mme Nemat a évoqué une « atmosphère de terreur » pour les femmes en Afghanistan.  Elle a rappelé le sort tragique de trois femmes journalistes, d’une femme médecin et d’une femme chargée des vaccinations à Jalalabad, toutes assassinées.  Elle a évoqué des attentats à la voiture piégée non loin d'établissements de santé, des frappes visant un lycée de jeunes filles de Kaboul qui ont récemment tué 85 jeunes filles et blessé des centaines d’autres.  

Face à ces tactiques impitoyables, a regretté l’intervenante, la communauté internationale s’est limitée à des condamnations verbales, sans  enquête pour identifier les responsables qui appartiennent à Daech.  Pour leur part, les Taliban continuent de nier certaines de ces attaques, a-t-elle assuré, alors que les civils sont utilisés comme éléments d’une guerre psychologique par les parties prenantes.  Mme Nemat a réclamé une enquête internationale indépendante.  De nombreuses mines jonchent les terres rurales du pays, menaçant la subsistance des agriculteurs et de villages entiers.  Mme Nemat a posé la question à la communauté internationale: le fait de discuter, de négocier avec les Taliban, ne justifie-t-il pas indirectement de telles méthodes? 

La société civile afghane, les femmes  dirigeantes notamment, envoient un message de paix, d'inclusion et de participation au processus de paix à tous les niveaux.  Tous les efforts des groupes de défense des femmes convergent vers le maintien du cessez-le-feu, la fin des violences, le retour à l’éducation des filles, et la préservation des valeurs démocratiques et humanistes essentielles. « Le pays ne doit pas céder à l’obscurantisme », a plaidé Mme Nemat. 

Le Royaume-Uni s’est inquiété de la persistance des attaques contre des personnels humanitaires cinq ans après l’adoption de la résolution 2286 (2016).  Il a dénoncé l’impact des récentes violences sur la situation humanitaire à Gaza, et a condamné l’assassinat au Soudan du Sud du docteur Louis Edward Saleh Ufew, avant de déplorer les attaques qui se poursuivent contre des hôpitaux en Syrie.  Par ailleurs, le Royaume-Uni a estimé qu’on ne pouvait pas débattre de la protection des civils sans évoquer la situation actuelle au Tigré qui connaît un risque croissant de famine en partie en raison de la conduite des hostilités.  « Des informations faisant état d’atrocités continuent d’émerger, notamment des massacres, des violences sexuelles endémiques et la destruction systématique des services de base, y compris les hôpitaux », a insisté la délégation.  Les parties armées continuent d’empêcher l’acheminement de l’aide humanitaire. 

« Il ne s’agit pas de s’ingérer dans les affaires intérieures souveraines, mais de respecter les obligations contraignantes de tous les États en vertu du droit international humanitaire », a déclaré le Royaume-Uni avant de noter que des millions de personnes au Yémen, au nord-est du Nigéria et dans certaines régions du Soudan du Sud sont confrontées au même risque de famine.  C’est pourquoi, la délégation a souhaité que le conseil, conformément à sa résolution 2417 (2018), soit informé des risques de famine induite par un conflit, afin de pouvoir prendre des mesures adéquates.  Le Royaume-Uni a rappelé que le Conseil de sécurité a adopté plusieurs résolutions appelant à la responsabilisation de ceux qui ciblent les soins de santé, les travailleurs humanitaires et les infrastructures critiques.  Dans ce contexte, la délégation a estimé que de tels incidents doivent être systématiquement portés à l’attention du Conseil afin qu’il utilise tous les outils à sa disposition pour que les responsables de ces attaques rendent des comptes, notamment en renforçant les recours aux sanctions. 

Les États-Unis ont déclaré que le plein respect du droit international par toutes les parties à un conflit est essentiel pour la protection des civils.  « En Syrie, le régime Assad a, pendant des années, lancé des attaques qui ont tué d’innombrables civils », a dit la mission, en appelant à faire la distinction entre les populations civiles et les combattants dans la poursuite d’objectifs militaires.  Elle a condamné les effroyables violations des droits de l’homme commises en Éthiopie et exhorté la communauté internationale à agir, comme les États-Unis l’ont fait, pour mettre fin aux violences.  En Afghanistan, la mission a exhorté les Taliban, qui sont les principaux responsables des violences, à cesser leur offensive et à s’abstenir de toute attaque contre les civils.  En ce qui concerne la situation en Israël, en Cisjordanie et à Gaza, le Président Biden a souligné que les Palestiniens comme les Israéliens, comme tout individu, ont droit à la vie, la liberté et la sécurité, a poursuivi la mission. 

Les États-Unis ont assuré qu’ils continueront d’œuvrer pour que la protection des civils et la promotion des droits humains soient au cœur de ce que les missions onusiennes peuvent faire.  Cela signifie garantir que ces missions disposent du soutien politique, des ressources et des outils nécessaires à la prévention de la violence et à une réponse prompte aux attaques contre les civils. 

Il est crucial de garantir le respect du droit international humanitaire, a déclaré le Viet Nam, pour qui toutes les parties prenantes à un conflit armé doivent respecter pleinement les principes de distinction, de précaution et de proportionnalité, et s’abstenir d’attaquer, de détruire ou de rendre inutilisables des infrastructures indispensables à la survie de la population civile.  Pour la délégation, la responsabilité première de protéger les civils incombe à l’État, et que les violations à leur égard doivent être traitées de manière appropriée aux niveaux national et international, conformément à la Charte des Nations Unies et aux lois applicables. 

Extrêmement préoccupé par les attaques contre les établissements de soins de santé et le personnel médical, en particulier pendant la pandémie de COVID-19, le Viet Nam a souligné que le cinquième anniversaire de la résolution 2286 (2016) était l’occasion de renouveler les engagements en faveur de la protection des établissements de soins de santé et du personnel médical et de transformer la volonté politique en actions concrètes.  Il a réitéré son soutien à l’appel du Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu mondial pour faciliter l’aide humanitaire et la distribution du vaccin contre la COVID-19.  Aussi importante que soit l’aide humanitaire, cette dernière ne saurait remplacer une approche globale visant à renforcer les capacités nationales, améliorer les moyens de subsistance et renforcer la résilience des populations locales face aux défis, notamment les changements climatiques, les catastrophes naturelles et les chocs économiques. 

L’Inde a jugé préoccupant de constater que les civils continuent d’être les principales victimes des conflits armés, sachant que la responsabilité de les protéger incombe avant tout aux gouvernements nationaux.  « Il ne peut y avoir de substitut aux efforts nationaux pour créer un environnement où les civils sont en sécurité.  Les soldats de la paix qui exécutent les mandats du Conseil de sécurité et les organisations humanitaires ont un rôle important mais essentiellement supplémentaire à jouer  », a plaidé la délégation.  Pour elle, le terrorisme continue d’être la menace la plus grave pour l’humanité et leur impact sur les civils et les infrastructures civiles essentielles, dévastateur.  « Le Conseil n’a pas le luxe de retarder davantage le moment de prendre une action mondiale décisive contre cette menace. »

Le respect des principes de la Charte des Nations Unies, y compris la souveraineté et l’intégrité territoriale des États Membres, doit rester la base de toutes les mesures prises par le Conseil pour la protection des civils, a argué l’Inde.  « Toute décision d’intervention associée à des motivations politiques détourne les principes fondamentaux et court le risque d’être contre-productive et doit donc être évitée.  En outre, l’intervention doit être proportionnée à la menace, impliquer l’utilisation de méthodes appropriées et se fonder sur une perception crédible et vérifiée de la menace », a-t-elle poursuivi.  Le Conseil devrait privilégier les dispositions du Chapitre VI de la Charte à celles du Chapitre VII, a encore plaidé l’Inde.  Il faut également adhérer au principe selon lequel la responsabilité de protéger les civils s’applique à toutes les parties au conflit, y compris les groupes armés et autres acteurs non étatiques.  Le recours à la force devrait en effet être la mesure de dernier recours, a conclu l’Inde. 

S’exprimant au nom du groupe A3+1 (Kenya, Niger et Tunisie), Saint-Vincent-et-les Grenadines a condamné tous les actes de violence perpétrés contre des civils et s’est dite profondément alarmée par le nombre élevé de victimes, notamment civiles, résultant de la récente escalade des hostilités dans le territoire palestinien occupé, y compris à Jérusalem-Est, et dans la bande de Gaza.  Saluant toutefois le cessez-le-feu, le groupe A3+1 appelle les parties à le respecter et à agir sérieusement pour le mettre en œuvre.  Ils soulignent la nécessité de fournir immédiatement une aide humanitaire à la population civile palestinienne, en particulier à Gaza, et appellent à la fourniture rapide et sans entrave de cette aide humanitaire. 

Préoccupée par l’application du principe de responsabilité, la délégation a déclaré que l’impunité ne peut en aucun cas être toléré.  En outre, les A3+1 réitèrent leurs inquiétudes quant aux conditions de vie des migrants et des réfugiés, notamment ceux interceptés en mer et débarqués sur le sol libyen.  Au vu de cette situation, il faut, selon eux, revoir la politique de débarquement des migrants et des réfugiés interceptés en mer et sur le sol libyen, où, par ailleurs, la présence de combattants étrangers et de mercenaires continue de compromettre les efforts de stabilisation. 

L’Estonie a constaté que les conflits sont de plus en plus des crises de protection des populations les plus vulnérables et les plus marginalisées.  Elle en a voulu pour preuve la situation dans la région du Tigré en Éthiopie, avec des allégations de massacres, de violence sexuelle et sexiste, de destructions et de pillages ainsi que d’enlèvements et de déplacements forcés.  Ou encore l’Afghanistan, qui a connu une hausse de 43% des décès de civils provoqués par des engins explosifs improvisés. 

« Cinq ans après la résolution 2286 (2016) du Conseil de sécurité, le personnel médical continue d’être enlevé, menacé et tué », a déploré l’Estonie, qui a pointé les répercussions durables sur les États et les communautés concernées.  Nous sommes également préoccupés par les attaques et les assassinats de journalistes dans les situations de conflit, a poursuivi la délégation, en réaffirmant que leur sécurité fait partie des domaines prioritaires de la conférence annuelle de la Coalition pour la liberté des médias organisée cette année par l’Estonie.  Pour la délégation enfin, l’établissement des responsabilités est indispensable s’agissant des violations du droit international, par le biais de mécanismes nationaux et internationaux, ou par la saisine de la Cour pénale internationale (CPI). 

Le Mexique a jugé inacceptable que 100 millions de personnes touchées par des conflits à travers le monde continuent de souffrir de la faim.  La délégation a estimé que cette situation nécessite une action immédiate du Conseil de sécurité en collaboration avec les agences spécialisées concernées de l’ONU.  « Nous devons faire de la réduction de la faim notre priorité en mettant l’accent sur la situation des filles et de femmes », a dit le Mexique en notant que les femmes et les filles sont touchées de manière disproportionnée par la faim.  Le Mexique a condamné les attaques récurrentes contre les acteurs humanitaires en Somalie et au Tigré.  Le Mexique a rappelé que l’adoption d’amendements au Statut de Rome en 2019 a permis d’ériger l’exploitation de la famine comme crime de guerre.  Le Mexique a aussi appelé à une mise en œuvre de la résolution 2573 du Conseil de sécurité pour empêcher les attaques contre les infrastructures essentielles dans les zones urbaines.  Rappelant que le continent africain n’a été destinataire que de 2% des vaccins mondiaux destinés à la lutte contre la lutte contre la pandémie de COVID-19, le Mexique a appelé la communauté internationale à garantir un accès juste et une distribution équitable des vaccins aux 160 millions de personnes qui sont affectées par un conflit dans le monde. 

La Fédération de Russie a dénoncé la situation déplorable en matière de protection des civils dans les situations de conflit armé, malgré l’existence d’un arsenal important d’instruments juridiques internationaux visant à assurer le respect du droit international humanitaire.  Elle a confirmé la nécessité de maintenir cette question à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.  Tout en louant les « initiatives utiles » visant à réduire les souffrances des civils, comme l’adoption, le mois dernier, de la résolution 2573 (2021) sur la protection des biens civils nécessaires à la survie de la population civile, la Russie a fermement mis en garde le Conseil contre « la tentation d’inventer de nouveaux concepts juridiques internationaux », censés combler les lacunes du régime de protection des Conventions de Genève.  Il n'est pas non plus utile, selon la Russie, d’isoler des catégories de plus en plus nombreuses d’individus ayant besoin d’une protection spéciale: cette approche s’est avérée contre-productive dans la pratique, entraînant un régime juridique différencié, et un affaiblissement de la protection accordée aux civils.  

Se disant très préoccupée par la situation en Ukraine où, à l’est du pays, des civils continuent de mourir à la suite de bombardements, et où « les autorités de Kiev poursuivent une guerre non déclarée contre leur propre peuple », la délégation russe a défendu le concept de l’application du principe de responsabilité pour les auteurs de crimes de masse.  Toutefois, a-t-elle ajouté, les mesures visant à mettre en œuvre cette responsabilité doivent être appliquées dans le plein respect de la loi, et ne pas devenir « un instrument de manipulation politique ».  Blâmant par ailleurs les groupes terroristes en Irak et en Syrie pour des exécutions de masse, l’utilisation de civils comme boucliers humains, ainsi que l’obstruction de l’acheminement de l’aide humanitaire, la Russie s’est dite favorable au renforcement de la coopération internationale en matière de lutte contre le terrorisme sous les auspices de l’ONU.  Enfin, la délégation a dénoncé « la politisation sans précédent » de l’action humanitaire, et rejeté l’utilisation de « prétextes humanitaires » pour faciliter des actions terroristes et diffuser de la désinformation.  Dans le contexte d’une « rhétorique enflammée de défense de la population civile », les mesures de sanctions unilatérales illégales imposées par certains États lui ont paru « très hypocrites ». 

La Norvège s’est déclarée frappée par les niveaux de décès, de blessures, de traumatismes psychologiques et de destruction d’infrastructures parmi les civils signalés dans le rapport du Secrétaire général.  La Norvège a donc exhorté toutes les parties à des conflits armés à s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire.  « Les attaques contre les établissements médicaux et de soins de santé, le personnel médical et les transports sont toujours inacceptables et interdites en vertu du droit international humanitaire », a affirmé la délégation, en plaidant pour la mise en œuvre intégrale des résolutions 2286 (2016) et 2565 (2021)du Conseil de sécurité. 

La Norvège s’est dite consternée par les attaques contre l’éducation et par le fait que la pandémie de COVID-19 a alimenté l’absentéisme et les fermetures d’établissements scolaires, exposant les enfants au risque d’un large éventail de menaces.  Aussi a-t-elle appelé tous les États à approuver et à mettre en œuvre la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, félicitant les 108 États qui l’ont déjà fait, dont 10 membres de ce Conseil.  Celui-ci doit en outre recourir à tous les moyens à sa disposition pour prévenir la violence sexuelle et sexiste et d’autres menaces sexistes, qui doit cesser d’être utilisée comme « outil de répression politique et tactique de guerre et de terreur ».  La Norvège a également soutenu l’initiative irlandaise en faveur d’une déclaration politique visant à minimiser l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées. 

L’Irlande a constaté, que malheureusement, cinq ans après l’adoption de la résolution 2286 (2016), les attaques contre les installations médicales et le personnel se poursuivent, avec un impact dévastateur sur les populations locales privées d’accès à des systèmes de santé fragiles sur fond de pandémie mondiale.  Elle s’est en outre dite gravement préoccupée par les effets néfastes sur les civils de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées, qui ravagent les communautés vulnérables et persistent longtemps après la fin du conflit.  La délégation a partagé l’avis du Secrétaire général selon lequel nous devons faire davantage pour inverser cette tendance.  C’est pourquoi l’Irlande mène des consultations à Genève sur une déclaration politique pour leur interdiction dans les zones fortement peuplées pour aboutir à un changement durable. 

Si les opérations de maintien de la paix des Nations Unies jouent un rôle majeur dans la protection des civils, y compris dans le domaine de la prévention, nous savons que les transitions entre missions se produisent souvent lorsque la stabilité politique est fragile ou que les processus de paix restent précaires, a observé la délégation.  Dans ce contexte, a-t-elle préconisé, le Conseil doit veiller à ce que le processus place les besoins des civils au centre de ses préoccupations et que des mesures soient prises pour protéger ceux qui sont touchés par le conflit contre des risques nouveaux ou persistants de préjudice. Rappelant que les conflits sont le premier moteur de la faim dans le monde, l’Irlande a souligné qu’ils contribuent à la destruction des cultures et des pâturages et à la souillure des puits et des sources d’eau.  L’adoption à l’unanimité de la résolution 2417 (2018) témoigne de l’unité du Conseil sur la nécessité de lutter contre la faim induite par les conflits, a relevé la délégation.  Si un accès humanitaire rapide et sans entrave est vital pendant une crise alimentaire aiguë, le Conseil doit alors envisager une action rapide pour prévenir l’insécurité alimentaire grave et la famine, en particulier pour protéger la santé des enfants et des mères, a estimé l’Irlande. 

La France a constaté que la pandémie de COVID-19 a aggravé les conflits en cours, exacerbant les inégalités et accentuant les risques pour les civils, avec comme conséquence l’augmentation critique des besoins humanitaires.  L’année écoulée a vu s’aggraver les violences contre les enfants et les violences sexuelles et sexistes, ainsi que les violations du droit international humanitaire, a-t-elle poursuivi.  Ce Conseil, a ajouté la délégation, doit rester mobilisé pour que les parties respectent leurs obligations au titre du droit international humanitaire.  « L’appel à l’action humanitaire, présenté par la France et l’Allemagne en septembre 2019, met en avant des engagements concrets que les États peuvent mettre en œuvre pour mieux respecter le droit international humanitaire », a-t-elle rappelé, en encourageant tous les États Membres à endosser cet appel, qui est aujourd’hui soutenu par 47 États membres et par l’UE. 

Pour la France, la contribution de ce Conseil à la lutte contre l’impunité doit être renforcée, pour que la protection des civils soit plus efficace.  Il doit appeler à la coopération avec les missions d’établissement des faits, les commissions d’enquête et les instruments de la justice pénale internationale, au premier rang desquels la Cour pénale internationale (CPI) pour les crimes les plus graves.  Enfin, la mission a réitéré son appel à une meilleure utilisation de l’outil des sanctions pour les responsables de violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme, y compris les violences contre les enfants et les violences sexuelles. 

La Chine a exhorté toutes les parties en conflit à respecter le droit international et le droit international humanitaire de sorte que les résolutions du Conseil de sécurité soient dument mises en œuvre.  La délégation a estimé que la dure réalité sur le terrain montre que la communauté internationale a encore beaucoup à faire en matière de protection des civils.  Elle s’est particulièrement inquiétée de la récente escalade du conflit israélo-palestinien qui vient de faire 250 victimes, dont des femmes et des enfants, et a détruit des infrastructures de santé. 

« En Afghanistan, alors que les contingents étrangers se retirent la situation humanitaire se détériore », a poursuivi la Chine avant d’exhorter toutes les parties à respecter les acteurs humanitaires et à fournir un accès sûr et sans entraves aux opérations d’aide humanitaire.  Face à toutes ces réalités, la Chine a estimé que la prévention des conflits est le meilleur moyen de garantir la protection des civiles.  « Afin de parvenir à un règlement politique des conflits, il faut désamorcer les tensions grâce au dialogue », a-t-elle préconisé, avant d’appeler toutes les parties en conflit à répondre à l’appel du Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu mondial.  Enfin, la Chine a appelé à éviter toute politisation des missions humanitaires. 

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