SC/14514

Conseil de sécurité: l’Équipe d’enquêteurs chargée d’amener Daech à répondre de ses crimes en Iraq espère des procès dès 2022 sur la base de ses preuves

À pied d’œuvre depuis trois ans, l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes est désormais « pleinement opérationnelle ».  Son Chef l’a affirmé, ce matin, au Conseil de sécurité, en faisant état des progrès accomplis sur le terrain et à distance, en dépit des difficultés liées à la pandémie de COVID-19. M. Karim Asad Ahmad Kahn a également indiqué que, sur la base des preuves collectées, des procès pourraient s’ouvrir dès l’an prochain. 

Prochain Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), M. Khan a présenté au Conseil son sixième et dernier rapport semestriel sur les travaux d’une Équipe qui compte maintenant plus de 200 fonctionnaires, appuyée par des unités sur le terrain.  Ces six derniers mois, a-t-il précisé, l’Équipe a élargi ses stocks de preuves, y compris des pièces médico-légales tirées de charniers, des données numériques extraites des disques durs de Daech et des dossiers numérisés en coopération avec les autorités iraquiennes. 

Le Conseiller spécial a indiqué que des informations extraites des dispositifs électroniques de Daech ont conduit à l’ouverture d’une nouvelle enquête sur la mise au point et le déploiement d’armes chimiques et biologiques. Les preuves recueillies montrent que Daech a utilisé les laboratoires de l'Université de Mossoul comme « épicentre » de son programme d’armes chimiques, en s’appuyant sur l’expertise de scientifiques et de professionnels de la santé d’Iraq et de l’étranger.  

En parallèle, a expliqué M. Khan, l’introduction d’outils technologiques avancés a amélioré les capacités de traitement des preuves, ce qui a permis de progresser dans les enquêtes ayant trait au massacre de cadets non armés et de personnel militaire à l’Académie de l’air de Tikrit en juin 2014 et aux attaques contre la communauté yézidie dans la région de Sinjar.  Ces atrocités sont à présent documentées grâce à la fouille de charniers, à l’écoute des témoins et à la collecte de nombreux éléments de preuve. 

L’Équipe a ainsi pu établir de manière « claire et convaincante » qu’un génocide a été commis par Daech contre les Yézidis en tant que groupe religieux. « Mises bout à bout, ces preuves racontent l’histoire du peuple yézidi.  Ce que nous avons perdu, ce à quoi nous avons survécu », a témoigné Mme Nadia Murad, lauréate du prix Nobel de la paix et porte-parole de la communauté yézidie.  Près de quatre ans après sa précédente intervention devant le Conseil, elle a parlé des plus de 200 000 Yézidis qui croupissent dans des camps de déplacés, des milliers de familles qui attendent que les restes de leurs proches et des quelque 2 800 femmes et enfants toujours captifs de Daech. 

Malgré toutes ces horreurs, les Yézidis continuent de travailler ensemble à la reconstruction de leur patrie, a affirmé Mme Murad.   Ils sont désireux de participer à la gouvernance locale et à la sécurité de leur communauté parce qu’ils savent que stabiliser  Sinjar  est le meilleur espoir pour empêcher de nouvelles persécutions, a-t-elle assuré, déplorant que les progrès en ce sens soient mis à mal « par des intérêts politiques divergents et par l’inaction ».  

Alors que les preuves « existent », les Yézidis attendent encore que justice soit faite, a martelé l’intervenante, avant de rappeler aux membres du Conseil qu’elle leur avait demandé en 2017 de renvoyer ce génocide devant la CPI ou de créer un tribunal par traité.  Notant que « lorsque l’impunité est acceptée, la violence se répète », elle a estimé que des procès publics, sous surveillance internationale, et la reconnaissance des atrocités commises par Daech faciliteraient la guérison des survivants. 

Sur ce point, le Chef de l’Équipe d’enquêteurs s’est félicité du projet de loi iraquien visant à établir une base juridique à la poursuite, en Iraq, des membres de Daech pour les crimes internationaux que sont les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes de génocide.  Il a aussi fait état d’une formation au droit pénal international dispensée par l’Équipe à 27 juges et procureurs.  Dans ce contexte de coopération continue avec l’Iraq, il a jugé que des procès pourraient débuter l’an prochain, à partir des preuves collectées et analysées. 

Assurant mettre tout en œuvre pour « déraciner le terrorisme » et renforcer son système judiciaire, l’Iraq s’est dit reconnaissant du travail accompli par l’Équipe d’enquêteurs, en concertation avec les autorités nationales.  Il a cependant souhaité que, dans la perspective de procès, l’Équipe communique à son gouvernement le résultat des enquêtes menées depuis trois ans.  Il a également appelé au respect de sa souveraineté et sa compétence s’agissant des crimes commis à l’intérieur de ses frontières et contre son peuple. 

Cet appel a été repris par la Chine et la Fédération de Russie, cette dernière demandant en outre à l’Équipe de poursuivre ses enquêtes sur le développement et l’utilisation d’armes chimiques et biologiques par des terroristes.   Alors que de « nombreuses preuves » montrent que Daech sévit aussi en Syrie, la Fédération de Russie a déploré que les enquêtes soient au « point mort » sur le sol syrien, ce qui atteste, selon elle, d’une politique de « deux poids, deux mesures » en tout point « intolérable ». 

La plupart des délégations ont salué les progrès importants réalisés par l’Équipe ce dernier semestre, à l’instar de la France qui a retenu la volonté d’achever en 2021 la collecte et l’analyse des preuves liées aux crimes commis contre d’autres communautés religieuses.  

D’autres missions, comme l’Irlande et la Norvège, se sont félicitées de l’approche centrée sur les survivants, avec à la clef un soutien psychosocial et juridique, mais aussi sensible au genre, les femmes et les filles étant systématiquement ciblées par la violence sexuelle et sexiste de Daech.  De son côté, Le Royaume-Uni a annoncé l’organisation, avec les États-Unis, l’Iraq, les Pays-Bas et les  Émirats  arabes unis, d’une réunion en formule Arria consacrée à l’apport de la technologie dans les méthodes d’enquête et l’établissement des responsabilités en Iraq.  

M. KARIM ASAD AHMAD KHAN, Conseiller spécial et Chef de l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes, a présenté son sixième et dernier rapport en cette qualité.  Deux ans et demi après la présentation de son premier rapport en octobre 2018, il s’est dit heureux de pouvoir rendre compte des activités de plus de 200 fonctionnaires, parmi lesquels figurent des experts nationaux nommés en consultation avec le Gouvernement iraquien.  Ces fonctionnaires, a-t-il précisé, travaillent depuis les bureaux de Bagdad, Dahouk, Erbil et New York, à partir des activités de six unités d’enquête sur le terrain qui traitent des crimes commis contre toutes les communautés d’Iraq.  Ils s’appuient aussi sur le travail d’unités thématiques spécialisées dans les crimes sexistes et les crimes contre les enfants, le suivi financier et la protection des témoins, tandis qu’une unité dédiée aux fosses communes procède à des fouilles sur 22 sites.  L’Équipe d’enquêteurs est « pleinement opérationnelle » et peut relever certains des principaux défis auxquels les autorités nationales sont confrontées pour faire répondre les membres de Daech de leurs crimes en Iraq. 

M. Khan a indiqué que l’Équipe a élargi ses stocks de preuves au cours des six derniers mois, y compris des preuves médico-légales à partir de charniers, des données numériques extraites des disques durs de Daech et la numérisation de dossiers documentaires en coopération avec les autorités iraquiennes.  En parallèle, a-t-il expliqué, l’introduction d’outils technologiques avancés a amélioré les capacités de traitement des preuves, permettant aux enquêteurs de rechercher rapidement dans des ensembles de données, afin de reconstruire des événements, répondre à des demandes d’informations ciblées et s’assurer que les preuves sont correctement corroborées. 

Sur la base de ces progrès, le Conseiller spécial a fait état d’avancées dans le traitement de deux enquêtes prioritaires ayant trait au massacre en masse de cadets non armés et de personnel militaire à l’Académie de l’air de Tikrit en juin 2014 et aux attaques contre la communauté yézidie dans la région de Sinjar.  L’Équipe a établi un compte rendu détaillé de ces atrocités grâce à la fouille de charniers, à l’écoute des témoins les plus vulnérables et à la collecte de nombreux éléments de preuve, en coopération avec les autorités iraquiennes et les ONG. 

Le Conseiller spécial a pu confirmer que, sur la base de ses enquêtes criminelles indépendantes, l’Équipe a établi des preuves « claires et convaincantes » qu’un génocide a été commis par Daech contre les Yézidis en tant que groupe religieux.  Selon lui, l’intention de « détruire les Yézidis, physiquement et biologiquement », est manifeste dans l’ultimatum lancé à tous les membres de cette communauté pour qu’ils se convertissent.  Des milliers de personnes ont été tuées à la suite de cet ultimatum, soit exécutées en masse, soit abattues alors qu’elles fuyaient ou tentaient de s’échapper sur le mont Sinjar, a-t-il souligné. 

Des milliers d’autres ont été réduites en esclavage, des femmes et des enfants étant enlevés à leur famille et soumis aux abus les plus brutaux, « y compris des viols en série et d’autres formes de violence sexuelle insupportable ».  Pour beaucoup, a détaillé M. Khan, ces abus ont duré des années, menant souvent à la mort.  Le but de tels actes était de « détruire définitivement » la capacité de ces femmes à avoir des enfants et à fonder des familles au sein de la communauté yézidie. 

L’Équipe, a indiqué son Chef, a également établi que de nombreux autres crimes internationaux ont été commis contre la communauté yézidie, notamment l’extermination, l’esclavage, la violence sexuelle, le transfert forcé, la persécution pour des motifs religieux et sexistes et la conscription d’enfants dans un groupe armé.  Quiconque s’est échappé vivant, en particulier les enfants, « porte quotidiennement le fardeau des effets durables de ces crimes », a-t-il noté, ajoutant que ces crimes se poursuivent.  Des milliers de femmes, garçons et filles yézidis restent détachés de leur famille, ont disparu et sont même détenus par leurs ravisseurs ou par ceux à qui ils ont été vendus.  « Nous ne les oublierons pas, et notre travail pour rendre justice à toutes les personnes touchées par ces crimes se poursuivra », a-t-il assuré. 

Grâce à ses enquêtes sur les attaques de Daech contre des cadets de l’air non armés à prédominance chiite et des membres du personnel de l’Académie de l’air de Tikrit, l’Équipe a compilé et analysé de nombreuses preuves.  D’après M. Khan, elle a conclu que ces actes constituent des crimes de guerre tels que le meurtre, la torture, les traitements cruels et les atteintes à la dignité de la personne.  En outre, a-t-il relevé, l’Équipe a conclu, sur la base de preuves claires et convaincantes, qu’une vidéo de Daech diffusée en juillet 2015 et montrant ces meurtres constitue « une incitation directe et publique à commettre un génocide contre des musulmans chiites », avec une exhortation répétée aux adeptes de Daech: « Tuez-les où que vous les trouviez ».

Le Chef de l’Équipe d’enquêteurs a ensuite fait état de la création d’une nouvelle unité consacrée à l’enquête sur les crimes commis contre la communauté sunnite en Iraq.  Les informations obtenues des dispositifs électroniques de Daech ont par ailleurs conduit à l’ouverture d’une nouvelle enquête sur la mise au point et le déploiement réussi d’armes chimiques et biologiques par Daech en Iraq.  Les preuves recueillies à ce jour montrent que Daech a utilisé les laboratoires de l’Université de Mossoul comme épicentre de son programme d’armes chimiques, en s’appuyant sur l’expertise de scientifiques et de professionnels de la santé d’Iraq et de l’étranger. 

Après avoir utilisé du chlore issu d’usines de traitement des eaux en 2014, Daech a ensuite développé des composés mortels toxiques, notamment du thallium et de la nicotine, qui ont été testés sur des prisonniers vivants, entraînant la mort, a révélé M. Khan.  À mesure que sa capacité se renforçait, Daech a développé un système de production de moutarde au soufre qui a été déployé en mars 2016 avec le tir de 40 roquettes sur la ville turkmène chiite de Taza.  Cette enquête avance rapidement et un premier dossier devrait être achevé et mis à la disposition des autorités nationales dans un délai de cinq mois, a-t-il dit. 

D’ici à la fin de 2021, a poursuivi le Conseiller spécial, l’Équipe prévoit l’achèvement des dossiers relatifs aux crimes commis contre les communautés chrétiennes, kaka’i, shabak, chiites turkmènes et sunnites en Iraq, ainsi que le massacre de détenus à majorité chiite à la prison de Badouch.  Pour M. Khan, il ne suffit pas de collecter et synthétiser les preuves.  Pour que l’Équipe remplisse son mandat et réponde aux attentes des survivants, son travail doit être soumis aux tribunaux nationaux pour poursuivre les responsables de ces « crimes horribles ».  Dans cet esprit, il a confirmé au Conseil le transfert à la justice iraquienne d’éléments de preuve concernant les crimes financiers commis à l’appui des activités de Daech en Iraq. 

« Il s’agit d’une première étape importante pour garantir que nos travaux contribuent de manière tangible aux efforts d’établissement des responsabilités en Iraq », a-t-il affirmé, avant de réitérer son soutien aux efforts du Conseil des représentants iraquien en vue de l’adoption d’une législation établissant une base juridique pour la poursuite des membres de Daech en Iraq pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide.  Il a également annoncé qu’un projet de loi a été présenté au Parlement de la région du Kurdistan pour créer un tribunal compétent pour les crimes internationaux commis par Daech. 

Si une grande partie des activités de l’Équipe repose sur l’innovation, notamment sur l’exploitation de la technologie et de pratiques psychosociales avancées, l’autre principe fondamental qui sous-tend son action est le partenariat, a fait valoir M. Khan, soulignant « l’excellente coopération » développée avec le Gouvernement iraquien.  Le pouvoir judiciaire iraquien a continué d’être exemplaire dans son engagement avec l’Équipe, a-t-il insisté, avant d’indiquer que l’Équipe contribue de son côté au renforcement des capacités.  En collaboration avec l’Université nationale australienne, elle propose ainsi une formation sur le droit pénal international à 27 juges et procureurs.  Dans le cadre de ce cours, l’Équipe encadrera des juges dans la construction de dossiers contre des membres spécifiques de Daech pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide. 

En combinant cette formation avec son soutien continu aux autorités iraquiennes dans la fouille des charniers et la numérisation des preuves documentaires, l’Équipe entend établir une base solide sur laquelle les poursuites contre les membres de Daech pour crimes internationaux pourraient être engagées rapidement après la création d’une base juridique appropriée en Iraq.  Dans ce contexte, M. Khan a estimé que des procès pourraient avoir lieu en Iraq à partir des preuves recueillies par l’Équipe.  À ses yeux, il est possible que de tels procès puissent commencer l’année prochaine. 

« Si nous voulons nous attaquer de manière significative à l’héritage des crimes de Daech en Iraq, la justice doit être la base sur laquelle ces efforts se fondent », a-t-il soutenu, non sans rappeler la douleur de centaines de milliers d’Iraquiens des communautés yézidies, chiites, sunnites, kaka’i, chrétiennes et autres qui ont perdu des membres de leur famille du fait des crimes de Daech.  À cet égard, a-t-il dit en conclusion, il convient que nous soyons rejoints par Mme Nadia Mourad, lauréate du prix Nobel de la paix, dont l’appel à l’action et à notre conscience collective a donné lieu à la création de l’Équipe d’enquêteurs. 

Mme NADIA MURAD, Lauréate du prix Nobel de la paix et porte-parole de la communauté yézidie, a rappelé que lors de sa dernière intervention au Conseil en 2017, aux côtés de l’avocate Amal Clooney, elle avait demandé le soutien du Conseil pour empêcher Daech de réaliser son objectif affiché d’éradiquer le peuple yézidi d’Iraq.  L’adoption de la résolution 2379 a été une étape essentielle, a-t-elle dit, remerciant les membres du Conseil d’avoir soutenu la création de l’UNITAD et les travaux en cours.  Le travail de l’Équipe d’enquêteurs contribue à ce que justice soit faite.  Une poignée de survivants ont ainsi pu confronter leurs agresseurs devant le tribunal et, il y a quelques mois, j’ai moi-même pu, a-t-elle ajouté, enterrer deux de mes frères ainsi que plus d’une centaine de victimes du massacre de Kojo, grâce à l’exhumation de fosses communes et à l’identification des restes.  Mais il reste encore beaucoup à faire, a-t-elle estimé appelant le Conseil à établir des priorités et à accélérer concrètement les choses. 

Les preuves recueillies confirment la conclusion à laquelle sont parvenues les Nations Unies en 2016, à savoir que les crimes commis par Daech contre les Yézidis constituent un génocide.  Les progrès de l’Équipe ne sont pas seulement remarquables par le recours aux technologies mais aussi et surtout parce que les données représentent des vies humaines et témoignent de leurs souffrances.  « Mises bout à bout, ces preuves racontent l’histoire du peuple yézidi.  Ce que nous avons perdu.  Ce à quoi nous avons survécu ».  

Cela fait près de sept ans que les Yézidis sont incapables d’avancer et de reprendre leur vie.  Plus de 200 000 d’entre eux vivent toujours dans des camps de déplacés à quelques heures seulement de leur patrie.  Ils attendent, dans l’espoir que justice soit rendue et que la sécurité, la gouvernance et les infrastructures de Sinjar soient rétablies.  Mme Murad a aussi parlé des milliers de familles qui espèrent toujours qu’un jour les restes de leurs proches soient exhumés des fosses communes, pour pouvoir les enterrer dans la dignité.  Enfin, elle a attiré l’attention sur l’horreur vécue par les 2 800 femmes et enfants qui sont toujours captifs de Daech.

Pour Mme Murad, les preuves du génocide commis par Daech brossent un tableau clair.  « Daech n’a jamais tenté de cacher ses intentions »: les fosses communes étaient clairement signalées, des décrets, publiés sur « l’immoralité » du yézidisme et des manuels, publiés pour codifier la traite des esclaves et la vente aux enchères de femmes yézidies.  « Leur intention d’éradiquer notre communauté, notre religion et notre culture a été largement déclarée.  Daech était fier de son génocide », en a conclu Mme Murad.

Malgré toutes ces horreurs, les Yézidis continuent de travailler ensemble pour reconstruire leur patrie, redémarrer et obtenir la justice, a-t-elle affirmé.  Ils sont désireux de participer à la gouvernance locale et à la sécurité de la communauté dans son ensemble, parce qu’ils savent que stabiliser Sinjar est le meilleur espoir pour empêcher de nouvelles persécutions.  Malheureusement, les progrès en ce sens sont mis à mal par des intérêts politiques divergents et l’inaction.  « Nous essayons de tourner la page mais sans stylo pour écrire notre prochain chapitre ».  Les procès publics et la reconnaissance du génocide contribueraient à éviter de futures violences et faciliteraient la guérison des survivants, a souligné Mme Murad. Une surveillance internationale est nécessaire pour veiller à ce que les tribunaux nationaux iraquiens appliquent la justice et que les tribunaux internationaux traitent du caractère universel des crimes contre l’humanité de l’EI, a estimé l’intervenante.

S’adressant aux membres du Conseil, elle leur a dit: « Amal et moi vous avions demandé il y a cinq ans d’établir un plan clair pour les poursuites.  Nous vous avions demandé de renvoyer ce génocide à la Cour pénale internationale (CPI) ou de créer un tribunal par traité.  Nous avons été accueillies par des promesses creuses et des priorités concurrentes.  La justice a été différée.  Les yézidis sont persécutés depuis des siècles et les exactions n’ont pas eu de suite.  Pourtant, lorsque l’impunité est acceptée, la violence se répète.  La responsabilité est essentielle pour vaincre Daech et pour reconnaître officiellement les traumatismes que continuent de subir les survivants  ».

Alors qu’aujourd’hui les preuves existent, les Yézidis attendent encore que justice soit faite, a martelé Mme Murad, pour laquelle le traitement de cette affaire a de vastes implications pour les droits humains dans le monde.  Allons-nous fermer les yeux face au nettoyage ethnique et aux violences sexuelles?  Les preuves recueillies par l’Équipe n’auront de sens que l’on agit sur elles.  La communauté internationale est-elle prête à agir contre le génocide et la violence sexuelle comme elle l’a été contre le terrorisme? s’est demandé la Lauréate du prix Nobel de la paix.

Le Royaume-Uni a demandé à la communauté internationale de rester unie dans sa détermination à établir la responsabilité de Daech et à le traduire en justice. Il a exprimé son ferme appui à l’Équipe à laquelle il a fourni une aide dans les enquêtes sur les crimes commis contre les Kaka’i, Chabak et Turkmènes chiites.  Le Royaume-Uni a noté la coopération entre l’Équipe et les autorités judiciaires iraquiennes, d’une part, et les Gouvernements de l’Iraq et de la Région du Kurdistan, d’autre part.  Il a salué le projet de loi visant à donner une base juridique nationale aux poursuites lancées contre des membres de Daech pour des crimes internationaux commis en Iraq.  Le Royaume-Uni a insisté sur un mécanisme de partage d’éléments de preuve qui garantisse la non-application de la peine de mort.  

Á ce jour, le Royaume-Uni a dit avoir versé près de 2,8 millions de dollars pour l’Équipe à laquelle il a conseillé de rester avec les États qui lui fournissent du personnel, des fonds et autre type d’appui.  L’Équipe doit le faire ici à l’ONU mais aussi individuellement avec chaque État.  Le Royaume-Uni a aussi annoncé qu’il organisera une réunion en formule Arria avec les États-Unis, l’Iraq, les Pays-Bas et les Émirats arabes unis.  Il s’est dit en effet impatient d’entendre ce que le Conseiller spécial et les experts ont à dire sur la manière dont l’innovation et la technologie ont contribué à l’avancement des enquêtes, à l’appui aux survivants et à l’établissement des responsabilités.

La Norvège a réaffirmé d’emblée son soutien à l’UNITAD en justifiant cela par le fait que le travail de cette Équipe est essentiel pour établir les responsabilités et rendre justice aux victimes et aux survivants.  Elle y voit une condition préalable à une paix durable avec l’état de droit en son cœur.  La Norvège s’est félicitée du travail de l’Iraq et de l’UNITAD pour résoudre les obstacles juridiques et permettre à l’Équipe de partager les éléments de preuve, conformément à son mandat.  La Norvège a également appuyé l’assistance fournie par l’UNITAD aux juridictions nationales.  La Norvège a insisté sur l’approche centrée sur les survivants qui doivent avoir accès à un soutien psychosocial et juridique, et être interrogés conformément aux meilleures pratiques.  L’Équipe, a aussi insisté la Norvège, doit maintenir une approche sensible au genre et à l’âge.  Bien que des crimes horribles aient été commis contre tous les membres de la société iraquienne, nous savons que les femmes et les filles étaient particulièrement et systématiquement ciblées pour la violence sexuelle et sexiste, a-t-elle rappelé, se félicitant à cet égard de l’adoption récente de la loi sur les survivantes yézidies par le Conseil iraquien des représentants.

L’Irlande a dit retenir des propos de Mme Nadia Murad la nécessité d’établir les responsabilités et de rendre justice aux survivants des crimes perpétrés par Daech.  C’est la raison pour laquelle, a-t-elle dit, nous devons préserver les preuves des atrocités commises.  L’Irlande s’est félicitée du travail de l’Équipe et de son recours aux technologies novatrices.  Elle l’a surtout félicitée pour avoir, avec la collaboration des autorités iraquiennes, adopté une approche centrée sur les victimes et les survivants.  Elle a aussi salué l’approche de l’Équipe s’agissant des enquêtes sur les crimes sexuels commis contre les enfants et le lancement des enquêtes sur les crimes commis contre la communauté LGBTQ+.  

Insistant sur le bien-fondé de l’appui psychosocial aux survivants et aux témoins, en particulier les femmes et les enfants, l’Irlande a jugé essentiel de passer de la collecte des preuves aux poursuites et aux condamnations des crimes liés à la violence sexuelle.  Elle a salué la loi sur les survivantes yézidies et l’inclusion des survivants turkmènes, chrétiens, shabaks et autres.  L’Irlande a également salué l’aide qu’offre l’Équipe aux autorités iraquiennes pour élaborer un cadre législatif sur la poursuite, par la juridiction nationale, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des crimes de génocide.  Réitérant son opposition ferme à la peine de mort, l’Irlande a dit accueillir avec satisfaction le travail sur un partage des preuves conforme aux politiques et aux meilleures pratiques des Nations Unies.

La Tunisie s’est félicitée de la participation de Mme Nadia Mourad à cette réunion, estimant que son témoignage est une confirmation de l’aspiration du peuple iraquien à la justice.  Selon elle, il ne fait aucun doute que l’obligation de rendre des comptes contribuera à panser les blessures des victimes et de leurs familles, mais contribuera également à instaurer la paix et la stabilité en Iraq et à éliminer définitivement le terrorisme.  À cette aune, la Tunisie a salué la poursuite des travaux de l’Équipe d’enquêteurs, malgré la pandémie de COVID-19, et son recours à des moyens novateurs pour s’acquitter de son mandat, notamment l’utilisation de la technologie numérique et de l’intelligence artificielle.  La Tunisie s’est félicitée en particulier de l’adoption d’une approche sexospécifique centrée sur les droits des survivants et des témoins, tout en prenant note de la volonté des autorités iraquiennes et de l’Équipe d’enquêteurs de s’occuper des restes des victimes, dans le respect des traditions des communautés.

Exprimant sa profonde gratitude au Gouvernement iraquien pour son soutien constructif aux travaux de l’Équipe d’enquêteurs, la Tunisie a observé que cette coopération a permis d’aboutir à des résultats tangibles, illustrés par l’achèvement des dossiers des affaires prioritaires liées aux crimes commis par Daech dans la région de Sinjar et à l’Académie de l’air de Tikrit.  À cet égard, elle a rappelé que, conformément à la résolution 2379 (2017), les autorités iraquiennes sont le principal destinataire de toutes les preuves recueillies sous le mandat de l’Équipe.  Ces preuves, a-t-elle ajouté, doivent être utilisées dans le cadre de procédures judiciaires équitables et indépendantes engagées par les tribunaux compétents au niveau national.  Enfin, la Tunisie a souhaité que le Conseil de sécurité reste uni dans son soutien au Gouvernement et au peuple iraquiens afin de les aider à reconstruire et à éliminer toutes les « racines et vestiges du terrorisme » grâce à une approche respectant les orientations nationales de l’Iraq.

Le Mexique a salué la coopération entre l’Équipe d’enquêteurs et les autorités iraquiennes, notamment pour l’excavation de fosses communes, le partage des informations et la formation de juristes en vue d’enquêter et de poursuivre les crimes internationaux de Daech.  Il s’est dit convaincu que le Parlement iraquien progressera dans la mise en œuvre d’une législation nationale permettant la tenue de procès nationaux pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide.  Dans ce cadre, il a appelé à la coopération avec d’autres États, ainsi qu’avec des mécanismes et tribunaux internationaux, pour faire en sorte que ces crimes ne restent pas impunis.  Le Mexique s’est par ailleurs félicité des progrès technologiques qui ont permis de progresser plus rapidement dans la collecte d’informations pertinentes pour les enquêtes. 

Pour le Mexique, il est essentiel de reconnaître les victimes de ces crimes et de travailler avec elles pour faire progresser les processus de justice et de réconciliation.  En ce sens, il importe de tenir compte des traumatismes subis par les victimes et les témoins, a-t-il souligné, avant de saluer l’intégration d’une approche soucieuse de la santé mentale.  Il a également insisté sur l’importance de la récupération et du retour dans les familles de 103 dépouilles de Yézidis, dans le respect de leur culture et de leurs traditions.  Avant de conclure, le Mexique a rendu hommage au travail accompli par M. Khan, en exprimant ses vœux de succès dans ses nouvelles fonctions de Procureur de la Cour pénale internationale (CPI). 

Le Niger a salué l’aboutissement des enquêtes menées par l’UNITAD pour faire la lumière sur les attaques contre les Yézidis dans la région de Sinjar en aout 2014 ainsi que le massacre d’élèves de l’armée de l’air, non armés, perpétré à la « Tikrit Air Academy », en juin 2014.  Il a encouragé l’Équipe d’enquêteurs à persévérer dans la même dynamique afin de finaliser aussi les dossiers relatifs aux autres crimes commis par les combattants de Daech.  Toujours dans le chapitre des progrès enregistrés, le Niger a souligné la pertinence de la création de la nouvelle plate-forme numérique « Shuhud  » pour la soumission à distance des preuves par les témoins.  Il a également salué les efforts qui ont permis l’identification et la remise aux membres de leurs familles, des restes de corps de 103 Yézidis retrouvés dans neuf fosses communes du village de Kojo.  Tous ces succès n’auraient pas eu lieu sans un appui de la population et des autorités iraquiennes, a fait remarquer la délégation qui s’est réjouie de la coopération entre l’Équipe et le Comité national de coordination désigné par le Gouvernement iraquien.  Le Niger a salué à son tour l’intégration des outils technologiques avancés dans les travaux de l’UNITAD.

La Fédération de Russie a souligné l’importance de la coordination dans la lutte contre le terrorisme.  Ceux qui sont impliqués dans cette lutte en Iraq doivent respecter la souveraineté du pays, coordonner leurs actions avec les autorités iraquiennes et les aider à stabiliser la situation.  La Fédération de Russie a demandé à l’Équipe de poursuivre ses enquêtes sur le développement et l’utilisation d’armes chimiques et biologiques par des terroristes.  Daech sévit aussi en Syrie où ils utilisent les mêmes armes, selon « les nombreuses preuves » mais les enquêtes sont au point mort, a affirmé la Fédération de Russie.  Cette politique de « deux poids, deux mesures » est tout simplement intolérable, a-t-elle dénoncé.  Elle a insisté sur la coopération entre l’Équipe et les autorités iraquiennes et également sur le transfert des preuves à ces dernières.  Dans le prochain rapport, a conclu la Fédération de Russie, nous voudrions voir des informations sur le déroulement des procès contre les membres de Daech en Iraq. 

Le Kenya a demandé à la communauté internationale de qualifier les crimes « monumentaux » commis par Daech de crimes de génocide.  Il réitéré son soutien « sans équivoque » à la poursuite des membres de Daech, non seulement pour actes terroristes, mais aussi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et bien sûr crimes de génocide.  Les crimes commis par Daech, a-t-il prévenu, sont copiés ailleurs et notamment dans plusieurs pays d’Afrique, « par le compagnon de voyage de Daech: les Chebab ».  Le Kenya a donc exhorté le Conseil de sécurité et la communauté internationale à se lever une fois de plus contre le terrorisme.

Le Kenya s’est félicité des progrès engrangés par l’Équipe et a salué les autorités iraquiennes pour avoir formulé une législation appropriée et créé un tribunal spécialisé qui permettra de poursuivre les suspects de Daech pour des crimes internationaux sur le sol iraquien.  Á son tour, il s’est dit encouragé par l’intégration continue d’outils technologiques avancés dans le travail de l’Équipe.  Il a réaffirmé son soutien « au travail difficile » de l’Équipe et a mis en garde contre des coupes budgétaires qui pourraient affecter l’exécution efficace de son mandat.

L’Inde a rappelé que 39 ressortissants indiens comptent parmi les victimes de Daech qui ne peut plus être vu comme un banal groupe terroriste régional.  Daech, a-t-elle martelé, est un « syndicat du crime » qui a des affiliés dans le monde entier, y compris dans « notre voisinage ».  L’Inde a salué le travail important de l’Équipe, un travail, a-t-elle estimé, qui est essentiel pour la réconciliation et la pérennisation de la paix en Iraq.  Á son tour, elle s’est félicitée de l’adoption de la loi sur les survivantes yézidies.  Elle s’est dite particulièrement préoccupée par l’utilisation, confIrmée par l’Équipe, d’armes chimiques contre des civils.  Nous n’avons cessé, a-t-elle rappelé, d’alerter contre le danger que des armes de destruction massive tombent entre les mains de Daech et d’autres groupes terroristes.  Elle a espéré que l’enquête de l’Équipe fournira des éléments contribuant aux efforts internationaux de non-prolifération, par le biais du Comité 1540 du Conseil de sécurité. 

L’Inde a estimé que l’implication d’experts iraquiens dans le travail de l’Équipe est un gage de succès.  Ce travail commun ainsi que la formation de plusieurs responsables iraquiens, ne peuvent qu’assurer les capacités nationales nécessaires à l’établissement à long terme des responsabilités.  Elle a aussi salué le recours aux technologies avancées, d’autant qu’exploiter les avantages de ces technologies pour le bien de l’humanité « est une de nos priorités ».  Le partage des informations et des éléments de preuve collectés par l’Équipe avec les États Membres est la voie à suivre, a poursuivi l’Inde.  Elle a donc jugé « malheureux » qu’au bout de trois ans, l’Équipe n’ait toujours pas ouvert complètement ses vastes volumes de preuves aux autorités iraquiennes.

Le Viet Nam a qualifié de « louable » la finalisation des dossiers initiaux sur deux des principales priorités de l’Équipe d’enquêteurs.  Ces progrès sont remarquables compte tenu des défis posés par la pandémie de COVID-19, a-t-il noté, se disant par ailleurs encouragé par l’approche novatrice de l’Équipe, notamment l’utilisation de technologies de pointe et de plateformes numériques pour les témoignages à distance et la collecte de preuves.  Le Viet Nam a également félicité l’Équipe pour sa coopération renforcée avec le Gouvernement iraquien, avant d’applaudir la formation dispensée aux autorités compétentes afin de renforcer la capacité nationale de poursuivre les membres de Daech pour des crimes internationaux.

Le Viet Nam a d’autre part noté les arrangements mis en place entre l’Équipe et la justice iraquienne pour permettre le partage d’informations, formant le vœu que ces efforts se poursuivront au cours de la période à venir.  Dans le même temps, il a souligné l’importance de la protection des témoins et des survivants.  Il a encouragé l’Équipe et les autorités iraquiennes à faire en sorte que les personnes qui coopèrent puissent le faire en toute sécurité.  Enfin, le Viet Nam a estimé que la mise à disposition d’experts et le versement de contributions financières à l’Équipe atteste de la détermination de la communauté internationale à lutter contre le terrorisme et empêcher la résurgence de Daech.  Dans cet esprit, a-t-il conclu, « le succès de l’Équipe est important pour la paix et la stabilité dans la région et au-delà des frontières de l’Iraq ».

Pour l’Estonie, les histoires personnelles, comme celle de Mme Murad, ne font que souligner l’importance du travail de l’Équipe.  Elle a salué les résultats obtenus par l’Équipe au cours de la période considérée, malgré les circonstances difficiles dans les domaines politique et sécuritaire, et dans le contexte des restrictions relatives à la COVID-19.  Plus spécifiquement, elle a pris note de l’exhumation de 103 victimes yézidies de neuf fosses communes.  Elle a salué les efforts déployés par l’Équipe, en coopération avec les autorités iraquiennes, pour faire en sorte que la commémoration des victimes se déroule conformément aux traditions et coutumes locales.  À cet égard, l’Estonie a plaidé en faveur d’un dialogue interconfessionnel pour susciter plus d’engagement de la part des communautés religieuses dans le processus d’établissement des responsabilités.

Appuyant pleinement les efforts de l’Équipe pour renforcer les capacités des autorités iraquiennes et saluant les progrès importants réalisés en termes de recours aux nouvelles technologies, l’Estonie a salué la collecte et la numérisation d’une vaste documentation interne de l’EIIL grâce à une coopération efficace avec les institutions iraquiennes.  Elle s’est également félicitée de l’accord passé entre l’Équipe d’enquêteurs et la justice iraquienne, qui permet le partage d’informations sur les crimes financiers commis dans le cadre des activités de Daech en Iraq.  C’est une étape notable car elle ouvre la voie à une coopération encore plus forte à l’avenir, a estimé l’Estonie.  Elle a ensuite souligné l’importance des travaux des unités spéciales de l’Équipe sur les crimes sexuels et sexistes et les crimes contre les enfants; l’accent étant mis sur la protection des témoins et le soutien psychologique des témoins et des survivants pour éviter de nouveaux traumatismes.

Saint-Vincent-et-les Grenadines s’est félicitée des progrès accomplis par l’Équipe et salué le rôle joué par le Gouvernement iraquien, en particulier le pouvoir judiciaire, qui continue de collaborer de manière constructive avec l’Équipe.  Pour la délégation, l’accent mis par l’Équipe sur la santé mentale des victimes et des survivants est un élément essentiel du processus de réconciliation.  Un autre élément est, selon elle, le renforcement des capacités des institutions iraquiennes, essentiel pour garantir que toutes les branches de l’État sont en mesure de tenir pour responsables tous les individus et entités coupables d’infractions au droit interne et international.  À cet égard, elle s’est réjouie des discussions sur un projet de loi visant à établir une base juridique pour la poursuite des membres de Daech pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide. 

La délégation a par ailleurs pris note des conclusions selon lesquelles des armes chimiques ont été utilisées par Daech en Iraq entre 2014 et 2016.  Les atrocités liées à ces armes ne sauraient être ignorées et il ne peut y avoir impunité pour leur utilisation par des acteurs non étatiques, a-t-elle fait valoir.  Pour terminer, Saint-Vincent-et-les Grenadines a salué l’appui fourni par l’Équipe au Gouvernement iraquien pour la restitution des dépouilles de Yézidis afin qu’elles soient inhumées par leurs proches.  « Nous encourageons la poursuite de ces efforts car il s’agit d’un élément du processus plus large de réconciliation et de reconstruction. » 

Les États-Unis ont commencé par féliciter l’Équipe d’enquêteurs pour les progrès substantiels réalisés, en particulier la restitution des restes de 103 Yézidis retrouvés dans neuf charniers à Kojo, et ses efforts pour que les commémorations soient dignes et conformes aux croyances et pratiques yézidies.  Ce travail doit se poursuivre parallèlement au travail d’enquête sur la « brutalité » de Daech.  Les enquêtes sur les exactions subies par les Yézidis et les progrès accomplis dans des affaires similaires impliquant d’autres communautés ethniques et religieuses d’Iraq, rendront justice au peuple iraquien, ont souligné les États-Unis.  Les exhumations étant un processus profondément douloureux, ils ont félicité l’Équipe et ses partenaires pour avoir fourni un soutien psychosocial au personnel, aux survivants et aux membres de leur famille.  L’Équipe, ont-ils poursuivi, doit avancer dans l’enquête sur la mise au point et l’utilisation présumées d’armes chimiques et biologiques par Daech.  La communauté internationale ne saurait tolérer l’impunité en la matière. 

Le succès de ces enquêtes dépendra entièrement du partenariat entre l’Équipe et les entités nationales iraquiennes, ont fait observer les États-Unis, favorables à une coopération élargie entre l’Équipe, le Gouvernement iraquien et le Gouvernement régional du Kurdistan, y compris les forces de l’ordre et les entités judiciaires iraquiennes, les groupes de survivants, les ONG et les autorités religieuses.  Cette coopération accrue mènera à des poursuites plus fructueuses contre les membres de Daech en Iraq et à l’étranger, ont-ils estimé.  Pour aller de l’avant, ils ont exhorté l’Iraq à adopter la législation, qui est actuellement examinée par le Conseil des représentants, sur l’octroi d’une base pour poursuivre en Iraq les crimes internationaux commis par Daech.  Cette loi sera essentielle pour finaliser un arrangement permettant à l’Équipe de partager les preuves avec les autorités iraquiennes compétentes, conformément à son mandat.  Cela irait dans le même sens que « l’excellente loi » adoptée récemment par le Gouvernement iraquien sur les survivantes yézidies. 

Les États-Unis ont également félicité le Gouvernement régional du Kurdistan d’avoir annoncé son intention de créer un tribunal pénal spécial à Erbil pour les crimes commis par Daech.  Il s’agit d’une étape importante dans l’établissement des responsabilités pour les crimes commis contre les Yézidis.  Pour ce qui est de la question difficile des combattants terroristes étrangers, les États-Unis ont exhorté les États Membres à les rapatrier, à les poursuivre et réhabiliter et réintégrer les membres de leur famille.  Ils ont remercié l’Équipe pour le précieux soutien fourni aux États Membres, dont eux-mêmes, pour mener des enquêtes et des poursuites. 

La France a pris acte des importants progrès accomplis depuis le 10 décembre 2020, dont l’achèvement de la collecte de preuves dans les deux affaires initiales, à savoir les attaques contre la communauté yézidie dans la région du Sinjar et la tuerie de masse de jeunes cadets militaires à l’école de l’air de Tikrīt.  Elle a dit retenir la volonté d’achever, en 2021, la collecte et l’analyse des preuves liées aux crimes commis contre d’autres communautés religieuses et a encouragé l’Équipe à poursuivre l’enquête ouverte concernant le développement et l’utilisation d’armes chimiques et biologiques par Daech contre des populations civiles en Iraq entre 2014 et 2016 ainsi que la mise en œuvre de la stratégie conjointe de fouille des charniers. 

La pandémie, a noté la France, a donné une nouvelle pertinence à la stratégie développée par l’équipe d’intégrer des outils technologiques pour réussir ses missions.  Elle a salué l’efficacité de l’Équipe qui a su traiter un nombre de preuves en forte augmentation dans le cadre du projet de numérisation auquel participent les autorités iraquiennes.  Les progrès et la réussite du mécanisme sont le résultat de la très bonne coopération avec l’Iraq, a souligné la France, en se félicitant du renforcement de la collaboration entre l’Équipe et le Comité national de coordination établi par le Gouvernement iraquien ainsi que la conclusion de l’accord visant à faciliter le partage d’informations sur le financement des crimes commis par Daech.  Elle s’est également réjouie de la participation de l’Équipe à la formation des juges d’instruction iraquiens au droit pénal international et à l’élaboration de dossiers d’accusations et de poursuites contre des membres de Daech pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide. 

La France a tenu à rappeler la position constante de l’ONU de non-transmission d’éléments dans le cadre de procédures judiciaires impliquant la possibilité de condamnation à mort, où que ce soit.  Elle a encouragé les autorités iraquiennes à poursuivre leurs efforts pour finaliser le cadre législatif permettant de traduire en justice les membres de Daech dans le respect des standards et principes les plus élevés en matière de droits humains.  La situation des victimes est un élément fondamental, a-t-elle poursuivi, avant de saluer les efforts du Conseiller spécial et de l’Équipe pour offrir un soutien psychologique aussi bien aux victimes survivantes qu’aux témoins.

La Chine a salué le travail de M. Khan à la tête de l’Équipe et le témoignage de Mme Nadia Murad.  Elle a espéré que les enquêtes menées par l’Équipe apporteront un soulagement aux victimes du terroriste, y compris Mme Murad.  Elle a prié l’Équipe d’enquêteurs de transférer aux autorités iraquiennes les résultats des enquêtes « de façon complète ».  Le terrorisme est un ennemi commun, il faut donc continuer d’aider l’Iraq à traduire les terroristes en justice.  La Chine a donc insisté sur l’importance qu’il y a à respecter le droit souverain de l’Iraq de mener des enquêtes et des poursuites judiciaires sur son territoire.  Le Conseil, a-t-elle conclu, doit soutenir l’Iraq et promouvoir une bonne coordination entre ce dernier et l’Équipe d’enquêteurs.  

L’Iraq a commencé par exprimer sa gratitude à l’ONU pour les efforts qu’elle déploie pour l’aider à lutter contre le terrorisme et établir les responsabilités en la matière.  « Tout comme notre sœur Nadia Mourad, nous ressentons beaucoup de tristesse face aux crimes commis par Daech », a-t-il confié, assurant qu’il « ne se reposera pas tant que les responsables de Daech n’auront pas répondu de leurs crimes ». 

Après avoir vaincu militairement Daech, l’Iraq a dit entrer dans « une nouvelle phase » qui nécessite une coopération internationale accrue pour apporter des solutions, après les ravages causés par Daech.  Il s’agit non seulement de poursuivre les auteurs des crimes mais aussi ceux qui les ont appuyés et financés, et ce, afin d’empêcher une résurgence de tels actes.  Cela exige, a souligné l’Iraq, des procédures et des mesures de coordination combinant les efforts de différents États et organisations internationales, dans le cadre d’une « synergie efficace ».  Dans ce cadre, l’Iraq a dit avoir besoin du soutien et de l’assistance de la communauté internationale pour développer ses capacités juridiques, sécuritaires et économiques, améliorer son système politique, assurer les libertés fondamentales et la démocratie et protéger les droits humains, conformément à la Déclaration universelle des droits de l’homme. 

À cet égard, a-t-il poursuivi, notre Gouvernement iraquien attend avec intérêt l’élaboration d’un régime juridique international qui permette de surveiller la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité relatives à la lutte contre le terrorisme, sous tous ses aspects.  Il s’agit, selon l’Iraq, de démontrer le « sérieux » des États dans l’application effective des obligations découlant desdites résolutions, dans le respect du droit international et des droits de l’homme.  Pour sa part, l’Iraq a promis de continuer de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour « déraciner le fléau du terrorisme ».  Il a mis en avant le renforcement des capacités institutionnelles dans la lutte antiterroriste et le renforcement du système judiciaire, sur la base des droits humains et constitutionnels. 

Notre gouvernement, a-t-il assuré, prend des mesures pour pouvoir utiliser les éléments de preuve une fois que l’Équipe d’enquêteurs les aura remis.  Sur ce point, il a indiqué que son Conseil des représentants a terminé la première lecture d’un projet de loi portant création d’un tribunal chargé de poursuivre les crimes de Daech.  Cette juridiction utilisera les éléments de preuve pour engager des poursuites pour génocide et crimes contre l’humanité, a-t-il précisé, rappelant également l’adoption d’une loi destinée à fournir une protection et des soins aux survivantes yézidies. 

L’Iraq a ensuite souligné l’importance de la nouvelle phase des travaux de l’Équipe d’enquêteurs.  Après trois ans de travail, marqués notamment par la découverte de charniers et l’identification des victimes, une formation va être élargie à toutes les autorités compétentes, en particulier pour la collecte et l’analyse des données, ainsi que pour la protection des témoins.  Nous insistons sur la nécessité pour notre gouvernement de recevoir les résultats des enquêtes menées par l’Équipe, ces trois dernières années, a souligné l’Iraq, jugeant ces éléments essentiels pour lui permettre d’avancer.  De même, a-t-il fait valoir, il importe que le travail de l’Équipe d’enquêteurs respecte pleinement notre souveraineté et notre compétence s’agissant des crimes commis à l’intérieur de nos frontières et contre notre peuple.  Le mandat doit être respecté ainsi que les échéanciers, a ajouté l’Iraq, souhaitant que la justice soit rendue rapidement « pour les victimes et pour éviter toute impunité ».  Parvenir à la justice contribuera à la réintégration des victimes dans la société, a souligné l’Iraq, avant d’exprimer sa reconnaissance à l’Équipe, au Conseil de sécurité et aux « pays frères » qui l’ont aidé dans son combat contre le terrorisme.  Nous souhaitons plein succès à M. Khan dans ses nouvelles fonctions de Procureur de la CPI, a conclu l’Iraq. 

Reprenant la parole, le Conseiller spécial a confirmé au Kenya que son Équipe fait tout pour sécuriser et préserver les preuves, conformément aux normes internationales.  Garantir la recevabilité et l’exhibition des preuves auprès des tribunaux du monde relève de notre responsabilité, a-t-il dit, en attirant l’attention sur les procédures qui prennent en compte les spécificités de chaque région. 

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