Les systèmes sanitaires, l’accès au traitement, la relance économique et l’allégement de la dette, au cœur de la note de M. Guterres sur l’impact de la COVID-19 en Afrique
On trouvera ci-après le discours d’ouverture du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, à l’occasion de la séance d’ouverture de haut niveau du cycle de Conférences sur l’Afrique de 2020, organisé sur le thème « faire taire les armes en Afrique au temps de la COVID-19: difficultés et possibilités », à New York aujourd’hui,
Je suis heureux de pouvoir me joindre à vous en cette période de crise sans précédent pour discuter des effets de la pandémie du COVID-19 sur la paix et la sécurité en Afrique.
La pandémie a mis en évidence la fragilité de nos sociétés. Il s’agit d’un problème mondial qui exige une réponse mondiale coordonnée et fondée sur l’unité et la solidarité.
Alors que la COVID-19 se propage sur le continent, l’Afrique a rapidement réagi face à la pandémie et, à ce jour, le nombre de cas signalés est plus faible que ce que l’on craignait. Malgré cela, l’enjeu reste de taille. Ces dernières années, les pays africains ont fait beaucoup pour améliorer le bien-être des peuples du continent. La croissance économique a été forte. La révolution numérique s’est installée. Une zone de libre-échange a été décidée.
Mais la pandémie menace les progrès accomplis en Afrique. Elle aggravera les inégalités existantes et accentuera la faim, la malnutrition et la vulnérabilité face à la maladie. Déjà, la demande pour les produits africains de base, le tourisme et les envois de fonds sont en baisse. L’ouverture de la zone de libre-échange a été reportée et des millions de personnes pourraient basculer dans la pauvreté extrême.
Le virus a fait plus de 2 500 morts en Afrique. La vigilance et la préparation sont essentielles. Je félicite les pays d’Afrique, ainsi que l’Union africaine, pour ce qu’ils ont déjà entrepris. La plupart se sont empressés d’agir pour renforcer la coordination régionale, déployer des travailleurs sanitaires et établir des quarantaines, des confinements et la fermeture des frontières. Ils puisent également dans l’expérience acquise dans la lutte contre le sida et l’Ebola pour réfuter les rumeurs et surmonter la méfiance à l’égard des autorités, des forces de sécurité et du personnel sanitaire.
J’exprime ma solidarité la plus totale avec les peuples et les gouvernements africains dans leur lutte contre la COVID-19. Les organismes des Nations Unies, les équipes pays, les opérations de maintien de la paix et les acteurs humanitaires apportent tout leur soutien à ces efforts. Les vols de solidarité de l’ONU ont permis d’acheminer des millions de kits de dépistage, de masques et d’autres équipements, à travers pratiquement tout le continent. La note de synthèse que nous diffusons aujourd’hui met en évidence une série de problèmes urgents.
Nous demandons une mobilisation internationale pour renforcer les systèmes sanitaires en Afrique, maintenir les chaînes d’approvisionnement alimentaire, éviter une crise financière, soutenir l’éducation, protéger les emplois, maintenir les ménages et les entreprises à flot et protéger le continent contre les pertes de revenus et de recettes d’exportation. Les pays d’Afrique doivent bénéficier du même accès rapide, équitable et abordable à tout vaccin et traitement à venir, qui doivent être considérés comme des biens publics mondiaux.
J’ai demandé un plan de relance mondiale qui représente au moins 10% du produit intérieur brut global. Pour l’Afrique, cela signifie plus de 200 milliards de dollars de soutien additionnel de la part de la communauté internationale.
Je continue également de plaider en faveur d’un cadre global de la dette, à commencer par un gel généralisé de la dette des pays qui ne peuvent pas en assurer le service, suivi d’un allégement ciblé de la dette et d’une approche globale des questions structurelles de l’architecture internationale de la dette, afin de prévenir les défauts de paiement.
Il sera également essentiel que les pays d’Afrique poursuivent leur action pour faire taire les armes et faire face à l’extrémisme violent, et je me félicite du soutien à travers le continent pour mon appel à un cessez-le-feu mondial. Les processus politiques et les élections représentent dans les mois à venir autant d’occasions de franchir des étapes importantes sur le plan de la stabilité et de la paix.
Les femmes seront indispensables à tous les niveaux de notre réponse face à la pandémie. Les plans de relance doivent en priorité mettre de l’argent à leur disposition et renforcer leur protection sociale. Nous devons donner aux jeunes africains les moyens d’agir. Les droits humains de chacun doivent être respectés.
Au fur et à mesure que la pandémie progresse, il faudra prendre des décisions difficiles, et il est essentiel de conserver la confiance et la participation des citoyens tout au long du processus. La pandémie en Afrique n’en est qu’à ses débuts, et les perturbations pourraient s’intensifier rapidement. Il faut impérativement faire preuve de solidarité mondiale avec l’Afrique – dès aujourd’hui et pour mieux se redresser.
Il est indispensable de mettre fin à la pandémie en Afrique, pour y mettre fin dans le monde entier.
Je vous remercie.