La situation sécuritaire en Afrique centrale, sur fond de pandémie, reste une source de grande préoccupation pour le Conseil de sécurité
Les conditions de sécurité précaires en Afrique centrale, notamment les attaques perpétrées contre des civils au Cameroun et dans le bassin du lac Tchad, ont continué de préoccuper le Conseil de sécurité, réuni aujourd’hui en visioconférence pour examiner le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation et les activités du Bureau des Nations Unies dans cette région.
Malgré une augmentation lente –mais constante– du nombre de cas de COVID-19 dans toute l’Afrique centrale, la pandémie y a perturbé la stabilité politique, économique et sociale et la stabilité des conditions de sécurité, a informé le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), M. François Louncény Fall.
Lors de sa dernière visite au Cameroun en novembre, M. Fall a constaté que la violence persistait dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun. Il a dénoncé les attaques contre les civils, y compris des écoliers et des travailleurs humanitaires, perpétrées par des groupes armés non étatiques et par les forces de sécurité.
Plusieurs délégations se sont ralliées aux inquiétudes du haut fonctionnaire, à l’instar de l’Afrique du Sud, du Niger, de la Tunisie et de Saint-Vincent-et-les Grenadines (Groupe A3+1), alarmées face à la flambée de violence dans ce pays, où la population civile « paye le prix fort ».
Les États-Unis ont pour leur part préconisé une solution politique pour mettre fin à ces violences « odieuses » dans la partie anglophone du Cameroun. Dans ce contexte, la délégation a exhorté les dirigeants des groupes séparatistes et le Gouvernement camerounais à prendre des mesures audacieuses pour renforcer la confiance et aller vers un dialogue constructif. Abondant dans le même sens, l’Allemagne a considéré qu’il n’existe pas de solution militaire à ce conflit. « Il n’y aura pas de paix durable sans un dialogue politique entre le Gouvernement et les séparatistes. »
Toutefois, pour la Fédération de Russie, « le problème anglophone au Cameroun trouve ses racines dans la période coloniale ». Avec la Chine, elle s’est opposée à toute ingérence dans les affaires intérieures de ce pays.
De façon générale, les menaces persistantes que font peser les groupes armés internes et transfrontières dans la sous-région ont continué de s’opposer aux appels lancés pour faire taire les armes, a résumé le Représentant général. Les délégations ont à leur tour tiré la sonnette d’alarme face aux attaques incessantes de Boko Haram dans le bassin du Lac Tchad et aux activités de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) en République démocratique du Congo ou en République centrafricaine, et face aux actes de piraterie dans le golfe de Guinée, malgré une diminution relative de la criminalité maritime.
Saluant les efforts du Groupe de travail multinational conjoint pour lutter contre Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest, le Royaume-Uni a exhorté les pays du bassin du lac Tchad à redoubler d’efforts pour s’attaquer aux causes profondes des conflits, ce qui passera, selon lui, par l’amélioration de la gouvernance. En attendant, voyant des similitudes dans les situations dans les deux régions, le Représentant du Secrétaire général a préconisé d’établir des liens entre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et la Stratégie régionale pour le bassin du lac Tchad afin d’éviter les doubles emplois.
Autre source de préoccupation pour les membres du Conseil: les effets multidimensionnels de la pandémie de COVID-19 en Afrique centrale. Pour M. Fall, les tendances observées indiquent clairement que les premières mesures prises par les gouvernements de la sous-région pour contenir et réduire la propagation de la maladie se sont avérées efficaces. Mais cette efficacité a un coût socioéconomique élevé, a-t-il averti en encourageant les partenaires bilatéraux et multilatéraux à renforcer leur appui. M. Fall a loué en particulier l’adoption par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) d’une stratégie régionale de lutte contre la COVID-19 en Afrique centrale.
Ayant d’ores et déjà mis en œuvre l’initiative de réduction de la dette des pays en développement dans le cadre du G20, la Chine a demandé au BRENUAC de s’assurer que les autres partenaires internationaux mettent en œuvre leurs engagements. Le Royaume-Uni a rappelé qu’il avait annoncé en septembre un financement supplémentaire de six millions de dollars pour fournir une assistance vitale aux populations, portant à 18 millions l’ensemble de son aide humanitaire au Cameroun en 2020. Quant à la France qui s’est engagée à verser 1,2 milliard d’euros pour soutenir l’Afrique dans sa lutte contre le virus, elle a mis en garde contre les violations des droits de l’homme sous le prétexte de la pandémie.
La situation politique en Afrique centrale, largement dominée par les cycles électoraux prévus en 2020 et 2021 dans 8 des 11 pays d’Afrique centrale, a également retenu l’attention des États Membres. Le Royaume-Uni s’est réjoui de la tenue, le 27 décembre, d’élections présidentielle et législatives en République centrafricaine, y voyant une étape importante vers une paix durable, tandis que la Chine a appelé à la levée des sanctions imposées à ce pays. Au Burundi, le retour volontaire de plusieurs réfugiés des pays voisins confirme, selon le Groupe A3+1, que la situation n’y constitue plus une menace à la paix et la sécurité internationales. Les membres du Conseil ont appelé tous les acteurs politiques à veiller à ce que ces élections dans la région soient inclusives, pacifiques, libres et équitables. L’occasion pour le Représentant spécial de faire part de sa détermination à continuer d’offrir les bons offices du Secrétaire général, chaque fois que cela sera nécessaire, pour encourager un dialogue politique inclusif et significatif dans les pays qui se préparent aux élections.
En conclusion, M. Fall a félicité les États membres de la CEEAC d’avoir mené à bien une réforme institutionnelle cruciale et mis en place une architecture de paix et de sécurité prometteuse pour l’Afrique centrale. Les entités des Nations Unies continueront de soutenir les efforts faits par la Commission de la CEEAC en vue de consolider l’intégration régionale, a-t-il assuré. La coopération régionale est la clef de la réalisation de l’aspiration commune à la stabilité et au développement, ont témoigné les délégations du Viet Nam et de l’Indonésie, elles-mêmes membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN).
M. FRANÇOIS LOUNCÉNY FALL, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), a présenté au Conseil de sécurité, par visioconférence, le dernier rapport du Secrétaire général sur la situation en Afrique centrale et les activités du BRENUAC. Il a d’entrée souligné que la pandémie de COVID-19 semble généralement sous contrôle dans la sous-région, avec seulement 13 470 cas actifs au 7 décembre, pour un total de 88 422 cas et 1 614 décès officiellement signalés depuis le début de la pandémie. Toutefois, a-t-il précisé, il semble que ces derniers jours, le nombre d’infections dans certains pays ait recommencé à augmenter, retardant ainsi la levée de certaines restrictions imposées pour contrer l’évolution de la pandémie.
Les tendances observées en Afrique centrale indiquent clairement que les premières mesures prises par les gouvernements de la sous-région pour contenir et réduire la propagation de la pandémie se sont avérées efficaces. Mais cette efficacité, a expliqué M. Fall, a « un coût socioéconomique élevé », car le ralentissement économique provoqué par la pandémie et les différentes mesures restrictives ont encore réduit la capacité déjà limitée des États à fournir des services sociaux de base à leurs populations. Il a voulu, à cet égard, encourager les partenaires bilatéraux et multilatéraux à apporter leur soutien à tous les pays de la sous-région pour les aider à poursuivre la lutte contre la pandémie et à faire face à ses conséquences économiques, sociopolitiques et sécuritaires. De même, il a appelé les institutions financières internationales à continuer d’aider au déblocage de l’aide d’urgence pour tous les pays d’Afrique centrale touchés par la COVID-19.
Malgré ce contexte particulier qui a eu un impact sur la bonne mise en œuvre du mandat du BRENUAC, M. Fall a dit avoir pu s’engager avec des partenaires clefs des Nations Unies, nationaux et internationaux dans la sous-région sur diverses questions, notamment lors de ses récentes visites au Cameroun et en République du Congo. Il a évoqué la réunion des chefs des équipes des Nations Unies en Afrique centrale, au cours de laquelle « nous avons convenu, entre autres, de renforcer la coordination du soutien aux efforts régionaux pour faire face à l’impact des changements climatiques, prévenir la violence liée aux élections et lutter contre les discours de haine ».
Le Représentant spécial en a profité pour annoncer que la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) a franchi une étape importante dans son processus de réforme institutionnelle avec la prestation de serment de sa nouvelle Commission le 1er septembre. La convocation de deux sommets ordinaires des chefs d’État et de gouvernement est une preuve supplémentaire, à ses yeux, que les dirigeants régionaux sont déterminés à renforcer l’intégration régionale et à traiter les questions de paix et de sécurité en Afrique centrale. Un engagement qu’il a pu constater lors du dix-huitième sommet ordinaire de la CEEAC, à Libreville, au Gabon, le 27 novembre, qui a adopté le Plan stratégique indicatif de la CEEAC pour 2021-2025 et le Plan d’action prioritaire pour 2021. De plus, il a été décidé de nommer un médiateur et de déployer une mission d’observation électorale pour les prochaines élections présidentielle et législatives en République centrafricaine.
Avant le sommet, a précisé M. Fall, le BRENUAC s’est engagé avec la nouvelle Commission à identifier des priorités communes pour les années à venir, notamment en matière de prévention des conflits et d’intégration régionale, et à renforcer la coordination des partenaires internationaux pour la mise en œuvre du Plan stratégique indicatif pour 2021-2025. Alors que les institutions réformées de la CEEAC deviennent progressivement opérationnelles, le Comité consultatif permanent des Nations Unies chargé des questions de sécurité en Afrique centrale (UNSAC) reste, selon lui, un forum pertinent où les pays d’Afrique centrale discutent et formulent des recommandations visant à relever les défis de la paix et de la sécurité régionales.
Par ailleurs, a poursuivi le Chef du BRENUAC, plusieurs pays de la sous-région se sont préparés à la tenue d’élections, notamment le Cameroun, la République centrafricaine, le Tchad, la République du Congo et Sao Tomé-et-Principe. Le 6 décembre, le Cameroun a tenu avec succès ses toutes premières élections régionales visant à finaliser le processus de décentralisation dans le pays, y compris la mise en œuvre d’un statut spécial pour les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. En République du Congo, des consultations politiques sur la préparation de l’élection présidentielle de 2021 ont eu lieu les 25 et 26 novembre, avec la participation des partis d’opposition. Au Tchad, suite aux recommandations du deuxième Forum national inclusif convoqué par les autorités, du 29 octobre au 1er novembre, des amendements à la Constitution ont été votés le 3 décembre, notamment la création d’un poste de Vice-Président, le rétablissement du Sénat et de la Cour des comptes, ainsi que la réduction de l’âge minimum pour se porter candidat à l’élection présidentielle de 45 à 40 ans. M. Fall a fait part de sa détermination à continuer à offrir les bons offices du Secrétaire général, chaque fois que cela sera nécessaire, pour encourager un dialogue politique inclusif et significatif dans les pays qui se préparent aux élections.
M. Fall a par ailleurs fait part de sa préoccupation face à l’insécurité dans toute l’Afrique centrale, y compris lorsqu’elle a une dimension transfrontalière, notamment dans le bassin du lac Tchad et le golfe de Guinée, et en ce qui concerne la situation interne dans certains pays. Lors de sa dernière visite au Cameroun en novembre, il a constaté avec une « grande inquiétude » la poursuite de la violence dans les régions de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Il a déploré le fait que la violence dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest vise maintenant les civils, y compris les élèves et les enseignants, ainsi que les religieux. Au cours de sa visite, il a réitéré l’appel lancé par le Secrétaire général à toutes les parties concernées pour qu’elles renoncent à la violence, fassent taire les armes et cessent les attaques contre les civils et les infrastructures civiles telles que les établissements scolaires.
À cet égard, le Représentant spécial a appelé tous les acteurs à rester engagés en faveur d’un dialogue constructif pour mettre fin à la crise dans les deux régions et construire une paix et un développement durable. Poursuivant, il s’est dit particulièrement préoccupé par le fait que Boko Haram continue d’être une menace sérieuse dans le bassin du lac Tchad avec la multiplication des attaques et des enlèvements. Les groupes terroristes ont continué d’intensifier leurs attaques au Cameroun et au Tchad et de perfectionner leur modus operandi, comme l’a démontré une attaque récente, dans la nuit du 24 au 25 novembre, lors de laquelle 4 soldats tchadiens ont été tués et environ 16 autres ont été blessés dans la région de Ngouboua sur le lac Tchad.
« On ne saurait trop insister sur la nécessité de traiter la crise dans le bassin du lac Tchad de manière globale, notamment dans le cadre de la Stratégie régionale de stabilisation, de redressement et de résilience des zones du bassin du lac Tchad affectées par Boko Haram. » Malgré les difficultés dues à la COVID-19, le Plan d’action régional de la Stratégie a été finalisé et les huit territoires les plus touchés sont maintenant en train d’élaborer leurs plans d’action territoriaux. L’occasion pour M. Fall d’en appeler une fois de plus à la générosité des membres du Conseil de sécurité et des autres partenaires pour fournir les ressources nécessaires à la mise en œuvre rapide de la Stratégie régionale.
D’après M. Fall, la proximité et les similitudes entre les situations dans le bassin du lac Tchad et au Sahel justifient l’établissement de liens entre la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et la Stratégie régionale pour le bassin du lac Tchad afin d’éviter les doubles emplois. Dans le golfe de Guinée, la criminalité organisée maritime a continué à se développer, notamment le trafic de drogue, la traite des personnes et le trafic illicite de migrants. Tout en saluant les mesures individuelles et les initiatives de coopération bilatérale prises par plusieurs États de la région pour faire face à l’insécurité maritime, il a tenu à souligner que les réponses aux menaces à la sécurité tant des États que des personnes dans le golfe de Guinée ne seront efficaces que si elles sont coordonnées entre l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest, par le biais des mécanismes existants tels que le Centre régional de sécurisation maritime de l’Afrique centrale (CRESMAC) et le Centre régional de sécurisation maritime de l’Afrique de l’Ouest (CRESMAO). Le Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), M. Mohamed Ibn Chambas, et lui-même ont convenu d’intensifier leur engagement en faveur de la coopération et de la coordination interrégionales en matière de sécurité maritime dans le golfe de Guinée, qui constitue l’une des principales priorités communes de leurs deux bureaux. Par ailleurs, M. Fall a réitéré l’appel du Secrétaire général aux gouvernements et aux communautés locales d’Afrique centrale pour qu’ils continuent à travailler ensemble afin de relever les défis communs liés à la transhumance.
Pour conclure, le Représentant spécial a attiré l’attention sur le fait que les menaces à la paix et à la sécurité en Afrique centrale touchent également d’autres régions, en particulier l’Afrique de l’Ouest et les Grands Lacs. C’est le cas de l’instabilité déjà mentionnée dans le bassin du lac Tchad. De surcroît, l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) est actuellement présente en Afrique centrale et dans les Grands Lacs, deux régions auxquelles appartiennent plusieurs pays sous la responsabilité du Bureau.
Le Royaume-Uni a salué les efforts de prévention des conflits et de médiation menés par le BRENUAC dans toute l’Afrique centrale, encourageant ce dernier à se coordonner avec les équipes de pays des Nations Unies dans la sous-région. Il s’est cependant dit profondément préoccupé par la crise actuelle dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun, qui est aggravée par les effets de la COVID-19. La délégation britannique a rappelé qu’elle avait annoncé, en septembre, un financement supplémentaire de 6 millions de dollars pour fournir une assistance vitale aux populations, portant à 18 millions le total de son soutien humanitaire au Cameroun en 2020. Elle s’est inquiétée des informations faisant état de violations des droits de l’homme et d’abus commis par les forces de sécurité et les séparatistes armés dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Dénonçant les actes de violence signalés contre des civils, elle a demandé instamment à toutes les parties de respecter les droits de l’homme, y compris la liberté d’expression, d’association et de réunion. Elle a aussi exhorté le Gouvernement à coopérer pleinement avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme.
Dans ce contexte, la délégation britannique s’est félicitée des mesures prises par le Gouvernement pour faire face à la crise et répondre aux recommandations du Grand Dialogue national d’octobre 2019, notamment en organisant des élections régionales le 6 décembre. Le dialogue inclusif reste essentiel pour parvenir à une résolution juste, pacifique et durable de la crise et toutes les parties doivent rester engagées dans les efforts de consolidation de la paix, a-t-elle plaidé, en formant le vœu que tous les partenaires internationaux et régionaux du Cameroun continueront également d’appuyer les efforts visant à rétablir la paix et la sécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Le Royaume-Uni a également condamné les attaques terroristes perpétrées contre des civils dans l’extrême nord du Cameroun et dans toute la région du bassin du lac Tchad. Saluant les efforts du Groupe de travail multinational conjoint pour lutter contre Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest dans la région, il a exhorté les pays du bassin du lac Tchad à redoubler d’efforts pour s’attaquer aux causes profondes des conflits, ce qui passera, selon lui, par l’amélioration de la gouvernance, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants et l’atténuation des effets des changements climatiques sur la sécurité régionale. Avant de conclure, la délégation s’est réjouie de la tenue, le 27 décembre, d’élections présidentielle et législatives en République centrafricaine, y voyant une étape importante dans le cheminement de ce pays vers une paix durable. Elle a exhorté le Gouvernement et tous les acteurs politiques à veiller à ce que ces élections soient inclusives, pacifiques, libres et équitables.
Les États-Unis ont déclaré que, de tous les pays couverts par le BRENUAC, le Cameroun est « le plus préoccupant », avec plus de 6,2 millions de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire, soit 2,3 millions de personnes de plus qu’au début de l’année. Ce pays est en outre confronté à de multiples crises, notamment des attaques terroristes dans l’Extrême-Nord, des violences persistantes dans les régions anglophones et l’impact d’importants flux de réfugiés de ses voisins, tous aggravés par la pandémie de COVID-19. Les États-Unis se sont dits « profondément troublés » par la récente augmentation des attaques de groupes armés séparatistes contre des civils, y compris des incendies criminels et des enlèvements. Le meurtre d’écoliers à Kumba le 24 octobre dernier est particulièrement odieux à cet égard et indique clairement qu’une solution politique est nécessaire pour mettre fin à la violence. Dans ce contexte, la délégation a exhorté les dirigeants des groupes séparatistes et le Gouvernement camerounais à prendre des mesures audacieuses pour renforcer la confiance et aller vers un dialogue constructif. « Le BRENUAC peut les soutenir dans cet effort. » Par ailleurs, les États-Unis ont ajouté qu’ils suivaient de près la situation du Burundi, alors que le Bureau de l’Envoyé spécial se prépare à fermer. Ils exhortent le Gouvernement burundais à continuer de travailler avec le BRENUAC, ainsi qu’avec l’Envoyé spécial pour les Grands Lacs, afin d’établir un calendrier raisonnable pour la fermeture de ce Bureau. En République centrafricaine, la délégation a apprécié et appuyé le rôle régional que joue la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) pour appuyer l’Accord de paix et soutenir la stabilité dans le contexte où ce pays se prépare à tenir des élections nationales le 27 décembre.
Les États-Unis ont félicité tous les pays de l’Afrique centrale pour leurs efforts visant à atténuer l’impact de la pandémie de COVID-19. Alors que les pays continuent de lutter contre cette crise sans précédent, la solidarité régionale est cruciale, a jugé la délégation, avant de saluer l’adoption par la CEEAC de la stratégie de réponse régionale contre la COVID-19 pour l’Afrique centrale, ainsi que les efforts de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale, de la Banque des États de l’Afrique centrale, de la Banque de développement des États de l’Afrique centrale et du Club de Paris pour préserver la stabilité économique dans la région. Enfin, les États-Unis ont encouragé le BRENUAC, de même que les États de la région à travailler avec l’ONU, l’Union africaine et d’autres partenaires concernés pour élaborer des stratégies viables afin de renforcer leur capacité de prévention des conflits. Cela comprend l’ajout d’une perspective de genre et la construction de partenariats avec la société civile, a insisté le représentant.
Intervenant au nom du Groupe A3+1, la Tunisie a relevé que 8 des 11 pays d’Afrique centrale se préparent à l’organisation d’élections, occasion pour les populations de consolider leur processus démocratique, et facteur déterminant dans la voie d’une stabilité politique et d’une paix durable. Le Groupe A3+1 est par ailleurs encouragé par les efforts des pays tendant au renforcement de la riposte contre la COVID-19, à la réduction de ses répercussions et à l’amélioration de leurs relations bilatérales. Passant à la dynamique diplomatique en cours dans la région, le Groupe A3+1 s’est réjoui du mini-Sommet virtuel tenu le 7 octobre sur la région des Grands Lacs qui a réuni les Chefs d’États de l’Angola, de la République démocratique du Congo (RDC), du Rwanda et de l’Ouganda. Il a espéré que d’autres réunions de haut niveau et activités diplomatiques favoriseront le renforcement des liens bilatéraux et ouvriront la voie à la sécurité, la stabilité et la prospérité de la région tout entière.
Le Groupe A3+1 a aussi salué les progrès accomplis par le Gouvernement du Cameroun dans le dialogue et la décentralisation des régions du nord-ouest et du sud-ouest, tout en restant préoccupé par la flambée de violence dans ces parties du pays. Il a exhorté toutes les parties à cesser les hostilités et à entamer des négociations de paix et à ouvrir le dialogue, seuls moyens de trouver des solutions à toutes les questions en suspens. Il a également encouragé les parties à accélérer la mise en œuvre des conclusions du Grand dialogue national. Il reste préoccupé par ailleurs de la situation sécuritaire, volatile, dans certaines parties de la région, exacerbée par les violentes activités de groupes armés comme les factions de Boko Haram et de l’Armée de résistance du Seigneur, par les actes de piraterie dans le golfe de Guinée, malgré une diminution relative de la criminalité maritime durant la période examinée dans le rapport.
Le Groupe A3+1 a notamment mis l’accent sur la traite des personnes et loué les efforts de l’ONU visant à fournir des mécanismes de protection pour les migrants vulnérables, l’insécurité et l’impact de la pandémie de COVID-19 ayant accru le nombre de nécessiteux. Il a fait remarquer à cet égard les mouvements massifs de réfugiés et de demandeurs d’asile, ainsi que les déplacements forcés qui ont exacerbé la malnutrition, l’insécurité alimentaire et les épidémies. Il a donc exhorté à donner accès aux acteurs humanitaires là où il leur est refusé et applaudi le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, qui a épaulé le processus de retour et de rapatriement des réfugiés, en étroite coordination avec les pays concernés de la région. Le retour volontaire de plusieurs réfugiés burundais des pays voisins confirme, selon le Groupe A3+1, l’avis du Conseil selon lequel la situation au Burundi ne constitue plus une menace à la paix et la sécurité internationales.
La Chine a dit qu’il fallait soutenir tous les efforts déployés par les pays de la région pour lutter contre la pandémie de COVID-19. Celle-ci a pu être contenue grâce aux mesures coordonnées par la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Pour autant, le BRENUAC peut davantage appuyer les États concernés. La Chine a indiqué avoir pour sa part apporté une aide en nature à plusieurs pays de la région. Son représentant a également déclaré que la communauté internationale a l’obligation de favoriser le développement des pays de la région, par diverses mesures et initiatives. La Chine a mis en œuvre l’initiative de réduction de la dette des pays en développement dans le cadre du G20. Elle a appelé le BRENUAC à s’assurer que d’autres partenaires internationaux mettent en œuvre leurs engagements. En plus de cet appui économique, la communauté internationale doit rester engagée dans les efforts de paix dans la région, qu’il s’agisse de contrer Boko Haram et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) qui continuent de mener leurs activités terroristes dans la région, ou la piraterie maritime dans le golfe de Guinée. Toutefois, la Chine estime que la question des régions anglophones au Cameroun relève de ses affaires intérieures. Compte tenu de la nature du problème, la délégation a jugé que le Cameroun est capable de la gérer tout seul. Enfin, elle a appelé par ailleurs à la levée des sanctions imposée à la République centrafricaine.
Si elle s’est félicitée des avancées vers le dialogue dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun, la Belgique s’est toutefois dite préoccupée par la situation sur le terrain, notamment par le boycott des élections locales du 6 décembre. Elle a demandé à toutes les parties prenantes de faire preuve de retenue dans le suivi des élections régionales. La mise en œuvre des recommandations issues du dialogue reste essentielle à la construction d’une paix et d’un développement durables, a rappelé la délégation. Par ailleurs, elle a appelé toutes les parties à soutenir l’appel du Secrétaire général et de l’Union africaine pour un cessez-le-feu global, avant de dénoncer l’impact négatif du conflit sur les femmes et les enfants, les déplacements forcés et les violations des droits de l’homme.
La Belgique a estimé que la valeur ajoutée du BRENUAC réside dans son système d’alerte rapide ainsi que dans sa couverture des thématiques régionales, notamment les changements climatiques et le terrorisme. Elle a explicitement salué l’intégration par le Bureau de la perspective de sécurité climatique dans son analyse des conflits, jugeant cruciaux que les enseignements tirés puissent profiter à d’autres contextes sur le continent africain où couve le terrorisme, notamment au Mozambique.
Enfin, au Burundi, si la tenue des élections a permis de tourner une page, a observé la Belgique, il reste selon elle des défis à relever, dont le retour des réfugiés et la poursuite des travaux sur la sixième priorité présentée par le Président Ndayishimiye dans son discours d’investiture du 18 juin 2020, en termes de droits de l’homme, de paix durable et de réconciliation. La Belgique s’est dite prête à travailler sur cette question importante, avec le peuple burundais et son gouvernement, a ajouté en conclusion sa représentante.
Dans une déclaration conjointe, le Représentant du Viet Nam, qui s’exprimait également au nom de l’Indonésie, a d’entrée fait part de sa préoccupation face à la violence incessante perpétrée par les groupes armés et les terroristes dans certaines régions du Cameroun, en particulier l’Extrême-Nord, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, dans la zone d’opérations de Boko Haram et dans le bassin du lac Tchad. Les deux pays sont convaincus que la seule manière viable de parvenir à une paix durable est de s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité régionale. Pour eux, qui sont membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), la coopération régionale est la clef de la réalisation de l’aspiration commune à la stabilité et au développement.
C’est pourquoi « nos délégations sont très heureuses de constater que les pays d’Afrique centrale continuent à s’engager à renforcer leur coopération », ont déclaré l’Indonésie et le Viet Nam, saluant et soutenant pleinement les initiatives de réforme institutionnelle des États membres de la CEEAC. Ces efforts devraient bénéficier d’une assistance technique et financière de la part des partenaires internationaux et des entités des Nations unies pour aider la CEEAC et ses États membres. En conclusion, les deux délégations ont rendu hommage aux efforts déployés pour maintenir la paix et la sécurité dans la région par le BRENUAC ainsi que par tout le personnel des Nations Unies dans les différentes missions de l’ONU, dont plus 1 600 membres du personnel en uniforme sont issus des États membres de l’ASEAN.
L’Estonie a rappelé que les États d’Afrique centrale continuent de se heurter à de sérieuses difficultés politiques, économiques et sécuritaires exacerbées par la pandémie de COVID-19. Mais elle a vu des signes encourageants dans la « solide coopération régionale » visant à relever ces défis, en particulier dans la stratégie d’une CEEAC renforcée pour la riposte à la pandémie, et la coopération transfrontalière entre l’Angola et la République démocratique du Congo (RDC). Elle a souligné que les efforts de sécurité régionale incluant le partage de renseignements, la coopération entre civils et militaires et le respect des droits de l’homme sont essentiels pour combattre l’insurrection de Boko Haram.
La délégation s’est dite préoccupée par l’aggravation de la violence et des violations des droits de l’homme au Cameroun et les attaques « tragiques » visant les écoles et les écoliers, ainsi que du nombre de personnes nécessitant une aide humanitaire qui dépasse les six millions aujourd’hui. Condamnant les attaques contre les civils et le personnel humanitaire, elle a demandé que les responsabilités soient établies afin d’éviter « une culture de l’impunité ». L’Estonie a appelé toutes les parties à faire preuve de modération et à privilégier le dialogue, louant à cet égard le rôle du BRENUAC dans la médiation et le soutien à la réconciliation au Cameroun. Consciente des efforts déployés en République centrafricaine pour organiser des élections, elle a qualifié les violences des groupes armés de violation de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation, « seule voie vers une paix durable » dans ce pays. Elle a enfin souligné les effets négatifs des changements climatiques sur la situation complexe et fragile en Afrique centrale, notant que cette menace, si elle n’est pas suffisamment prise en compte, pèsera sur la paix et la sécurité internationales.
La France s’est félicitée de la mise en œuvre de la réforme institutionnelle de la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC) entrée en vigueur en août dernier. Elle intervient en complément des initiatives de coopération en Afrique centrale dans le domaine de la sécurité ou encore de la coopération transfrontalière, une dynamique qui doit être prolongée au service de la paix et du développement. Dans la région, plusieurs défis d’ordre politique, sécuritaire, humanitaire, ou relatifs aux droits de l’homme subsistent, notamment les actions terroristes menées par Boko Haram au Cameroun et au Tchad, a constaté la délégation. Son représentant a recommandé de rester également vigilant face aux activités des groupes armés en République démocratique du Congo (RDC) et en République centrafricaine, et de maintenir l’engagement contre la piraterie dans le golfe de Guinée.
La France a rappelé que la lutte contre la pandémie de COVID-19 ne justifie pas la violation des droits de l’homme. Elle a condamné les attaques contre les personnels humanitaires et médicaux, des actes qui ne doivent pas rester impunis. En outre, le soutien des partenaires internationaux est indispensable pour aider les pays d’Afrique centrale à surmonter la crise humanitaire et sanitaire. À cet égard, la France s’est engagée à verser 1,2 milliard d’euros pour soutenir l’Afrique dans la lutte contre la COVID-19. Elle a lancé une initiative dans le cadre du G20 et du Club de Paris pour un moratoire sur le service de la dette des pays touchés par la pandémie. En Afrique centrale, le Tchad, le Congo, l’Angola, la RDC et le Cameroun bénéficient de cette mesure, a-t-elle souligné. Enfin, alors que des échéances électorales approchent en République centrafricaine, au Tchad et au Congo, la France a estimé que la pleine participation des femmes comme électrices et candidates est indispensable, tout comme celle de la jeunesse, des déplacés et des réfugiés. La France continuera à soutenir les Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC), a conclu son représentant.
La République dominicaine s’est félicitée des progrès réalisés par la Communauté économique des États d’Afrique centrale, en particulier de son programme de réforme institutionnelle et sa nouvelle architecture régionale pour la paix et la sécurité, qui l’aideront à atteindre la stabilité dans la région. Elle a toutefois fait part de son inquiétude face aux conséquences de la COVID-19 sur l’organisation et le financement du processus électoral. La délégation a vu comme un signe positif la présentation d’un calendrier électoral pour 2021 par la Commission Nationale Indépendante du Tchad, soulignant l’importance de la participation des femmes et des jeunes à ce processus. Elle a rappelé qu’il est essentiel d’améliorer les relations entre les pays de la sous-région, saluant les accords conclus entre l’Angola, la République démocratique du Congo (RDC), l’Ouganda et le Rwanda pour l’élimination des groupes armés et de leurs sources de financement, ainsi que les efforts du Burundi et du Rwanda pour normaliser leurs relations bilatérales.
La République dominicaine a cependant déploré les violences survenues dans les régions Nord-Est et Sud-Est du Cameroun, « pour lesquelles la population civile paye le prix fort », et les attaques visant le personnel humanitaire. Elle a réitéré son appel au Gouvernement camerounais à trouver une solution politique, encourageant l’Envoyé spécial et les organisations régionales à intensifier ses efforts de médiation et de dialogue pour renforcer la confiance et la volonté politique nécessaires à une paix durable dans tout le pays. La délégation a dénoncé les attaques meurtrières commises au Cameroun et au Tchad par Boko Haram et l’Armée de résistance du Seigneur et leurs conséquences dévastatrices pour les femmes et les filles. Plus que jamais, a-t-elle ajouté, il est nécessaire que les groupes armés écoutent l’appel au cessez-le-feu mondial lancé plus tôt, cette année, par le Secrétaire général. La République dominicaine a aussi souligné l’effet des changements climatiques, illustré par des inondations destructrices pour les ressources alimentaires de la population, et les effets de la COVID-19 qui aggravent une situation humanitaire déjà précaire.
Pour la Fédération de Russie, il importe de prendre des mesures opportunes pour faire cesser la propagation de la pandémie de COVID-19 en Afrique centrale. La délégation a souligné que les acteurs régionaux devraient jouer un rôle majeur dans le cadre de la prévention et de la gestion des crises et des conflits. Elle a salué les efforts de la CEEAC qui a entamé une réforme institutionnelle afin de renforcer l’organisation. La région d’Afrique centrale est très importante pour la lutte contre le terrorisme. De ce fait, la Fédération de Russie s’est inquiétée de voir que le potentiel de nuisance de Boko Haram n’a pas diminué. Elle a ainsi plaidé pour un financement prévisible des forces régionales engagées dans cette lutte contre le terrorisme.
En RCA, « nous soutenons les efforts du Président Touadéra pour stabiliser la situation dans le pays », notamment en cette veille d’élections, a indiqué la délégation. Elle a rappelé l’importance de l’Accord de paix du 6 février 2019, avant de promettre qu’elle accompagnera de près le processus de réconciliation nationale. La Fédération de Russie a par ailleurs déploré l’impact de la piraterie dans le golfe de Guinée, avec des attaques contre des navires qui se poursuivent, ainsi que des prises d’otages des équipages, y compris des ressortissants russes. En ce qui concerne le Cameroun, la délégation a affirmé que « le problème anglophone trouve ses racines dans la période coloniale ». Le règlement des problèmes accumulés passe par la table des négociations, a-t-elle préconisé, avant d’appeler toutes les parties à la retenue. Enfin, la Fédération de Russie a noté que les États de la région sont interdépendants, et que l’ébranlement d’un pays peut avoir un impact sur un autre. C’est pourquoi « il faut éviter d’interférer dans les affaires intérieures de ces États ».
L’Allemagne a loué le travail accompli par le BRENUAC. Compte tenu des échéances électorales à venir dans les pays de la région, il doit selon elle poursuivre sa coopération et ses bons offices, y compris avec la CEEAC. La délégation s’est également dite préoccupée par les allégations faisant état de violations des droits de l’homme par les forces de sécurité de certains pays de la région, ce qui n’est pas acceptable. La situation dans les régions anglophones du Cameroun est alarmante, a considéré l’Allemagne, en estimant qu’il n’existe pas de solution militaire à ce conflit. Il n’y aura pas de paix durable sans un dialogue politique entre le Gouvernement et les séparatistes, a assuré la délégation, qui a précisé que Berlin appuie les efforts déployés par la Suisse pour parvenir à ce résultat. Selon le représentant, les conclusions du dialogue national organisé par les autorités sont insuffisantes. Le Gouvernement camerounais doit prendre des mesures « plus concrètes », a conclu le représentant, en condamnant aussi les attaques lancées contre les représentations diplomatiques sur son territoire.