En cours au Siège de l'ONU

SC/14276

Déclaration publique du Président du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés 

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés a décidé, à l’occasion de l’examen du quatrième rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants dans le contexte du conflit armé en Colombie (S/2019/1017), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de son président, le message suivant : 

À toutes les parties au conflit armé en Colombie

  • Se félicite de la signature de l’Accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et durable (ci-après l’« accord de paix ») entre le Gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC-EP) à Bogota le 24 novembre 2016, à la suite de quoi les FARC-EP se sont reconverties en parti politique, ont cessé d’exister comme groupe armé, ont libéré les enfants qui se trouvaient dans leurs rangs et ont été radiées pour avoir cessé tout recrutement et toute utilisation d’enfants (A/72/865-S/2018/465); se réjouit en particulier des dispositions relatives à la réintégration des enfants et à l’intégration de la protection des enfants dans l’ensemble de l’accord, et encourage la poursuite de leur application intégrale;
     
  • Constate avec satisfaction que l’accord de paix fixe comme principes directeurs l’intérêt supérieur de l’enfant, la nécessité de traiter les enfants séparés des groupes armés comme des victimes et la réintégration dans la famille et la communauté, compte que l’accord continuera d’être intégralement appliqué et de servir de modèle en matière de protection des enfants et de prise en compte de leurs opinions dans le cadre d’autres processus de paix;
     
  • Salue les efforts faits par le Gouvernement pour mettre au point des solutions négociées au conflit armé avec les autres groupes armés, regrette que plusieurs cessez-le-feu temporaires aient été rompus par l’ELN, note que ce groupe a annoncé un cessez-le-feu unilatéral actif d’un mois à partir du 1er avril 2020 en réponse à l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’un cessez-le-feu mondial afin de se concentrer sur la lutte contre la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), constate que ce cessez-le-feu a été bien respecté tout en regrettant son absence de prolongation, appelle à intégrer à un stade précoce les dispositions relatives à la protection de l’enfance, notamment celles qui concernent la libération et la réintégration des enfants, ainsi que les dispositions relatives aux droits et au bien-être des enfants, dans tous les pourparlers de paix, les accords de cessez-le-feu ou de paix et dans les mesures de surveillance du cessez-le-feu, en tenant compte, dans la mesure du possible, dans ces processus, des vues des enfants, et engage tous les acteurs participant aux processus de paix et de médiation à faire autant que possible usage, dans ces processus, des orientations pratiques à l’intention des médiateurs aux fins de la protection des enfants en temps de conflit armé (S/2020/114);
     
  • Se félicite de la diminution globale du nombre de violations et d’atteintes commises contre les enfants au cours de la période considérée, confirmée par l’équipe spéciale de surveillance et d’information, et note le lien de causalité direct établi par le Secrétaire général dans son rapport entre cette baisse et la signature de l’accord de paix et la démobilisation ultérieure du principal groupe armé du pays;
     
  • Se déclare toutefois gravement préoccupé par l’expansion, au cours de la période considérée, de la présence territoriale de groupes armés, y compris de l’ELN et de groupes dissidents des FARC-EP, et par la poursuite des déplacements d’enfants ainsi que des violations et atteintes commises à leur encontre;
     
  • Les prie de continuer à donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants dans le conflit armé en Colombie (S/AC.51/2010/3, S/AC.51/2012/4 et S/AC.51/2017/1);

À tous les groupes armés parties au conflit en Colombie, en particulier à l’Armée de libération nationale (ELN), mentionnés dans le rapport du Secrétaire général

  • Se déclare gravement préoccupé par les violations et atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants par les groupes armés en Colombie, condamne ces actes avec la plus grande vigueur, exhorte ces groupes à prévenir et à faire cesser immédiatement toutes les violations du droit international applicable concernant le recrutement et l’utilisation d’enfants, les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique, les viols et autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, les attaques dirigées contre les écoles et les hôpitaux et les refus d’accès humanitaire, et à s’acquitter des obligations que leur impose le droit international;
     
  • Se déclare profondément préoccupé par la persistance et l’ampleur du recrutement et de l’utilisation d’enfants, notamment d’enfants des communautés autochtones et afro-colombiennes et d’enfants réfugiés et migrants, condamne ces pratiques, et exhorte tous les groupes armés à prévenir et à faire cesser tout recrutement et toute utilisation d’enfants de moins de 18 ans et à libérer immédiatement et sans condition préalable tous les enfants présents dans leurs rangs;
     
  • Se déclare profondément préoccupé par le nombre d’enfants tués et mutilés, notamment à la suite de tirs croisés, d’attaques aveugles, d’attaques les visant directement et de bombardements, ainsi que d’accidents causés par des mines antipersonnel, des munitions non explosées et des engins explosifs improvisés, et exhorte tous les groupes armés à mettre un terme aux meurtres et aux mutilations d’enfants, à mettre fin immédiatement et définitivement à l’utilisation aveugle de dispositifs d’explosion et à détruire tout dispositif de ce type se trouvant encore dans leur arsenal;
     
  • Se déclare gravement préoccupé par les viols et autres formes de violence sexuelle commis contre les enfants, condamne ces actes avec la plus grande vigueur, et demande instamment à tous les groupes armés de prendre immédiatement des mesures spéciales pour prévenir et faire cesser la commission de viols et d’autres formes de violence sexuelle contre les enfants;
     
  • Condamne vigoureusement les enlèvements d’enfants et exhorte tous les groupes armés à mettre un terme aux enlèvements d’enfants et à libérer immédiatement et sans condition préalable tous les enfants enlevés;
     
  • Condamne vigoureusement les attaques dirigées contre les écoles et les hôpitaux, et demande à tous les groupes armés de respecter le caractère civil des établissements scolaires et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et faire cesser les attaques ou menaces d’attaque contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et d’hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international applicable; prend note à cet égard de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles;
     
  • Condamne vigoureusement les refus d’accès humanitaire et demande instamment à tous les groupes armés de permettre et de faciliter l’acheminement rapide, sans entrave et en toute sécurité de l’aide humanitaire aux enfants, dans le respect des principes humanitaires d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’indépendance, de respecter le caractère exclusivement humanitaire et impartial de l’aide ainsi que le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans discrimination;

Au Gouvernement colombien

  • Se félicite que le Gouvernement ait renouvelé son engagement en faveur de la mise en œuvre de l’accord de paix et l’exhorte à poursuivre la tâche essentielle qui consiste à assurer la poursuite de son application intégrale dans les territoires, l’objectif étant de garantir une paix durable et de mettre fin aux violations et atteintes commises contre les enfants;
     
  • Se réjouit des progrès réalisés par le Gouvernement dans la prévention et la répression des violations et atteintes commises contre les enfants, notamment grâce au programme de prévention « Mi futuro es hoy »; encourage le Gouvernement à continuer de donner la priorité à la mise en œuvre de ce programme et d’autres activités de prévention, notamment en allouant des ressources suffisantes et en désignant des institutions et en procédant à une évaluation complète des progrès accomplis et des difficultés rencontrées, en vue d’améliorer la prévention de nouveaux cas de recrutement et d’utilisation d’enfants, dans le respect des Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (« Principes de Paris ») approuvés par le Gouvernement;
     
  • Se félicite de l’adoption du décret no 1434, qui articule une politique publique visant à prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants et la perpétration de violences sexuelles contre les enfants par des groupes armés non étatiques et par les groupes criminels organisés, et demande au Gouvernement et aux autorités locales de concevoir et de mettre en œuvre les plans d’application correspondants et à y consacrer des ressources suffisantes; encourage le renforcement des institutions et des programmes qui empêchent le recrutement d’enfants tout en accordant une attention particulière aux enfants migrants et réfugiés, notamment non accompagnés;
     
  • Exhorte le Gouvernement à prendre des mesures supplémentaires pour protéger les enfants pendant les opérations militaires, notamment en respectant les principes de discrimination et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions pratiquement possibles, et à se conformer aux obligations que leur impose le droit international humanitaire lors des affrontements armés dans les zones où se trouvent des civils et des enfants; et encourage le Gouvernement à poursuivre ses activités de sensibilisation aux dangers des mines et à renforcer les activités de déminage, notamment par une coordination accrue et des opérations de déminage dans les régions touchées;
     
  • Exhorte le Gouvernement à accorder la priorité à la prévention du viol et d’autres formes de violence sexuelle contre les enfants, y compris la traite à des fins d’exploitation sexuelle, à veiller à ce que des programmes adaptés, des services spécialisés et des voies de signalement soient mis en place et accessibles aux victimes de viols et d’autres formes de violence sexuelle commis contre elles lorsqu’elles étaient enfants, et à enquêter sur les faits de viol et d’autres formes de violence sexuelle contre les enfants, y compris la traite à des fins d’exploitation sexuelle, et, s’il y a lieu, à en poursuivre et condamner les auteurs;
     
  • Demande au Gouvernement de poursuivre l’action menée pour mettre en œuvre l’accord de paix, notamment en assurant la mise en œuvre effective, le suivi et l’évaluation du programme « Un autre chemin de vie » en faveur de la réintégration des enfants qui ont quitté les rangs des FARC-EP, y compris par une approche familiale et communautaire, tout en tenant compte des besoins particuliers des garçons et des filles ainsi que de l’âge et de l’appartenance ethnique, et en prévoyant des mesures de protection spéciales pour les bénéficiaires du programme ainsi que pour les enfants nés d’anciens membres des FARC-EP (rapport du Secrétaire général, par. 46 à 53 et 72);
     
  • Encourage le Gouvernement à poursuivre sa coopération constructive avec l’Organisation des Nations Unies et en particulier avec l’équipe spéciale de surveillance et d’information ainsi qu’avec la Représentante spéciale du Secrétaire général pour la question des enfants et des conflits armés et l’UNICEF;
     
  • Souligne qu’il importe de réprimer toutes les violations et atteintes commises contre des enfants en temps de conflit armé, et demande au Gouvernement de veiller à ce que tous les responsables de violations et d’atteintes de ce type soient traduits en justice pour y répondre de leurs actes sans retard excessif, notamment par la conduite d’enquêtes approfondies, indépendantes, diligentes et systématiques et, s’il y a lieu, par l’ouverture de poursuites judiciaires et l’établissement de la culpabilité des auteurs; se félicite à cet égard de l’ouverture par la Juridiction spéciale pour la paix de l’affaire no 007, qui porte sur les faits de recrutement et d’utilisation de filles et de garçons entre le 1er janvier 1971 et le 1er décembre 2016;
     
  • Exhorte le Gouvernement à répondre pleinement, dans le cadre du Système intégré pour la vérité, la justice, la réparation et la non-répétition, aux besoins de protection particuliers des enfants témoins et victimes, y compris ceux des enfants susceptibles d’avoir été associés à des groupes armés, notamment au moyen d’un processus de justice réparatrice et de réinsertion sociale, l’intérêt supérieur des enfants étant une considération primordiale;
     
  • Salue les efforts faits dans le cadre du Système intégré pour la vérité, la justice, la réparation et la non-répétition pour assurer la participation des enfants, et exhorte le Gouvernement à renforcer les institutions composant le Système, à offrir une réponse adéquate et individualisée aux victimes, et à inscrire les enfants victimes au registre des victimes pour leur permettre d’avoir accès à une assistance et aux réparations;
     
  • Compte tenu des liens entre le déplacement et les violations et atteintes commises contre les enfants, demande au Gouvernement de renforcer ses programmes et ses dispositifs institutionnels relatifs à la réinstallation et au retour des populations déplacées et de faciliter l’accès de ces dernières aux services de base, notamment à l’éducation et à la santé;
     
  • Se déclare préoccupé par les activités civilo-militaires que les Forces armées colombiennes mènent dans les zones où les groupes armés sont présents, lesquelles exposent les enfants à un risque de représailles et à celui d’être utilisés pour des activités de renseignement; et demande au Gouvernement de s’abstenir d’organiser de telles activités avec les enfants;

Aux notables locaux et aux chefs religieux

  • Souligne la contribution importante des notables locaux et des chefs religieux au renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;
     
  • Les exhorte à renforcer la protection au niveau local et à condamner publiquement les violations et les atteintes commises contre des enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le meurtre et les atteintes à l’intégrité physique, le viol et les autres formes de violence sexuelle, les attaques et les menaces d’attaques dirigées contre des établissements scolaires et hospitaliers, les enlèvements et le refus de l’accès humanitaire, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour appuyer la réintégration et la réadaptation, dans leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.
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