SC/14158

Déclaration publique du Président du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé

Le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé, à l’occasion de l’examen du deuxième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé au Yémen (S/2019/453), est convenu d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de son Président, le message qui suit:

Le Groupe de travail est convenu d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de son président, le message qui suit à toutes les parties au conflit armé au Yémen, qui sont mentionnées dans le rapport du Secrétaire général, en particulier aux groupes armés non étatiques, tels que les houthistes, Al-Qaida dans la péninsule arabique/Ansar el-Charia, aux milices progouvernementales, y compris les salafistes et les comités populaires, ainsi que les Forces de la Ceinture de sécurité, aux forces gouvernementales, notamment aux forces armées yéménites, et à la Coalition en appui à la légitimité au Yémen.  Le Groupe:

  • Se déclare vivement préoccupé par l’ampleur, la gravité et la récurrence des violations et des exactions commises contre des enfants au Yémen, condamne fermement toutes les violations et exactions qui continuent d’être commises contre des enfants au Yémen et prie instamment toutes les parties au conflit de prévenir et de faire cesser immédiatement toutes les violations du droit international applicable concernant le recrutement et l’utilisation d’enfants, les enlèvements, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques lancées contre des établissements scolaires et hospitaliers et le refus de l’accès humanitaire, et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international;
  • Souligne l’importance de l’application du principe de responsabilité à toutes les formes de violation et d’exaction dont sont victimes les enfants touchés par des conflits armés; insiste sur le fait que tous les responsables doivent être traduits en justice pour répondre de leurs actes sans retard indu, notamment dans le cadre d’enquêtes systématiques et diligentes et, s’il y a lieu, de poursuites judiciaires et de condamnations;
  • Se déclare vivement préoccupé par le grand nombre de cas confirmés de recrutement et d’utilisation d’enfants, essentiellement par les houthistes, en violation du droit international; exhorte toutes les forces et tous les groupes armés à libérer immédiatement tous les enfants qui leur sont associés et à faire cesser et prévenir les recrutements et l’utilisation d’enfants, conformément aux obligations que leur impose le droit international, notamment le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et la Déclaration faite par le Yémen lors de son adhésion à celui-ci en 2007; constate avec préoccupation que des enfants sont privés de liberté par des acteurs tant étatiques que non étatiques au motif qu’ils sont soupçonnés d’être associés à des forces armées et à des groupes armés, et exhorte toutes les parties au conflit à les relâcher et à faire en sorte qu’ils réintègrent la société grâce à des programmes de protection de l’enfance; demande instamment que les enfants qui seraient associés à des parties au conflit soient traités avant tout comme des victimes, et que la détention ne soit utilisée qu’en dernier recours et pour une période aussi courte que possible, conformément au droit international et en s’appuyant sur les Principes directeurs relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés (« Principes de Paris ») approuvés par le Gouvernement yéménite en décembre 2012;
  • Exprime sa profonde préoccupation face au nombre alarmant d’enfants tués et d’enfants ayant subi des atteintes à leur intégrité physique notamment à l’occasion de frappes aériennes, dans des combats terrestres, notamment du fait de tirs d’armes de petit calibre, dans des bombardements, fréquents dans les zones densément peuplées, du fait de mines et d’engins non explosés, et lors d’attentats-suicides; engage vivement toutes les parties à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier les principes de discrimination et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter ou, en tout état de cause, réduire au minimum les dommages causés aux civils et aux biens de caractère civil;
  • Se déclare vivement préoccupé par le nombre élevé d’enfants tués et d’enfants ayant subi des atteintes à leur intégrité physique du fait de mines, d’engins non explosés et de restes explosifs de guerre, et demande instamment à toutes les parties au conflit armé de prendre des mesures pour prévenir et réduire ces meurtres et atteintes à l’intégrité physique, notamment en accordant la priorité à l’enlèvement des mines, engins non explosés et autres explosifs, ainsi qu’aux activités de sensibilisation aux dangers des mines et d’atténuation des risques;
  • Se déclare vivement préoccupé par les cas de viol et d’autres formes de violence sexuelle perpétrés contre des enfants et par l’absence de services appropriés pour les victimes; constate avec préoccupation une augmentation du nombre de mariages précoces de filles; exhorte toutes les parties au conflit armé à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants; souligne qu’il importe que les responsables de violences sexuelles et de violences fondées sur le genre commises contre des enfants répondent de leurs actes;
  • Condamne fermement les attaques commises contre des établissements scolaires et des hôpitaux en violation du droit international; demande à toutes les parties au conflit armé de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des établissements scolaires et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de prévenir et faire cesser les attaques ou menaces d’attaques disproportionnées ou menées sans discrimination contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et d’hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international applicable; à cet égard, note que le Gouvernement yéménite a approuvé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles en octobre 2017, et souligne qu’il importe que les auteurs des attaques perpétrées contre de tels établissements en violation du droit international répondent de leurs actes;
  • Condamne fermement l’enlèvement d’enfants, notamment aux fins de leur recrutement et de leur utilisation, ainsi que les autres formes d’exploitation et le recours aux rançons; demande à toutes les parties concernées de mettre un terme à l’enlèvement d’enfants et de libérer immédiatement tous les enfants enlevés;
  • Se déclare vivement préoccupé par la crise humanitaire qui sévit au Yémen; condamne fermement les nombreux cas de refus d’accès humanitaire aux enfants, notamment le refus d’aide humanitaire et les attaques contre le personnel, les installations et les biens humanitaires; demande à toutes les parties au conflit armé, en particulier aux houthistes, de permettre et de faciliter un accès sûr, rapide et sans entrave aux enfants, conformément aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire, de respecter la nature exclusivement humanitaire et impartiale de l’aide humanitaire et de respecter également les activités de tous les organismes humanitaires des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires, sans discrimination;
  • Demande à toutes les parties qui ne l’ont pas encore fait de renforcer leur dialogue avec l’Organisation des Nations Unies en vue d’élaborer et d’adopter des instructions permanentes en faveur de la libération et de la réintégration des enfants associés aux parties au conflit, et d’accorder un accès immédiat aux acteurs civils de la protection de l’enfance pour faciliter la libération et la réintégration de ces enfants dans la société; souligne que la réintégration dans leur famille et dans la société des enfants qui étaient associés à des parties au conflit est essentielle pour leur garantir un avenir, ainsi qu’à leur famille, et pour prévenir les risques de ré-enrôlement en violation du droit international; note à cet égard les efforts entrepris par le Gouvernement yéménite et la Coalition en appui à la légitimité au Yémen pour réunir avec leur famille les enfants ayant été associés aux groupes armés;

Au Gouvernement yéménite

  • Le Groupe se félicite de la signature, le 18 décembre 2018, d’une feuille de route visant à relancer l’application du plan d’action signé par le Gouvernement yéménite le 14 mai 2014 pour faire cesser et prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants par ses forces; se félicite de l’émission, en mars 2018, d’un ordre dans lequel le commandant en chef adjoint des Forces armées yéménites a rappelé que l’enrôlement et l’utilisation d’enfants par les forces gouvernementales étaient interdits et demandé que toute violation soit signalée immédiatement; se félicite également de l’adoption par le Gouvernement yéménite, en octobre 2017, de la Déclaration sur la sécurité dans les écoles; exhorte le Gouvernement à mettre en œuvre immédiatement cette feuille de route en collaboration avec l’ONU, à arrêter de recruter et d’utiliser des enfants, à prévenir ces pratiques, à libérer immédiatement tous les enfants présents dans ses rangs et à accorder la priorité à la mise en place de mécanismes efficaces d’évaluation de l’âge des recrues; prie le Gouvernement de continuer à donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé au Yémen (S/AC.51/2013/3);

      À la Coalition

  • Le Groupe se félicite de la signature, le 25 mars 2019, entre l’Organisation des Nations Unies et la Coalition en appui à la légitimité au Yémen d’un mémorandum d’accord visant à renforcer la protection des enfants touchés par le conflit armé dans le pays; se félicite de ce que la Coalition ait élaboré, avec l’Organisation, un programme d’activités assorties de délais sur la base de ce mémorandum d’accord et l’exhorte à le mettre en œuvre; demande à la Coalition de prendre toutes les mesures nécessaires pour s’acquitter des obligations que lui impose le droit international; demande au Yémen et à la Coalition de veiller à ce que toutes les violations ou allégations de violation attribuées à la Coalition fassent l’objet d’une enquête en bonne et due forme, conformément au droit international, afin que les responsables soient amenés à répondre de leurs actes;

Aux houthistes

  • Le Groupe exprime sa vive préoccupation et condamne fermement toutes les violations et exactions que les houthistes continuent de commettre contre des enfants au Yémen; exprime sa déception face au fait que les houthistes refusent de collaborer véritablement avec l’Organisation des Nations Unies au Yémen concernant la protection des enfants touchés par le conflit armé; exhorte les houthistes à prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour s’acquitter des obligations que leur impose le droit international, à renforcer leur dialogue permanent avec l’Organisation au Yémen et à élaborer et adopter un plan d’action pour mettre fin aux six violations graves commises contre des enfants et les prévenir; leur demande de donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé au Yémen (S/AC.51/2013/3);

Aux autres parties mentionnées

  • Le Groupe demande à toutes les autres parties au conflit mentionnées dans les annexes du rapport annuel du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé, si elles ne l’ont pas encore fait, de signer et d’appliquer en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies un plan d’action visant à mettre fin aux six violations graves commises contre des enfants et à les prévenir, et d’engager à cet effet un dialogue avec l’Organisation; leur demande également de donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé au Yémen (S/AC.51/2013/3);

À toutes les parties concernées

  • Le Groupe encourage ceux qui sont ou seront engagés dans des pourparlers et des accords de paix à veiller à ce que des dispositions relatives à la protection de l’enfance, notamment à la libération et la réintégration d’enfants précédemment associés à des forces armées ou groupes armés, ainsi qu’aux droits et au bien-être des enfants, soient intégrées dans toutes les négociations de paix, dans tous les accords de cessez-le-feu et de paix et dans les dispositions relatives au contrôle du cessez-le-feu, et à ce que l’avis des enfants soit pris en compte à cette occasion, dans la mesure du possible;
  • Demande aux États Membres, aux entités des Nations Unies, notamment à la Commission de consolidation de la paix, et aux autres parties concernées de faire en sorte qu’une place soit faite à la protection, aux droits, au bien-être et à l’autonomisation des enfants touchés par le conflit armé et que la priorité leur soit accordée dans les plans, les programmes et les stratégies de relèvement et de reconstruction après le conflit, ainsi que dans les efforts faits pour consolider et pérenniser la paix, et d’encourager et faciliter la prise en compte de leurs vues à cette occasion;
  • Exprime sa préoccupation face aux problèmes de sécurité et d’accès, entre autres, auxquels se heurte le personnel du mécanisme de surveillance et de communication de l’information sur les violations graves commises contre des enfants en situation de conflit armé; exige des parties au conflit qu’elles fassent le nécessaire pour aider ce personnel à accéder en sûreté et sans entrave aux territoires à des fins de surveillance et d’information et cessent immédiatement de menacer les observateurs du mécanisme et la population locale dans les lieux où les allégations de violations et d’atteintes sont examinées;

Aux notables locaux et aux chefs religieux 

  • Le Groupe souligne la contribution importante des notables locaux et des chefs religieux au renforcement de la protection des enfants touchés par le conflit armé;
  • Les exhorte à renforcer cette protection au niveau local et à condamner publiquement les violations et les exactions commises contre des enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le meurtre et les atteintes à l’intégrité physique, le viol et les autres formes de violence sexuelle, les attaques et les menaces d’attaques visant des établissements scolaires et hospitaliers, les enlèvements et le refus d’accès humanitaire, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour contribuer à la réintégration et à la réadaptation, dans leur communauté, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.                                      
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