En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/19671-SC/13889

La transition d’une opération de maintien de la paix à un processus de consolidation des acquis est un moment d’espoir, de potentiel et de promesse

On trouvera, ci-après, le texte de l’allocution du Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres, prononcée lors de la séance du Conseil de sécurité consacrée au renforcement des partenariats facilitant le déroulement des transitions dirigées par les pays, à New York, aujourd’hui:

Les missions politiques spéciales et les opérations de maintien de la paix des Nations Unies comptent parmi les outils les plus efficaces dont nous disposons pour promouvoir et maintenir la paix et la sécurité internationales, mais elles sont temporaires.  Nous sommes en train de concentrer nos efforts sur les périodes de transition, lorsque nos missions sont reconfigurées ou qu’elles quittent le pays. 

Un processus de transition est généralement le résultat d’une avancée vers la paix.  C’est un moment d’espoir, de possibilité et de promesse – une occasion de nous réengager et de redynamiser notre engagement, le moment d’aider les gouvernements eux-mêmes à promouvoir des politiques et des programmes qui s’attaquent aux causes profondes des crises et des conflits et de mettre le Programme de développement durable à l’horizon 2030 au centre de nos efforts.

Mais les processus de transition des missions posent aussi des risques.  Il se peut que la communauté internationale accorde moins d’attention au pays concerné.  Les gains stratégiques obtenus durant des décennies de soutien international ne tiennent qu’à un fil et les pertes en vies humaines, la dévastation économique et la perte des gains en matière de développement dues au retour au conflit peuvent aller bien au-delà des frontières du pays.  Il nous faut apprendre des exemples précédents, notamment ceux de Timor-leste et de la Côte d’Ivoire, qui fournissent d’importants enseignements sur le partenariat et la continuité. 

Des transitions dirigées par les pays et tournées vers l’avenir sont donc une priorité pour l’ensemble du système des Nations Unies.  Alors qu’elles assument des responsabilités accrues s’agissant des tâches de sécurité et de consolidation de la paix, les autorités nationales et les communautés ont besoin d’un appui continu de la part d’équipes de pays des Nations Unies et de partenaires multilatéraux et bilatéraux revigorés afin que leur engagement dans la voie de la paix durable et du développement soit irréversible.  Il nous faut privilégier et renforcer les partenariats avec les parties prenantes nationales à l’échelle du système des Nations Unies et avec les institutions financières internationales et les États Membres aux fins d’une action collective visant à garantir leur succès.

L’ONU doit jouer un rôle global et cohérent dans les processus de transition et travailler d’une façon intégrée pour lutter contre les moteurs du conflit, qui sont interdépendants et sont souvent tenaces: la pauvreté, la marginalisation, les inégalités, la discrimination et les violations des droits de la personne, exacerbées par les changements climatiques et les mouvements de population.  Notre processus de réforme en cours favorise un plus grand engagement collectif en appui aux efforts nationaux tout au long de continuum de paix – du déploiement d’une mission de maintien de la paix ou politique à son retrait ou à sa reconfiguration.

Mais l’ONU ne peut pas gérer -et ne gère pas- seule la transition d’une opération de paix.  Nombre d’autres institutions et de groupes sont impliqués.  Comme je l’ai dit tout à l’heure, ce sont les gouvernements qui sont les partenaires les plus importants, mais les bailleurs de fonds, les organisations internationales et régionales, les institutions financières, la société civile, les institutions locales et la communauté d’affaires jouent tous un rôle essentiel.  L’ONU peut apporter une importante valeur ajoutée en formulant des idées et en ralliant l’expertise et les ressources de différents secteurs autour de priorités nationales définies par le pays. 

La nature évolutive de notre soutien accroît notre responsabilité de collaborer, de communiquer et de participer à un effort collectif où chacun a un rôle à jouer et a intérêt à ce qu’il aboutisse.  Je me félicite de la présence de représentants de la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement ici aujourd’hui.  Ces deux institutions ont été des partenaires extrêmement précieux dans nombre de processus de transition que nous avons observés. 

Des partenariats solides entre l’ONU et d’autres organisations, notamment des organisations régionales et sous-régionales et des institutions financières internationales, peuvent aider à éviter une baisse brusque de soutien tandis que notre présence est reconfigurée.  Nous avons déjà des modèles réussis qui peuvent éclairer les processus de transition.  Par exemple, en 2016, l’ONU, la Banque mondiale et l’Union européenne ont aidé le Gouvernement de la République centrafricaine à élaborer un plan national de relèvement et de consolidation de la paix, et les bailleurs de fonds ont annoncé des contributions de 2,2 milliards de dollars pour le mettre en œuvre.

La Commission de consolidation de la paix, dont le Président est avec nous aujourd’hui, a un pouvoir rassembleur et un rôle consultatif, et elle s’est également révélée être un outil efficace pour renforcer la cohérence entre les parties prenantes et veiller à ce que la communauté internationale accorde une attention continue aux besoins à long terme.  Le chapitre « transition » du Fonds pour la consolidation de la paix couvre maintenant deux années avant le retrait d’une mission et cinq années après.  J’encourage tous les États Membres à contribuer à cette importante ressource et à renforcer sensiblement sa capacité.

Plus tôt cette année, j’ai fait de la transition une priorité de l’Organisation et accordé une attention particulière aux contextes de transition dans plusieurs pays.  L’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et l’équipe de pays ont travaillé avec le Gouvernement sur une stratégie de transition globale.  Cette année, la MINUAD a dégagé 32 millions de dollars sur son budget à des activités conjointes avec l’équipe de pays des Nations Unies dans des domaines prioritaires, notamment l’état de droit, les droits de la personne, et des solutions durables pour les personnes déplacées, en coordination étroite avec le Gouvernement.

En Haïti, les piliers paix et développement des Nations Unies ont formulé une approche commune pour appuyer les institutions chargées de l’état de droit et de la gouvernance depuis la création de la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti en 2017.  L’équipe de pays met la dernière main à un ensemble de projets dans des domaines prioritaires identifiés par le Gouvernement haïtien, dont certains seront financés pour la première fois en Haïti par le Fonds pour la consolidation de la paix.  De concert avec l’Union européenne, nous avons, ces trois dernières années, fourni un financement de 12 millions de dollars, dans le cadre de l’Initiative Spotlight, pour lutter contre la violence fondée sur le genre.

En Colombie, nous avons répondu à la demande du Gouvernement d’appuyer le processus de paix avec deux missions politiques successives, travaillant en étroite collaboration avec notre équipe de pays.  Je salue aussi les initiatives en cours ici au Siège pour fournir un appui plus global.  Par exemple, le Département des opérations de paix et ONU-Femmes ont lancé une initiative conjointe sur les analyses des conflits tenant compte des questions de genre qui permet à notre Bureau intégré en Haïti d’assurer une planification reposant sur une bonne connaissance des risques.

Les pays qui se relèvent d’un conflit peuvent avoir à faire face à des défis urgents et complexes, notamment le désarmement et la réforme du secteur de la sécurité, les processus de réconciliation et de responsabilisation, et la corruption.  Ces pays ont besoin d’un soutien multiforme aux fins d’un leadership politique, d’institutions fortes et inclusives, de l’état de droit, des droits de l’homme, de l’égalité des sexes et du développement durable pour s’attaquer aux causes profondes du conflit.  La justice transitionnelle et l’établissement des responsabilités pour les crimes graves et les atteintes aux droits de la personne sont essentiels pour instaurer une paix durable.  Nous sommes déterminés à promouvoir les quatre piliers de la justice transitionnelle: la vérité, afin de reconnaître les crimes commis; la justice, afin que les responsables aient à en répondre; les réparations, afin que les victimes et les communautés soient compensées pour les torts subis; et enfin et surtout, la mise en place de réformes, afin que les atrocités et les crimes graves ne se reproduisent jamais.

Le Plan-cadre de coopération des Nations Unies pour le développement durable est un outil central pour l’appui multilatéral sous la direction d’un système des coordonnateurs résidents renforcé et autonome.  Nos bureaux politiques régionaux aident aussi les coordonnateurs résidents et les équipes de pays des Nations Unies à consolider les gains engrangés en matière de consolidation de la paix dans la phase faisant suite au retrait de la mission.  Ainsi, les bons offices du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel ont été essentiels pour faire face à la crise politique au Libéria à la suite des élections présidentielles de 2017.

Tenir les promesses du Programme de développement durable à l’horizon 2030, c’est tenir celles faites à ceux qui ont été les plus oubliés – les populations des pays en proie à des conflits et des crises.  L’ONU est fermement résolue à aider les pays qui s’efforcent de se redresser après un conflit et de réaliser leurs aspirations à la paix, à la stabilité et à un avenir meilleur.  Nous continuerons de renforcer les partenariats afin d’améliorer la cohérence et d’accroître la responsabilisation dans l’ensemble des activités de paix.

En contrepartie, j’exhorte chacun d’entre nous à se tenir aux côtés des pays dans lesquels les missions des Nations Unies traversent une phase de transition afin de leur permettre de mettre en œuvre le Programme 2030 et de contribuer à la pérennisation de la paix pour le bien des populations que nous servons.

 

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