Session de 2018,
22e et 23e séances – matin & après-midi
ECOSOC/6911

ECOSOC: Amman, Medellín, New York, trois villes, trois stratégies pour résoudre les problèmes en matière de résilience

Le segment du Conseil économique et social (ECOSOC) sur l’intégration a mené, au cours de cette deuxième journée de travaux, trois tables rondes pour cerner les problèmes en matière d’infrastructures et de résilience, en particulier en milieu urbain.  Deux maires et un responsable municipal de trois grandes villes -Amman, Medellín et New York– avaient fait le déplacement pour présenter leurs stratégies visant l’équilibre entre le développement d’infrastructures et la durabilité.  

Dans son rapport* intitulé « Adaptation et établissements humains: les principaux résultats et les perspectives », le secrétariat du Programme de travail de Nairobi sur les incidences des changements climatiques et la vulnérabilité et l’adaptation à ces changements indique que « l’adaptation est davantage qu’une protection physique contre les risques climatiques; c’est un processus de planification et de mise en œuvre dynamique, itératif, intersectoriel et évolutif qui demande un appui politique, institutionnel et financier, ainsi qu’une évolution sur le plan des comportements ».

Les trois villes prises en exemple ont été amenées à adopter des plans visant à renforcer leur résilience pour faire face à des problèmes différents (poids des migrations, taux élevé de violence, évènements climatiques extrêmes), mais elles ont en commun une volonté d’œuvrer en partenariat avec le secteur privé pour intégrer les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Le secteur du transport et les énergies renouvelables ont aussi été au centre de leurs efforts.

Amman, la capitale de la Jordanie, voit ses infrastructures mises sous pression à cause de migrations successives depuis 1948, notamment en 1974 et en 2011, a indiqué son maire, M. Youssef Al-Shawaarbeh.  La solution trouvée en l’espèce est un partenariat avec la Fondation Rockefeller, avec laquelle une stratégie à trois volets de transport public a été élaborée.  Elle couvre un plan à court terme visant à augmenter l’offre, un plan de création du premier réseau de bus public qui sera réalisé d’ici à 2020, et un plan stratégique plus large visant à intégrer les zones éloignées.

Medellín, la ville colombienne qui a vu passer le taux d’homicides de 361 à 23 pour 100 000 habitants entre 2011 et 2017, doit son salut à l’intégration des 17 objectifs de développement durable et ses 169 cibles dans son plan local de développement, a expliqué le maire, M. Federico Gutierrez.  Il a mis cette réussite sur le compte du partenariat public-privé et de la résilience de « la communauté citadine de Medellín qui s’est levée comme un seul homme pour se relever ».  Le modèle mis en place repose sur un réseau de transport public inclusif qui « fonctionne avec l’énergie renouvelable et qui tient compte des besoins des pauvres ».

À New York, tout a commencé en 2012 avec l’ouragan Sandy, a expliqué le responsable de la résilience de la ville.  La municipalité a consacré 20 milliards de dollars au développement d’infrastructures résilientes après les ravages de cet ouragan.  En outre, un plan ainsi qu’un guide d’intégration des objectifs de développement durable et d’alignement sur l’Accord de Paris sur les changements climatiques ont été lancés en janvier 2018.  Dans le cadre de son programme de responsabilisation, des procès sont intentés contre les entreprises consommant une trop grande quantité d’énergie fossile, a ajouté M. Daniel Zarrilli.

Le Directeur du Programme des Nations Unies pour les établissements humains à New York (ONU-Habitat), M. Christopher Williams, a jugé important d’examiner la résilience des municipalités sous des angles différents et en fonction des contextes.  Pour cela, a prôné M. Williams, il faut un outil de profilage des villes établi en collaboration avec toutes les parties prenantes.

Au niveau des outils, la science et la technologie ont été examinées en tant que facteurs de renforcement de la résilience, notamment grâce aux commissions économiques régionales de l’ECOSOC.  Ainsi, la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPAL) a mis au point une méthodologie d’analyse des vulnérabilités dans cette région, tandis que celle de l’Afrique, la CEA, a établi un système d’alerte météorologique pour prévenir et mieux gérer les sécheresses et inondations.  

Ces deux problèmes liés à la météorologie sont gérés, en Thaïlande, grâce à l’analyse des données reçues de trois centres d’observation météorologique, a indiqué le représentant du Ministère des sciences et de la technologie, M. Royol Chitradon en se félicitant que les inondations de l’an dernier n’aient ainsi duré que deux semaines, alors que les eaux avaient stagné pendant deux mois en 2011.

Enfin, plusieurs conférenciers ont relevé l’importance de l’application sur le terrain des stratégies de résilience en autonomisant le niveau local.  La technologie disponible au plan mondial, qu’elle soit numérique ou géospatiale, doit descendre jusqu’au niveau local, a plaidé la Présidente du Conseil d’administration des services des registres fonciers et de la cartographie des Pays-Bas, Mme Dorine Burmanje.  C’est selon elle un moyen imparable pour faire en sorte que les villes soient résilientes, car les informations géospatiales donnent un aperçu des réalités et aident à prendre des décisions au niveau local.

De même, le Ministre de l’environnement et du logement des Bahamas a jugé essentiel de fournir des ressources aux gouvernements locaux, notamment car les moyens de communication sont quasi inexistants dans l’archipel quand surviennent des catastrophes.

La session de l’intégration se poursuit et se termine demain, jeudi 3 mai, dès 10 heures, avec un débat sur la résilience et l’inclusion en Afrique dans le contexte du Programme 2030. 

*FCCC/SBSTA/2018/3

DÉBAT CONSACRÉ À L’INTÉGRATION

Équilibre entre le développement des infrastructures et la durabilité

Animée par M. MICHAEL SHANK, Directeur des communications de « Carbon Neutral Cities Alliance », la discussion de la table ronde a porté sur la difficulté d’établir des infrastructures durables et résilientes dans plusieurs secteurs comme les transports et les institutions publiques. 

Pour M. YOUSEF AL-SHAWAARBEH, le maire d’Amman, capitale de la Jordanie « qui a accueilli depuis 1948, puis en 1974 et depuis 2011, des milliers de réfugiés », la question est aujourd’hui de savoir si la ville peut continuer de recevoir encore plus de réfugiés.  « Toutes les infrastructures sont sous pression et nous devons trouver des solutions. »  En partenariat avec la Fondation Rockefeller, une stratégie à trois volets en matière de transport urbain a été élaborée pour la ville d’Amman, a-t-il dit: un plan à court terme visant à augmenter l’offre, un plan de création du premier réseau de bus public qui sera réalisé d’ici à 2020, et un plan stratégique plus large visant à intégrer les zones éloignées.  La participation des femmes et le déplacement des touristes sont pris en compte, a assuré le maire. 

Le Directeur du Programme des Nations Unies pour les établissements humains à New York (ONU-Habitat), M. CHRISTOPHER WILLIAMS, a souligné qu’il existe des milliers de modèles différents pour les villes.  Il a attiré l’attention en particulier sur les villes dont les plans datent d’avant 1950 et sur celles qui ont mis à jour leurs plans mais qui demandent de l’aide.  Il a fait une différence entre les villes qui n’ont pas du tout mis à jour leurs plans faute de moyens et les villes qui ont mis à jour leurs plans mais qui ont du mal à les respecter.  Il a également parlé des villes qui font face à des conflits et des déplacements de population.  Fort de ce constat, il a recommandé d’examiner la résilience des municipalités sous des angles différents et en fonction des contextes.  Pour cela, il faut un outil de profilage des villes établi en collaboration avec toutes les parties prenantes, a-t-il prôné avant de mettre en garde qu’il n’y a pas de panacée pour la résilience. 

« Quand on parle de résilience, il faut parler d’inclusion », a enchaîné Mme NANCY ODENDAAL, professeure associée à l’École d’architecture, de planification et de géomatique de l’Université du Cap (Afrique du Sud), qui a conseillé de consulter les planificateurs, « car ce sont eux qui exploitent la technologie pour assurer une plus grande inclusion et une plus grande connectivité ».  Une ville inclusive est une ville intelligente, a encore déclaré Mme Odendaal.  Pour ce qui est des infrastructures, elles doivent rendre visible ce qui invisible, a-t-elle dit.  Pour la professeure, la technologie et l’innovation doivent permettre aux gens d’améliorer les moyens de subsistance et l’espace urbain, et surtout être au service des pauvres.

Quelques principes de base ont été avancés par le Président de la cinquante et unième session de la Commission de la population et du développement (CPD), M. ION JINGA (Roumanie), qui présentait les dernières conclusions de la session: il faut une gestion durable des villes, des partenariats novateurs pour les villes et un contrôle de l’exode rural.  Il a en outre encouragé les industries à sortir des centres urbains pour s’installer dans les zones environnantes.  M. Jinga a réitéré la nécessité d’assurer un bon système d’élimination des déchets urbains et l’inclusion des femmes et des filles dans l’espace urbain, en tenant compte de leurs besoins spécifiques. 

Ces solutions sont connues, a rétorqué le Président de la cinquante-sixième session de la Commission du développement social, M. NIKULÁS PETER JOHN HANNIGAN (Islande).  « Ce dont on a vraiment besoin, c’est de la volonté politique. »  La Commission, a ajouté le représentant, a encouragé des investissements privés dans les infrastructures pour qu’elles soient véritablement des instruments d’inclusion et d’interconnectivité.  Il a aussi souligné l’importance de la crédibilité politique des responsables pour attirer les investissements, se disant préoccupé par les inégalités flagrantes dans les villes et la question du financement des infrastructures urbaines. 

Comment dès lors mobiliser la volonté politique? a relancé le Modérateur.  « Nous avons la volonté politique d’agir et nous agissons pour être résilients, a assuré le maire d’Amman, avant d’ajouter que sa ville veille à intégrer les jeunes dans les plans conçus pour créer une ville innovante.  Il a tenu à préciser que la solution valable est celle qui peut être réalisée rapidement et qui répond aux besoins des gens.  Pour ONU-Habitat, la solution se trouve dans la réforme du système des Nations Unies pour le développement, une réforme qui devra avoir des conséquences sur la question de la résilience.  Elle exige déjà que l’ONU soit plus intelligente et plus résiliente.  Enfin, pour l’experte de l’Université du Cap, la mobilisation passe par des partenariats avec le secteur privé. 

Le maire de Medellín (Colombie), M. FEDERICO GUTIERREZ, a d’emblée prévenu que « la Medellín d’aujourd’hui n’est pas la Medellín de Netflix ».  C’est une ville nouvelle, a-t-il expliqué, qui a intégré les 17 objectifs de développement durable et ses 169 cibles dans son plan de développement.  En 2011, si l’on a dénombré 361 homicides pour 100 000 habitants, le taux est tombé en 2017 à 23, le taux le plus bas en 45 ans, s’est-il félicité.  Il a mis cette réussite sur le compte du partenariat public-privé et de la résilience de « la communauté citadine de Medellín qui s’est levée comme un seul homme pour se relever ».  Le maire a présenté le modèle urbain mis en place, qui repose sur le transport, l’éducation, la santé et la culture.  Il a estimé que le transport public jouait un rôle fondamental et a vanté « un système intégré qui fonctionne avec l’énergie renouvelable et qui tient compte des besoins des pauvres », précisant: « Notre objectif est de devenir avant 2 030 la première ville 100% électrique d’Amérique latine. » 

Puis ce fut au tour du responsable de la résilience de la ville de New York, M. DANIEL ZARRILLI, de présenter les efforts de résilience de la municipalité.  « Tout a commencé en 2012 avec l’ouragan Sandy qui nous a coûté beaucoup d’argent et des vies humaines », a-t-il rappelé en indiquant que la ville avait alors décidé de consacrer 20 milliards de dollars au développement d’infrastructures résilientes.  Un plan a ainsi été lancé en janvier 2018, ainsi qu’un guide d’intégration des objectifs de développement durable et d’alignement sur l’Accord de Paris sur les changements climatiques.  En outre, dans le cadre de son programme de responsabilisation, des procès sont intentés contre les entreprises consommant une trop grande quantité d’énergie fossile, a ajouté M. Zarrilli. 

Un danger résultant des projets de villes résilientes et intelligentes a été toutefois soulevé par la responsable du Bureau de liaison de l’Union internationale des télécommunications (UIT) à New York.  Dans la mesure où ces projets reposent sur les technologies de l’information et des communications et (TIC), Mme URSULA WYNHOVEN a prévenu des risques de cybercriminalité, dont le coût s’élève à 600 milliards de dollars par an.  Ces projets sont des proies pour la cybercriminalité, a-t-elle en effet remarqué.  Mme Wynhoven a donc recommandé que les TIC prévoient ce risque et y parent dès le départ.  Elle a aussi déclaré que cette situation ne devait pas faire renoncer à utiliser les TIC pour avoir des villes résilientes et intelligentes.  Au contraire, l’accès aux TIC doit être sûr, libre, ouvert à tous, a-t-elle plaidé en faisant valoir les avantages des TIC: elles peuvent faciliter l’accès aux services financiers, la croissance économique, la transition vers la ville intelligente, et elles servent à protéger les infrastructures numériques.  À cet égard, le système de partage d’informations de l’UIT est déjà utilisé par 50 villes dans le monde, a déclaré Mme Wynhoven. 

Le cofondateur et Président-Directeur général de City Heroes Inc., M. DANIEL PONDE GANDARILLAS, a regretté que de nombreux responsables publics ne soient pas toujours au courant de l’importance de l’apport de la technologie dans la gestion urbaine.  Il a aussi dénoncé la corruption qui freine le partenariat avec le secteur privé. 

De son côté, la Présidente du Conseil d’administration des services des registres fonciers et de la cartographie (cadastre) des Pays-Bas et Coprésidente du Comité d’experts sur la gestion de l’information géospatiale à l’échelle mondiale, Mme DORINE BURMANJE, a vu un moyen imparable pour faire en sorte que les villes soient résilientes: la technologie disponible au plan mondial, non seulement sur le plan numérique mais aussi dans le domaine des informations géospatiales, doit descendre jusqu’au niveau local.  Les informations géospatiales peuvent donner un aperçu des réalités et aider à prendre des décisions, a fait valoir Mme Burmanje qui en est revenu, en conclusion, à l’exigence de mobilisation des autorités: « La volonté politique reste nécessaire pour faire du monde un bel endroit pour vivre. » 

Stratégies nationales de résilience

Plusieurs exemples de stratégies et de politiques nationales intégrées qui favorisent le développement durable et la résilience ont été fournis au cours de cette session, dans l’idée d’un partage d’expériences et de meilleures pratiques.

Le développement durable devant prendre pied dans les communautés, l’animateur de cette session, M. DOMINIC ALLEN, a insisté sur l’importance de la participation des populations qui peuvent apporter leur contribution de manière bénévole.  Le Chef du Bureau de New York des Volontaires des Nations Unies (VNU) a d’ailleurs rappelé que 109 millions de volontaires sont à pied d’œuvre à travers le monde.  En juillet prochain, un rapport sera présenté au Forum politique de haut niveau pour le développement durable, placé sous les auspices de l’ECOSOC, afin d’étudier comment les communautés peuvent contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable.

Aux Pays-Bas, les communautés participent déjà à l’approche gouvernementale de renforcement de la résilience qui se base sur les « cinq C ».  M. HENK OVINK, Envoyé spécial pour les affaires internationales de l’eau des Pays-Bas, a ainsi expliqué que le premier C tient de « Commitment ».  L’« engagement » de tous est crucial, a—t-il expliqué en faisant valoir que « personne n’est une île et aucun ne peut être résilient sans la collaboration des autres ».  Le second C renvoie à l’expression « cross cutting », soit les approches transversales.  Le troisième C souligne l’importance d’une « collaboration » qui prenne en compte les manières traditionnelles d’agir.  Ensuite, toute solution doit être « cohérente », c’est le quatrième C, alors que le cinquième fait référence au renforcement des « capacités » de tous les acteurs clefs.

L’Envoyé spécial a donné l’exemple de l’île de Saint-Martin qui a été littéralement détruite l’an dernier à la suite du passage de plusieurs ouragans.  Un fonds fiduciaire de 100 millions de dollars avait été créé pour sa reconstruction par les Pays-Bas et la Banque mondiale notamment.  Il a souligné que cette reconstruction doit tenir compte du besoin de renforcer la résilience de l’île en prévision de futures catastrophes.

Aux Pays-Bas, on construit en tenant compte des catastrophes, a aussi rappelé M. Ovink.  En effet, la gestion des deltas permet de renforcer les côtes pour qu’elles puissent mieux résister à toute élévation du niveau de la mer.  Le pays est du reste disposé à partager son expérience en matière de résilience des villes côtières.  C’est ce qui a motivé un projet que les Pays-Bas ont mis en œuvre dans trois villes d’Asie: Chennai en Inde, Khulna au Bangladesh, et Semarang en Indonésie.

M. ROMAULD SOTARIO FERREIRA, Ministre de l’environnement et du logement des Bahamas, s’est dit hanté par les images de débris flottants, l’an dernier, alors que la nouvelle saison des ouragans approche aux Bahamas.  « Nous ne contribuons presque pas à la production de gaz à effet de serre, mais nous sommes obligés de financer notre résilience de notre poche. »  Le Ministre a rappelé que le secteur du tourisme avait perdu 68 millions de dollars l’an dernier après les catastrophes, alors que les habitudes alimentaires ont changé dans ce pays qui importe 90% de sa consommation alimentaire.  La première conséquence est la recrudescence des maladies non transmissibles, a-t-il déploré. 

Fournir des ressources aux gouvernements locaux est donc essentiel pour cet archipel où les moyens de communication sont quasi inexistants quand surviennent des catastrophes.  Le Gouvernement entend également réduire les cloisonnements et remédier au manque de coordination en adoptant une approche intégrée de préparation aux catastrophes.

Le Ministre a en outre regretté que les Bahamas ne puissent bénéficier de fonds pour la reconstruction en cas de catastrophe au motif que c’est un pays à revenu intermédiaire, alors que les Bahamas demandent qu’on les classe en tenant davantage compte de leurs vulnérabilités.  Les Bahamas entendent assurer la transition vers les énergies renouvelables et adopter les technologies vertes, d’autant plus que le pays est l’un de ceux ayant les frais d’électricité les plus élevés de la région des Caraïbes.    

Parmi les exemples évoqués au cours de la session, M. ROYOL CHITRADON, Conseiller au sein de l’Institut « Hydro and Agro Informatics Institute (HAII) », Ministère des sciences et de la technologie de la Thaïlande, a parlé de la mise en place de trois centres d’observation météorologique dans son pays.  L’analyse des données de ces centres permet désormais de prévenir les inondations et les sécheresses afin d’en atténuer les effets néfastes sur les communautés.  C’est ainsi que les inondations de l’an dernier n’ont duré que deux semaines, alors que les eaux avaient stagné pendant deux mois en 2011.  

Ce système de prévention se base sur ce qu’il a appelé « l’hydro-informatique », une combinaison de l’informatique et de l’hydrologie qui permet d’établir une cartographie des risques.  Le Gouvernement prend également en compte les capacités d’innovation des communautés, car « le développement durable doit se faire au niveau local » en tenant compte de la sécurité alimentaire, la sécurité hydrique et la sécurité énergétique des communautés.  Il a donc expliqué qu’en Thaïlande, la science et la technologie ont pour alliées les connaissances endogènes des communautés.

C’est ainsi qu’un projet mené dans la région de Khlong Yan a permis de viabiliser un canal fluvial, long de 70 km, qui serpente les montagnes jusqu’au delta.  Les communautés ont établi, le long du lit du fleuve, 540 barrages, tout en créant des forêts de production et des zones de pêche.  Depuis cinq ans, il n’y a pas eu d’inondation le long du canal, alors qu’auparavant, on en comptait une par an, laquelle était suivie d’une période de sécheresse.  De plus, dans la communauté de Phu Tum Phu Kratae, du nord-est de la Thaïlande, les populations ont créé des criques artificielles afin de conserver l’eau du canal qui serpente la région, assurant ainsi des réserves qui démontrent leur utilité quand les pluies se font rares.

Le représentant de l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles (UICN) a salué le fait que de nombreux États, comme la Thaïlande, et parties prenantes, utilisent des « solutions naturelles » pour faire face aux changements climatiques et aux risques de catastrophe.  « Il faut combiner l’offre de la nature avec les technologies modernes », a—t-il soutenu en notant que les solutions naturelles sont parfois plus efficaces sur le plan financier face à une technologie essentiellement onéreuse. 

Au vu des exemples présentés par les panélistes, le Directeur du Bureau des commissions régionales à New York, a invité tous les États à intégrer la résilience dans les budgets.  M. AMR NOUR a rappelé que le Forum sur le financement du développement de la semaine dernière avait laissé voir que 7% des investissements tombent à l’eau du fait des catastrophes naturelles.  Il a parlé de la région Asie-Pacifique qui a perdu des milliers de milliards de dollars du fait des catastrophes, évoquant également la situation de stress hydrique dans les pays du Moyen-Orient qui a des conséquences sur les conflits que la région connaît.  Pour lui, le diagnostic est clair, la résilience s’impose.  L’ECOSOC y contribue déjà par le biais de ses commissions économiques régionales.  C’est ainsi que la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC) a mis au point une méthodologie d’analyse des vulnérabilités en Amérique latine et dans les Caraïbes.  En Afrique, la Commission économique (CEA) a établi un système d’alerte météorologique pour prévenir et mieux gérer les sécheresses et inondations. 

Il y a aussi des initiatives régionales comme ce fonds bleu pour le bassin du Congo qui a été l’objet d’un sommet à Brazzaville, il y a quelques jours, a rappelé la déléguée du Maroc.  Elle a expliqué qu’il est question de développer l’économie du bassin du Congo par le biais de l’écotourisme et de l’agriculture irriguée.

De son côté, la représentante de l’ONG « Women Thrive alliance » a fait part de son inquiétude de voir que l’on privilégie la technologie pour renforcer la résilience, au détriment des efforts en faveur des femmes, « la moitié de l’humanité » qui coure le risque d’être laissée de côté. 

 

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