En cours au Siège de l'ONU

Cinquantième session,
7e séance – matin
POP/1059

Commission de la population et du développement: « la région d’Asie-Pacifique risque d’être vieille avant d’être riche »

« Si la région d’Asie et du Pacifique ne prend pas des mesures pour faire face au vieillissement de sa population, elle risque d’être vieille avant d’être riche. »  C’est le cri d’alarme qu’a lancé aujourd’hui la Commission économique de cette région (CESAP) devant la Commission de la population et du développement qui poursuivait son débat général sur le thème « évolution de la structure par âge de la population et développement durable ».  

La CESAP a indiqué qu’en 2050, un quart de la population de la région Asie-Pacifique aura plus de 60 ans.  Le nombre de la population active se réduit mais, a constaté la Commission, certains pays continuent d’avoir des structures de production fondées sur une main-d’œuvre abondante.  Il est vrai que les personnes âgées travaillent encore bien souvent parce qu’elles n’ont pas accès à une pension de retraite, une situation bien différente de celle des pays européens qui vivent aussi un vieillissement de la population mais peuvent exploiter un dividende démographique parce que le troisième âge a pu accumuler du patrimoine. L’Organisation mondiale du tourisme l’a prouvé en parlant de l’expansion du tourisme médical et culturel.

Il est grand temps que les pays d’Asie-Pacifique se préparent au vieillissement de leur population, en élargissant l’accès à la protection sociale.  Une attention particulière doit être accordée aux implications sexospécifiques du vieillissement vu que les femmes vivent plus longtemps que les hommes et qu’elles ont moins accès à la sécurité de revenu.  « Si la région ne prend pas des mesures pour faire face au vieillissement de sa population, elle risque de devenir vieille avant d’être riche », a alerté la CESAP qui travaille actuellement sur l’examen du Plan d’action de Madrid sur le vieillissement et organisera une réunion régionale du 12 au 14 septembre à Bangkok.

La population vieillit également dans plusieurs pays arabes, a indiqué la Commission économique et sociale de la région (CESAO).  Hier un expert de l’Institut national d’études démographiques de la France constatait que ces pays ont « une peur bleue » du vieillissement de leur population.  Il faudrait, a-t-il dit, leur expliquer que « le dividende démographique de l’An II » peut être un bienfait pour eux ».  Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a ainsi proposé la création d’un groupe interorganisations sur le vieillissement et continue à appuyer les initiatives visant à combler les lacunes dans la collecte des statistiques. 

Dans ce cadre, le « Comité catholique international des infirmières et assistantes médico-sociales » a dénoncé l’impact des politiques en faveur de la baisse de fécondité sur les pays qui ont dépassé le premier dividende démographique, « le capital-jeunes ».  Il faut au contraire encourager l’élimination de toutes les formes de contraception et l’interdiction de l’avortement pour rééquilibrer la structure par âge de la population mondiale. 

La Commission, qui doit terminer sa session demain, vendredi 7 avril, tiendra sa dernière séance à partir de 10 heures.

MESURES POUR LA POURSUITE DE LA MISE EN ŒUVRE DU PROGRAMME D’ACTION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT AUX NIVEAUX MONDIAL, REGIONAL ET NATIONAL

THÈME SPÉCIAL DE LA CINQUANTIÈME SESSION DE LA COMMISSION, ÉTABLI SUR LA BASE DU PROGRAMME D’ACTION DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT ET DES PRINCIPALES MESURES POUR LA POURSUITE DE SON APPLICATION (E/CN.9/2017/2, E/CN.9/2017/3 ET E/CN.9/2017/4)

Suite et fin du débat général

M. NAWAF SALAM (Liban) a indiqué que la population de son pays vieillissait, les plus de 65 ans devant représenter 14,1% et 23,3% de la population en 2030 et 2050 respectivement.  Le Gouvernement se concentre de plus en plus sur les systèmes d’appui aux personnes âgées, les retraites et les services de santé. Aujourd’hui, le Liban compte parmi les pays de la région arabe qui ont atteint l’objectif de développement durable (OMD) relatif à la mortalité maternelle.  En coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), il a réalisé des progrès considérables en matière de santé sexuelle et génésique, de planning familial, de lutte contre le VIH/sida, et a incorporé les questions démographiques dans les programmes scolaires.  Le pays a adopté un programme national pour la jeunesse et une stratégie nationale pour les femmes couvrant la période 2011-2021 et, en 2014, une loi sur la violence domestique. 

Depuis 2011, a rappelé le représentant, le Liban a été très touché par l’arrivée massive d’1,2 million de réfugiés à la suite de la crise en Syrie.  Cela a créé d’énormes pressions sociales, environnementales et économiques sur les communautés d’accueil, exacerbant les vulnérabilités et grevant les ressources nationales.  Le représentant a souligné l’importance de passer d’une assistance humanitaire à court terme à un développement à long terme. 

M. MOHAMED KHALED KHIARI (Tunisie) a dit que son pays est en train de vivre l’évolution de la structure par âge de la population.  En un demi-siècle, la Tunisie a accompli sa transition démographique en passant d’un taux d’accroissement naturel de 2,9% en 1966 à 1,4% en 2015.  L’indice synthétique de fécondité est passé de 7,2% en 1966 à 2,4% en 2015.  Les jeunes comptaient 10,9 millions en 2014 dont environ 27% âgés entre 15 ans et 29 ans, l’âge médian en Tunisie s’élevant à 31,4 ans en 2014.  Les projections mettent en relief l’inéluctable mouvement vers un vieillissement de la population.  La proportion des plus de 60 ans passera de 11,7% en 2014 à 16% en 2026 et sera autour de 20% en 2036 pour atteindre environ 23% en 2041.

La Tunisie est en train d’étudier les mesures à prendre pour s’adapter à cette situation qui va notamment peser sur les caisses sociales.  Elle songe donc à une possible modification de l’assiette des cotisations sociales ou du taux de cotisation et à une modification de l’âge de départ à la retraire.  Les besoins en maisons de retraite et en services destinés aux personnes âgées sont également en cours d’étude et d’examen. 

Le développement durable, a poursuivi le représentant, en peut être bâti sans émanciper la femme.  Combattre le mariage précoce forcé et faciliter l’accès aux soins de santé contraceptifs sont une nécessité.  Dans ce cadre, a-t-il prévenu, une jeunesse non éduquée sexuellement est une jeunesse handicapée qui risque d’être incapable de devenir un acteur social positif aux temps présent et futur, a souligné le représentant.  C’est pour cette raison que la Tunisie s’est lancée sur le chemin de l’éducation sexuelle complète.  Le représentant a souligné que l’engagement de la Tunisie envers la santé et les droits sexuels et reproductifs et l’égalité des sexes date des premières années de l’indépendance, le programme de planification familiale ayant été lancé dès 1966.  Le taux de prévalence contraceptive est de 62,5% et l’avortement a été légalisé dès 1973, l’État fournissant tous les efforts pour réduire les taux de mortalité maternelle et infantile.  Grâce à tous ces efforts, l’espérance de vie a atteint 76,1 ans.  Dans ce cadre, le représentant a salué la coopération du FNUAP et appelé les pays donateurs à continuer de le financer.  Après s’être félicité des progrès dans l’éducation des jeunes, il a précisé que la nouvelle Constitution tunisienne de janvier 2014 protège fortement les droits des femmes. 

Les grossesses et les accouchements sont les principales causes de décès chez les filles et les adolescentes, a déploré M. ROBERTO LIZ, Directeur général du développement économique et social au Ministère de l’économie, de la planification et du développement de la République dominicaine.  Avec l’aide du FNUAP, le Gouvernement s’attache à mettre en œuvre les objectifs définis dans le Consensus de Montevideo pour la période 2017-2020.  Il a notamment mis l’accent sur la santé sexuelle et reproductive, la violence sexiste et la collecte de données pertinentes. Le représentant a tenu à souligner que la définition des jeunes et du groupe de la population en âge de travailler (25 à 64 ans) dans les rapports du Secrétaire général « ne correspond pas à la réalité en Amérique latine et dans les Caraïbes ».  Il a insisté sur la thématique de l’emploi et du chômage pour les personnes de 15 à 24 ans, et de la scolarisation des 18 à 25 ans.   

M. ABDULLAH ABU SHAWESH, Observateur de l’État de Palestine, a dit que depuis 1947 jusqu’à l’occupation israélienne, la population palestinienne a augmenté de 200%.  Après l’occupation, le taux est descendu à 21%.  Si la situation actuelle continue, la catastrophe est assurée.  À Gaza, on enregistre actuellement 500 habitants au km².  En 2020, Gaza restera-t-il encore un territoire viable? Depuis 1967, Israël a transféré plus de 600 000 de ses habitants dans les territoires palestiniens que l’on appelle « colons ».  Ceux-ci représentent un défi pour la communauté internationale qui est incapable de mettre en œuvre les résolutions des Nations Unies dès qu’il s’agit d’Israël.  Depuis 1967, un million de Palestiniens ont été emprisonnés par la Puissance occupante, soit 18% de la population palestinienne.  En avril 2017, 6 000 Palestiniens croupissent dans les geôles israéliennes.  « Allez-vous continuer à laisser les Palestiniens mourir? » s’est emporté l’Observateur.

Mme ROSEMARY KALAPURAKAL, Conseillère juridique au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a reconnu qu’il fallait se centrer sur la jeunesse tout en se préparant au vieillissement des populations dans la perspective de 2030.  Les débats et les politiques publiques doivent veiller à ne pas exclure les personnes âgées et à promouvoir leur intégration en tant qu’acteurs à part entière du développement durable.  Les préoccupations exprimées lors de cette session font écho aux efforts entrepris par le PNUD pour réduire l’exclusion, a-t-elle poursuivi. En 2016, le PNUD a élaboré un document de réflexion qui met en exergue les mesures à prendre à cet effet. Enfin, le PUND a proposé de créer un groupe interorganisations sur le vieillissement.  Il appuie les initiatives visant à combler les lacunes dans les statistiques relatives au vieillissement.

Mme TAKYIWAA MANUH¸ Directrice de la Division du développement de politique sociale de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a rappelé que l’Afrique représente un quart de la population active mondiale, ce qui constitue un avantage économique certain à mettre à profit par des investissements dans l’éducation et la santé, sans oublier la création d’emplois.  Avec les capacités du continent, la réalisation des objectifs de développement durable est tout à fait possible pour autant que l’on libère tout le potentiel africain.  La CEA développe donc des données pour soutenir les plans de développement nationaux.  Les chefs d’État africains ayant une feuille de route pour profiter du dividende démographique, la CEA, avec le FNUAP, a élaboré un guide pour orienter l’action africaine, en cette décennie 2017-2027 de l’amélioration des données en Afrique.

Les maladies liées à la santé sexuelle et reproductive, y compris les grossesses trop précoces et trop fréquentes, sont une cause majeure de décès et d’incapacités chez les femmes et les filles, en particulier les plus vulnérables, les plus marginalisées et les plus exclues, a confirmé Mme NATELA MENABDE, Directrice exécutive de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).  Une mauvaise santé sexuelle et reproductive contribue de manière significative à la pauvreté limitant ainsi le développement socioéconomique.  L’oratrice a parlé de son Département qui fournit à tous les États les preuves dont ils ont besoin, en identifiant leurs lacunes dans la collecte des données, en générant des connaissances, en testant des interventions novatrices pour améliorer l’efficacité et l’équité des systèmes de santé et en évaluant les mécanismes permettant d’assurer la viabilité des interventions fondées sur les données.

Nous sommes à la croisée des chemins, a prévenu l’oratrice.  Comment faire face aux inégalités et aux injustices dont sont victimes les jeunes et les personnes âgées dans l’exercice de leur droit aux services de santé sexuelle et reproductive?  La capacité des sociétés à exploiter le dividende démographique et à créer un nouveau paradigme de santé, de dignité et de bien-être sera déterminée par leur volonté d’investir suffisamment dans la santé et les droits sexuels et reproductifs, a-t-elle prévenu, soulignant que le respect de cette santé et de ces droits a reçu à juste titre « une place centrale » dans le Programme 2030. 

M. JOE THOMAS, Directeur exécutif de « Partners in Population and Development (PPD) », a rappelé que le PPD est une organisation intergouvernementale composée de 26 pays en développement représentant près de 70% de la population du monde en développement, qui se consacre au renforcement de la coopération Sud-Sud en matière de santé génésique, de planning familial et d’autres questions démographiques, dont le vieillissement.  Dans les pays membres du PPD, qui se trouvent à divers stages de la transition démographique, les politiques de population continuent de jouer un rôle critique pour modeler et gérer les effets des changements dans la structure par âge, a-t-il expliqué. Depuis 1994, le taux de mortalité maternelle y a été réduit de moitié.

Donner aux femmes et aux filles un accès au planning familial, à la santé génésique et à l’éducation sexuelle est un droit de l’homme et un investissement important dans l’avenir, a plaidé M. Thomas. Or, à cet égard, les besoins de 225 millions de femmes ne sont toujours pas satisfaits.  Un tiers des maladies chez les femmes âgées de 15 à 44 ans est dû à une mauvaise santé sexuelle et génésique.  Nous obtiendrions des gains considérables, a-t-il assuré, si toutes les femmes qui veulent éviter une grossesse non désirée utilisent des contraceptifs modernes et si toutes les femmes et leurs nouveau-nés reçoivent les soins recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

M. SARBULAND KHAN, Organisation mondiale du tourisme, a déclaré que la population et le tourisme sont étroitement liés.  La vie humaine survit et prospère grâce à la procréation et aux déplacements.  La croissance de la population est le facteur clef de la croissance rapide du tourisme et de sa résilience.  L’augmentation du nombre des jeunes et des personnes âgées influent aussi sur la manière dont le tourisme évolue: l’introduction des nouvelles technologies dans tous les aspects du tourisme et le tourisme médical et culturel.  Par ailleurs, la reconnaissance des droits des personnes handicapées a fait que l’on a porté une attention accrue à l’accessibilité dans le tourisme.

Ce secteur est le deuxième plus grand de l’économie mondiale après la finance.  Les flux touristiques augmentent de 4% par an depuis 2009 générant des revenus de 1 200 milliards de dollars, soit 7% du total des exportations mondiales des biens et 30% des exportations mondiales des services.  Les flux devraient passer de 1,2 milliard en 2016 à 1,8 milliard en 2030 et la part des économies émergentes a augmenté de 30% en 1980 à 45% en 2015, et devrait atteindre les 57% en 2030. 

Les changements démographiques façonnent également la demande touristique et le développement, comme on le voit avec la fréquence des voyages, la durée des séjours, les types de produits et les stratégies de communication des sociétés touristiques.  Ces tendances et les interactions entre les facteurs démographiques et le tourisme nécessitent d’être prises en compte au moment où nous discutons de l’évolution de la structure par âge de la population et du développement durable, a conclu l’intervenant.

M. ASHRAF ELNOUR MUSTAFA MOHAMED NOUR, Directeur de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), s’est dit encouragé par l’accent récent mis sur les questions de migration et par la défense des droits de l’homme des migrants.  À cet égard, il s’est félicité du thème choisi pour la prochaine session de la Commission de la population et du développement en 2018, « Villes durables, mobilité humaine et migrations internationales ».  À ce propos, elle a attiré l’attention sur la conférence sur les migrants et les villes que l’OIM a organisée en 2015 et sur le rapport annuel sur les migrations internationales qui avait pour thème en 2015 « Migrants et villes: Les nouveaux partenariats pour gérer la mobilité urbaine ».

Mme NASRIA ELARDJA FLITTI, Ligue des États arabes, a souligné que cette session se déroule à un moment où les pays de la Ligue se trouvent à différentes phases de la transition démographique.  Elle se passe aussi six ans après le début de la crise syrienne qui a provoqué des mouvements migratoires et une crise des réfugiés.  Comment dans ces conditions profiter du dividende démographique? Si les progrès réalisés par les États membres ont été freinés par ces mouvements, ils réaffirment tous que la jeunesse est leur priorité.  Les États de la Ligue tiennent aussi à assurer au peuple palestinien la vie décente qui leur est refusée.  La Ligue souhaite la fusion des forces pour parvenir au développement durable aux niveaux international, régional et national

M. VINICIUS CARVALHO PINHEIRO, Directeur du Bureau de l’Organisation internationale du Travail (OIT), à New York, a indiqué que la population mondiale en âge de travailler devrait augmenter de 31% environ, passant de 3,6 milliards en 2015 à 4,8 milliards en 2050.  Cela veut dire qu’il va falloir créer entre 1,2 et 1,8 milliard d’emplois d’ici là.  Tant la quantité que la qualité des emplois sont importantes, a-t-il précisé.  Aujourd’hui, les jeunes restent touchés par des taux de chômage élevés.  De plus, près de 156 millions de jeunes dans les pays émergents et en développement travaillent dans la pauvreté. 

L’appel à l’action de l’OIT pour l’emploi des jeunes et l’Initiative des Nations Unies en faveur de la création d’emplois décents pour les jeunes montrent la voie à suivre, a poursuivi le Directeur.  D’un autre côté, la population âgée de 65 ans et plus va continuer d’augmenter, a-t-il averti, en soulignant la nécessité de mettre au point des systèmes de protection sociale adéquats.  Dans les pays émergents et en développement, près d’un tiers des personnes de 65 ans et plus vivent dans une pauvreté extrême ou modérée, et la moitié d’entre elles, notamment les femmes, ne perçoivent pas de retraite.

Mme VANESSA STEINMEYER, Chef de la Section de la transition durable de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a prévu qu’en 2050, un quart de la population de la région Asie-Pacifique aura plus 60 ans.  Si la région ne prend pas des mesures pour faire face au vieillissement de sa population, elle risque de devenir vieille avant d’être riche.  Le nombre de la population active se réduit dans certains pays, en particulier dans l’est et le sud-est.  Mais certains des pays continuent d’avoir des structures de production fondées sur une main d’œuvre abondante.  Il est vrai que les personnes âgées travaillent encore bien souvent parce qu’elles n’ont pas accès à une pension de retraite. 

Les pays de l’Asie du Sud sont jeunes et peuvent exploiter le premier dividende démographique mais le temps presse.  En Inde par exemple, la population active devrait commencer à diminuer de 15% par rapport à aujourd’hui.  Il est grand temps que les pays se focalisent sur la création d’emplois décents pour les jeunes et se préparent au vieillissement de sa population en élargissant l’accès à la protection sociale.  Une attention particulière doit être accordée aux implications sexospécifiques du vieillissement vu que les femmes vivent plus longtemps que les hommes et qu’elles ont moins accès à la protection sociale et la sécurité de revenu.

La CESAP appuie les États en les convaincant de fonder leurs politiques sur des données fiables.  La CESAP travaille actuellement sur l’examen du Plan d’action de Madrid sur le vieillissement et organisera une réunion régionale du 12 au 14 septembre à Bangkok.

Mme ROUBA ARJA, représentante de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a souligné que la mortalité avait considérablement décru dans la région arabe.  Les taux de fertilité ont diminué moins vite, ce qui a contribué à la poussée démographique des jeunes et à la croissance de la population en âge de travailler.  La population vieillit également dans plusieurs pays.  De plus, a-t-elle continué, les mouvements produits par l’urbanisation rapide, les migrations et les déplacements forcés ont un impact sur la structure par âge de la population.  De telles évolutions doivent permettre de tirer parti du dividende démographique si l’on répond aux besoins des divers groupes de la population.  Pour mieux appuyer les États membres, a assuré la représentante, la CESAO les aide à renforcer leurs connaissances et leurs capacités en fonction de leurs besoins, y compris au niveau régional.  Elle adopte une approche intégrée, centrée sur les droits de l’homme et les trois piliers du développement durable. 

M. PAULO SAAD, Spécialiste principal des questions de population de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a déclaré que comme la Commission est responsable du suivi de la mise en œuvre du Consensus de Montevideo, elle a commencé un projet visant à améliorer la capacité des décideurs politiques à évaluer les opportunités et les défis apportés par la transition démographique afin de réaliser les objectifs de développement durable.  L’hypothèse sous-jacente est que la réussite du Programme 2030 est fortement liée à l’anticipation et à la planification des effets de la transition démographique qui se déroulera pendant la période de 2015 à 2030. 

L’une des caractéristiques de ce projet est d’incorporer la dimension hommes-femmes dans l’analyse de l’impact de l’évolution de la population sur le développement économique et sociale.  La parité constitue un facteur clef à prendre en compte lorsqu’il s’agit d’élaborer des politiques de développement durable.  Bien que l’intérêt politique et académique ait été axé sur le dividende démographique, il est probable que le dividende des sexes pourrait être d’une importance similaire ou supérieure.

D’après Mme MARIAN NOWAK Comité catholique international des infirmières et assistantes médico-sociales (CICIAMS), « on met trop l’accent sur la force de travail et sur l’économie, et pas assez sur la plus grande ressource renouvelable au monde, à savoir les enfants ».  Elle s’est dit préoccupée par les efforts entrepris pour faire baisser les taux de fécondité et le risque que cela fait courir aux économies des pays post-dividende démographique.  Elle n’a pas hésité à proposer d’encourager la fécondité, d’éliminer toutes les formes de contraception et d’interdire l’avortement pour rééquilibrer la structure par âge de la population mondiale.  

Pour M. STEFANO GENNARINI, Center for Family & Human Rights (CFAM), le problème aujourd’hui est la faible fécondité et le vieillissement qui menacent la lutte contre la pauvreté car on peut imaginer que les économies émergentes auront à se battre pour écouler leurs produits.  La diminution de la main d’œuvre dans les pays conduira à un marasme économique.  La pression sur les systèmes de protection sociale accentuera encore la pauvreté.  Le dividende démographique est menacé, s’est alarmée l’oratrice, en regrettant que « l’élite », hantée par le fantôme de la théorie démographique des années 1950, soit incapable de faire face aux défis actuels, préférant prescrire les mêmes politiques obscènes contre la fécondité. 

M. Gennarini est revenu sur le « plan Marshall pour l’éducation en Afrique » dont ont parlé plusieurs orateurs.  Elle a jugé que des interventions analogues doivent être assurées pour les infrastructures, l’énergie, le transport et la santé, en particulier la santé maternelle.  Or, rien n’est fait sinon des politiques antifécondités.  Le Programme 2030 est une occasion d’allouer de l’aide à de tels projets pour ne laisser personne de côté.

Mme AGNES KING, « Minnesota Citizens Concerned for Life Education Fund (MCCL GO! Gobal Outreach), » qui représente 70 000 familles dans 70 pays, s’est opposée à l’approche qui consiste à encourager la légalisation de l’avortement.  La santé maternelle, a-t-elle fait valoir, n’est pas protégée par l’avortement mais par la qualité des soins de santé.  Des pays tels que l’Irlande, la Pologne, Malte, le Chili, le Koweït, la Libye et les Émirats arabes unis interdisent les avortements et ont des taux de mortalité maternelle très bas, a-t-elle lancé à titre d’exemple.  Par ailleurs, les États devraient renforcer leur appui aux personnes âgées, malades ou handicapées, et rejeter les efforts visant à légaliser l’euthanasie et le suicide assisté.  

Mme ANN BRASSIL, Asia Pacific Alliance for Sexual and Reproductive Health Rights, a souligné que c’est en promulguant des lois, des politiques et des programmes qui concrétisent le respect universel des droits de l’homme et de l’égalité des sexes, permettant aux individus d’atteindre leur plein potentiel, que la région peut exploiter son dividende démographique et réaliser le développement durable.  Les jeunes, en particulier, doivent avoir accès à une éducation sexuelle complète et à des services et des informations sur la santé sexuelle et procréative qui éliminent les obstacles de la discrimination, des préjugés et du manque de confidentialité.  Cela implique également de faire face aux inégalités d’accès tout en permettant et reconnaissant les besoins des populations marginalisées y compris les femmes, les filles, les personnes vivant avec le VIH, les Lesbiennes, gays, bi et transsexuels, les prostitués, les peuples autochtones et les migrants, entre autres.

Mme SIVANANTHI THANENTHIRAN, Asian–Pacific Resource and Research Center for Women (ARROW), a rappelé que 60% de la population mondiale vit en Asie, un continent qui accueille à la fois 489 millions des personnes de plus de 60 ans et 670 millions de jeunes, a-t-elle précisé.  Dans la plupart des pays, les personnes en âge de travailler représentent déjà ou représenteront la majorité de la population, tandis que la région vieillit rapidement.  La région est marquée par de fortes inégalités, a-t-elle expliqué; 772 millions de personnes vivant encore avec moins de 1,25 dollar par jour.  Les progrès en matière de santé sexuelle et génésique sont également mitigés, a poursuivi la déléguée.  La plupart des stratégies dans la région Asie-Pacifique sont encore axées sur le contrôle de la fécondité, au lieu d’être centrées sur les droits de l’homme et le cycle de la vie.  Après l’Afrique subsaharienne, c’est en Asie du Sud que l’on enregistre le plus fort taux de mortalité maternelle.  Beaucoup de femmes n’ont toujours pas accès à la contraception et la violence domestique, sexiste, sexuelle et contre les personnes en raison de leur identité sexuelle reste généralisée. 

Mme BARCLAY, « The International Planned Parenthood Federation », a insisté sur les droits des jeunes à l’information sur la procréation, la conception et la transmission des maladies sexuelles, ce qui permettrait aux gouvernements de savoir exactement le type de services de santé à leur offrir et à profiter du dividende démographique.  Il faut investir massivement dans la santé sexuelle et reproductive pour assurer la croissance économique, a-t-elle affirmé. 

Mme JILLIAN ABBALLE, Conseil mondial des Églises (World Council of Churches), a dit que le Conseil milite pour « une vie d’abondance pour tous, protégée par les droits de l’homme universels ».  Elle a défendu, en particulier, « la dignité inhérente de chaque personne en tant que partie à la création divine ».  Dans un grand nombre de pays en développement, les associations catholiques de santé contribuent jusqu’à 40% aux services de santé sexuelle et reproductive offerts aux femmes et aux filles.  Chacun doit pouvoir apprendre à s’occuper de son corps, grâce à une éducation sexuelle adaptée à l’âge et à la culture.

Mme SOLANGE MBAYE, Dance4Life, a prévenu que la structure par âge de la population dépendra de ce que nous faisons aujourd’hui dans les domaines de l’éducation et de la santé.  Les jeunes ont un droit sur leur corps et leur sexualité, et les politiques en leur faveur doivent se fonder sur des données ventilées par âge et par sexe.  La représentante a aussi mis l’accent sur le droit des réfugiés et des migrants à des services de santé sexuelle et reproductive.

Évoquant les défis qui se présentent à lui et ses pairs, JULIA PINHEIRO CARVALHO, Fédération internationale des associations d’étudiants en médecine (IFMSA), s’est plaint du manque d’accès à la santé et aux droits sexuels et génésiques dans certaines parties du monde, lequel empêche les communautés de prendre des décisions éclairées et autonomes.  Elle a plaidé en faveur d’une participation accrue des jeunes au processus de prise de décisions.  La capacité à obtenir, trier et comprendre des informations en matière de santé est essentielle, a-t-elle insisté, en rappelant le droit universel à la santé.  Elle a exhorté les États Membres à garantir l’accès à l’éducation sexuelle, à des services de santé sexuelle et génésique, y compris le planning familial et l’avortement sûr et légal.

M. JOSE VASQUEZ, International Federation for Family Development, a regretté que trop souvent au sein des familles et des communautés, la voix des personnes âgées et des jeunes ne soit pas entendue.  Aujourd’hui, les structures par âge, le vieillissement et les nouveaux cadres parentaux qui accompagnent l’urbanisation influencent, modifient graduellement les relations intergénérationnelles.  Il faut des efforts intentionnels pour maintenir les connexions entre les générations.  Conformément au Programme 2030, il n'y a pas de meilleure perspective holistique pour construire des sociétés résilientes et renforcer la cohésion et l’intégration sociales que l’approche familiale.  Il faut redécouvrir de la contribution essentielle de la famille au bien-être des enfants, des jeunes et des personnes âgées.  Nous nous sommes engagés à promouvoir de fortes relations intergénérationnelles, dans le but global de réduire la vulnérabilité des jeunes et des personnes âgées et veiller à ce que personne ne soit laissée de côté.

Mme CYNTHIA STUEN, déléguée de la Fédération internationale sur le vieillissement, a jugé impératif qu’aucune personne âgée ne soit « laissée de côté » dans le cadre de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Soucieuse de la pauvreté qui frappe les personnes âgées, elle a recommandé une approche multidimensionnelle pour évaluer leurs sources de revenus.  Elle a également conseillé de suivre de près les progrès réalisés en matière de vaccination et de traitement de l’hypertension et du diabète.  Ainsi l’indicateur de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) relatif aux maladies non transmissibles doit-il être élargi au-delà de 70 ans.  Il faudrait aussi mieux mesurer les soins non rémunérés que prodiguent les personnes âgées à travers le monde, et se pencher sur la question de la violence contre ces personnes, en particulier les femmes. 

M. JACOB MOHAN THAZHATHU, Help Me See Inc., a alerté la Commission sur les dégâts de la cataracte qui est la première cause de cécité dans le monde et qui peut toucher n’importe qui, en particulier les personnes âgées.  En 2010, 20 millions de personnes souffraient de la cataracte dans le monde, s’est-il alarmé en citant les chiffres de l’OMS.  Il a prévenu du risque d’une aggravation de la situation compte tenu du vieillissement de la population mondiale, y compris en Afrique où l’on manque cruellement de spécialistes de la cataracte.   Cette crise risque d’échapper à tout contrôle si l’on ne prend pas des mesures urgentes, surtout dans les pays en développement.

Mme GABRIELLE JASTREBSKI, FEMM, a indiqué que la mission de sa fondation est de faire en sorte que les besoins des femmes en matière de santé soient satisfaits, conformément à l’objectif de développement durable 3.  Réaliser cet objectif, a-t-elle fait valoir, permettra également d’atteindre les objectifs 4 et 5 sur l’éducation et la parité des sexes.  En ce qui concerne la santé sexuelle et reproductive, le consentement informé des femmes est essentiel, a-t-elle insisté.  « Le savoir c’est l’autonomisation. »  Les femmes et les filles doivent pouvoir comprendre comment leur corps fonctionne, s’est-elle résumée, avant d’indiquer que FEMM forme des médecins pour traiter les problèmes hormonaux des femmes.

Mme DALIA CLEMENT, Alliance mondiale pour les jeunes, qui compte plus de 200 000 membres à travers le monde, a préconisé une approche centrée sur les personnes en matière de population et de développement.  « Nous ne pouvons pas ignorer les politiques coercitives qui ont été mises en œuvre dans de nombreux pays au nom de la transition démographique, en violation des droits de l’homme, des libertés et de la dignité humaine, et qui traitent l’être humain comme un problème à gérer », a-t-elle déclaré.  Elle a exhorté les États à faire en sorte que les soins de santé respectent la dignité de tous, s’assurent de leur consentement éclairé, et qu’ils ne promeuvent pas des politiques controversées, tel l’avortement, qui bafouent la dignité de la mère et de l’enfant. 

Contrarié par la longueur de la file d’attente à l’entrée du Secrétariat de l’ONU cette semaine, M. BABU RAM PANT, Coalition des jeunes pour les droits sexuels et reproductifs (YCSRR), a exhorté l’Organisation à faciliter l’accès des jeunes et de la société civile.  Le monde est caractérisé par un nombre de jeunes sans précédent dans son histoire: 1,8 milliard.  Malheureusement, a-t-il souligné, rien qu’aujourd’hui, 8 000 filles auront subi des mutilations génitales.  En moins de temps qu’il ne faut pour lire ma déclaration, soit 3 minutes, 80 filles auront été mariées avant leur dix-huitième anniversaire, s’est alarmé le jeune orateur.  Chaque jour, a-t-il continué, 830 femmes meurent enceintes ou en couches de causes évitables.  Il a appelé tous les gouvernements à agir pour engager les jeunes dans le processus de prise de décisions et garantir leurs droits sexuels et génésiques, y compris l’accès à la contraception, à l’avortement sûr et légal et à l’éducation sexuelle complète pour combattre la violence sexiste, les mariages précoces et forcés, et, enfin, pour dépénaliser le commerce du sexe. 

Mme RADA TZANEVA, Amnesty International, est revenue sur quelques principes: l’égalité des sexes, l’émancipation des femmes et les droits de l’homme, y compris les droits à la santé sexuelle et reproductive sont les clefs pour des sociétés justes et le développement durable.  Le dividende démographique ne pourra être atteint que si les adolescents et les jeunes peuvent jouir pleinement de leurs droits à l’éducation, au logement, à l’emploi, à la santé, y compris sexuelle et reproductive.  La contribution des personnes âgées à la société doit être dûment reconnue et les politiques doivent aussi donner la priorité aux groupes marginalisés pour veiller à l’égalité de la participation au développement.  La représentante a dit parler des personnes handicapées, des personnes à l’orientation et à l’identité sexuelle différente, des peuples autochtones, des minorités, des migrants ou encore des réfugiés.  Enfin, a-t-il conclu, seul un développement participatif et responsable peut être véritablement durable.  À cet égard, elle a insisté sur la participation de la société civile et des personnes directement concernées par les politiques adoptées. 

 

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