En cours au Siège de l'ONU

SC/12662

Déclaration publique du Président du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé

À sa soixantième séance, le 2 décembre 2016, le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé est convenu, à l’occasion de l’examen du troisième rapport du Secrétaire général sur le sort des enfants en temps de conflit armé en République centrafricaine (S/2016/133), d’adresser, sous forme de déclaration publique de son président, les messages suivants:

À tous les groupes armés opérant en République centrafricaine, en particulier la coalition ex-Séléka et groupes armés associés, les milices de défense locale connues sous le nom de « antibalaka » et l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) mentionnées dans le rapport du Secrétaire général:

a)  Exprime sa plus ferme condamnation de toutes les violations et violences persistantes commises à l’encontre des enfants en République centrafricaine, et invite toutes les parties à faire cesser immédiatement et à prévenir toutes les violations des dispositions applicables du droit international concernant le recrutement et l’utilisation d’enfants, le meurtre et les mutilations d’enfants, les viols et autres formes de violence sexuelle commis à leur encontre, les enlèvements d’enfants, les attaques dirigées contre des écoles et des hôpitaux, et le refus d’accès humanitaire;

b)  Se déclare profondément préoccupé par le recrutement et l’utilisation généralisés d’enfants par des groupes armés, exprime son inquiétude face à l’utilisation d’enfants comme boucliers dans des attaques dirigées par les antibalaka contre les forces de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), demande instamment à tous les groupes armés de libérer immédiatement et sans condition préalable tous les enfants associés avec eux et à cesser tout nouveau recrutement et utilisation d’enfants, y compris le recrutement, une nouvelle fois, d’enfants qui ont été libérés;

c)  Déplore tous les actes de violence dirigés contre les enfants sur la base de leur religion, y compris le meurtre et la mutilation d’enfants, ainsi que les viols et autres formes de violence sexuelle commis à leur encontre, et exhorte tous les groupes armés à mettre fin à ce type de violations et de violences, et à s’engager sur la voie de la réconciliation;

d)  Considère qu’il importe de continuer de lutter contre la violence sexuelle en République centrafricaine, et exhorte toutes les parties à prendre immédiatement des mesures concrètes pour faire cesser et prévenir les viols et autres formes de violence sexuelle commis à l’encontre des enfants par des membres de leurs groupes respectifs;

e)  Demande aux groupes armés de se conformer aux dispositions applicables du droit international et de respecter le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de faire cesser et de prévenir les attaques ou menaces d’attaques contre ces institutions et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’écoles et d’hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international applicable;

f)  Rappelle la résolution 2286 (2016) et enjoint également à toutes les parties de garantir le respect et la protection de l’ensemble du personnel médical et des agents humanitaires dont l’activité est d’ordre exclusivement médical, de leurs moyens de transport et de leur matériel, ainsi que des hôpitaux et des autres installations médicales;

g)  Exhorte les groupes armés, en particulier l’Armée de résistance du Seigneur, à mettre un terme aux enlèvements d’enfants et à toutes les violations et violences commises à l’encontre des enfants enlevés, et à remettre immédiatement sans condition préalable tous les enfants victimes d’enlèvement qu’ils ont en captivité aux instances civiles compétentes chargées de la protection de l’enfance;

    h)  Souligne que le déni de l’aide humanitaire peut constituer une violation du droit international humanitaire et avoir des répercussions graves sur les enfants, et demande que soit facilité aux agents humanitaires, y compris à l’ONU et à ses partenaires humanitaires, l’acheminement complet, en temps voulu, en toute sécurité et sans entrave de l’aide humanitaire aux populations touchées, notamment aux enfants, conformément aux Principes directeurs de l’ONU régissant l’aide humanitaire et aux dispositions pertinentes du droit international;

i)  Exhorte les groupes armés à s’engager publiquement à faire cesser et à prévenir toutes les violations et violences commises à l’encontre des enfants et à élaborer, adopter et mettre en œuvre rapidement des plans d’action assortis d’échéances, conformément aux résolutions 1612 (2005), 1882 (2009), 1998 (2011), 2068 (2012), 2143 (2014) et 2225 (2015) du Conseil de sécurité;

j)  Se félicite à cet égard de l’engagement signé le 5 mai 2015 par dix groupes armés, dont des factions de l’ex-Séléka et de l’ex-antibalaka, de faire cesser et de prévenir le recrutement et l’utilisation d’enfants, leur demande instamment de respecter cet engagement, de libérer tous les enfants qui leur sont associés et par ailleurs, d’élaborer et de mettre en œuvre des plans d’action en coopération avec l’ONU[1];

k)  Se félicite également des instructions interdisant le recrutement et l’utilisation d’enfants données par les factions de l’ex-Séléka issus du Rassemblement patriotique pour le renouveau de la Centrafrique (RPRC) et de l’Unité du peuple centrafricain (UPC), qui ont conduit à la libération d’enfants de leurs rangs, et demande que ces instructions continuent d’être suivies;

l)  Note que les autorités nationales ont saisi la Cour pénale internationale (CPI) le 30 mai 2014 de la situation que vit la République centrafricaine depuis le 1er août 2012 et que le 24 septembre 2014, le Procureur de la Cour a annoncé sa décision d’ouvrir une enquête sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre qui auraient été commis par toutes les parties, y compris les ex-Séléka et les groupes antibalaka, notamment l’utilisation d’enfants dans les combats armés, et que certains des actes mentionnés au paragraphe 8 a) ci-dessus, peuvent constituer des crimes au regard du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, auquel la République centrafricaine est partie;

m)  Rappelle que le Conseil de sécurité, par sa résolution 2262 (2016), a reconduit, jusqu’au 31 janvier 2017, les mesures financières et les mesures sur les déplacements imposées par les résolutions 2127 (2013) et 2134 (2014), qui s’appliquent aux personnes et entités désignées par le Comité créé par le paragraphe 57 de la résolution 2127 (2013), pour des actes portant atteinte à la paix, à la stabilité ou à la sécurité de la République centrafricaine tels que :

i)Préparer, donner l’ordre de commettre ou commettre, en République centrafricaine, des actes contraires au droit international des droits de l’homme ou au droit international humanitaire ou constituant des atteintes aux droits de l’homme ou des violations de ces droits (violences sexuelles, attaques dirigées contre des civils, attentats à motivation ethnique ou religieuse, attentats commis contre des écoles et des hôpitaux, enlèvements, déplacements forcés);

ii)  Recruter ou utiliser des enfants dans le conflit armé en République centrafricaine, en violation du droit international;

  iii) Faire obstacle à l’acheminement de l’aide humanitaire destinée à la République centrafricaine, à l’accès à cette aide ou à sa distribution dans le pays;

n)  Déclare que le Groupe de travail se tient prêt à communiquer au Conseil de sécurité toutes informations utiles pour l’aider à adopter des mesures ciblées contre les auteurs de violations.

Au Gouvernement de la République centrafricaine :

a)  Souligne que c’est au Gouvernement qu’il incombe au premier chef d’offrir à tous les enfants touchés par les conflits armés en République centrafricaine une protection et des secours, et lui demande d’inscrire la protection des enfants au rang des priorités nationales et de renforcer les systèmes de protection de l’enfance, notamment par l’enregistrement des déclarations de naissance, y compris des déclarations tardives;

b)  Encourage vivement le Gouvernement à accorder la priorité à la protection de l’enfance dans son cadre législatif national, notamment par l’adoption d’une loi nationale érigeant en infraction le recrutement et l’utilisation d’enfants en violation du droit international et d’accélérer le processus de ratification du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés;

c)  Souligne qu’il importe de mettre fin à l’impunité et demande au Gouvernement de veiller à ce que les auteurs de violations et de violences à l’encontre des enfants répondent de leurs actes, en renforçant l’appareil judiciaire national, notamment par la création et l’ouverture d’une cour pénale spéciale.

Aux notables locaux et aux chefs religieux de la République centrafricaine :

d)  Souligne le rôle important que doivent jouer les notables locaux et les chefs religieux dans le renforcement de la protection des enfants dans les conflits armés et dans l’intensification des efforts de réconciliation;

e)  Exhorte les notables locaux et les chefs religieux à condamner publiquement les violations et les violences commises à l’encontre des enfants, notamment sur la base de la religion, à plaider pour qu’il y soit mis fin et à en promouvoir la prévention, et les encourage à se concerter avec le Gouvernement et l’Organisation des Nations Unies pour mettre un terme au recrutement et à l’utilisation d’enfants par les parties au conflit armé en violation du droit international;

À toutes les forces de maintien de la paix des Nations Unies, y compris la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) et les forces de sécurité non onusiennes actuellement ou anciennement présentes en République centrafricaine et aux États Membres concernés :

f)  Exprime sa profonde détresse devant les allégations de viol et d’actes d’exploitation et de violences sexuelles commis à l’encontre d’enfants par des soldats de la paix des Nations Unies et des membres des forces non onusiennes en République centrafricaine, et condamne avec la dernière énergie tous les actes d’exploitation et de violences sexuelles;

g)  Demande à l’Organisation des Nations Unies et aux États Membres concernés de prendre les mesures appropriées pour enquêter sur les allégations d’actes d’exploitation et de violences sexuelles commis par leur personnel, d’amener les auteurs à en répondre conformément à la résolution 2272 (2016), de veiller à assurer une protection adéquate des enfants victimes et témoins de crimes durant la procédure d’enquête et de leur faciliter l’accès à des soins médicaux et à un soutien psychologique, le cas échéant;

h)  Demande instamment aux États Membres concernés de continuer de dispenser une formation solide préalable au déploiement sur la question de l’exploitation et des violences sexuelles, conformément aux mémorandums d’entente et autres accords conclus avec l’Organisation des Nations Unies;

i)  Demande à toutes les forces de maintien de la paix des Nations Unies et aux forces non onusiennes en République centrafricaine de respecter le droit international en vigueur, ainsi que le caractère civil des écoles et des hôpitaux, y compris leur personnel, et de faire cesser et de prévenir l’utilisation des écoles et des hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international.

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[1] Les 10 groupes qui ont signé l’engagement sont les antibalaka; le Front démocratique pour le progrès de la Centrafrique (FDPC); le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC); le Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ); le Rassemblement patriotique pour le renouveau de la Centrafrique (RPRC); Révolution et justice (RJ); La Séléka rénovée; l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC); l’Union des forces républicaines (UFR) et l’Union des forces républicaines fondamentales (UFRF).

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