En cours au Siège de l'ONU

Quarante-neuvième session,
8e & 9e séances – matin & après-midi
POP/1051

La Commission de la population réaffirme le caractère « essentiel » de la collecte de données démographiques pour la réalisation du développement durable

La Commission de la population et du développement a réaffirmé aujourd’hui que la collecte de données démographiques « de bonne qualité, accessibles, actualisées, fiables et désagrégées » est essentielle pour la planification et la mise en œuvre du Programme d’action du Caire et du Programme sur le développement durable à l’horizon 2030.

Achevant une session d’une semaine sur le thème de l’enrichissement des données démographiques à l’appui du Programme 2030, la Commission a, dans son document final*, réaffirmé le Programme d’action sur la population et le développement adopté au Caire en 1994, même si elle a aussi réaffirmé « le droit souverain » de chaque pays à ne mettre en œuvre que les recommandations conformes à ses lois et priorités de développement nationales, à ses valeurs religieuses, éthiques et culturelles, et aux droits de l’homme reconnus universellement. 

Les données démographiques étant « essentielles » pour le respect des engagements pris dans le Programme d’action du Caire mais aussi dans le Programme 2030, les gouvernements sont priés de faire des efforts pour renforcer leurs systèmes de registres et de statistiques d’état civil, et d’informations sanitaires.  À ce propos, la Commission souligne l’importance du Programme 2020 sur le recensement de la population et les enquêtes sur les ménages, lancé par le Conseil économique et social (ECOSOC), en juin 2015.  Elle demande aux autorités nationales de promouvoir de nouvelles sources de données, y compris les méga données, pour en améliorer la collecte, l’exploitation et la diffusion.

Elle leur demande aussi d’instituer le géoréférencement comme norme dans toutes les formes de collecte de données démographiques.  Elle les encourage à mettre en place des politiques de libre accès aux données géoréférencées, anonymisées et collectées à partir des sources administratives pertinentes, « dans le respect de la confidentialité ».

Comme le disait hier l’ONG « The International Planned Parenthood Federation », les données ne sont pas que des chiffres sur un graphique.  Ce sont des histoires de femmes et de filles, d’hommes et de garçons dont la vie change à chaque pourcentage.  Sans de bonnes données, comment savoir quel programme marche ou ne marche pas.  Sans des données désagrégées par revenu, par sexe, par âge, par race, par ethnicité, par statut migratoire, par handicap, par état civil, par emploi, par niveau d’éducation, par état de santé, par location géographique et autres, comment savoir si les filles ont les mêmes chances que les garçons à

l’école ou si les femmes autochtones sont traitées comme les autres dans les hôpitaux.  Des données détaillées racontent des histoires détaillées.  Si on ne braque pas les projecteurs sur la vie et l’histoire des gens, on ne saura jamais si les mesures ne « laissent personne sur le côté », comme le veut le Programme 2030.

D’ici à cette date, le monde qui comptait en 2015, 7,3 milliards d’individus, devrait passer à 8,5 milliards, l’essentiel de cette croissance ayant lieu en Afrique et en Asie, soit dans des pays qui ont les plus grandes difficultés à éradiquer la pauvreté et la faim et à garantir la santé, l’éducation et l’égalité pour tous.  À cela, il faut ajouter d’autres problèmes, dont le fait qu’en 2015, on comptait 244 millions de migrants internationaux et qu’à la fin de 2014, le nombre total de réfugiés s’élevait à environ 19,5 millions de personnes.

Alors que la non prise en compte de la démographie a été une omission préjudiciable pour les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), le représentant de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a avoué qu’aujourd’hui encore, 71% des pays africains n’ont pas transmis leur statistiques d’état civil et que neuf n’ont pas effectué de recensement depuis 2005, alors que les registres de population sont presque inexistants.  Face à cette situation, la feuille de route de la CEA est la Déclaration d’Addis-Abeba sur la population et le développement au-delà de 2014 et ses 88 engagements. 

Ce ne sont pas moins de 230 indicateurs dont la majorité porte sur la population que la Commission des statistiques a présenté au cours de cette session, pour le suivi mondial du Programme de développement durable à l’horizon 2030.

Les représentants du Canada et de la Norvège ont regretté que la résolution de la Commission ne contienne pas un libellé « plus fort » sur l’égalité des sexes et qu’il n’insiste pas suffisamment sur le droit à la santé sexuelle et reproductive.  Leur homologue de la Fédération de Russie s’est dit préoccupé de la tendance de certains États à recourir à des termes qui ne font pas l’unanimité, avant que le représentant du Qatar ne regrette que les réserves de certains États sur la santé reproductive n’aient pas été prises en compte.

Au nom de l’Union européenne, le représentant des Pays-Bas a remercié la Présidente de la Commission pour avoir réussi à établir un équilibre entre toutes les positions.

Le Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) qui a parlé après le message du Secrétaire général aux affaires économiques et sociales, a souligné l’importance de la coopération internationale pour mettre en œuvre les engagements pris aujourd’hui par la Commission. 

Si vous voulez avancer vite, marchez seul mais si voulez aller loin, marchez groupé, a conclu M. Babatunde Osotimehin, en soulignant que le monde attend de la Commission qu’elle continue à offrir son leadership pour réaliser le droit de chaque femme et de chaque fille à la santé sexuelle et reproductive et à réaliser la vision d’un développement qui ne « laisse personne sur le côté ».

Pour 2017, la Commission a choisi pour thème « Évolution de la structure par âge de la population et développement durable » et pour 2018, elle attend la décision de l’ECOSOC.

*La résolution n’est pas encore parue en français

**E/CN.9/2016/L.4

EXÉCUTION DU PROGRAMME ET DU FUTUR PROGRAMME DE TRAVAIL DU SECRETARIAT DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION E/CN.9/2016/6 ET E/CN.9/2016/7

Déclarations

Pour l’examen de cette question, la Commission était saisie des Rapports du Secrétaire général sur les tendances démographiques mondiales (E/CN.9/2016/6) et sur les activités menées en 2015 par la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales (E/CN.9/2016/7).

M. GLENN FERRI, Bureau des recensements des États-Unis, a tenu à mettre l’accent sur le travail « remarquable » que la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU fait pour améliorer la faculté de la communauté internationale à traiter efficacement des questions actuelles et émergentes liées à la population et les intégrer à l’agenda du développement aux niveaux national et international.  Après avoir cité quelques exemples, le représentant a souligné que le travail de la Division a aidé la communauté internationale à en savoir plus sur les interrelations, les défis et les progrès de cette intégration.

M. FRANK SWIACZNY, Institut fédéral de recherche sur la population de l’Allemagne, a indiqué que son pays utilise de plus en plus les données démographiques dans sa coopération au développement, pour faciliter les planifications et décisions qu’il faut.  Le représentant a appelé l’ONU, en particulier sa Division de la population et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), à encourager les initiatives visant à coordonner et à appuyer, entre autres, le libre accès aux données, aux archives, aux méga données et autres moyens novateurs de collecter des données et de les diffuser.  Les données comparables au niveau infranational manquent toujours, a dit le représentant qui a encouragé tous les producteurs de données à les collecter mais aussi à les ventiler par localisation.  L’accès libre et illimité aux données est également essentiel pour que les universités et la société civile puissent jouer un rôle déterminant dans le développement.   

À son tour, M. HE ZHAOHUA, Commission nationale de la santé et de la planification familiale de la Chine, a salué le travail de la Division qui a, entre autres, lancé l’alerte sur les crises potentielles d’ici à 2030.  Le représentant a en effet retenu que l’augmentation de la population va se concentrer dans les pays qui sont à la traine du point de vue de la lutte contre la pauvreté et la faim, et de l’accès universel à la santé et l’éducation, sans compter l’égalité entre les sexes.  Ces faits, a souligné le représentant, exigent des États, des organisations internationales et des ONG qu’ils respectent les différences entres les réalités et les niveaux de développement des pays.  Pour promouvoir le Programme de développement durable à l’horizon 2030, le représentant a conseillé à la Division de la population d’aider les pays en développement à renforcer leurs capacités en matière de collecte et d’analyse des données et de projections démographiques.  La Division devrait aussi renforcer l’appui technique dans des domaines tels que la santé maternelle et infantile, la santé des adolescents, le vieillissement et les migrations.  Il a enfin prôné la promotion des échanges internationaux sur le suivi et l’évaluation des données sur la population et le développement.

Mme REIKO HAYASHI (Japon) a souligné l’importance des données sur la migration internationale par pays d’origine et par pays de destination.  Les données publiées par la Division de la population depuis 2013 et actualisées en 2015 fournissent le nombre de migrants internationaux d’un pays à l’autre alors qu’avant cela, les données ne montraient que les mouvements vers les pays riches.  Non seulement les données actuelles clarifient la situation de la migration Sud-Sud, mais elles offrent aussi des indications intéressantes sur la nature même de la migration internationale.  Par exemple, s’est expliquée la représentante, les chiffres du Japon sur le nombre de Japonais à l’étranger sont très différents de ceux que les pays de destination ont fournis à la base de données.  Cette différence, a tenté d’expliquer la représentante, se justifie peut-être par les différentes définitions du statut d’étranger et la manière dont les données sont collectées.  Quoi qu’il en soit, il s’agit là d’une indication précieuse sur la complexité de la migration internationale.  Les données sur les migrants internationaux étant bien souvent difficiles à obtenir à l’intérieur des frontières, la force de la Division de la population est qu’elle peut compiler des données transfrontières susceptibles d’expliquer la nature de la migration et de promouvoir le développement humain par la migration internationale.

Alors que la non prise en compte de la démographie a été une omission préjudiciable pour les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), M. WILLIAM MUHWAVA, Commission économique pour l’Afrique (CEA), a indiqué qu’aujourd’hui encore, 71% des pays africains n’ont pas transmis leur statistiques d’état civil et que neuf n’ont pas effectué de recensement depuis 2005, alors que les registres de population sont presque inexistants.  Face à cette situation, la feuille de route de la CEA est la Déclaration d’Addis-Abeba sur la population et le développement au-delà de 2014 et ses 88 engagements.  La CEA est d’ailleurs en train d’élaborer un « guide opérationnel » qui inclura aussi les objectifs de développement durable et la Charte africaine de la jeunesse, entre autres.

La CEA entend aussi aider les États à exploiter le dividende démographique et pour le « démystifier », elle entend approcher le concept sous l’angle du développement et comme le point d’entrée pour aborder les problèmes auxquels sont confrontés les jeunes en Afrique.  À cet égard, le représentant a dessiné les contours du « Compte du développement pour les jeunes » mis en place par la Commission.  La migration est l’un des objectifs majeurs de la Commission, a ajouté M. Muhwava.  La CEA entend construire une base solide fondée pour des politiques et des stratégies adéquates et soutenir ainsi des « cadres du savoir ».  La Commission travaille aussi sur le vieillissement dans un continent où la population jeune connaît déjà des changements rapides.  La proportion des plus de 60 ans a considérablement augmenté pendant les dernières décennies. 

Ces changements démographiques s’ajoutent à des transformations économiques et sociales importantes qui soulèvent la question de l’affaiblissement possible de la tradition familiale, laquelle est historiquement la fondation de sécurité économique du troisième âge.  À cet égard, la Commission entend mettre en place un Groupe de haut niveau sur la migration.  M. Muhwava a dénoncé la multiplication des projets sur la population en Afrique, la quantité « étonnante » des chevauchements.  La CEA, a-t-il fait valoir, a une Section de la population qui a « la capacité et la faculté de coordonner systématiquement les programmes pertinents en Afrique ».

La représentante de l’Iran a dit que son gouvernement mettra en œuvre la résolution conformément au contexte spécifique de son pays.

Son homologue de la Fédération de Russie s’est dit préoccupé de la tendance de certains États à imposer leurs programmes en recourant à des termes qui ne font pas l’unanimité.

Au nom de l’Union européenne, le représentant des Pays-Bas a prévenu que beaucoup restent à faire pour réduire les inégalités et réaliser l’autonomisation des femmes et des enfants.  Une meilleure collecte de donnée contribuera au progrès pour tous, y compris les plus vulnérables.  Il a remercié la Présidente de la Commission qui, avec cette résolution, a réussi à établir un équilibre entre toutes les positions tout en reconnaissant les compromis que les États ont faits.

La représentante du Qatar a souligné l’importance d’une mise en œuvre respectueuse des lois et des contextes nationaux.  Elle a regretté que les réserves de certains États sur la santé reproductive n’aient pas été prises en compte. 

Son homologue de l’Afrique du Sud a estimé que la résolution est le plus petit dénominateur commun.  Un certain nombre de questions méritent des clarifications et mon interprète les références à la « non-discrimination » comme visant toutes les personnes.  Elle a rappelé que la Constitution sud-africaine interdit toutes les formes de discrimination. 

Le représentant du Brésil s’est félicité de l’adoption de la résolution qui n’aurait pas été possible sans l’excellent travail accompli par les cofacilitateurs.

Explications de position sur le document final

La représentante des États-Unis a émis des réserves concernant le concept de « droit au développement » lequel ne fait l’objet d’aucun consensus international.  Elle a aussi souligné que son pays n’est pas partie à certains instruments internationaux mentionnés dans le document final dont la Convention internationale sur les droits de l’enfant.

Son homologue du Canada a regretté que le texte ne contienne pas un libellé « plus fort » sur l’égalité des sexes et qu’il n’insiste pas suffisamment sur le droit à la santé sexuelle et reproductive. 

La représentante de la Norvège, qui a fait le même reproche, s’est rangée derrière le consensus pour ne pas « affaiblir le résultat de la Commission ».

La déléguée de Trinité-et-Tobago a émis des réserves sur le terme de « mariage précoce » en ce qu’il est « vague et imprécis ».

Le représentant de Guyana a fait de même. 

L’Observateur permanent du Saint-Siège a regretté qu’une bonne partie de la discussion ait été consacrée sur des concepts comme la santé reproductive, les droits sexuels et reproductifs au lieu de se focaliser par exemple sur le dividende démographique.  Pour le Saint-Siège, l’avortement ne peut pas être considéré comme un droit ou une méthode de contraception.  Les Nations Unies n’ont pas créé de nouveaux droits de l’homme depuis la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, a-t-il rappelé.  

Le représentant de la Malaisie a déclaré que chaque État est souverain pour mettre en œuvre ou non la résolution.

Déclarations de clôture

Au nom du Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, son adjoint au développement économique, M. LENNI MONTIEL, a rappelé que sur le thème « Enrichir les données démographiques à l’appui du programme de développement pour l’après-2015 », les travaux de la Commission ont permis d’attirer l’attention sur la demande croissante de données désagrégées, un élément crucial pour veiller à ce que « personne ne soit laissé de côté ».  Il a estimé qu’en partageant leur expérience nationale en matière de données, les délégations ont donné des idées à d’autres pays, tout en guidant les activités régionales et internationales qui pourraient être menées pour aider les pays. 

M. Montiel a déclaré que 2016 est une année importante, car les États sont en train de faire en sorte que l’ONU tienne les promesses du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a félicité les membres de la Commission pour le consensus auquel ils sont parvenus et a jugé que les délibérations sur les méthodes de travail ont permis de réaffirmer le caractère central du Programme d’action du Caire et de souligner la nécessité pour la Commission de suivre également la mise en œuvre du Programme 2030.  Il a enfin salué la contribution du FNUAP à la réussite de cette session, se félicitant également de la participation de la société civile.

M. BABATUNDE OSOTIMEHIN, Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour la population, a dit que les deux résolutions adoptées rappelaient que le multilatéralisme est bel et bien vivant au sein de la Commission.  S’agissant du texte sur le thème spécial, il a souligné que la coopération entre les gouvernements, les universités, la société civile, le secteur privé et les partenaires au développement sera importante pour respecter les engagements pris et faire en sorte que les générations futures aient assez de compétences en matière de données pour bâtir les économies de la connaissance du XXIsiècle.  L’autonomisation des femmes est dans ce contexte tout aussi importante pour ne « laisser personne sur le côté » et multiplier les chances et les compétences de chaque jeune, y compris les adolescentes.

Si vous voulez avancer vite, marchez seul mais si voulez aller loin, marchez groupé, a conclu le Directeur exécutif en soulignant que le monde attend de la Commission qu’elle continue à offrir son leadership pour réaliser le droit de chaque femme et de chaque fille à la santé sexuelle et reproductive et à réaliser la vision d’un développement qui ne « laisse personne sur le côté ».

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