En cours au Siège de l'ONU

Conseil économique et social - Session de 2016,
11e & 12e séances - matin & après-midi
ECOSOC/6742

ECOSOC: « Au bout du compte, ce qu’il nous faut, c’est un système de développement de l’ONU qui marche », tranche le représentant du Canada

Le Conseil économique et social (ECOSOC) a poursuivi aujourd’hui son dialogue, entamé hier, sur les activités opérationnelles de développement menées dans les pays par les fonds, programmes et agences des Nations Unies.  Les intervenants ont reconnu que cette session sera déterminante pour le rôle du système de l’ONU dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  « On a beau retourner le problème dans tous les sens, ce qu’il nous faut, c’est un système de développement de l’ONU qui marche », a tranché le représentant du Canada.

Le dialogue de l’ECOSOC a maintenant entamé une étape critique qui est celle des propositions concrètes pour renforcer et enrichir le travail du système de l’ONU, a précisé le Vice-Président de l’ECOSOC.  « Le moment est venu d’agir », a-t-il dit.  « Nous avons l’occasion de configurer notre vision stratégique pour les premières années de la mise en œuvre du Programme à l’horizon 2030. »

« Notre travail n’est pas d’inventer l’ONU mais de la réinventer et de la redynamiser », a enchaîné la Vice-Présidente du Honduras, en résumant l’opinion de la majorité des participants.  Elle a plaidé pour une réforme « transformatrice » et pour que l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement devienne un véritable outil stratégique fournissant des directives sur le repositionnement du système de développement l’ONU.

Oui, ce système doit être redessiné pour l’adapter aux multiples défis identifiés dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Oui, il doit répondre aux besoins différents des pays et oui, il doit maintenir l’équilibre entre cohérence et spécificité.  Mais au bout du compte, a tranché le représentant du Canada, ce qu’il nous faut, c’est un système qui marche. 

Parlant aussi au nom de l’Australie, il a proposé trois changements fondamentaux pour ce système: produire des résultats partagés grâce à des mécanismes de financement et d’exécution multisectoriels et multipartites, parvenir à une plus grande coopération et à une plus grande coordination dans la planification, le financement, les opérations et l’établissement des rapports, et intégrer véritablement les piliers humanitaire, paix et développement. 

Son homologue de l’Union européenne est revenu sur le financement.  L’architecture financière du système de développement de l’ONU mérite une analyse plus détaillée, a-t-elle estimé.  Il faut réfléchir davantage à la manière dont le volume et les cibles des fonds s’alignent avec les plans stratégiques.  Le potentiel du système à mobiliser les ressources, a-t-elle reconnu, demeure largement sous-exploité.  En l’occurrence, il faut élargir la base des donateurs par des moyens novateurs dont des partenaires public-privé et multipartites, et des mécanismes de financement commun.

Maintenant que les ressources de base ont confirmé leur tendance à la baisse, on ne saurait trop souligner, a insisté, à son tour, le représentant de la Thaïlande, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, l’importance de la cohérence et de l’efficacité.  Il faut que le système de l’ONU sépare clairement la comptabilité des actions de développement de celle des actions humanitaires pour permettre aux États de bien suivre l’affectation des fonds.  Le système doit aussi préserver l’équilibre entre les ressources de base et les fonds extrabudgétaires et se garder d’utiliser les premières pour préfinancer des projets qui devraient l’être par les seconds. 

L’ECOSOC poursuivra ses travaux demain à partir de 10 heures.  

ACTIVITÉS OPÉRATIONNELLES DU SYSTÈME DES NATIONS UNIES AU SERVICE DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE POUR LE DÉVELOPPEMENT: SUITE DONNÉE AUX RECOMMANDATIONS DE POLITIQUE GÉNÉRALE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ET DU CONSEIL (A/71/63–E/2016/8)

Mise à jour sur le dialogue du Conseil économique et social (ECOSOC) sur le positionnement à plus long terme du système des Nations Unies, dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030

M. ALEJANDRO PALMA CERNA (Honduras), Vice-Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a expliqué que le dialogue de l’ECOSOC sur le positionnement à plus long terme du système des Nations Unies, dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, reprend à son compte « l’esprit de l’ambition et du renouvellement » des accords historiques qui ont marqué l’année 2015.   

Au cours des discussions, les opinions des États Membres ont convergé sur des priorités clefs.  Tout d’abord, a expliqué M. Palma Cerna, nous devons identifier clairement les fonctions sur lesquelles le système de développement devrait se concentrer afin de traduire les promesses en actes, compte tenu de l’interconnexion entre les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030. 

Sur le terrain, l’ONU doit pouvoir fournir un appui adapté aux contextes et aux besoins, qu’il s’agisse des pays à revenu intermédiaire ou des pays en crise.  Ensuite, a-t-il poursuivi, « la forme ne doit pas supplanter le fond » et « les mécanismes de financement ne doivent pas dicter aux Nations Unies ce qu’elles doivent faire ou pas ». 

Pour M. Palma Cerna, la cohérence et l’orientation stratégique au niveau du système de l’ONU sont essentielles.  Ainsi les fonctions de l’ECOSOC et du Forum politique de haut niveau doivent-elles être renforcées au niveau mondial.  De même, certains des mécanismes existants devront être revus sur le terrain pour être à la hauteur des défis posés par le nouveau Programme.  « Ce sont les pays qui doivent mener la danse », a-t-il insisté.  Les plans doivent être incorporés dans les programmes nationaux de développement durable.

Le dialogue de l’ECOSOC a maintenant entamé une étape critique qui est celle des propositions concrètes pour renforcer et enrichir le travail du système de l’ONU.  « Le moment est venu d’agir », a conclu le Vice-Président.  « Nous avons l’occasion de configurer notre vision stratégique pour les premières années de la mise en œuvre du Programme à l’horizon 2030 ».

À cet égard, une table ronde s’est tenue sur le thème: « Comment renforcer la coordination et l’intégration du pilier développement, du pilier humanitaire et du pilier de la paix dans les travaux du système des Nations Unies ».

« Si nous voulons réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030, nous devons régler les conflits et bâtir des sociétés pacifiques », a souligné l’oratrice principale, la Baronne VERMA, Sous-Secrétaire d’État parlementaire au Département du développement international (DFID) du Royaume Uni, en parlant en particulier des crises qui s’éternisent, dont celle en Syrie.

« Ne pas être à la hauteur d’un des piliers du Programme veut dire ne pas pouvoir réaliser les autres », a insisté la Baronne Verma.  Le prochain Sommet mondial sur l’action humanitaire, les réunions sur les migrants et les dialogues de l’ECOSOC sont autant d’occasions de démontrer que l’ONU est prête à assumer son rôle central, a encouragé la Sous-Secrétaire d’État.  Les volets humanitaire, paix et de développement doivent être actionnés de manière simultanée.  Dans ce contexte, il faut se concentrer sur les causes profondes des conflits et l’amélioration de la gouvernance et de l’état de droit.  L’ONU doit être plus souple et aller dans les régions qui en ont le plus besoin et où les gens sont les plus vulnérables.  En s’améliorant, l’initiative « Unis dans l’action » peut rendre l’ONU plus efficace, laquelle doit aussi, a conseillé la Sous-Secrétaire d’État, attirer de nouveaux donateurs, notamment le secteur privé.

Il est évident, a renchéri Mme AMEERAH HAQ (Bangladesh), ancienne Secrétaire générale adjointe à l’appui aux missions de l’ONU, que les volets humanitaire, paix et développement fonctionnent encore largement de manière distincte, alors que le système a besoin d’unir ses forces pour parvenir à de meilleurs résultats. 

L’ONU doit mettre en branle tous ses outils de prévention, de règlement des conflits et de redressement économique.  Des centaines de milliards de dollars sont dépensés chaque année dans des interventions militaires ou des réponses humanitaires, au lieu d’être investis dans les filets de sécurité pour prévenir les conflits et remédier à leurs causes profondes.  Les avantages comparatifs de l’ONU sont pourtant clairs, a estimé l’ancienne Secrétaire générale adjointe, en arguant que les acteurs du développement peuvent fournir une aide en amont pour renforcer les facteurs de paix; les envoyés spéciaux et médiateurs étant davantage mis à contribution.

« Pourquoi, s’est-elle interrogée, cette fragmentation des activités qui rend pourtant l’intégration très difficile »?  Mme Haq a proposé que le Secrétaire général fixe des objectifs bien définis pour faire en sorte que l’ONU coordonne réellement ses activités autour des priorités.  Il faut remplacer « la mentalité bureaucratique centrée sur le Siège de l’ONU à New York » par « la mentalité centrée sur l’importance de faire la différence sur le terrain ».

« Unis dans l’action », a été salué, dans ce cadre, par l’animateur du débat, M. ALEX ALEINIKOFF, Attaché de recherche de l’Initiative politique mondiale de la Columbia University.  Il a encouragé l’idée d’un leadership fort et d’un financement coordonné et plus souple.

Les Nations Unies vont devoir gérer un ensemble de responsabilités beaucoup plus complexes que par le passé, lesquelles impliquent le renforcement des capacités organisationnelles des pays en développement, a prévenu Mme STEPHANIE HOCHSTETTER SKINNER-KLEE, Présidente du Conseil d’administration du Programme alimentaire mondial (PAM.  La prévention des conflits et la consolidation de la paix constituent « un fil conducteur commun ».  Elle a vu dans l’appropriation nationale un « élément fondamental de la recherche de la paix et du développement durable ».  Elle a, à son tour, appelé à un changement de mentalités.

L’échelle des crises et des défis actuels exige en effet des réponses intégrées de la part du système des Nations Unies, a reconnu Mme HELEN CLARK, Présidente du Groupe des Nations Unies pour le développement et Administratrice du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).  « En cherchant des solutions, essayons de nous rappeler que ni les objectifs de développement durable, ni la paix ni la sécurité ne seront atteints s’il y a des inégalités trop importantes, y compris entre les sexes », a-t-elle argué.  Le PNUD, a-t-elle affirmé, cherche à obtenir des cadres d’assistance humanitaire plus cohérents avec ses partenaires, et estime que les mandats des missions de la paix devraient dès le départ tenir compte des diverses équipes de l’ONU, appuyer leur travail et respecter leurs prérogatives.  Les coordonnateurs résidents et humanitaires doivent pouvoir jouer leur rôle de chef de file et cela est d’autant plus important que non seulement les ressources disponibles sont limitées mais le Programme 2030 intervient à un moment où l’économie mondiale est plus fragile que lors du lancement des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  « Aujourd’hui, chaque dollar dépensé pour le développement durable et le règlement des crises compte ».

En 2015, 20 milliards de dollars ont été demandés par les agences humanitaires, soit 600% de plus qu’en 2005.  Aujourd’hui, a indiqué M. STEPHEN O’BRIEN, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, ce sont 125 millions de personnes dans le monde qui sont touchées par des crises humanitaires.  Or, les cycles de financement courts ne peuvent plus répondre aux besoins.

Le premier Sommet humanitaire de l’histoire de l’ONU, qui se tiendra en mai prochain à Istanbul, « offrira une occasion sans pareil d’ouvrir une nouvelle ère », a martelé M. O’Brien.  Il a plaidé pour « un leadership mondial » et le respect des normes humanitaires.  Il faut « changer la vie des gens, se concentrer sur les groupes les plus vulnérables et investir dans l’humanité ».  Anticiper les crises, mieux s’y préparer et agir sur la base des risques signalés est tout aussi important.  Il faut renforcer les capacités locales et « abandonner les approches à court terme ».  Après avoir parlé de « décloisonnement », M. O’Brien a proposé de « passer à une planification pluriannuelle en matière humanitaire ».

Il faut peut-être envisager « un nouveau système réunissant les bailleurs de fonds, le Conseil de sécurité et le nouveau gouvernement d’un pays et qui permette de mettre en commun toutes les ressources sous la houlette d’un seul responsable », a estimé M. PARFAIT ONANGA-ANYANGA, Représentant spécial du Secrétaire général pour la République centrafricaine, via vidéo depuis Bangui.  La République centrafricaine, s’est-il félicité, se réveille d’un cauchemar et commence à rêver, après avoir fêté l’élection d’un nouveau Président.  L’élection, qui a mis un terme à une très longue transition politique, permet de revenir à l’ordre constitutionnel, s’est-il réjoui, car « sans droits de l’homme tout le travail que nous réalisons ne servirait à rien ».  Le Représentant spécial a salué l’appui fourni par l’ONU et notamment par le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) qui a facilité le vote des réfugiés. 

Mais il a rappelé qu’en République centrafricaine, 138 enfants sur 1000 meurent avant l’âge de 5 ans.  « L’inclusion de l’objectif 16 dans la liste des objectifs de développement durable est une avancée considérable », a-t-il estimé en parlant de « la promotion de sociétés pacifiques et inclusives pour le développement durable, l’accès à la justice pour tous et le renforcement des institutions responsables et efficaces à tous les niveaux. »

« Si nous travaillions de façon cloisonnée en Haïti, nous n’arriverions à rien », a renchéri M. MOURAD WAHBA, Représentant spécial adjoint du Secrétaire général en Haïti, via vidéo.  Il a décrit la situation d’un pays frappé par des crises humanitaires récurrentes telles que le choléra, la sécheresse, le déplacement des populations et la violence urbaine qui trouvent leur origine dans la situation économique catastrophique du pays.  En Haïti, les deux tiers de la population sont classées comme pauvres et un quart vit dans l’extrême pauvreté.  Le Représentant spécial a surtout souhaité plus de cohérence au niveau du financement.

« Allons-nous pouvoir travailler à partir de ce qui existe déjà? », s’est demandée la Norvège, dans la discussion interactive qui a suivi.  Elle a fait observer que le coordonnateur résident n’a pas le pouvoir de prendre des décisions.  « Quels éléments de la réforme de l’humanitaire et de la consolidation de la paix pourrait être mieux pris en compte? », s’est demandé l’Australie, qui parlait aussi au nom du Canada.  La sécurité est essentielle pour parvenir à la stabilité, a insisté l’Iraq.  Lorsque nous voulons régler les conflits, nous devons penser aux stratégies de sortie mais également aux investissements dans la stabilité et la paix ».  Les projets à impact rapide sont bons mais il faut penser au long terme, a préconisé l’Iraq.

Renchérissant sur le long terme, les Maldives ont, au nom de l’Alliance des petits États insulaires, souligné que « lorsque une catastrophe naturelle nous touche, il ne s’agit pas seulement d’une menace humanitaire immédiate mais aussi d’une menace pour les efforts de développement ».  Il faut donc consolider les liens entre développement et action humanitaire par une coordination accrue entre les différentes institutions des Nations Unies.  Il faut, ont insisté les Maldives, recenser les moyens de régler les problèmes transversaux avec une bonne allocation des ressources et un partage judicieux des responsabilités.

Le PAM a parlé de la promotion de l’évaluation stratégique dans les situations de conflit et postconflit.  Le PNUD a évoqué la réflexion sur la planification intégrée menée au sein du Groupe indépendant de haut niveau chargé d’étudier les opérations de paix.  Le « leadership consensuel », a prévenu le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), dépendra d’un appui renforcé des donateurs, de la prévisibilité des fonds et de la mise en commun des objectifs.  Il faut investir dans l’humanitaire et dans les capacités locales pour accroître la résilience sur le terrain et ne pas tout miser sur les besoins humanitaires des conflits en oubliant ceux liés aux catastrophes naturelles.

Les mandats des missions de la paix doivent être mieux conçus, a argué à son tour, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), en prônant l’implication dans la préparation desdits mandats des équipes de pays de l’ONU et des acteurs du développement pour pouvoir « prévoir assez tôt des stratégies de sortie ».  Il faut donner plus de pouvoir aux coordonnateurs résidents.  « L’autorité se gagne par la capacité à construire le consensus, à arbitrer les besoins et à allouer les fonds », a commenté la Mission intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Il va falloir voir comment l’ONU va réussir à agir de manière simultanée et non séquentielle. 

Table ronde sur le thème « Modalités organisationnelles: comment renforcer la collaboration interinstitutions dans la présence organisationnelle aux niveaux national, sous-régional et régional? »

Notre travail n’est pas d’inventer l’ONU, a répondu Mme ROSSANA GUEVARA, Vice-Présidente du Honduras, mais de la réinventer et de la redynamiser.  Le Honduras, a-t-elle dit pour illustrer ses propos, abrite neuf bureaux de pays de l’ONU gérant un budget global de 9 millions de dollars, sans compter les fonds extrabudgétaires qui sont importants par rapport aux autres pays d’Amérique latine des Caraïbes.  La Vice-Présidente a aussi fait observer que toutes les activités opérationnelles de développement de l’ONU représentent moins de 10% de l’aide publique au développement (APD) que reçoit le Honduras, classé parmi dans la fourchette la plus basse des pays à revenu intermédiaire.  En effet, plus des deux tiers de la population vit dans la pauvreté et une personne sur 10, dans l’extrême pauvreté, un chiffre qui monte à six dans les zones rurales.  Dans un tel contexte, l’APD du Honduras est donc assez modeste.  Le pays compte donc sur ses ressources propres et les flux privés internationaux pour financer son développement.  Or, pour réaliser les objectifs de développement durable, le Honduras aura besoin de l’APD et d’une assistance technique.  Le Honduras est d’ailleurs l’un des sept pays pilotes du Programme régional du Département des affaires économiques et sociales (DAES) sur le renforcement des capacités dans l’intégration des objectifs de développement dans les stratégies nationales de développement.  La coopération avec l’ONU laisse le siège du conducteur au pays qui s’assure d’une bonne prise en compte des priorités nationales.

En conséquence, a poursuivi la Vice-Présidente, lorsque nous parlons de repositionner le système de développement de l’ONU, nous devons d’abord et avant tout faire en sorte que toutes les activités se concentrent sur le renforcement des capacités.  L’ONU doit être assez souple pour pouvoir apporter une assistance technique différenciée et adaptée aux besoins changeants sur le terrain.  Malheureusement, s’est désolée la Vice-Présidente, nous savons comment le travail de l’ONU peut être fragmenté.  La non-représentativité de la gouvernance et l’imprévisibilité des fonds ont empêché la cohérence et l’efficacité des politiques de l’ONU.  La coopération entre ses entités est en outre comprise par la course aux fonds, les dérives et les pratiques éculées. 

Vis-à-vis des pays à revenu intermédiaire, l’ONU doit avoir une nouvelle stratégie, a asséné la Vice-Présidente.  L’Organisation doit renforcer sa capacité analytique, stratégique, novatrice et multisectorielle pour réunir les données et les traduire en normes et en politiques adaptées à chaque pays.  « Le bras opérationnel doit informer le bras normatif » pour que l’ONU soit capable de mettre en place des solutions ciblées et taillées sur mesure dans chaque pays à revenu intermédiaire.  Cela veut dire, s’est expliquée la Vice-Présidente, fonctionner comme un système et pas comme « le metteur en scène d’un seul et unique scénario ».  Les priorités spéciales des pays à revenu intermédiaire, qui sont fournisseurs d’aide mais aussi demandeurs d’une aide très spécifique, exigent de l’ONU qu’elle soit un véritable partenaire, le but ultime étant le partage des connaissances, le renforcement de la coopération Sud-Sud et triangulaire, l’offre de conseils et l’avancement des pays.  Cet avancement, a précisé la Vice-Présidente, ne veut pas forcément dire accès à la catégorie des pays à revenu élevé car le Honduras est convaincu de la pertinence de l’index multidimensionnel de pauvreté qui tient compte des facteurs socioculturels affectant la qualité de vie.

L’interconnexion horizontale de notre monde exige des institutions interconnectées, a insisté la Vice-Présidente.  Le système de développement de l’ONU ne doit pas seulement se laisser guider par ses aspirations.  Elle doit avoir une vraie feuille de route sur la façon de les réaliser.  Il faut donc des réformes « radicales et ambitieuses » reposant sur une vision couplée à des étapes pragmatiques et séquencées.  Il faut une réforme « transformatrice » et l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement devrait devenir un véritable outil stratégique pour fournir des directives sur le repositionnement du système de développement l’ONU.  On pourrait d’ailleurs songer à rebaptiser ce système pour garder vivace l’intérêt des capitales, a suggéré la Vice-Présidente, avant de conclure et d’inviter l’ECOSOC à formuler le cadre nécessaire pour faire en sorte que le système puisse réellement répondre aux besoins de notre temps.

Beaucoup d’espoirs ont été placés dans le Programme « révolutionnaire » de développement durable à l’horizon 2030.  M. DAVID NABARRO, Conseiller spécial du Secrétaire général sur le Programme de développement durable à l’horizon 2030, a salué un Programme qui conduira à « une renaissance » de l’action internationale et qui exige des gouvernements et de leurs peuples qu’ils avancent ensemble. 

« On ne peut plus travailler comme avant », a acquiescé Mme ALICIA BÁRCENA, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  Elle a reconnu la nécessité de tenir compte des pratiques exemplaires et des spécificités de chaque pays, tout en préservant les politiques sociales pour ne pas faire marche arrière.  La présence dans un pays n’est pas forcément la meilleure façon pour l’ONU de répondre aux besoins.  Certains pays peuvent être aidés, aux niveaux régional et sous-régional.  Il faut dégager un consensus régional et le porter à la connaissance de la toute la planète, a milité Mme Bárcena, en évoquant, à cet égard, la Vision 2063 de l’Union africaine.  La priorité, a-t-elle ajouté, doit être accordée aux pays les moins avancés (PMA) et aux pays en développement sans littoral

Il faut, a-t-elle précisé, intégrer les objectifs de développement durable dans les plans nationaux et les cadres fiscaux et renforcer les capacités statistiques.  En Amérique latine, par exemple, l’évasion fiscale représente une perte de 300 milliards de dollars.  Soulignant que, dans le monde, 62 personnes ont autant que trois milliards d’autres, elle a plaidé pour « un nouveau keynésianisme » pour le développement durable. 

En l’occurrence, les gouvernements auront besoin de l’appui de tous les partenaires, a poursuivi M. MIKE KELLEHER, Conseiller principal à la Banque mondiale qui, a-t-il souligné, travaille avec l’ONU sur des dizaines de projets, dont un accord-cadre pour aider les institutions des pays fragiles à surmonter les crises et les conflits.  La mise en commun des objectifs permet de meilleurs résultats, comme en Tanzanie.

Avec des conseils techniques en amont, les gouvernements peuvent améliorer la qualité des dépenses publiques.  La collecte des données est, dans ce cadre, un des principaux outils.  À ce stade, a confié le Conseiller principal, la Banque mondiale a identifié 29 pays qui n’ont aucune donnée sur la pauvreté.  Il a insisté sur le rôle du secteur privé qui, depuis 10 ans, a créé 80% des emplois dans le monde.   

L’important c’est l’appropriation nationale, a dit Mme NARDOS BEKELE-THOMAS, Cabinet du Secrétaire général.  Elle a cité le cas du Kenya dont le Président a signé le Plan-cadre pour le développement avec tous les partenaires du développement, étant entendu que les parties doivent ensemble mobiliser les ressources et réaffecter celles qui n’auront pas été absorbées.  « Les Nations Unies, c’est chacun d’entre vous », a souligné Mme Bekele-Thomas, en vantant les mérites du Plan-cadre et de son principe: « un pays et un plan, qui englobe toutes les dimensions du développement ».  « Le Plan-cadre est un pacte entre le gouvernement et les citoyens », a-t-elle résumé.

L’oratrice a insisté sur « la révolution des données » dans de nombreux pays et sur la nécessité de créer des indicateurs et des jalons pour suivre la progression des objectifs de développement durable.    

Appropriation nationale, leadership et engagement au plus haut niveau de toutes les parties prenantes, a insisté, à son tour, Mme SAHAR NASR, Ministre de la coopération internationale de l’Égypte.  Elle a dénoncé le fait que les consultations avec les agences de l’ONU sont trop exhaustives pour recenser toutes les difficultés.  Les agences de l’ONU travaillent avec « des clients donnés sur des questions données » alors que bien souvent ce sont des solutions intégrées qu’il faut.

Il faut agir en fonction de la demande, a insisté la Ministre car les activités « dictées » par les bailleurs de fonds « ne sont pas tenables ».  Le système de l’ONU doit être plus « réactif » et appuyer véritablement le renforcement des capacités des institutions nationales, dans le cadre d’une approche transversale et intégrée. 

L’expérience des mécanismes régionaux n’est pas suffisamment reflétée dans les documents alors qu’ils pourraient produire les données nécessaires à une bonne application du Programme de développement durable à l’horizon 2030, a commenté l’Argentine pour laquelle la question d’assurer la complémentarité entre les efforts des commissions régionales et ceux des bureaux régionaux des fonds et programmes de l’ONU.  L’aide doit en effet tenir compte des spécificités régionales, a renchéri Trinité-et-Tobago, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), en insistant sur l’impact des catastrophes naturelles sur la dette extérieure.  Les pays des Caraïbes, qui sont des pays à revenu intermédiaire ou élevé, appuient tous les appels en faveur d’une plus grande intégration mais respectueuse des mandats individuels des institutions.  Trinité-et-Tobago a regretté que la coordination se fasse au cas par cas et demandé l’établissement de « cartes d’identité » régionales et sous-régionales.

La Finlande a salué l’idée des centres de service partagés entre les institutions de l’ONU et demandé comment le système pourrait les améliorer.  Quelles sont les caractéristiques essentielles de la présence des Nations Unies dans le nouveau contexte humanitaire? a voulu savoir l’Allemagne.  Au nom de l’Alliance des petits États insulaires, les Maldives ont rappelé que « la Voie à suivre de Samoa », le dernier Programme d’action sur les petits États insulaires en développement, a demandé explicitement au système des Nations Unies d’améliorer la collaboration entre et à l’intérieur des régions.  Quels mécanismes institutionnels ont été mis en place à cette fin?  Almaty pourrait être choisi pour abriter un centre régional humanitaire, a proposé le Kazakhstan.

Débat général

Au nom du Groupe des 77 et de la Chine, M. VIRACHAI PLASAI (Thaïlande) a dit attendre l’intensification des activités opérationnelles de développement, en particulier dans la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Dans ce cadre, il a insisté sur le renforcement des capacités nationales et la prise en compte des différents niveaux de développement entre les pays.  Le représentant a demandé que les organismes du système de développement de l’ONU incluent dans leurs rapports les efforts qu’ils ont menés effectivement, la manière dont ils les ont intensifiés pour traiter des causes sous-jacentes de la pauvreté et de la famille, les activités qu’ils ont menées pour promouvoir le partage des pratiques exemplaires et la manière dont ils ont œuvré à l’intégration du Programme 2030 dans la planification de leurs activités.

Maintenant que les ressources de base ont confirmé leur tendance à la baisse, on ne saurait trop souligner, a insisté le représentant, l’importance de la cohérence et de l’efficacité dans le système de développement de l’ONU.  S’il faut saluer l’initiative « Unis dans l’action », il ne faut pas pour autant imposer des solutions à taille unique.   Il faut aussi, a poursuivi le représentant, séparer clairement la comptabilité des actions de développement de celle des actions humanitaires pour bien suivre l’affectation des fonds.  En l’occurrence, il est urgent de rétablir l’équilibre entre les ressources de base et les fonds extrabudgétaires.  Le représentant a mis en garde les entités de l’ONU contre la tendance à utiliser les ressources de base pour préfinancer des projets qui devraient l’être par des fonds extrabudgétaires.  Il a encouragé les entités de l’ONU à élargir la base de leurs donateurs.  Le représentant a aussi souligné l’importance qu’il y a à assurer diversité, répartition géographique équitable et égalité des sexes dans le système des coordonnateurs résidents.  Il a plaidé pour le renforcement du Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud.  

Mme ANNE POORTA (Pays-Bas), au nom de l’Union européenne, a, à son tour, souligné que le Programme 2030 exige un changement de mentalité, une collaboration entre les disciplines et l’abandon de l’approche en silos.  Il nous faut, a-t-elle insisté, un système de développement de l’ONU fort, mieux coordonné et plus efficace.  Les États devraient éviter de contraindre les entités de l’ONU à se battre entre elles.  Ils devraient plutôt leur montrer la nécessité de travailler en complémentarité et en partenariat, grâce à des programmations communes, des rapports harmonisés ou des cadres de gestion.  L’ECOSOC et le Groupe de développement des Nations Unies devraient jouer un rôle de coordonnateur pour promouvoir la cohérence du système et de meilleures synergies entre les fonctions normatives et opérationnelles.  Il est essentiel, a poursuivi la représentante, de renforcer le lien entre « développement » et « humanitaire » pour être plus efficace face aux États fragiles et affectés par les conflits.  Le système de l’ONU doit être prêt à faire avancer l’égalité entre les sexes en tant qu’objectif spécifique et multisectoriel.  

L’architecture financière du système de développement de l’ONU mérite une analyse plus détaillée, a estimé le représentant.  Il faut réfléchir davantage à la manière dont le volume et les cibles des fonds s’alignent avec les plans stratégiques.  Le potentiel du système à mobiliser les ressources demeure largement sous-exploité, a reconnu la représentante.  En l’occurrence, il faut élargir la base des donateurs par des moyens novateurs dont des partenaires public-privé et multipartites, et des mécanismes de financement commun. 

Au nom des pays les moins avancés (PMA), M. MASUD BIN MOMEN (Bangladesh) a reconnu que les fonds, les programmes et les agences des Nations Unies devaient se réaligner pour mettre en œuvre le Programme de développement durable à l’horizon 2030.  En tant que groupe vulnérable, les PMA méritent qu’on leur accorde la plus haute attention.  S’il s’est félicité de constater que 74% des ressources du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) allaient aux PMA, il a toutefois noté une tendance « alarmante » à la baisse, y compris les ressources de base.  D’après le représentant, les activités opérationnelles de développement en faveur des PMA doivent se poursuivre, au lieu de porter sur des petits projets.

Il s’est dit préoccupé par le fait qu’un certain nombre d’entités des Nations Unies mènent leurs travaux en se fondant sur le concept du niveau de revenu des pays, au lieu de se concentrer sur le concept « PMA ».  Les activités de l’ONU en faveur de ces pays doivent être prévisibles et croissantes, a-t-il insisté.  Il a enfin jugé impératif que tous les PMA aient des équipes de pays de l’ONU sur leur territoire.  Toutes les entités du système doivent pouvoir faire des recommandations pour relever les défis auxquels ces pays font face.

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires, M. AHMED SAREER (Maldives) a rappelé que le but ultime des efforts entrepris était de « transformer la vie des gens ».  Il a souligné la nécessité d’intégrer le Programme 2030 et la Voie de Samoa dans toutes les activités du système de développement des Nations Unies.  La nature multidimensionnelle de ce Programme demande que l’on trouve les moyens d’appliquer les objectifs environnementaux à tous les niveaux.  Préoccupé par le déséquilibre « massif » entre les ressources de base et les autres ressources, le représentant a estimé que « les fonctions du système d’aide devait être appuyées par ses pratiques de financement et non dictées par elles comme cela semble être la tendance actuelle ».

Pour les petits États insulaires en développement, il est indispensable d’édifier et de renforcer les capacités de mise en œuvre, a-t-il poursuivi.  Il faut « briser les silos » et faire en sorte que tous les fonds et programmes des Nations Unies agissent ensemble dans les domaines où les synergies, notamment en matière de données, peuvent contribuer à l’application du Programme 2030, au lieu de l’entraver.  Il serait bien également de renforcer la diversité du système des coordonnateurs résidents pour mieux représenter les communautés locales.

Également au nom de l’Australie, M. MICHAEL GRANT (Canada) a estimé qu’au bout du compte, ce qu’il faut, c’est un système de développement de l’ONU qui fonctionne.  Ce qu’il faut, c’est un système moins fragmenté et débarrassé des chevauchements et de la concurrence.   Il faut donc produire des résultats partagés grâce à des mécanismes de financement et d’exécution multisectoriels et multipartites.  Il faut aussi une plus grande coopération et une plus grande coordination dans la planification, le financement, les opérations et l’établissement des rapports.  Il faut enfin une plus grande intégration des piliers humanitaires, paix et développement.  Le représentant a espéré que le nouvel examen quadriennal des activités opérationnelles de développement contribuera à combler les lacunes identifiées dans le rapport du Secrétaire général. 

Il a insisté sur la rationalisation des mandats et la clarté des objectifs.  Il a répété la nécessité d’intégrer l’humanitaire, la paix et le développement et d’élaborer un système de financement au niveau des pays.  Il faut aussi rationaliser la présence de l’ONU dans les pays et au niveau régional et institutionnaliser la gestion basée sur les résultats, assurer la standardisation de la méthodologie et des instruments, au niveau des pays et à travers tout le système.  Il faut encore, a poursuivi le représentant, repenser le système des coordonnateurs résidents pour leur donner le leadership, l’autorité, la responsabilité, les ressources et la capacité nécessaires au travail qu’ils font pour le système de l’ONU, et ce, de manière véritablement intégrée.  Il faut, dans ce cadre, considérer la société civile et le secteur privé comme des partenaires essentiels de l’ONU dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Au cœur de tous ces éléments, réside la nécessité d’une nouvelle architecture de gouvernance du système de développement de l’ONU au niveau des pays et au niveau mondial.  Un Groupe de développement des Nations Unies doté de plus d’autorité et étant plus comptable de ses actes est nécessaire ainsi qu’un système actualisé de financement, avec des incitations à la collaboration et des mécanismes de financement commun, s’est résumé le représentant.

Au nom de la Communauté des Caraïbes, Mme RUEANNA HAYNES (Trinidad-et- Tobago), a estimé que le système de développement des Nations Unies devait continuer d’améliorer sa souplesse et son efficience.  La CARICOM note qu’il a des progrès au niveau national pour améliorer la cohésion du système mais estime qu’il faut une démarche plus coordonnée s’agissant de la planification sur le terrain pour gérer les crises.  La représentante a relevé le manque de coordination au niveau sous-régional et a exprimé sa préoccupation face à la tendance à la diminution des ressources de base qui permettent pourtant plus de souplesse.  Il faut plus de fonds et des fonds ciblés et prévisibles.  Enfin, la collecte des données doit aller de pair avec le renforcement des capacités.

Mme KRISTINA PERSSON, Ministre du développement stratégique et de la coordination de la Suède, a considéré que l’ONU avait un rôle normatif et de rassemblement unique qu’il faut sauvegarder et améliorer, tout en s’adaptant au paysage changeant du développement.  À cet égard, l’émergence d’un consensus sur les fonctions que devrait remplir le système des Nations Unies marque une avancée vers un système moderne et fort.  À cet égard, elle a jugé important pour l’ONU de générer, promouvoir et nourrir des partenariats et de fournir un appui à l’intégration et à la coordination des politiques.  La Ministre a mis l’accent sur le rôle de l’ONU dans les PMA affectés par les conflits ou d’autres crises humanitaires.  De même, l’Organisation doit rester pertinente pour tous les pays, y compris ceux à revenu intermédiaire et élevé.  Enfin, l’Organisation a un rôle indispensable à jouer pour suivre la mise en œuvre du Programme 2030.

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