En cours au Siège de l'ONU

Quarante-huitième session,
8e & 9e séances – matin & après-midi
POP/1041

La Commission de la population et du développement achève ses travaux sans parvenir à adopter un texte sur le programme de développement pour l’après-2015

Après plus de six jours de négociations, les membres de la Commission de la population et du développement ne sont pas parvenus aujourd’hui à adopter par consensus un projet de résolution intitulé « Intégration des questions de population dans les programmes de développement durable, y compris dans le programme de développement pour l’après-2015 ».

La Présidente de la Commission, Mme Bénédicte Frankinet (Belgique), après plusieurs suspensions de séance pour permettre une poursuite des négociations, n’a pu que constater les profondes divergences de vues concernant ce texte et a donc décidé de le retirer.

Elle n’a donc pas accédé à la demande du représentant du Nigéria qui, au nom du Groupe des États d’Afrique, avait souhaité une poursuite des discussions, puisque le texte en l’état imposait aux États Membres, selon lui, « des engagements intenables et inacceptables ».

Avant de le retirer, Mme Frankinet n’avait pas fait mystère des difficultés entourant l’adoption de ce projet de résolution, qu’elle avait elle-même élaboré dans un esprit de consensus.  Elle a en effet expliqué que ce texte était un « document équilibré » et une « tentative honnête, de prendre en compte, dans la mesure du possible, les vues de chacun ».

Dans ses remarques de clôture, le Directeur de la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, M. John Wilmoth, a dit son vif désappointement devant l’échec de la Commission.  « C’est de mémoire la première fois que cela arrive », a-t-il dit.

Le Directeur exécutif du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), M. Babatunde Osotimehin, a également dit sa profonde déception et affirmé que le texte de la Présidente contenait « tous les éléments que nous souhaitions ».  Il est important pour la communauté internationale de se montrer tolérante et de prendre en compte la véritable réalité des pays, a-t-il dit.

Certains États ont pris la parole pour dire également leur regret du retrait du texte.  Le délégué de la Suisse a affirmé que ce texte représentait un bon équilibre entre les diverses positions exprimées par les États Membres.  

Son homologue des Pays-Bas a affirmé que des appels forts avaient été lancés lors de la session pour que les droits sexuels et procréatifs soient consacrés dans le projet de résolution.  « Chaque individu a le droit de décider librement, sans coercition, sur tout ce qui touche à sa santé ou à son corps », a-t-il déclaré.

Certaines délégations ont néanmoins tenu à marquer leur désaccord avec le projet de résolution mais aussi avec la manière dont les négociations ont été conduites.  Le représentant de Nauru a ainsi dit sa vive préoccupation devant les tentatives du FNUAP de « discréditer » les positions de Nauru sur les droits sexuels et procréatifs.

Sur le plan procédural, la Commission a adopté deux décisions, l’une intitulée « Organisation future et méthodes de travail de la Commission de la population et du développement1 », l’autre intitulée « Thème spéciaux de la Commission en 2013 et 2017 », par laquelle elle a décidé que sa quarante-neuvième session en 2016 serait consacrée au thème suivant « Suivi du programme de développement pour l’après-2015: consolider les données démographiques2 ».

La Commission a en outre pris note du rapport du Secrétaire général intitulé « Exécution du programme et bilan des activités menées dans le domaine de la population en 2014: Division de la population (Département des affaires économiques et sociales3) » et du projet de programme de travail de la Division pour l’exercice biennal4 2016-2017.

Enfin, la Commission a tenu la première séance de sa quarante-neuvième session pour élire sa nouvelle Présidente, Mme Mwaba Patricia Kasese-Bota, de la Zambie. 

1E/CN.9/2015/L.5; 2E/CN.9/2015/L.4; 3E/CN.9/2015/6; 4E/CN.9/2015/CRP.1

DÉBAT GÉNÉRAL SUR L’EXÉCUTION DU PROGRAMME ET FUTUR PROGRAMME DE TRAVAIL DU SECRÉTARIAT DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION

Déclarations

Mme MARGARET POLLACK (États-Unis) a salué le « travail « remarquable » accompli par la Division de la population.  Elle joue un rôle essentiel en tant que source neutre d’expertise et produit des études qui servent aux États Membres, aux organisations multilatérales, aux milieux académiques et au public en général. 

Dans le contexte du thème de cette année, la Division de la population a notamment abordé les perspectives mondiales en matière de démographie, produit des estimations sur la mortalité infantile et sur le vieillissement de la population dans le contexte du développement durable, et a permis de suivre la mise en œuvre du Programme d’action du Caire.  La représentante a également apprécié l’amélioration du site Internet de la Division et des bases de données en ligne.

M. HARALD BRAUN (Allemagne) s’est également félicité de la contribution de la Division de la population à l’analyse des données démographiques pour réaliser le Programme d’action du Caire et les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Pour sa part, l’Allemagne a récemment renforcé ce qui est fait dans l’utilisation des données démographiques pour prendre de meilleures décisions.

M. GUSTAVO DE SANTIS (Italie) a félicité la Division de la population pour son travail et affirmé que sa base de données était devenue la référence pour tous ceux intéressés par les questions de population tant au niveau national qu’international.  « Bien sûr, nous voulons toujours plus d’informations et de meilleures informations », a-t-il dit, ajoutant que ces attentes stimulaient la Division de la population.  Le délégué a rappelé que même les meilleurs systèmes statistiques pouvaient ignorer des éléments essentiels et se tromper dans leurs projections.

M. JIANG WEIPING (Chine) a félicité la Division de la population pour la qualité de ses travaux.  Afin de faciliter la mise en œuvre du futur programme de développement pour l’après-2015, il l’a invitée à renforcer son soutien technique aux pays en développement.  Enfin, le délégué de la Chine a souhaité que la Commission facilite l’échange des bonnes pratiques entre pays s’agissant de la collecte de statistiques.

M. JUAN ALFONSO (Cuba) a salué à son tour le travail solide de la Division de la population et jugé important de préciser les priorités de la Commission des statistiques des Nations Unies.  « Les statistiques internationales ne doivent pas se substituer au statistiques nationales », a-t-il rappelé.

DÉBAT GÉNÉRAL CONSACRÉ À L’EXPÉRIENCE DES PAYS DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION SUR LE THÈME “RÉALISER L’AVENIR QUE NOUS VOULONS:PRENDRE EN COMPTE LES QUESTIONS DE POPULATION DANS LE DÉVELOPPEMENT DURABLE, Y COMPRIS DANS LE PROGRAMME DEDÉVELOPPEMENT POUR L’APRÈS-2015”

Mme REBECCA OAS, de Catholic Family and Human Rights Institute, Inc, a indiqué que les investissements visant à généraliser l’accès à la contraception n’amélioraient en rien la santé maternelle.  Elle a ensuite fait part de sa préoccupation vis-à-vis de la baisse de la fécondité dans certains pays.

Mme BRENDA MBAJA, de Sexual and Reproductive Health and Rights Youth Caucus, a estimé que la voix des jeunes devait maintenant se faire entendre, ces derniers ayant été écartés lors de l’élaboration des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  « Nos besoins et défis doivent recevoir l’attention de la communauté internationale », a-t-elle dit.  Revendiquant le droit au plaisir, elle a souligné la nécessité que les jeunes reçoivent une éducation sexuelle.  « La négation de nos droits sexuels est une menace pour nos vies », a-t-elle poursuivi, avant de rappeler qu’aucun développement durable ne sera possible sans une santé procréative de qualité.  « Nous sommes les agents du changement et nous incarnons l’avenir », a-t-elle conclu.

Mme KATIE LAU, de l’International Planned Parenthood Association a regretté que, plus de 20 ans après l’adoption du Programme d’action, les progrès restent insuffisants.  « Il n’est pas juste qu’en 2015 les jeunes entre 17 et 24 ans représentent la moitié des infections du VIH/sida », a-t-elle ainsi souligné, et que tant d’adolescentes décèdent après des avortements.  Selon elle, les jeunes doivent pouvoir se protéger et prendre les décisions concernant leur corps et leur avenir, et disposer d’un plein accès à la santé et aux droits sexuels et procréatifs.  Les gouvernements doivent faire en sorte que le Programme d’action du Caire soit intégré dans le programme de développement pour l’après-2015.

Mme REDHAWK du People’s Movement for Human Rights Learning a rappelé qu’en 110 ans la population mondiale est passée de 1 à 7,2 milliards de personnes.  Pourtant, a-t-elle déploré, 2 milliards de personnes vivent avec moins de 2 dollars par jour tandis qu’une poignée de personnes concentrent les richesses.  Il faut comprendre ce qui se passe sociologiquement et culturellement dans le village global, a-t-elle ajouté.  L’urbanisation et le règne des grandes entreprises « démantèlent l’esprit humain » en empêchant une concurrence efficace au niveau local.  De même, la pénurie d’eau et de terre cause des troubles politiques et de conflits armés.  Elle a prôné une vision globale qui protège les droits de l’homme.

Mme SUSMIITA CHOUDHURY, de Asian-Pacific Ressource and Research Center for Woman (ARROW), a souhaité que les droits sexuels et reproductifs soient consacrés dans le futur programme de développement pour l’après-2015.  Elle a affirmé que les jeunes devaient avoir accès aux informations nécessaires sur leur sexualité.  Elle a ensuite demandé une meilleure protection des droits des migrants et le renforcement des efforts visant à l’autonomisation des femmes.  Enfin, elle a noté que les menées des groupes fondamentalistes avaient une incidence sur la promotion des droits sexuels.  Les droits des femmes et filles doivent être au cœur de nos priorités, a-t-elle conclu.

Mme RABELANI MUDAU, d’ActionAid, a raconté son histoire de jeune fille ayant grandi à Johannesburg.  Elle a dit sa méconnaissance du sexe, du virus VIH, avant de raconter les discriminations rencontrées en particulier dans la recherche d’emplois et l’accès aux soins contraceptifs.  Elle a demandé que le programme de développement pour l’après-2015 propose une approche globale permettant de répondre aux préoccupations d’une jeune fille comme elle.

Mme NIHINLOLA MABOGUNJE d’IPAS, une organisation non gouvernementale qui se consacre aux morts évitables et aux blessures que subissent les femmes en raison d’avortements dangereux, a affirmé que dans son pays, le Nigéria, les femmes qui tombent enceintes parce qu’elles ont été violées ou ne disposent pas d’une éducation sexuelle sont traitées comme des criminelles et ne reçoivent pas de soins.  Pas moins de 760 000 avortements s’y produiraient ainsi chaque année, la plupart clandestins.  Selon IPAS, tous les gouvernements devraient révoquer les lois qui pénalisent l’avortement et mettent en danger la vie des femmes.

Mme PATRICIA SAYERS de l’International Catholic Committee of Nurses and Medico-social Assistants (CICIAMS) a fait remarquer que, dans beaucoup de zones éloignées, les infirmières sont souvent les seuls fournisseurs de soins de santé.  Toutes les personnes doivent pouvoir bénéficier de soins de santé respectueux de leur culture.  Tous les patients ont le droit d’accepter ou de refuser le traitement qui leur est proposé et d’en comprendre les risques.  Enfin, il faut construire des écoles d’infirmiers à proximité de sites mal desservis.  La représentante a réitéré que « la fertilité fait partie intégrante de l’être humain ».

Mme CAMILLE PESAVA, Amnesty international, a affirmé que le nouveau programme de développement devait bénéficier d’abord aux plus vulnérables et à ceux qui font face aux discriminations.  Elle a ensuite demandé la promotion de l’égalité des sexes et l’élimination des stéréotypes.  Le programme de développement pour l’après-2015 doit insister sur l’égalité des sexes afin que les droits des femmes et filles deviennent une réalité, a-t-elle déclaré.

Mme YOADAN SHIFERAW, de la Stitchting Rutgers WPF, a rappelé que dans de nombreux pays africains des enfants donnaient naissance à des enfants.  En Ouganda, une jeune fille de moins de 18 ans sur 4 est enceinte, a-t-elle dit.  En conséquence, elle a plaidé pour la fourniture d’une éducation sexuelle afin que les jeunes filles puissent prendre des décisions en toute connaissance de cause.

Mme ELIZA MARGUERITE RAYMOND de la New Zealand Family Planning Association a indiqué que son organisation travaille dans la région du Pacifique sur l’inclusion des droits sexuels et génésiques sans discrimination et sans stigmatisation.  Ces droits sont au cœur du développement durable, or 225 millions de femmes ne peuvent satisfaire leurs besoins en matière de planning familial, a-t-elle dit.  Les femmes doivent pouvoir choisir librement l’espacement et le nombre de leurs enfants et avoir un accès libre et gratuit à l’avortement.

Mme CYNTHIA STUEN de l’International Parenthood Federation pour la région de l’Asie du Sud-Est, qui représente 44 pays en Asie, a souhaité transmettre le message suivant: « les droits sexuels et génésiques sont inaliénables et indivisibles ».  Or, a-t-elle déploré, ces droits sont loin d’être réalisés dans la région où « le fondamentalisme s’accroît et aggrave les inégalités hommes-femmes ».  Elle a demandé aux gouvernements d’assurer les engagements pris lors des conférences d’examen régional et d’éliminer toutes les formes de violence et de discrimination à l’égard des femmes et, en particulier, d’autonomiser les jeunes femmes.

Mme NADJA WOLFE, du World Youth Alliance, a souligné qu’il fallait respecter chaque individu, les forts comme les faibles.  L’expérience montre que les changements démographiques engendrent des difficultés sociales qui peuvent être aigues, a-t-elle dit, avant d’indiquer que la réduction des taux de fécondité n’est pas la panacée que l’on croit souvent.  Elle a ensuite demandé que le futur programme de développement favorise l’égalité réelle entre hommes et femmes.  « Les jeunes sont l’avenir et nous méritons mieux que des politiques qui ne répondent pas à nos besoins. »

Mme CYNTHIA STUEN, de l’International Federation on Ageing and the Stakeholder Group on Ageing, a rappelé que les femmes de 50 ans constituaient 23% de la population féminine aujourd’hui, une proportion qui ne fera que croître à l’avenir.  Elle a demandé la Commission à mettre l’accent sur les défis du vieillissement, rappelant que « les jeunes d’aujourd’hui sont les vieux de demain ».  Toute personne doit pouvoir vieillir avec dignité dans une société juste, a-t-elle conclu.

Mme NADJA WOLFE de l’International Women’s Health Coalition a affirmé que « tous ont le droit de décider librement de toutes les questions liées à leur sexualité, sans discrimination, sans pression et sans violence ».  Elle a notamment défendu les droits des lesbiennes et des homosexuels qui connaissent des violations au quotidien; ces violations ne font qu’exacerber la pauvreté.  Elle s’est toutefois dite encouragée par le fait que de plus en plus de pays reconnaissent les droits sexuels et procréatifs dans leurs lois, en particulier en Amérique latine et dans les Caraïbes.   

M. ZIA AUR-REHMAN du Centre Awaz pour les services de développement a indiqué que cette organisation travaillait pour l’autonomisation des groupes socialement exclus au Pakistan et la reconnaissance des droits sexuels et génésiques, surtout pour les adolescents.  Dans « un contexte d’extrémisme montant » l’objectif de parité hommes-femmes continue de ne pas être reconnu.  Or, aujourd’hui, il est essentiel d’inclure les jeunes partout. 

Mme ANGELICA REGO, d’Advocates for Youth, a affirmé que la voix des jeunes filles n’était pas suffisamment entendue.  Elle a déploré que certaines traditions s’opposent à l’utilisation de moyens contraceptifs.  « Les filles sont des êtres humains et leurs droits à l’éducation, à la sûreté, à l’éducation, doivent être assurés. »  Elle a demandé que des campagnes internationales soient lancées pour promouvoir l’utilisation des moyens de contraception et que des cours obligatoires d’éducation sexuelle soient mises en place dans les écoles.  Enfin, elle a demandé qu’il soit mis fin aux mariages des enfants.

Mme EVA RICHTER, de NGO Committee on Migration, a plaidé pour une meilleure protection des droits des migrants.  Les migrations sont un facteur du développement durable, a-t-elle rappelé.  Elle a en conséquence appuyé l’intégration de plans d’actions en faveur des migrants dans le programme de développement pour l’après-2015.

Droit de réponse

La représentante de Bahreïn, réagissant à ce qui avait été dit par le représentant d’Israël, a affirmé que son pays est à l’avant-garde des pays arabes qui défendent la cause des femmes. 

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