ECOSOC: fort de son leadership politique et moral, le système de l’ONU doit se repositionner pour reprendre sa place d’acteur clef du développement et « gardien des biens publics mondiaux »
Fort de son leadership politique et moral, le système de l’ONU doit se repositionner comme un acteur clef du développement et le « gardien des biens publics mondiaux », a estimé aujourd’hui le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) à la fin du « Dialogue » de trois jours que le Conseil économique et social (ECOSOC) a clos aujourd’hui sur « le positionnement du système de l’ONU à long terme, compte tenu du programme de développement pour l’après-2015 ».
Le système de l’ONU, et ses 34 entités, n’est plus le principal acteur de l’aide au développement dans le monde, a déclaré le Secrétaire exécutif de la CEA, en pointant le doigt sur la concurrence des organisations régionales et sous-régionales voire des ONG. M. Carlos Lopes a appelé le système de l’ONU à se remettre en question et à se repositionner comme leader de l’aide au développement. Fort de son leadership politique et moral, ce système doit jouer un rôle prépondérant en tant que « gardien des biens publics mondiaux ».
Mais comment faire? Le Président du Conseil économique et social (ECOSOC) a apporté la réponse en « cinq messages clefs » qu’il a tirés de ces trois derniers jours de « Dialogue ». M. Martin Sajdik a d’abord dit que l’ONU doit changer et adopter une approche réellement « à l’échelle du système ». L’ECOSOC, a-t-il prévenu, devra définir la meilleure manière de faire en sorte que l’organisation verticale de l’ONU soit à même de répondre aux exigences d’intégration du programme de développement pour l’après-2015. Le représentant de l’Union européenne a résumé cette pensée: l’ONU est toujours perçue comme un système complexe et fragmenté et le futur programme ne manquera pas de rendre plus pressante la nécessité d’une plus grande cohérence, coordination et harmonisation.
La fragmentation ne touche pas seulement les opérations dans les pays mais aussi l’architecture financière, a relevé le Président de l’ECOSOC, en livrant le deuxième « message clef ». Le recours à des mécanismes de financement à l’échelle du système sera particulièrement important après 2015 et le rôle des ressources de base tout aussi important. La représentante de l’Argentine a précisément dénoncé le fait que les ressources de base ne représentaient plus en 2013 que 31% du budget des entités de l’ONU contre 50% en 1998. C’est un « grand défi » car les ressources extrabudgétaires ont une affectation prédéterminée; elles dépendent de la volonté des contributeurs et ne s’alignent pas nécessairement sur les mandats et les objectifs des pays.
Les États ont la responsabilité collective de privilégier les contributions qui permettent une plus grande souplesse, une plus grande prévisibilité et un meilleur alignement sur les priorités nationales, a renchéri le représentant du Brésil qui a rappelé que depuis la Conférence de Monterrey sur le financement du développement en 2002, le « déficit » accumulé de l’aide publique au développement(APD) est de 2 000 milliards de dollars, « ce qui n’est pas vraiment une goutte d’eau dans un océan ».
La nécessité de faire des cadres budgétaires communs a été perçue comme une priorité par toutes les délégations, a rappelé dans son troisième « message clef », le Président de l’ECOSOC. Le représentant de l’Allemagne a d’ailleurs pris note avec regret qu’une très grande partie des fonds provient toujours d’un nombre assez restreint de donateurs directs ou indirects. Il a encouragé les entités de l’ONU à développer encore leur stratégie de mobilisation des ressources. Toutes ces questions seront abordées en juillet prochain à Addis-Abeba, à la troisième Conférence internationale sur le financement du développement.
Pour son quatrième « message clef », le Président a souligné l’urgence qu’il y a à mieux comprendre les attentes des États quant au rôle que le système de l’ONU doit jouer dans la promotion de la coopération Sud-Sud, vantée par le représentant du Brésil, en particulier pour le transfert des technologies. Ce dernier a appelé le système de l’ONU à se montrer créatif, à explorer toutes les voies et à mettre en place une facilité de coordination à l’échelle du système pour élargir l’accès aux technologies. Il y a des leçons intéressantes à tirer de la coopération entre pays du Sud, a convenu le représentant de l’Allemagne, mais il faut encore affiner notre compréhension des formes et des conditions sous lesquelles la coopération Sud-Sud ou Nord-Sud est particulièrement fructueuse.
Le dernier « message clef » du Président de l’ECOSOC a porté sur l’importance pour le système de l’ONU de recourir davantage aux capacités nationales pour leurs activités opérationnelles. Il est regrettable qu’un trop grand nombre d’organisations continuent de mettre l’accent sur l’assistance technique plutôt que sur les compétences nationales, a dénoncé M. Jafar Javan, Directeur de l’École des cadres du système des Nations Unies. L’ONU aurait tellement tout à gagner d’autant plus qu’elle soufre elle-même d’un problème de qualité et de quantité de son personnel, a tranché M. Kikeo Chanthaboury, Vice-Ministre de la planification et de l’investissement de la République démocratique populaire lao.
Après les phases du 15 décembre et du 30 janvier, et celle qui a débuté hier, le « Dialogue sur le positionnement du système de l’ONU à long terme, compte tenu du programme de développement pour l’après-2015 » devrait se poursuivre jusqu’à l’adoption en 2016 de la résolution sur « l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement » visant à rendre le système de l’ONU capable d’aider véritablement les pays à mettre en œuvre le programme de développement qui devrait prendre le relais, après 2015, des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).
La troisième phase du « Dialogue », qui a coïncidé avec le segment annuel de l’ECOSOC sur les activités opérationnelles de développement, n’a pas été couronnée par la résolution annuelle sur ces activités. L’ECOSOC a été effectivement saisi d’un projet de résolution présenté par l’Afrique du Sud, au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), dont il a reporté l’adoption.
Table ronde sur le thème « L’efficacité de l’appui du système des Nations Unies en matière de renforcement des capacités nationales »
Par vidéoconférence à partir d’Addis-Abeba, M. CARLOS LOPES, Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique (CEA), a avoué que l’ONU n’est plus la principale actrice de l’aide au développement dans le monde. Les organisations régionales et sous-régionales se sont désormais imposées, n’hésitant pas à adopter des positions communes sur les questions de développement. Pour leur part, les ONG semblent aujourd’hui plus outillées pour répondre aux urgences en cas de catastrophe ou de crise humanitaire, alors que la « machine onusienne, lourde et lente » paraît inadaptée.
M. Lopes a invité le système des Nations Unies à se remettre en question et à se repositionner comme leader de l’aide au développement et cela passe par la simplification des pratiques administratives, la rationalisation des coûts, l’amélioration de la coordination et de la cohérence entre les différentes entités et le renforcement de la compétitivité aux niveaux national et international. Fortes de leur leadership politique et moral notamment, les Nations Unies doivent jouer un rôle prépondérant en tant que « gardien des biens publics mondiaux ». Pour jouer efficacement ce rôle, l’ONU doit se servir de statistiques fiables, un élément clef de ces « biens publics mondiaux ».
Le Secrétaire exécutif a aussi parlé de l’élément fondamental qu’est un financement durable et a conclu par un appel pour que le système de développement des Nations Unies tienne dûment compte des mutations du monde actuel et qu’il s’y adapte.
Ne faudrait-il pas que les Nations Unies exploitent plus systématiquement les avantages comparatifs des ONG dans le domaine humanitaire? a demandé la représentante des États-Unis. L’« agilité » des ONG leur confère un avantage sur le terrain, a concédé M. Lopes, mais la « faiblesse » du système onusien est une invitation à l’amélioration de ses procédures internes. L’ONU doit arrêter de se reposer sur ses lauriers, au risque de voir son influence diminuer considérablement.
Le renforcement des capacités est sans doute l’aspect le plus « essentiel » du mandat du système de l’ONU au niveau des pays, a d’emblée souligné M. KIKEO CHANTHABOURY, Vice-Ministre de la planification et de l’investissement de la République démocratique populaire lao. Pour lui, cet effort ne doit pas se limiter aux capacités humaines mais viser aussi les dimensions institutionnelles, organisationnelles et sociales. Se basant sur l’expérience de son pays, le Vice-Ministre a estimé que si les agences de l’ONU appliquent bien l’approche orientée vers les résultats s’agissant du renforcement des capacités en matière de développement, de nombreux problèmes subsistent. Il a par exemple estimé qu’il est de plus en plus difficile pour les entités de l’ONU de s’attribuer des résultats, surtout quand le volume de leurs investissements est modeste par rapport à celui des autres acteurs du développement.
En plus, l’évaluation de la performance de ces entités se concentre sur les résultats en tant que tels alors qu’elle devrait plutôt porter sur l’impact de ces résultats sur l’avancement général des pays. On se place malheureusement dans l’optique de l’offre plutôt que dans celle de la demande. Comme troisième problème, le Vice-Ministre a pointé celui de l’absence d’une définition commune des objectifs et des cibles entre les entités de l’ONU. Enfin, il a dénoncé le manque de données et de statistiques fiables qui empêche une pleine exploitation des approches fondées sur les résultats.
Le Vice-Ministre a tenu à souligner que le succès des activités liées au renforcement des capacités repose finalement sur la faculté de l’ONU à répondre à des besoins nationaux en constante mutation. La présence et la pertinence de l’ONU dans les pays ont souvent été discutées à l’Assemblée générale, a rappelé le Vice-Ministre, en insistant sur le fait que le travail auprès des pays exige de l’ONU qu’elle se dote d’un personnel ayant des compétences techniques dans pratiquement tous les domaines d’activités humaines et étant à même de contribuer à la formulation des politiques nationales de développement et de traiter des questions multisectorielles comme la lutte contre la pauvreté et l’intégration de la perspective genre. Ce personnel doit aussi être capable de concilier des demandes différentes dans ce contexte mondial de contraintes budgétaires. Sur le terrain, a tranché le Vice-Ministre, avant de passer en revue une dizaine de mesures correctives, l’ONU a un problème de qualité et de quantité de son personnel.
M. TUBAGUS ACHMAD CHOESNI, Directeur chargé de la coopération internationale pour le développement au Ministère d’État de la planification du développement (BAPPENAS) de l’Indonésie, a souligné que le premier apport que les pays attendent du système des Nations Unies est le soutien financier aux programmes nationaux de développement. Le système de l’ONU doit servir de catalyseur des initiatives nationales, et cela passe par le renforcement des capacités.
M. Choesni a indiqué que 22 entités de l’ONU travaillent dans son pays, appuyant le renforcement de la démocratie, le commerce extérieur ou encore la résilience face aux catastrophes. Le partenariat avec l’ONU est d’autant plus apprécié que cette dernière est perçue comme un partenaire neutre et impartial qui ne va pas « imposer des conditionnalités dans ses activités opérationnelles ».
Les choses peuvent être améliorées, a-t-il tout de même estimé, prônant la simplification des procédures administratives, une action davantage tournée vers le long terme et une plus grande collaboration avec les gouvernements dans la « révolution des données » pour avoir des statistiques plus fiables et de meilleurs indicateurs de développement.
M. THOMAS GASS, Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations des Nations Unies, a prévenu que les objectifs de développement durable (ODD) ne seraient réalisés que si un système de responsabilisation de tous les acteurs de développement est mis sur pied. Les autorités nationales, en particulier, doivent rendre compte à leurs populations des initiatives prises. Il faut, a-t-il souligné, à son tour, des données fiables, soulignant que plusieurs des futurs objectifs de développement durable font mention de l’exigence de renforcer les capacités nationales en matière de statistiques. M. Gass a invité le système de l’ONU à adopter une approche véritablement critique dans son autoévaluation.
Le renforcement des capacités est un processus grâce auquel les gens développent, renforcent, créent et adaptent leurs capacités, a déclaré M. JAFAR JAVAN, Directeur de l’École des cadres du système des Nations Unies à Turin. L’objectif du système de l’ONU est de soutenir leurs homologues du monde pour les aider à gérer et réaliser leurs priorités nationales et à en rendre compte. La maîtrise nationale exige l’implication d’un grand nombre de partenaires nationaux et internationaux mais il est regrettable qu’un trop grand nombre d’organisations continuent de mettre l’accent sur l’assistance technique plutôt que sur les capacités nationales. On ne comprend pas assez bien ce qu’est le partenariat pour le développement.
Il revient aussi à l’ONU, a poursuivi M. Javan, de se doter d’un personnel qualifié car dans un monde qui n’a jamais changé aussi rapidement, les défis sont de plus en plus complexes. Il faudra répondre au problème de l’adaptation aux transformations mondiales pour assurer la viabilité du système de développement de l’ONU après 2015.
Mais encore? s’est inquiétée la représentante de la Norvège. Le système de développement de l’ONU, ont répondu des orateurs, doit d’abord renforcer la cohérence entre les 34 entités qui le constituent, lesquelles doivent tenir dûment compte des priorités propres à chaque pays et recourir davantage aux capacités nationales. Il faut des indicateurs de résultats clairs et quantifiables et, le financement étant le nerf de la guerre, il faut qu’il soit à la fois de qualité et prévisible. L’importance des statistiques a été soulignée par M. JENS WANDEL, Administrateur assistant et Directeur du Bureau de la gestion du Programme des Nations Unies pour le développement.
Discussion générale
Le débat sur la coopération au développement ne devrait pas être conditionné par des normes et des concepts définis en dehors de l’ONU, dans des fora qui ne représentent pas toutes les parties prenantes, en particulier les pays en développement, a tranché le représentant du Brésil. Le débat, a-t-il souligné, ne devrait pas non plus se limiter à l’efficacité de l’aide mais devrait intégrer la perspective et les principes de la coopération Sud-Sud. La poursuite des activités opérationnelles de l’ONU dépendra de la capacité de ses entités d’être là où l’aide est nécessaire; de se montrer souples pour s’adapter aux circonstances nationales et d’être comptables de leurs actes pour assurer une cohérence entre leurs actions et les mandats que leur ont confiés les États membres.
Il est temps, s’est impatienté le représentant, de redynamiser les structures formelles de gouvernance du système de développement de l’ONU, en particulier le Conseil des chefs exécutifs des fonds et programmes. Il est temps, a-t-il précisé, d’élargir la représentativité des pays en développement et tout aussi important de doter les fonds et programmes d’un financement prévisible pour assurer l’équilibre entre les ressources de base et les ressources préaffectées. Les États ont la responsabilité collective de privilégier les contributions qui permettent une plus grande souplesse, une plus prévisibilité et un meilleur alignement sur les priorités nationales.
S’il est le bienvenu, le rôle joué par le secteur privé et les arrangements trilatéraux, comme la coopération Sud-Sud avec un pays développé tiers, ne devrait pas compter dans les engagements internationaux relatifs à l’aide publique au développement (APD), a estimé le représentant. La coopération Nord-Sud gardera son rôle traditionnel, a-t-il dit, en dénonçant le fait que depuis la Conférence de Monterrey sur le financement du développement en 2002, le « déficit » accumulé de l’APD s’élève à 2 000 milliards de dollars, « pas vraiment ce qu’on peut appeler une goutte d’eau dans l’océan ». Pour le représentant, les sources innovantes du financement du développement doivent être perçues comme un complément de l’APD et non comme un substitut. Dans ce contexte, une approche plus intégrée offrirait plus de cohérence et plus de coordination entre les nombreuses structures et facilités de financement.
Un autre élément positif de la coopération Sud-Sud dans le contexte du programme de développement pour l’après-2015 serait l’accès aux technologies sur une base plus favorable, plus facile et plus abordable, a poursuivi le représentant. Il a voulu que l’on se montre créatif, que l’on explore toutes les voies au sein du système de l’ONU et que l’on mette en place une base claire et pratique pour élargir l’accès aux technologies dans le cadre d’une facilité de coordination à l’échelle du système plus accessible aux États.
La coopération Sud-Sud a aussi le mérite de mettre l’accent sur l’appropriation nationale, d’écarter les conditionnalités et de se reposer sur la demande, a insisté le représentant. Les Nations Unies devraient créer des normes et des directives qui permettraient aux agences d’appuyer l’intensification de cette coopération qui pourrait d’ailleurs être intégrée comme un des modes d’exécution des activités opérationnelles de développement. La coopération triangulaire, a conclu le représentant, peut aussi optimiser l’impact de la coopération au développement en ce qu’elle articule les initiatives Sud-Sud et Nord-Sud et exploite les avantages comparatifs de chaque partenaire, tout en promouvant une gestion partagée sans les verticalités qui définissent la coopération Nord-Sud.
Le système de développement de l’ONU doit faire plus pour renforcer les capacités nationales, a dit, à son tour, le représentant du Viet Nam. Il s’est félicité qu’« Unis dans l’action » soit de plus en plus appliqué dans les pays. Le Viet Nam, a-t-il indiqué, devrait d’ailleurs inaugurer dans quelques mois la « Maison verte d’Unis dans l’action ». Cette « Maison » abritera toutes les entités de l’ONU présentes dans le pays et devrait améliorer la coordination, réduire les coûts de fonctionnement de quelque 500 000 dollars par an et faciliter le recours aux services communs. Le représentant a prévenu que l’approche « Unis dans l’action » ne connaîtra vraiment le succès que si elle peut s’appuyer sur une forte appropriation nationale, un réel engagement du système de l’ONU et un soutien sans faille des donateurs.
Il a donc appelé les agences de l’ONU à prendre des mesures ambitieuses pour appuyer les progrès au niveau des pays. Il a exhorté les donateurs à fournir un financement accru, prévisible et non préaffecté pour appuyer la mise en œuvre d’« Unis dans l’action » et plus généralement les activités opérationnelles.
La représentante de l’Argentine s’est dite préoccupée par « la stagnation », au cours de la dernière décennie, du financement de fonctions essentielles du système des Nations Unies, par rapport à la croissance exponentielle du financement extrabudgétaire. En 2013, 69% du financement des activités de développement provenait de ressources complémentaires, contre 50% en 1998. Cela représente un « grand défi » pour l’ONU, a-t-elle estimé. En effet, de telles ressources sont limitées dans leur affectation; elles dépendent de la volonté des contributeurs et ne s’alignent pas nécessairement sur les mandats et les objectifs établis par l’ONU. La représentante a regretté que les appels à rectifier ce déséquilibre n’aient pas été entendus.
L’Argentine, a-t-elle dit, appuie les efforts tendant à renforcer la coordination et la coopération entre tous les fonds et programmes. « Nous pensons qu’il faut continuer à écouter l’avis des États », a-t-elle insisté. Compte tenu de leur impact sur le développement, elle a jugé nécessaire d’avoir des institutions financières internationales plus démocratiques et regretté que ce thème ne soit pas directement abordé dans les débats actuels.
Pour l’Argentine, le mode de fonctionnement du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale doit être modifié car c’est la seule façon de garantir une économie durable. De même, la représentante a souhaité que les États Membres puissent avoir une interaction plus fluide avec lesdites institutions multilatérales.
S’agissant du suivi du programme de développement pour l’après-2015, elle a plaidé pour un système « national, volontaire et périodique ». Elle a considéré qu’un développement durable n’est possible que par le respect de la diversité et de tous les modèles de développement choisis par les sociétés elles-mêmes.
Elle a souligné que l’objectif de ce débat est de se concentrer sur les pays en développement, notamment « les pays à revenu intermédiaire qui ont vu diminuer au cours des dernières années la qualité et la quantité de l’aide des Nations Unies ». Enfin, Elle a salué les efforts de l’ONU pour promouvoir la coopération Sud-Sud.
Commentant point par point le rapport du Secrétaire général, le représentant de l’Allemagne a, entre autres, estimé qu’il faut trouver de nouvelles manières d’assurer la transition des secours d’urgence au développement. Un partenariat fort entre les acteurs humanitaires et de développement est absolument nécessaire pour améliorer la coordination, la cohérence et l’alignement. Quant au renforcement des capacités, il s’est dit fermement convaincu que la capacité de collecter et d’analyser les données sera un des principaux ingrédients de la mise en œuvre du programme de développement pour l’après-2015, aux niveaux mondial, régional et national. Améliorer l’accès, la fiabilité et l’utilité des données à tous les niveaux est un défi et le programme d’après-2015 nous fait repenser la manière dont nous surveillons les progrès, en jetant la lumière sur un certain manque de transparence, a avoué le représentant.
Il s’est aussi attardé sur les questions liées à la base des donateurs et a pris note avec regret qu’une très grande partie des fonds provient toujours d’un nombre assez restreint de donateurs directs ou indirects. Il a encouragé les entités de l’ONU à développer encore leur stratégie de mobilisation des ressources et à définir de nouvelles approches pour rationaliser et simplifier les modalités de financement et harmoniser ou consolider les services de gestion des fonds.
Le représentant s’est également attardé sur la coopération Sud-Sud que l’Allemagne appuie en promouvant la coopération triangulaire, une coopération qui établit un lien bien utile entre la coopération Sud-Sud et la coopération Nord-Sud et qui est un élément important de la future architecture internationale du développement. Il y a des leçons intéressantes à tirer de la coopération entre pays du Sud, a-t-il convenu, mais il faut encore améliorer la collecte et l’analyse des données de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire. Le représentant a en effet jugé que nous avons besoin de comprendre sous quelle forme et dans quelles conditions, la coopération Sud-Sud ou Nord-Sud est particulièrement fructueuse.
Le représentant de l’Union européenne a rappelé que l’examen quadriennal des activités opérationnelles de développement place un accent particulier sur l’importance de simplifier et d’harmoniser encore les modus operandi des entités de l’ONU et de dégager les goulets d’étranglement au Siège par une rationalisation des mécanismes de programmation, de financement, de rédaction de rapports et de reddition de comptes, en particulier par une pleine mise en œuvre du Cadre relatif à la gestion de l’aide et à l’obligation redditionnelle. Le représentant a appelé à une application stricte de cet agenda ambitieux.
Il a aussi exhorté tous les fonds, programmes et institutions spécialisées à mettre en œuvre l’arrangement sur le partage des coûts pour appuyer le système des coordonnateurs résidents. Plus généralement, l’autorité et la légitimité de ces résidents doivent être renforcées conformément à leur mandat. S’agissant du financement, le représentant a observé, à son tour, qu’un nombre limité de pays fournit toujours la majeure partie des ressources. Pour assurer des fonds plus stables et plus prévisibles et diminuer la dépendance à ce petit nombre de donateurs, il faut, a estimé le représentant, élargir la base des ressources, en particulier les ressources de base.
L’ONU, a fait remarquer le représentant, est toujours perçue comme un système complexe et fragmenté. Le programme de développement pour l’après-2015, a-t-il prévenu, ne manquera pas de rendre plus pressante la nécessité pour le système de l’ONU de se montrer plus cohérente, plus efficace et plus efficiente. Il est donc crucial que l’on tire parti des progrès enregistrés jusqu’ici dans la mise en œuvre des résultats du dernier examen quadriennal et, à ce propos, le représentant s’est félicité du Dialogue que tient l’ECOSOC sur le positionnement à long terme du système de l’ONU, compte tenu du programme de développement pour l’après-2015.
Dans ses remarques de clôture, le Président de l’ECOSOC, M. MARTIN SAJDIK (Autriche), a résumé ces trois derniers jours de travail en cinq messages clefs. Premièrement, il a noté qu’un programme de développement durable porteur de transformations après 2015 exige du système de développement de l’ONU qu’il s’adapte, change et adopte une approche réellement « à l’échelle du système ». L’Organisation devra développer la faculté de passer de la spécialisation à l’intégration dans ses activités opérationnelles. Elle devra faire bouger son « centre de gravité » de la représentation à l’expertise, et des « multiples bureaux » à la force d’une approche fondée sur l’équipe de pays.
L’Organisation devra sérieusement améliorer sa capacité de coordination aux niveaux interinstitutionnel et intergouvernemental mais aussi entre l’aide humanitaire et les activités de développement. Dans son Dialogue, l’ECOSOC devra discuter de la meilleure manière de faire en sorte que l’organisation verticale de l’ONU soit à même de répondre aux exigences d’intégration du programme de développement pour l’après-2015.
Deuxièmement, a poursuivi le Président, la fragmentation actuelle de l’architecture financière des activités opérationnelles ne fait rien pour faciliter la coopération entre les différentes entités de l’ONU. Le recours à des mécanismes de financement à l’échelle du système sera particulièrement important après 2015. Le rôle des ressources de base pour mettre les partenariats sur un pied d’égalité au sein et en dehors du système de l’ONU sera tout aussi important.
Troisièmement, si le système de l’ONU mettait en œuvre les mandats définis dans le dernier examen quadriennal, il aurait déjà beaucoup d’atouts pour s’attaquer au programme de développement pour l’après-2015. Le renforcement du système des coordonnateurs résidents et l’adoption de cadres budgétaires communs devraient être prioritaires. Le lancement d’une nouvelle génération de Plans-cadres pour l’aide au développement (PNUAD) fondés sur les nouvelles procédures opératoires standard sera particulièrement important pour renforcer la cohérence au sein du système, en offrant des directives aux équipes de pays pour la planification, la mise en œuvre, l’évaluation des résultats et la rédaction des rapports.
Quatrièmement, a ajouté le Président, il faut mieux comprendre les attentes des États Membres quant au rôle du système de développement de l’ONU dans la promotion de la coopération Sud-Sud. Enfin, maintenant que l’on demande de plus en plus au système de l’ONU de jouer un rôle de conseiller, compte tenu des nouvelles capacités des pays et de leurs attentes, il sera crucial pour l’ONU d’intensifier le recours aux capacités et systèmes nationaux.