L’Instance sur les questions autochtones brandit son droit de contribuer à l’agenda du développement post-2015 et propose la proclamation d’une année internationale des camélidés
L’Instance permanente sur les questions autochtones a fait valoir aujourd’hui son droit de contribuer à l’élaboration du programme de développement pour l’après-2015, avant que sa Présidente ne mette fin à la session d’un organe « né du plaidoyer des Premières Nations pour avoir leur place aux Nations Unies ». Les travaux, qui avaient débuté le 20 avril dernier, ont aussi donné lieu à des recommandations* sur la suite à donner à la toute première Conférence mondiale sur les peuples autochtones, la proclamation d’une année internationale des camélidés et la nomination d’un rapporteur spécial sur le suicide chez les jeunes autochtones.
« Les autochtones sont chez eux aux Nations Unies », a déclaré la Présidente de l’Instance permanente, Mme Megan Davis, en paraphrasant l’ancien Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan. Chaque année, a-t-elle souligné, ces peuples viennent témoigner de terribles histoires de violations de leurs droits fondamentaux et présenter des idées novatrices pour aider les États à mettre en œuvre le droit à l’autodétermination.
Parmi ces « idées novatrices », l’Instance permanente a demandé aux États d’incorporer les engagements pris dans le Document final de la toute première Conférence mondiale sur les peuples autochtones, tenue en septembre 2014, dans le programme de développement pour l’après-2015, en particulier les mesures concrètes relatives à la ventilation des données, aux droits fonciers, à l’application du principe du consentement préalable, libre et éclairé et à l’accès à la justice, sans oublier la nécessité de disposer d’indicateurs.
Le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales est appelé à définir une procédure propre à garantir la participation directe des représentants des peuples autochtones à la préparation du plan d’action à l’échelle du système pour la mise en œuvre du Document final de la Conférence mondiale. Les États, les organismes et les représentants de haut niveau du système des Nations Unies, a poursuivi l’Instance, devraient veiller à ce que les peuples autochtones participent directement au Forum politique de haut niveau sur le développement durable, à la réunion de haut niveau sur les changements climatiques, à la vingt et unième Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, à la onzième Conférence des Parties au Protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et à la troisième Conférence internationale sur le financement du développement.
L’Instance permanente a d’ailleurs recommandé au Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) d’accorder une attention particulière à la vulnérabilité des peuples autochtones de la région du Pacifique, eu égard notamment aux effets des changements climatiques. Elle a invité les États Membres et les institutions de protection des droits de l’homme à envisager d’examiner la question des déplacements forcés des communautés autochtones.
Les États et les organismes des Nations Unies ont aussi été invités par l’Instance à élaborer des politiques sociales permettant de promouvoir la restauration ou le rétablissement de la culture des variétés locales qui résistent à la sécheresse pour assurer la sécurité alimentaire. Ces États devraient étudier la possibilité de promulguer une« Année internationale des camélidés » afin d’appeler l’attention sur la gestion des terres, territoires et ressources nécessaires à l’élevage de ces camélidés. L’Instance a, en particulier, recommandé au Mali, au Burkina Faso et au Niger ainsi qu’aux organismes pertinents des Nations Unies de mettre en place, en ayant dûment consulté les peuples autochtones, un comité ayant pour vocation de prévenir les crises alimentaires dans la région du Sahara.
L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a poursuivi l’Instance, devrait organiser des formations et d’autres actions de renforcement des capacités et établir des mécanismes de participation dans les instruments et organes de la FAO qui intéressent les peuples autochtones. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), entre autres, a été appelé à aider l’Instance à mettre au point un indice de développement.
Sur le front des droits de l’homme, l’Instance a engagé instamment l’ensemble des organismes des Nations Unies à prendre les mesures qui s’imposent contre les allégations d’atrocités et de violations commises à l’encontre des peuples autochtones au Canada, en Finlande, en Indonésie, au Mexique, en Tanzanie, en Australie occidentale et dans d’autres régions. Elle a aussi demandé au Secrétaire général d’envisager de nommer un rapporteur spécial chargé d’examiner le phénomène de l’automutilation et du suicide chez les enfants et les jeunes autochtones et à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) d’élaborer une stratégie pour s’attaquer à ce problème, en commençant par réunir des données concrète sur l’ampleur du phénomène et par établir un recueil des bonnes pratiques en matière de prévention. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) est quant à lui prié d’établir « immédiatement » une politique spéciale globale qui tienne compte de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a insisté l’Instance avant de se féliciter de ce que le Conseil des droits de l’homme engage à sa session de juin 2015 un examen du mandat du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones.
Enfin, l’Instance a recommandé au Conseil économique et social d’autoriser la tenue d’une réunion de trois jours d’un groupe d’experts internationaux sur le thème « Préservation et revitalisation des langues autochtones. L’ECOSOC devrait aussi autoriser l’Instance à tenir sa prochaine session, du 9 au 20 mai 2016, dont un débat sur le thème « Les peuples autochtones: conflits, paix et règlement ». La Présidente de l’Instance a annoncé l’ajout à l’ordre de jour d’un nouveau point sur la mise en œuvre des six domaines prioritaires de Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
À partir de 2016, a-t-elle indiqué, la liste des orateurs sera arrêtée avant la réunion; une meilleure organisation permettant d’attirer davantage de hauts responsables de gouvernements et d’experts. La Présidente a aussi appelé ses collègues de l’Instance à limiter à 15 leurs recommandations, pour éviter qu’on ne se retrouve devant 25 recommandations non mises en œuvre. Tant que nous aurons un tel nombre de recommandations vaines, nous nous abstiendrons d’en adopter d’autres, a-t-elle proposé. Il faut des recommandations conformes aux normes des droits de l'homme, qui mettent le doigt sur les bonnes pratiques et qui prennent en compte les lacunes et les défis des problèmes urgents auxquels se heurtent les autochtones. Il faut des recommandations pertinentes, réalisables, quantifiables, claires et transparentes, a insisté la Présidente.
À l’occasion du dixième anniversaire de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, l’Instance a demandé à la Commission de la condition de la femme de faire de l’autonomisation des femmes autochtones une question prioritaire en 2017.
*E/C.19/2015/L.2 à L.10