Déclaration du Président du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé
À sa cinquante-et-unième séance, le 26 novembre 2014, le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé a décidé, à l’issue de son examen du premier rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé en Syrie (S/2014/31), de diffuser le message suivant à toutes les parties au conflit armé sous la forme d’une déclaration publique de son président:
a. Exprimant sa vive indignation devant le fait que, depuis mars 2011, bien plus de 10 000 enfants ont été tués et bien plus encore blessés, comme l’a indiqué le Secrétaire général dans son rapport sur les enfants et le conflit armé en République arabe syrienne (S/2014/31);
b. Condamnant fermement les très nombreuses violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire perpétrées par les autorités syriennes, ainsi que les atteintes aux droits de l’homme et les violations du droit international humanitaire commises par des groupes armés, notamment toutes les formes de violence sexuelle et sexiste, ainsi que toutes les violations et atteintes dirigées contre des enfants, ainsi spécifiées dans le rapport du Secrétaire général:
(i) Le recrutement et l’utilisation d’enfants par des groupes d’opposition armés, dont l’Armée syrienne libre, des groupes qui lui sont affiliés, des groupes armés kurdes syriens, l’État islamique d’Iraq et du Levant, le Front el‑Nosra et d’autres personnes, groupes, entreprises et entités associés à Al‑Qaida, ainsi que le recrutement ou la tentative de recrutement d’enfants parmi les réfugiés;
(ii) L’arrestation et la détention arbitraires d’enfants, ainsi que les mauvais traitements et les actes de torture infligés par les forces gouvernementales à des enfants parce qu’eux-mêmes ou leurs proches avaient ou étaient présumés avoir participé à des manifestations ou prêté leur appui à des groupes d’opposition, et l’utilisation d’enfants comme boucliers humains;
(iii) Les mauvais traitements et tortures qu’auraient infligés des groupes d’opposition armés à des enfants considérés comme favorables au Gouvernement dans des centres de détention à leurs mains, soulignant que ces actes, s’ils étaient avérés, constitueraient des violations du droit international humanitaire;
(iv) Les meurtres et atteintes à l’intégrité physique d’enfants résultant d’opérations de pilonnage à l’artillerie et de bombardement aérien, et aussi des attaques aveugles de zones habitées, effectuées par les forces gouvernementales au moyen notamment d’armes à sous-munitions et de barils explosifs en vue de frapper la population et les installations civiles;
(v) Le meurtre et la mutilation d’enfants par des groupes d’opposition armés du fait de l’emploi aveugle d’obus de mortier et de roquettes dans des zones résidentielles et condamnant en outre fermement l’utilisation d’engins explosifs improvisés et les attaques terroristes perpétrées par l’État islamique d’Iraq et du Levant, le Front el-Nosra et d’autres personnes, groupes, entreprises et entités associés à Al-Qaida, y compris les attentats à la voiture piégée, les attentats-suicides et les explosions de tunnels;
(vi) Les actes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants détenus par les forces gouvernementales dans des lieux de détention officiels ou clandestins, aux postes de contrôle, lors d’incursions et à l’occasion de la perquisition de logements de familles considérées comme favorables à l’opposition, dans le dessein d’humilier, de blesser, d’obtenir des aveux forcés ou de faire pression sur un parent pour qu’il se livre;
(vii) L’emploi présumé de la violence sexuelle par des groupes d’opposition armés, que les enquêteurs de l’Organisation des Nations Unies n’ont pas pu confirmer faute d’avoir pu se rendre sur place, soulignant que ces actes, s’ils étaient avérés, constitueraient des violations du droit international humanitaire et engageant les groupes d’opposition armés à laisser le personnel des Nations Unies accéder en toute sécurité aux territoires qu’ils contrôlent et à y circuler librement pour constater les faits et en rendre compte;
c. Exigeant que les groupes d’opposition armés et les milices progouvernementales, ainsi que l’armée régulière, respectent leurs engagements et obligations au regard du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, et s’abstiennent de recruter et d’utiliser des enfants;
d. Condamnant avec la plus grande fermeté l’emploi d’armes chimiques, qui a fait de nombreuses victimes, dont beaucoup d’enfants;
e. Condamnant fermement les tueries et exécutions sommaires d’enfants perpétrées en République arabe syrienne;
f. Condamnant en outre fermement la multiplication des attentats terroristes, qui ont fait de nombreuses victimes, notamment parmi les enfants, et les actes de destruction commis par des organisations et des personnes associées à Al-Qaida, à des organisations qui lui sont affiliées ou à d’autres groupes terroristes, engageant les groupes d’opposition à continuer de garder leurs distances avec celles de ces organisations et personnes qui sont responsables de violations graves du droit international humanitaire dans les zones contrôlées par l’opposition, demandant aux autorités syriennes et aux groupes d’opposition de s’engager à combattre et à vaincre les organisations et les personnes associées à Al-Qaida, à des organisations qui lui sont affiliées ou à d’autres groupes terroristes;
g. Déplorant et condamnant avec la plus grande fermeté les attentats terroristes et l’idéologie extrémiste violente de l’État islamique d’Iraq et du Levant, ainsi que les atteintes aux droits de l’homme et les violations du droit international humanitaire auxquels il se livre de façon flagrante, systématique et généralisée, et condamnant en outre fermement certains de ses actes tels que le meurtre et la mutilation d’enfants, le recrutement et l’emploi d’enfants, le viol et d’autres formes de violence sexuelle, les détentions arbitraires et les attaques d’écoles et d’hôpitaux;
h. Exprimant combien il est préoccupé de constater que les enfants déplacés en République arabe syrienne et dans d’autres pays sont très exposés à l’exploitation ainsi qu’à la violence sexuelle et sexiste;
i. Exprimant sa profonde préoccupation quant au fait qu’en juillet 2013, 60 % des hôpitaux publics avaient été touchés par le conflit, 38 % d’entre eux n’étant alors plus en état de fonctionner, et qu’en octobre 2013, sur les 22 000 écoles que comptait le pays, plus de 3 000 avaient été endommagées ou détruites;
j. Condamnant avec force les attaques d’écoles et d’hôpitaux, qui sont contraires au droit international humanitaire, et exprimant sa profonde préoccupation devant ces attaques, l’utilisation fréquente de tels lieux à des fins militaires et le fait de prendre pour cible les enseignants et le personnel médical, qui menacent la sécurité des enfants et les empêchent de bénéficier des services éducatifs et sanitaires;
k. Exprimant son inquiétude que les forces gouvernementales aient, comme l’indique le rapport du Secrétaire général, empêché des civils, y compris des enfants, de se faire soigner simplement parce qu’ils étaient soupçonnés de venir de secteurs contrôlés par l’opposition;
l. Condamnant fermement les enlèvements d’enfants en vue d’extorquer des rançons, d’obtenir la libération de prisonniers ou de faire pression sur les proches supposés favorables à la partie adverse;
m. Exprimant l’extrême préoccupation que lui inspire le nombre élevé et croissant de déplacés et de personnes ayant besoin d’aide sur le territoire de la République arabe syrienne, qui dépasse désormais 6,4 millions de personnes dont environ 3 millions d’enfants, et le nombre de réfugiés syriens dans les pays de la région qui, d’après le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, dépasse les 3 millions, dont plus de 1,5 million d’enfants;
n. Faisant part de la grave préoccupation que lui cause la situation désastreuse des enfants pris au piège dans les zones assiégées, le plus souvent par les forces gouvernementales mais aussi quelquefois par des groupes d’opposition armés, ainsi que de ceux qui se trouvent dans des zones difficiles d’accès;
o. Rappelant qu’utiliser la famine contre des civils comme méthode de combat est interdit par le droit international humanitaire;
p. Disant sa préoccupation face à l’augmentation ininterrompue du nombre de réfugiés syriens, qui accroît la pression sur les communautés d’accueil et rend la protection de l’enfance encore plus difficile, comme l’indique le Secrétaire général dans son rapport;
q. Soulignant que le déni arbitraire d’aide humanitaire, notamment les mesures visant à empêcher délibérément l’accès humanitaire, peut constituer une violation du droit humanitaire international et avoir des répercussions graves sur les enfants;
r. Exigeant que toutes les parties au conflit armé :
(i) Œuvrent en faveur de l’application intégrale des dispositions du communiqué de Genève du 30 juin 2012 visant à établir une véritable transition politique qui réponde aux aspirations légitimes du peuple syrien et lui permette de décider de façon indépendante et démocratique de son propre avenir;
(ii) Fassent cesser les meurtres et les atteintes à l’intégrité physique d’enfants interdits par le droit international humanitaire;
(iii) Mettent fin immédiatement à toutes les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, à toutes les violations des droits de l’homme et à toutes les atteintes à ces droits dont les victimes sont des enfants, et prennent toutes mesures appropriées pour protéger les enfants lors des opérations militaires;
(iv) Mettent fin à l’impunité des auteurs de violations du droit international humanitaire, de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, et traduisent en justice ceux qui sont coupables ou responsables d’une quelconque manière de telles violations ou atteintes commises en République arabe syrienne;
(v) Respectent le principe de neutralité du corps médical et facilitent le libre passage, dans toutes les zones, du personnel, du matériel, des fournitures et des moyens de transport médicaux, y compris des articles chirurgicaux, rappelant qu’en vertu du droit international humanitaire, les blessés et les malades doivent recevoir, dans toute la mesure possible et dans les plus brefs délais, les soins médicaux et l’attention qu’exige leur condition, et que les équipes médicales et humanitaires doivent, ainsi que leurs installations et moyens de transport, être respectées et protégées;
(vi) Mettent fin à toutes les attaques contre la population et les installations civiles interdites par le droit international humanitaire, en particulier contre les écoles et les hôpitaux, ainsi qu’aux opérations d’inspiration terroriste et aux attaques aveugles lancées sur des zones peuplées, au moyen notamment d’armes à sous-munitions, de bombardements aériens, de barils explosifs, d’armes chimiques, d’obus de mortier et d’artillerie lourde;
(vii) Mettent fin à l’utilisation des écoles et des hôpitaux à des fins militaires en violation du droit international humanitaire, protègent le caractère civil de ces institutions et évitent d’établir des positions militaires dans des zones peuplées;
(viii) Se conforment immédiatement à l’intégralité des dispositions des résolutions 2139 (2014) et 2165 (2014) du Conseil de sécurité et de la Déclaration de son président datée du 2 octobre 2013 (S/PRST/2013/15);
(ix) Cessent les enlèvements d’enfants, libèrent immédiatement tous les enfants enlevés et les membres de leur famille et fassent en sorte que les familles puissent être réunies rapidement;
(x) Ne procèdent pas à des arrestations arbitraires ou à la mise en détention illégale d’enfants;
(xi) Prennent immédiatement toutes les mesures nécessaires pour prévenir et faire cesser toute forme d’atteintes et de violence sexuelles sur la personne de garçons et de filles;
(xii) Prennent les mesures qui s’imposent pour permettre au personnel du mécanisme de surveillance et de communication de l’information des Nations Unies de gagner, en toute sécurité, les territoires qu’ils contrôlent et d’y circuler librement pour constater les faits et en rendre compte.