L’Instance permanente sur les questions autochtones ouvre sa session de 2014, consacrée à la bonne gouvernance
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Instance permanente sur les questions autochtones
Treizième session
1re et 2e séances – matin et après-midi
L’INSTANCE PERMANENTE DES NATIONS UNIES SUR LES QUESTIONS AUTOCHTONES OUVRE SA SESSION DE 2014, CONSACRÉEÀ LA BONNE GOUVERNANCE
Le Secrétaire général souligne que la conférence mondiale 2014 sur les autochtones
devra servir à intégrer les questions autochtones aux objectifs de développement d’après-2015
À quatre mois de la première Conférence mondiale sur les populations autochtones, qui se tiendra à New York, les 22 et 23 septembre 2014, l’Instance permanente sur les questions autochtones (l’Instance) a ouvert, ce matin, sa treizième session annuelle sur le thème « Principes de bonne gouvernance conformes à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (art. 3 à 6 et 46) ».
Dans une déclaration liminaire d’ouverture des travaux, M. Ban Ki-moon, Secrétaire général des Nations Unies, a rappelé l’importance de la Conférence mondiale de 2014, dont les travaux devront donner aux délégations l’occasion d’intégrer les questions autochtones aux objectifs et au programme de développement durable pour l’après-2015, avant d’appeler les États Membres à reconnaître la capacité qu’ont les autochtones à aider la communauté internationale à relever le défi posé par les changements climatiques. Alors que les populations autochtones continuent de subir des discriminations, qui ont des conséquences terribles pour leurs langues, leurs terres et leur participation à la vie économique, M. Ban a assuré ces derniers de son soutien, afin qu’ils puissent préserver leurs langues, cultures et identités et vivre dans la dignité.
Soulignant l’importance particulière que les autochtones accordent à la culture comme élément de développement, le Président de l’Assemblée générale, M. John Ashe, a relevé les nombreux appels lancés lors d’une récente réunion de l’Assemblée afin que les objectifs de développement pour l’après-2015 intègrent pleinement le rôle de la culture et de la diversité culturelle dans les objectifs plus larges de la promotion de la croissance économique, de l’inclusion sociale et de la durabilité environnementale.
De son côté M. Thomas Gass, Sous-Secrétaire général de l’ONU à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, a appelé à cibler la structure de gouvernance de chaque pays et à voir la manière dont elle promeut les droits des peuples autochtones ou ne le fait pas. Il s’est dit persuadé que les exemples de bonne gouvernance examinés au cours des deux semaines de travaux de la session de l’Instance serviront de source d’inspiration aux États Membres.
En écho aux appels à prendre en compte les attentes des autochtones dans la définition des objectifs de développement pour l’après-2015, le Chef du Groupe de la gouvernance démocratique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) s’est dit persuadé que des objectifs basés sur les droits de l’homme prendront automatiquement en compte ceux des autochtones. Illustrant la contribution du PNUD à cette thématique, le représentant a annoncé le lancement d’un Manuel sur les droits des peuples autochtones lors de la Conférence mondiale de septembre 2014.
Le thème de la « bonne gouvernance » au service des droits des autochtones a fait l’objet d’une table ronde dans l’après-midi au cours de laquelle les participants ont appuyé leurs interventions sur un rapport* qui présente des pratiques optimales de règlement des différends fonciers aux Philippines, au Bangladesh et dans plusieurs régions d’Afrique.
Plusieurs intervenants ont mis l’accent sur le principe du consentement libre, préalable et éclairéen soulignant certaines contradictions potentielles existant entre les articles 3 et 46 de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones. Alors quel’article 46 précise qu’aucune disposition de la Déclaration ne peut justifier d’amoindrir l’intégrité territoriale d’un État souverain, les représentants du Caucus des femmes autochtones et du Caucus mondial des autochtones ont estimé que l’article 46 ne pouvait cependant non plus être interprété comme s’opposant au droit à l’autodétermination, qui est affirmé par l’article 3 de la Déclaration.
À l’ouverture de ses travaux, l’Instance a élu par acclamation Mme Dalee Sambo Doroughà la présidence de sa treizième session. Elle a aussi élu ses quatre Vice-Présidents: M. Mohammad Hassani Nejad Pirkouhi; M. Edward John; M. Gervais Nzoa; et Mme María Eugenia Choque Quisp. Mme Valmaine Tokia a été élue aux fonctions de Rapporteur. Après les déclarations liminaires, l’Instance a adopté l’ordre du jour provisoire et l’organisation de ses travaux**.
Créée en juillet 2000, après deux décennies de négociations, l’Instance est le principal forum visant à sensibiliser la communauté internationale sur la situation des quelque 370 millions d’autochtones qui vivent dans environ 90 pays et figurent parmi les individus les plus pauvres et marginalisés de la planète. Elle est composée de 16 experts indépendants siégeant à titre personnel, et nommés par l’ECOSOC, sur proposition des gouvernements, pour 8 de ses membres, et de représentants d’organisations autochtones de différentes régions du monde pour les 8 autres. La session ouverte aujourd’hui devrait se conclure par la rédaction d’un rapport destiné au Conseil économique et social, dont feront partie des projets de décision qu’il sera recommandé au Conseil d’adopter.
Outre une demi-journée consacrée aux peuples autochtones d’Asie, qui comprend 70% des 370 millions d’autochtones, l’Instance aura un dialogue avec les organismes et fonds des Nations Unies. Elle débattra aussi des perspectives de mise en application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée en 2007. Elle abordera aussi la question de la protection des savoirs traditionnels en Afrique et dans les communautés arctiques et subarctiques d’éleveurs de rennes. Elle aura un dialogue avec le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme des peuples autochtones ainsi qu’avec les organismes et fonds des Nations Unies.
Plus de 2 000 participants autochtones de toutes les régions du monde sont attendus aux travaux, qui ont lieu au Siège de l’ONU à New York du 12 au 23 mai, pour dialoguer avec des experts indépendants, des États Membres et des organismes des Nations Unies.
L’Instance permanente poursuivra ses travaux demain, mardi 13 mai, à 10 heures.
* E/C.19/2014/4
** E/C.19/2014/1 et E/CN.19/2014/L.1
Déclarations d’ouverture
Dans sa déclaration d’ouverture faite dans sa langue maternelle, M. TODADAHO SID HILL, Chef de la Nation onondaga, originaire de l’État de New York, aux États-Unis, a souhaité la bienvenue aux participants sur la terre onondaga avant d’appeler à respecter l’esprit et les voix des ancêtres et de tous ceux qui nous ont précédés sur terre. Il a exprimé sa reconnaissance aux ancêtres qui ont toujours été dignes des responsabilités qui sont les leurs, même dans l’au-delà. « Nous sommes protégés par une force suprême et nous jouissons d’une protection dans les moments les plus difficiles », a dit le Chef de la Nation onandaga avant d’appeler ses semblables à rester solidaires.
M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a dit que l’Instance permanente sur les questions autochtones était un instrument vital qui permet d’entendre les voies et aspirations des peuples autochtones aux quatre coins du monde. Depuis sa création en 2000, l’Instance est devenue un lieu central pour traiter de toutes les questions relatives aux autochtones, s’est-il félicité. Il a ajouté qu’un des défis de l’Instance était de trouver des solutions mutuellement bénéfiques. Le Secrétaire général s’est félicité des progrès notables réalisés depuis 2007, avec l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, avant de citer la mise en place du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones et la création d’un poste de Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones.
À l’aune de la Conférence mondiale des peuples autochtones, qui se tiendra à New York les 22 et 23 septembre 2014, M. Ban Ki-moon a encouragé les États Membres et les peuples autochtones à aller de l’avant dans la recherche de solutions pour notre avenir commun. Instaurer la confiance est essentiel pour promouvoir ce dialogue, a-t-il dit. Alors que nous allons célébrer la fin de la deuxième Décennie internationale des peuples autochtones en 2014, nous sommes tous conscients que les autochtones continuent de subir des discriminations, qui ont des conséquences terribles sur leurs langues, leurs cultures, leurs terres, et qui se traduisent par la pauvreté et leur manque de participation à la gestion de la vie courante, a ajouté le Secrétaire général. Il a précisé que les populations autochtones sont en première ligne des changements climatiques, avant d’appeler les États Membres à reconnaître la capacité qu’ont les autochtones à aider le monde à relever le défi des changements climatiques et à mieux faire face aux émissions de gaz à effet de serre.
« Les autochtones du monde entier doivent pouvoir décider des solutions à apporter aux questions qui les touchent et préserver leurs langues, leurs cultures et leurs identités », a insisté le Secrétaire général avant de garantir qu’il apportera toujours son soutien pour que les peuples autochtones puissent vivre dans la dignité.
M. JOHN ASHE, Président de la soixante-huitième session de l’Assemblée générale, a rappelé que le thème choisi par l’Instance cette année se concentre sur la bonne gouvernance en mettant l’accent sur les articles 3 à 6 et 46 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, qui rappellent que les autochtones ont des droits à l’autodétermination et au choix de la nationalité. « Votre présence est la preuve de votre volonté d’aider la communauté internationale à bien comprendre vos aspirations et les difficultés que vous rencontrez pour réaliser vos aspirations », a déclaré le Président de l’Assemblée générale aux représentants des populations autochtones.
M. Ashe a indiqué que les récentes discussions sur les objectifs de développement pour l’après-2015 ont permis de mettre la lumière sur la pertinence de valeurs universelles chères aux populations autochtones, comme l’absence de discriminations, le droit à vivre en liberté, en paix et en sécurité, la protection de la biodiversité, la bonne gouvernance, la gestion durable des ressources naturelles et le respect de la diversité culturelle. Il s’est réjoui que le débat tenu par l’Assemblée générale la semaine dernière sur la culture et le développement ait été l’occasion d’entendre de nombreux États Membres reconnaître l’importance de la culture pour le développement. Soulignant l’importance particulière que les autochtones accordent à la culture comme élément de développement, le Président de l’Assemblée générale a aussi relevé les nombreux appels lancés à la récente réunion de l’Assemblée afin que les objectifs de développement pour l’après-2015 intègrent pleinement le rôle de la culture et de la diversité culturelle dans les objectifs plus larges de la promotion de la croissance économique, de l’inclusion sociale et de la durabilité environnementale.
Alors que 2014 marque la fin de la deuxième Décennie internationale des peuples autochtones (2005-2014), M. Ashe a dit que la réunion de ce jour vise à permettre un échange de vues et de pratiques de référence sur la réalisation des droits des peuples autochtones, y compris en vue d’atteindre les objectifs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Il a espéré que le rapport final sur la mise en œuvre de cette deuxième Décennie et son impact sur la réalisation des OMD servira au cours de la tenue des débats relatifs aux objectifs de développement pour l’après-2015.
M. Ashe a dit que lui-même et l’équipe de l’Assemblée générale allaient tout mettre en œuvre, conformément à la résolution 66/296 de l’Assemblée, pour que l’on parvienne à la mise en place d’un processus inclusif réunissant les États Membres et les populations autochtones, afin de faire en sorte que la Conférence mondiale sur les peuples autochtones de septembre 2014 aboutisse à un réel succès
Il a également indiqué qu’une consultation interactive allait avoir lieu, après la séance de ce jour. Cette consultation sera l’occasion d’engager un dialogue entre la Présidente de l’Instance et les organismes des Nations Unies, ce qui permettra d’alimenter la préparation de la Conférence mondiale prévue au mois de septembre
M. MARTIN SAJDIK, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), dont relève l’Instance permanente sur les questions autochtones, s’est félicité de voir que la salle de l’Assemblée générale était comble, et qu’autant de peuples autochtones représentés et de délégations des États Membres prennent part à cette session. Il est nécessaire de réfléchir au lien entre ces peuples et les gouvernements du monde, et l’ECOSOC prend ce travail très au sérieux puisque l’Instance permanente est l’un de ses organes subsidiaires, a-t-il souligné.
M. Sajdik a parlé des changements intervenus dans l’organisation des sessions de l’ECOSOC ainsi que des décisions prises sur les meilleurs moyens d’intégrer les différentes thématiques abordées par cet organe. L’Instance souhaitera réexaminer son ordre du jour pour apporter des contributions ciblées susceptibles de mieux influencer les travaux de l’ECOSOC à l’avenir, a déclaré le Président du Conseil économique et social, qui a annoncé que, cette année, le rapport annuel de l’Instance ne sera pas examiné durant une des réunions de coordination et d’organisation du Conseil, mais plutôt lors de sa session du mois de juillet. Il a estimé que cela permettra un meilleur échange d’idées et plus d’influence au niveau politique.
Il est incontestable que l’impact de l’urbanisation est durement ressenti par les peuples autochtones de par le monde, a déclaré M. Sajdik. Dans les villes, ces peuples connaissent des situations inégales et vivent dans la précarité, loin de leur milieu; mais d’un autre côté, ils peuvent bénéficier des opportunités offertes par les villes, a souligné M. Sajdik, en encourageant les parties à mener une analyse approfondie sur cette question au moment même où l’ECOSOC débat de la question de la promotion d’une urbanisation durable.
Mme DALEE SAMBO DOROUGH, nouvelle Présidente de l’Instance permanente sur les questions autochtones, a d’abord rendu hommage au Chef traditionnel de la nation onondaga, habitants originaux de la région de New York, Chef Todadaho Sid Hill. Elle a également rendu hommage à la mémoire de Billy Frank, décédé le 5 mai, pour le rôle fondamental qu’il a joué pour honorer les traités de sa tribu, Nisqually, et le droit de son peuple à exploiter les ressources en saumon présentes dans le fleuve Nisqually, qui porte le nom de son peuple.
Mme Dorough a rappelé les différents processus nationaux, régionaux et internationaux visant à sensibiliser l’opinion et les décideurs aux questions qui tiennent le plus à cœur aux peuples autochtones, en particulier les principes de bonne gouvernance et l’approche fondée sur les droits de l’homme.
« La création d’un espace pour notre participation démocratique aux processus et mécanismes des Nations Unies est absolument nécessaire », a-t-elle déclaré, affirmant qu’il convenait de respecter ce droit fondamental et reconnu dans tous les contextes, y compris celui concernant la plénière de haut niveau qu’aura l’Assemblée générale au mois de septembre, intitulée « Conférence mondiale sur les peuples autochtones ». Elle a cependant noté que le principe d’égalité et de respect du droit des peuples autochtones à participer à ce grand débat « demeure un objectif bien lointain », et elle a émis l’espoir que le « milieu politique allait finalement évoluer changer » en faveur des peuples autochtones, à qui la parole doit être donnée.
La Présidente de l’Instance a ensuite remercié le Gouvernement du Mexique pour avoir accueilli la réunion présession de l’Instance, du 26 au 28 mars 2014, ce qui a permis aux participants de préparer le programme de travail de la présente session.
Elle a évoqué les inquiétudes que ressentent certains membres de l’Instance concernant les méthodes de travail de celle-ci. Les membres de l’Instance désirent qu’elle soit un mécanisme efficace au sein des Nations Unies, a dit Mme Dorough. Une discussion est en cours sur les réformes importantes envisagées, a-t-elle annoncé, en soulignant que si l’Instance doit effectivement être plus sensible à la promotion et à la protection des droits de l’homme au sein de l’ONU, il est impératif d’envisager et d’amorcer une réforme radicale en sa faveur. Elle a notamment cité la nécessité de mieux se centrer sur les recommandations et de limiter le nombre d’études menées par les membres de l’Instance. Il s’agit également de se concentrer davantage sur le travail que mènent un large éventail d’agences onusiennes pour veiller à ce qu’elles soient sensibles aux droits de l’homme, aux intérêts et aux préoccupations des peuples autochtones à tous les niveaux.
Mme Dorough a appelé, en outre, au renforcement du rôle de chaque expert de l’Instance et à l’amélioration des contributions qu’il est susceptible de faire au profit de tous les peuples autochtones et dans sa région respective. Elle a relevé à cet égard qu’en l’état actuel des choses, les experts n’avaient pas les ressources qui leur permettraient de conduire des consultations dans leurs propres régions ou au-delà. « Pour ce faire, des fonds supplémentaires seraient nécessaires afin de permettre aux 16 membres de l’Instance d’accomplir un travail plus concret et mieux orienté vers l’action », a-t-elle préconisé, appelant les États Membres et les donateurs à apporter leur appui pour rendre ces réformes possibles et favoriser une efficacité accrue de l’Instance permanente en tant que mécanisme de l’ONU.
Mme Dorough a aussi appelé à l’ouverture d’un débat autour de la « fausse dichotomie qui fait que les agences de l’ONU se limitent à assister uniquement les peuples autochtones dans les pays en développement, mais pas leurs pairs, qui sont pourtant marginalisés dans ce qu’on appelle le monde développé ».
L’Instance s’emploie également à affirmer son statut en tant qu’organe subsidiaire du Conseil économique et social (ECOSOC), l’objectif ultime étant que les peuples autochtones disposent d’une « maison » au sein de l’ONU. « Ce serait une maison accueillante et reposant sur un statut équitable et digne au sein de la famille des Nations Unies », a dit la Présidente.
Après avoir procédé à une description du programme de travail des deux semaines de travaux de cette treizième session de l’Instance permanente sur les questions autochtones, dont le thème spécial est « Principes de bonne gouvernance conformes à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones », la Présidente a estimé que les principes de transparence, d’inclusion, d’efficacité et de responsabilisation étaient liés et se renforcent mutuellement.
Mme Dorough a insisté sur la nécessité urgente pour toutes les parties, en particulier pour les États Membres, de prendre des mesures « coordonnées, audacieuses et efficaces, pour répondre à la discrimination, au racisme, à la marginalisation, à l’extrême pauvreté, et au conflit auxquels sont confrontés les peuples autochtones partout dans le monde ». « L’indifférence face à ces réalités urgentes ne doit pas être tolérée, car tout le monde sait que l’indifférence fait le lit de l’intolérance », a souligné Mme Dorough.
M. THOMAS GASS, Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations, a déclaré que les populations autochtones continuent de faire face à un accès insuffisant aux services de santé et d’éducation. M. Gass a appelé à préserver les cultures autochtones et s’est particulièrement inquiété de la situation dans laquelle sont les langues autochtones, menacées de disparition. Il a indiqué que 600 langues autochtones ont disparu au cours du siècle dernier et que cette disparition se poursuit au rythme d’une langue toutes les deux semaines. Il a dit qu’il est important qu’au cours de cette session on se concentre sur la bonne gouvernance. Il faut cibler la structure de gouvernance de chaque pays et voir la manière dont elle promeut les droits des peuples autochtones ou ne le fait pas, a-t-il recommandé.
Le Sous-Secrétaire général à la coordination des politiques et aux affaires interorganisations s’est dit persuadé que les exemples de bonne gouvernance qui seront présentés au cours de cette session serviront de source d’inspiration pour les États Membres et les représentants des populations autochtones. Il s’est dit persuadé que les débats relatifs au programme de développement pour l’après-2015 tiendront mieux compte, grâce à la coopération internationale, du développement des populations autochtones en répondant à leurs attentes. En tant que gardiens de leur territoire, les autochtones ont une contribution précieuse à apporter à la gestion durable des territoires et des ressources naturelles, a insisté M. Gass. Il a remercié le Gouvernement du Mexique d’avoir accueilli au mois de mars à Mexico City une réunion présession de l’Instance, qui a permis à ce forum de mieux connaître les meilleures pratiques existant aux quatre coins du monde en terme de gouvernance prenant en compte les autochtones. Il a ensuite remercié le Danemark d’avoir contribué en 2013 au Fonds d’affectation spéciale.
Mme NUVIA MAGDALENA MAYORGA DELGADO, Directrice générale de la Commission nationale du Mexique pour le développement des populations autochtones, a dit la volonté du Gouvernement mexicain d’orienter ses politiques publiques afin de mieux répondre aux besoins des populations autochtones en matière de santé, d’éducation, et de développement. Elle a dit qu’il est indispensable que les travaux de l’Instance, dont les recommandations sont de précieuses indications pour son pays en matière de promotion des droits des autochtones, soient fructueux. Elle a appelé à ce que soit reconnue la capacité des autochtones à s’organiser et à participer à la prise de décisions pour toutes les questions touchant leur développement. Il faut qu’ils puissent vivre dans un environnement de pleine reconnaissance de leurs droits, a insisté la représentante du Mexique. Au Mexique, a-t-elle ajouté, la prise en charge des communautés repose sur le principe de participation sociale, a-t-elle dit, avant de mettre l’accent sur l’importance de planifier le développement des autochtones en préservant leur identité dans chacune des régions concernées.
M. JERRY MATEPARAE, Gouverneur général de la Nouvelle-Zélande, a déclaré, dans son allocution, que la participation des représentants autochtones y était fondamentale. Ces peuples sont les dépositaires du patrimoine et de certaines des cultures les plus précieuses de l’humanité, a-t-il poursuivi en réaffirmant l’appui de la Nouvelle-Zélande à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Il a souligné que cette Déclaration contenait des principes qui sont en harmonie avec les obligations et les principes inhérents au Traité de Waitangi, l’un des quatre documents de fondation de la nation néo-zélandaise, comme par exemple, le fonctionnement de l’État, qui doit se faire dans un esprit de partenariat et de respect mutuel entre toutes les populations.
M. Mateparae a réitéré l’engagement du Gouvernement néo-zélandais à créer et maintenir des rapports sincères avec les Maoris, peuple autochtone du pays, ainsi qu’à respecter et favoriser l’autonomisation de ceux-ci pour qu’ils puissent réaliser leurs aspirations et leur plein potentiel. Dans ce contexte, des progrès considérables ont été accomplis dans la mise en œuvre du Traité historique de Waitangi.
La conclusion du Traité représente une base sociale, économique et culturelle plus forte pour chaque tribu, et pour les Maoris d’une manière générale, s’est-il félicité. L’économie maorie continue à se développer, et le Gouvernement néo-zélandais appuie le partenariat entre la Couronne et les Maoris par le biais du He Kai Kei Aku Ringa, qui signifie littéralement l’autosuffisance ou « avoir la nourriture dont tu as besoin grâce à tes propres mains », a indiqué M. Mateparae.
Le Gouverneur général a toutefois déploré que les Maoris restent surreprésentés dans le système pénal et pénitentiaire néo-zélandais, et qu’ils ne jouissent pas d’un état de santé physique et mental comparable au reste de la population. Il est également regrettable que la population autochtone maorie affiche un taux de chômage très élevé et, en dépit des progrès, que les enfants, surtout les garçons, aient des résultats scolaires inférieurs à ceux de leurs camarades non maoris.
Saluant l’engagement des peuples autochtones à travers le dialogue positif qu’ils ont engagé dans la perspective de la Conférence mondiale sur les peuples autochtones, prévue en septembre à New York, le Gouverneur général de la Nouvelle-Zélande a réitéré l’engagement de tous les autochtones et des autres parties pour que la conférence soit constructive et bénéficie d’une large représentativité durant ses travaux afin de pouvoir régler tous les problèmes qui se posent encore de manière pressante. Il a appelé tous les peuples autochtones, leurs défenseurs, et tous les États à poursuivre un dialogue ouvert, à rechercher des solutions durables aux nombreux défis qui persistent, et à saisir cette opportunité pour concrétiser les attentes et libérer le potentiel de ces peuples.
Table ronde sur le thème spécial « Principes de bonne gouvernance conformes à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones »
Interventions liminaires des panélistes
L’Instance permanente sur les questions autochtones a entamé, cet après-midi, son débat sur le thème spécial de sa treizième session -ouverte ce matin par le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon- axé sur les « Principes de bonne gouvernance conformes à la Déclaration sur les droits des peuples autochtones ».
Le premier panéliste de la table ronde organisée cet après-midi sur le thème majeur de la session, M. JAIME MARTÍNEZ VELOZ, Commissaire national chargé du dialogue avec les peuples autochtones du Mexique, a déclaré que les dispositionsrelatives aux droits de ces peuples figurant dans la Déclaration adoptée en septembre 2007, et en particulier les articles 3 à 6 et 46 de cette Déclaration, appellent à une profonde réflexion sur les différents aspects des luttes menées par les peuples autochtones à travers le monde: il a cité le droit à l’autodétermination et le droit à l’autonomie des autochtones, qui doivent pouvoir s’administrer eux-mêmes pour trouver des solutions à tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales. Il a également évoqué le droit des autochtones à bénéficier du renforcement de leurs institutions politiques, judiciaires, économiques, sociales et culturelles.
« La force de la Déclaration réside dans le fait qu’elle exprime les sentiments, revendications, aspirations, rêves et demandes de réparation exprimées par les autochtones pour compenser des siècles de discrimination », a dit M. Martínez Veloz. Le nouveau cadre international issu de la Déclaration a permis une révision des textes normatifs, juridiques et constitutionnels au niveau national. Il a rappelé qu’au Mexique, cela a culminé avec la signature, en 1994, des accords de San Juan Andrés Larrainzar, conclus entre le Gouvernement mexicain et l’Armée zapatiste de libération nationale (Ejército Zapatista de Liberación Nacional - EZLN), aux termes d’un long processus de consultation et de négociation. M. Martínez Veloz a aussi mis l’accent sur l’acceptation, par le Gouvernement mexicain, des observations formulées par le Groupe de travail de l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme. Dans ce contexte, le Programme sectoriel gouvernemental élaboré par le Mexique pour la période 2013-2018 prévoit l’élaboration d’une proposition d’harmonisation de la législation nationale avec les dispositions de la Déclaration, qui sera soumise à l’approbation des peuples autochtones avant d’être transmise au Parlement pour approbation.
Illustrant un exemple d’autonomie des peuples autochtones, le professeur ROBERT JOSEPH, de l’Université de Waikato, de Nouvelle-Zélande,a procédé à une description de la « plateforme autonome » dont jouissent les Maoris, et qui leur confère des droits et des obligations. Il a souligné qu’il était important pour les autochtones, dans un monde globalisé, de pouvoir vivre de manière autonome. Ainsi, les Maoris ont une représentation assurée et obligatoire dans les comités consultatifs de santé et éducatifs de la Nouvelle-Zélande, étant donné qu’ils ont beaucoup d’influence politique. L’économie maorie quant à elle est en pleine croissance, représentant 8% au PNB national néo-zélandais. D’autre part, les Maoris disposent de leurs propres écoles, dont les enseignements reposent sur leur propre vision du monde.
À l’instar du Gouverneur général de Nouvelle-Zélande qui s’est exprimé dans la matinée, le professeur Joseph a déploré que les Maoris restent cependant confrontés à beaucoup de difficultés. À partir de là, il a souligné l’importance d’une bonne gouvernance au niveau des communautés pour y assurer le développement durable à tous les niveaux. L’aspect essentiel de la mise en œuvre de la Déclaration dépend du niveau de volonté politique et des trois types de bonne gouvernance existant entre l’État et les peuples autochtones, et qui sont: la gouvernance traditionnelle, la gouvernance de transition et la gouvernance de transformation.
M. Joseph a recommandé à l’Instance d’examiner le statut des entités juridiques et a demandé la mise en place de structures législatives pour les tribus maories, comme aux États-Unis. Le public non autochtone doit reconnaître, de son côté, les cultures et cela se fait aux États-Unis au profit des Amérindiens, ce qui assure aux autochtones le respect de la diversité et identité et enrichit leur identité au plan national. M. Joseph a d’autre part plaidé pour une reconnaissance des femmes autochtones, de leur rôle et de la place qu’elles occupent, et en faveur de la promotion du bien-être des enfants des communautés autochtones.
Présentant une synthèse des résultats d’un atelier tenu récemment en Amazonie sur la bonne gouvernance, un autre panéliste, M. PEDRO GARCIA, Avocat représentant les intérêts des peuples autochtonesau Pérou, a indiqué que lesparticipants sont tombés d’accord sur le fait que les questions liées au respect de l’intégrité territoriale, à la transmission intergénérationnelle du savoir, à la sécurité alimentaire et à l’autosuffisance, et à la jouissance des droits collectifs reconnus dans les traités universels, étaient les priorités des peuples autochtones. Le panéliste a noté que ces dernières années, les conditions prévalant dans les territoires autochtones en général sont devenues catastrophiques, leurs ressources étant pillées sans vergogne par les entreprises transnationales. Pourtant, a-t-il relevé, la Convention sur la biodiversité, entre autres traités, évoque les dangers qui planent sur la Terre, et exhorte à un changement dans les paramètres économiques affectant le milieu naturel.
Les agressions contre les territoires autochtones représentent un vrai revers pour les peuples autochtones qui reviennent à une époque qu’on croyait révolue, par exemple, en ce qui concerne l’accès et l’approvisionnement en eau, a-t-il regretté. Les États ont de plus en plus une interprétation restrictive des droits des autochtones. M. Garcia a affirmé à cet égard que le thème de la pauvreté de ces peuples était évoqué de manière paternaliste et infantilisante et que le droit à l’autodétermination finit par disparaître purement et simplement dans le monde actuel. Cela ne fait qu’approfondir la méfiance qui existe entre ces peuples et l’État, a-t-il fait observer. Le panéliste a énuméré « les nombreuses questions qu’il reste à régler », en particulier concernant les droits fonciers des autochtones ou encore l’avenir des jeunes autochtones, qui n’ont aucune garantie quant aux droits qui devraient être les leurs sur leurs territoires ancestraux et sur les ressources naturelles qui y sont présentes. Il a souligné qu’aujourd’hui, au Pérou et au Brésil, de nombreux défenseurs des droits des autochtones sont arrêtés et détenus, alors même que les divisions administratives imposées par les États sèment la confusion en ce qui concerne la superficie des territoires autochtones.
« La mauvaise gouvernance est à l’origine de toutes les discriminations », a déclaré en guise de synthèse Mme DALEE SAMBO DOROUGH, Présidente de l’Instance permanente sur les questions autochtones. La bonne gouvernance doit s’appliquer tant aux États qu’aux entreprises transnationales, a-t-elle estimé. Le respect et la protection des droits de l’homme sont des principes essentiels à la bonne gouvernance. Les gouvernements doivent agir et réagir dans les meilleurs délais sur la base d’un processus de décision fondé sur la consultation et le consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones, a dit Mme Dorough. Elle a également préconisé la protection de l’environnement, des droits individuels et collectifs des autochtones et le plein respect de l’état de droit. Les forces de police doivent être incorruptibles et indépendantes, de même que le personnel judiciaire. En somme, a-t-elle conclu, il convient que les États Membres respectent et reconnaissent le droit à l’autodétermination des peuples autochtones, ceci sur la base des normes minima figurant dans la Déclaration.
Débat interactif
Au titre de ces normes minima, le Chef autochtone Little John a exhorté les parties à respecter le principe du consentement libre, préalable et éclairé, et a proposé à l’Union interparlementaire (UIP) d’établir une cartographie des parlementaires autochtones dans le monde ainsi que des bonnes pratiques en matière de participation des autochtones.
« Les politiques publiques mexicaines en faveur des autochtones sont le fruit d’une consultation participative », s’est félicité le représentant du Mexique, qui a ensuite mis l’accent sur la préservation de la culture autochtone, considérée comme un patrimoine national au Mexique. « Les affaires autochtones sont une priorité nationale pour notre pays », a renchéri la représentante de l’Australie, qui a mis en avant la volonté de l’Australie de réduire l’écart entre les autochtones aborigènes et les autres Australiens, ceci en coopération avec des représentants autochtones de huit régions de l’Australie.
Mettant l’accent sur les droits collectifs des autochtones sur les territoires et ressources naturelles de leurs territoires, le Chef du Groupe de la gouvernance démocratique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a annoncé le lancement d’un Manuel sur les droits des peuples autochtones lors de la Conférence mondiale de septembre 2014.
Si l’article 46 de la Déclaration sur les droits des autochtones précise qu’aucune disposition de la Déclaration ne peut être considérée comme autorisant ou encourageant aucun acte ayant pour effet de détruire ou d’amoindrir l’intégrité territoriale ou l’unité politique d’un État souverain et indépendant, la représentante du CAUCUS des femmes autochtones, et son homologue du Caucus mondial des autochtones, ont néanmoins estimé que l’article 46 ne pouvait non plus être interprété par les États comme s’opposant au droit à l’autodétermination.
Le représentant de la Colombie a mentionné que la Charte politique colombienne de 1991 reconnaissait l’égalité entre toutes les cultures autochtones et le respect de leurs langues dans leurs territoires respectifs, le droit à l’éducation selon leurs us et coutumes, et la reconnaissance de leurs juridictions spéciales. En Colombie, la population autochtone est d’environ 1 400 000 personnes organisées en 82 peuples qui représentant 3,4% de la population totale colombienne vivant sur près de 30% du territoire national, a précisé le représentant. Un cadre juridique pertinent existe donc, de même que la volonté politique pour parvenir à un mieux vivre pour les peuples autochtones de la Colombie et le reste de la population, a-t-il.
Le Représentant du Secrétariat de la Convention sur la biodiversité, a indiqué que les peuples autochtones doivent être les bénéficiaires et non les victimes de la création d’aires protégées. Il a fourni une description détaillée du Programme de travail sur les aires protégées (PoWPA) qui repose sur l’idée d’équité, d’inclusivité, de bonne gouvernance et de partage des bénéfices.
Le Représentant du Caucus des jeunes autochtones, a plaidé en faveur de l’inclusion des jeunes dans tous les travaux de l’Instance permanente. Il a appelé à mettre à la disposition des jeunes autochtones les ressources nécessaires à leur développement, et souhaité la mise en place d’un mécanisme efficace de surveillance ou d’un protocole facultatif à la Déclaration. Dans cette optique, il a appelé à la tenue d’une réunion d’experts pour réfléchir sur les risques et bénéfices potentiels que pourrait offrir un tel protocole, et à la mise en place de mécanismes de surveillance provisoires. Il a en outre recommandé la tenue d’une session spéciale du Conseil des droits de l’homme sur les droits des peuples autochtones.
Le représentant du Brésil a affirmé que la Déclaration était le fruit de négociations complexes et inclusives et qu’à cet égard, « elle reflète un équilibre de valeurs et d’intérêts différents ». La Constitution brésilienne s’est également efforcée de respecter cet équilibre, a-t-il souligné.
La représentante du Conseil des peuples autochtones sur le bio-colonialisme (Caucus nord-américain), a insisté sur la notion d’autodétermination et de liberté de vivre libre de tout schéma de colonisation déguisée qui pourrait être avancé par les États sous le prétexte et l’appellation de la « bonne gouvernance ». Elle a estimé nécessaire que les États Membres reconnaissent les nations autochtones.
La Sous-Ministre adjointe principale aux affaires autochtones et au développement du Nord Canada, elle a fait part de la détermination du Gouvernement canadien à prendre « les mesures qui s’imposent pour obtenir des résultats concrets et durables en créant des conditions qui permettront d’améliorer la santé et l’autosuffisance des collectivités des Premières Nations », qui sont les peuples autochtones du Canada.
Le représentant du Comité de coordination des peuples autochtones d’Afrique (IPACC), a indiqué que l’amélioration de la bonne gouvernance permet, entre autres, de contribuer à un recul de la pauvreté sur le continent africain. Il a mis en exergue la grande vulnérabilité des peuples autochtones dans les zones en conflit, et a évoqué l’enlèvement massif de 200 lycéennes au Nigeria, en demandant leur libération immédiate. Il a recommandé une coordination accrue entre le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour la prévention du génocide et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Il a également souhaité que la question des communautés autochtones africaines soit inscrite en tant que thème transversal dans l’ordre du jour du développement durable pour l’après-2015.
(Le Représentant permanent du Cameroun et Vice-Président de l’Assemblée générale, également prévu comme panéliste, n’a pu prendre part au panel cet après-midi).
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