La Commission de la population entend des appels multiples pour faire de la migration un choix et démontrer sa contribution au développement
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Commission de la population et du développement
Quarante-sixième session
4e et 5e séances
matin et après-midi
LA COMMISSION DE LA POPULATION ENTEND DES APPELS MULTIPLES POUR FAIRE DE LA MIGRATION UN CHOIX
ET DÉMONTRER SA CONTRIBUTION AU DÉVELOPPEMENT
Au deuxième jour du débat général de la Commission de la population et du développement, de nombreuses voix se sont élevées pour souligner la nécessité de lutter contre les causes structurelles de la migration, à commencer par la pauvreté, afin de faire de la migration un phénomène guidé par le choix et non pas par la nécessité.
Nombre de délégations ont également vu dans la bonne gestion des flux migratoires un moyen de contribuer aux stratégies de développement durable à l’échelle mondiale.
En fin de matinée, les délégations ont participé à un débat interactif sur la migration et le développement au cours duquel les panélistes, d’éminents chercheurs du Conseil national de la recherche technique et scientifique de l’Argentine, del’Université de Varsovie et de l’Université d’Ife ont illustré les nouvelles tendances de la migration. Le Ministre de l’immigration et de la politique d’asile de la Suède a affirmé que la migration est « un catalyseur de développement ».
Chargée d’évaluer l’exécution du Programme d’action du Caire de 1994, la Commission de la population et du développement, s’est donné pour thème central, cette année, l’évolution des migrations à l’intérieur des pays et entre les pays. Ses travaux, qui se déroulent au Siège de l’ONU, à New York, devraient s’achever le 26 avril.
La reprise du débat général a également été l’occasion pour plusieurs États, pays d’origine et de destination, d’attirer l’attention sur les complexités auxquelles ils doivent faire face en matière de migration.
Le représentant du Mexique a ainsi signalé que l’importance du nombre de migrants originaires d’Amérique centrale avait provoqué des déséquilibres démographiques dans les pays de la région, où, a-t-il précisé, on peut observer une accélération du vieillissement de la population et un déséquilibre entre le nombre de femmes et d’hommes. À l’heure actuelle, près de 12 millions de Mexicains vivent aux États-Unis dont la moitié est en situation irrégulière, a précisé le représentant qui a par ailleurs fait savoir que le Mexique aspire à devenir un pôle de développement capable d’accueillir le capital humain du monde.
Autre pays en proie à un important changement démographique, la Pologne a, par la voix de son représentant, indiqué que les autorités polonaises comptent créer des conditions propices au maintien des migrants dans le pays. Une politique migratoire réfléchie permet de limiter les conséquences négatives des changements démographiques. Si la Pologne compte une des populations les plus jeunes d’Europe, elle perdra néanmoins 1,3 million de personnes d’ici à 2030 en raison de la réduction du taux de renouvellement des générations.
Issue d’un pays qui compte un million d’immigrés et 3 millions de citoyens vivant à l’étranger, la représentante du Brésil s’est insurgée contre la stigmatisation et la criminalisation des migrants en situation irrégulière. À ce titre, elle a prévenu que les mesures législatives trop strictes ne permettent pas d’assurer la protection des droits des migrants et incitent souvent ces derniers à commettre des actes illégaux.
« On ne gagne rien en cherchant à émigrer illégalement », a tout de même souligné le représentant de Malte qui, tout en stigmatisant le nombre de morts en mer, a fait savoir que la migration illégale représente un problème de taille pour Malte « un des pays les plus peuplés au monde ». Il a assuré que son gouvernement augmentera son aide publique au développement (APD) aux pays qui s’engagent à accueillir leurs émigrés illégaux.
Au cours de cette deuxième journée de débats, plusieurs appels ont également été lancés pour trouver une solution aux coûts des envois de fonds, lesquels dépassent l’aide publique au développement que reçoivent de nombreux pays.
Le représentant de l’Australie a rappelé que le G-20 s’était engagé à réduire le coût global de ces frais de 5% d’ici à 2014 et que cet objectif permettrait de mettre à disposition de familles pauvres près de 15 milliards de dollars chaque année. Selon la Banque mondiale, les envois de fonds officiellement enregistrés vers les pays en développement ont été estimés à 406 milliards de dollars en 2012.
Les défis que pose l’exode rural ont également été évoqués à plusieurs reprises, le représentant de la Malaisie ayant notamment précisé qu’aujourd’hui, 7 Malaisiens sur 10 vivent en zone urbaine. La représentante du Sénégal a indiqué que ce phénomène avait entraîné une urbanisation galopante, une large concentration de la population active dans des villes et un accroissement rapide du taux de chômage, surtout des jeunes de moins de 35 ans.
Parmi les nouvelles tendances qui ont été évoquées au cours de la table ronde sur la migration et le développement, les délégations ont entendu les panélistes évoquer la migration « spectaculaire » des travailleurs chinois vers l’Afrique, ainsi que l’augmentation notable du nombre de jeunes qui décident de suivre leurs études à l’étranger, chiffre qui est passé d’un million en 1990 à 4 millions en 2009. « L’explosion » des coûts liés à la migration a également été commentée, ainsi que la féminisation de la migration, notamment vers le secteur du travail domestique dans les pays du Golfe.
Les panélistes ont aussi détaillé les contributions des diasporas à leur pays d’origine, ainsi que les initiatives lancées par les pays d’origine pour inverser les chiffres de la fuite de cerveaux et inciter leurs travailleurs qualifiés expatriés au retour.
La Commission de la population et du développement poursuivra son débat général demain, mercredi 24 avril, à partir de 10 heures.
DÉBAT GÉNÉRAL CONSACRÉ À L’EXPÉRIENCE DES PAYS DANS LE DOMAINE DE LA POPULATION: « L’ÉVOLUTION DES MIGRATIONS: ASPECTS DÉMOGRAPHIQUES »
Débat général
M. WIN MYINT, Vice-Ministre de l’immigration et de la population du Myanmar, a affirmé que l’immigration était un élément majeur de la croissance démographique et que le nouveau Gouvernement civil s’étant engagé sur la voie de la démocratisation, avait lancé une série de réformes politiques, sociales et économiques en vue d’améliorer les conditions de vie socioéconomiques de la population. L’une de ces mesures a consisté à établir des programmes et des politiques visant à réduire la pauvreté et à renforcer le développement rural. Pour mettre en œuvre ces politiques, il est impératif, a-t-il dit, de faire porter l’attention sur la population et ses nouvelles tendances, en particulier dans le domaine de l’immigration.
Selon le Ministre, la migration doit être incorporée dans les programmes socioéconomiques. Il a reconnu l’importance des données pour analyser le phénomène, et ainsi fournir aux décideurs les informations nécessaires pour élaborer des programmes pertinents dans les domaines de l’emploi, du logement ou de la santé.
Mme REGINA MARIA CORDEIRO DUNLOP (Brésil) a noté que le montant total des envois de fonds des migrants dépasse désormais les 200 milliards de dollars par an. Stigmatisant la criminalisation des migrants en situation irrégulière, elle a prévenu que les mesures législatives trop strictes ne permettent pas d’assurer la protection des droits des migrants et incitent ces derniers à commettre des actes illégaux, à commencer par la traite des personnes. Il importe donc de trouver un équilibre entre la demande de main-d’œuvre des pays de destination et les besoins des personnes disposées à émigrer. Elle a également exhorté la communauté internationale à accélérer ses efforts de lutte contre la pauvreté et pour le développement durable dans les pays d’origine.
Mme Dunlop a indiqué qu’un million de migrants s’étaient récemment installés au Brésil et qu’environ 3 millions de Brésiliens vivent à l’étranger. Elle a expliqué que la politique migratoire de son pays met l’accent sur l’intégration sociale des migrants. Le Brésil a conclu plusieurs accords bilatéraux sur la sécurité sociale afin d’assurer aux migrants le droit à la retraite et à la protection sociale. Comme beaucoup d’immigrants au Brésil viennent des pays voisins, les politiques migratoires ont un rôle important à jouer dans le cadre de l’intégration et du développement régional, a-t-elle jugé
La mobilité est au cœur de la mondialisation et il faut déplorer, a estimé la représentante, le fait que les obstacles les plus importants à la migration perdurent. Elle a voulu que le Dialogue de haut niveau sur la migration internationale et le développement que tiendra l’Assemblée générale au mois d’octobre prochain soit l’occasion de définir la marche à suivre pour les droits des migrants, tout en prenant en compte la lutte contre la pauvreté et la promotion du développement durable.
M. MARTHINUS VAN SCHALKWYK(Afrique du Sud) a estimé qu’un flux migratoire bien géré peut contribuer aux stratégies de développement mondial, régional et national. Il faut pour cela aller au-delà des lois. Les droits de l’homme sont au cœur du développement et la protection de ceux des migrants doit être une partie intégrante des stratégies de développement. Les gouvernements doivent veiller, en particulier, à la pleine réalisation des droits des femmes migrantes, notamment contre la violence et l’exploitation.
Le représentant a aussi voulu que l’on trouve une solution aux coûts des envois de fonds qui ont montré leur importance dans la lutte contre la pauvreté. Il faut aussi trouver les moyens d’encourager le partage du savoir, grâce aux diasporas. M. Mamabolo a attribué la vulnérabilité des migrants au VIH/sida à l’effet perturbateur des politiques migratoires restrictives sur la vie de famille. Il l’a également attribuée à la défaillance des services de santé sexuelle et reproductive. Souvent, s’est-il expliqué, les migrants se voient refuser la jouissance des droits sexuels et reproductifs que le reste de la population tient pour acquis. S’attaquer à cette question revient à corriger l’une des dimensions les plus persistantes de l’inégalité dont souffrent les hommes et les femmes migrantes, a-t-il conclu.
M. OMAR DE LA TORRE DE LA MORA (Mexique) a estimé qu’une migration bien gérée avait des retombées positives et a réclamé une politique migratoire qui puisse concilier les intérêts des pays d’origine et de destination. Il faut, a-t-il aussi souligné, lutter contre les causes structurelles de la migration pour qu’elle devienne une décision volontaire et non pas une mue par la pauvreté. Le représentant a engagé les États à mener des négociations sur des régimes migratoires sûrs et ordonnés. Il a donc plaidé pour l’intégration de la question de la migration dans l’agenda du développement post-2015.
La situation migratoire du Mexique est très complexe, a-t-il dit, en expliquant qu’il s’agit d’un pays d’origine, de transit, de destination et de retour. Il a rappelé le nombre importants d’émigrés mexicains aux États-Unis, qui a provoqué des déséquilibres démographiques dans les pays de la région, où on peut observer une accélération du vieillissement de la population et un déséquilibre entre le nombre de femmes et d’hommes. À l’heure actuelle, près de 12 millions de Mexicains vivent aux États-Unis dont la moitié, a précisé le représentant, est en situation irrégulière.
Il a souligné l’importance de renforcer les liens avec le « pays de l’extérieur » afin de préserver les liens entre les migrants et leur famille, tout en veillant à leur bonne intégration dans leur pays de destination. Il a fait part des efforts de son pays, dans la lutte contre la pauvreté, pour qu’il devienne aussi un pays de destination. Le Mexique aspire à devenir un pôle de développement capable d’accueillir le capital humain du monde, tout en veillant au renforcement des capacités des migrants qui reviennent.
Le représentant a reconnu que les passages clandestins entre l’Amérique centrale et les États-Unis étaient une importante source de tension dans sa région. Il a reconnu la nécessité de réduire le taux de la migration irrégulière et de lutter contre la traite des êtres humains. Mais, a-t-il plaidé, il faut protéger les droits des migrants, et établir des procédures spéciales pour les mineurs et les personnes vulnérables, sans oublier la formation des officiers de l’immigration au respect des droits de l’homme.
M. de la Torre de la Mora a annoncé que le Mexique est sur le point de finaliser un plan national de développement 2013-2018 sur lequel se fondera l’élaboration d’une politique de la migration « moderne et tournée vers l’avenir ».
M. VADIM PISAREVICH (Bélarus) a déclaré que le Gouvernement suit régulièrement la situation de la migration dans le pays sur la base des travaux d’analyse systémique. En d’autres termes, nous voyons clairement où et en quelle quantité nous avons besoin d’immigrants pour remplacer le déclin naturel de la population du pays. Dans un effort d’attirer des migrants, le Gouvernement essaie d’utiliser pleinement les capacités des citoyens vivant à l’étranger et de la diaspora. Des mesures ont été prises pour encourager les émigrés, qui avaient quitté le pays pour vivre en permanence à l’étranger ou tout simplement pour y travailler grâce à des contrats de travail, à revenir au pays. Le Bélarus travaille également pour faciliter l’intégration des migrants dans la société. Le Gouvernement a mis en œuvre un ensemble de mesures juridiques, organisationnelles et financières visant à légaliser et à intégrer les migrants. Il accorde une attention particulière à l’emploi des migrants. Aussi, le Ministère du travail et de la protection sociale gère-t-il une banque nationale de l’emploi qui rend disponibles des informations pertinentes pour les citoyens et les étrangers.
M. CHUA HOON HWA, Ministre de la femme, de la famille et du développement de la communauté de la Malaisie, a affirmé que l’impact de la migration sur le développement social et économique, à l’intérieur comme au niveau international, constituait une source de préoccupation. Comme l’a observé le Secrétaire général dans son rapport, avec des politiques appropriées, la migration peut avoir un impact positif à la fois pour les pays d’accueil et les pays d’origine. Il a rappelé, citant la Banque mondiale, que la Malaisie, un jeune pays en développement, avait l’un des niveaux les plus élevés de flux migratoires.
Aujourd’hui, 7 Malaisiens sur 10 vivent en zone urbaine, a-t-il expliqué. La forte industrialisation du pays a également attiré de nombreux migrants, travaillant essentiellement dans les secteurs manufacturiers, agricoles et du bâtiment. La Malaisie est en particulier préoccupée, a-t-il dit, par la situation des femmes et des enfants migrants, plus exposés à l’exploitation. Des mesures visant à lutter contre les trafics d’êtres humains ont ainsi été prises par le Gouvernement.
M. YAROSLAV GOLITSYN (Ukraine) a réaffirmé le soutien de son pays aux efforts déployés par les Nations Unies en matière de coopération internationale pour rationaliser et améliorer les politiques migratoires et de développement. Il a ajouté que ce thème devrait être intégré à l’agenda du développement post-2015. Son gouvernement est parvenu, selon lui, à stabiliser la situation intérieure tout en reconnaissant que son pays demeure un pays d’émigration. La population ukrainienne tend à diminuer, a-t-il reconnu, en déplorant la fuite des cerveaux.
Il a par ailleurs réaffirmé l’attachement de son pays au respect des droits des migrants et déclaré que l’Ukraine contribue au processus global contre les inégalités dont souffrent les migrants, les personnes déplacées et les réfugiés, tout en combattant la traite des êtres humains. Il a également cité des statistiques selon lesquelles 313 819 étrangers résident légalement sur le territoire national. Il a conclu en insistant sur la nécessité de mettre en place des partenariats et de renforcer la coopération transfrontalière afin d’encourager les pratiques les plus protectrices des droits des migrants.
M. SUDIBYO ALIMOESO (Indonésie) a indiqué que selon les prévisions, en 2030, son pays devrait compter 225 000 migrants et qu’en conséquence, la question de la migration dans son ensemble figure parmi les priorités définies par son gouvernement. Il a expliqué que les flux migratoires en Indonésie sont en train de changer, son pays faisant actuellement face à une hausse du nombre d’immigrants et de l’exode rural, ce qui donne lieu à de nouveaux défis. Il a souligné la nécessité de limiter les pressions exercées par ces nouveaux flux migratoires, notamment en ce qui concerne l’emploi. Il a également précisé que de nombreuses femmes comptent parmi les migrants internes.
L’Indonésie renforce actuellement son cadre juridique et institutionnel ainsi que sa législation pour assurer le respect des droits des migrants et de leur famille. Le Plan national de développement 2005-2025 place l’individu au centre des efforts, car c’est là, a affirmé le représentant, la ressource la plus précieuse. M. Almoeso a invité les délégations à examiner comment les perspectives mondiales en matière de migration s’inscrivent dans le cadre du développement post-2015.
M. PAUL SEGER (Suisse) a déclaré que 26,4% de la population de son pays sont nés à l’étranger. La politique de migration étrangère suisse est basée sur une approche globale de la migration comme étant des opportunités économiques, sociales et culturelles sans perdre de vue les défis. Elle est aussi basée sur un partenariat étroit entre la Suisse et les pays d’origine, de transit et de destination accompagné d’une considération équilibrée des intérêts de toutes les parties prenantes. Enfin, elle est fondée sur une coopération interministérielle étroite au moyen d’une approche gouvernementale qui vise à assurer que la politique migratoire suisse reste cohérente. La Suisse a établi des partenariats sur la migration avec la Serbie, le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine, le Nigéria et récemment avec la Tunisie. En 2007, la Suisse a développé le concept de « Protection in the region » qui tend à renforcer la protection des réfugiés, des migrants vulnérables et des personnes déplacées de l’intérieur dans leurs régions d’origine. Les autorités nationales ont été appuyées pour établir des procédures d’asile efficientes et équitables.
Pour s’assurer de la mise en œuvre stratégique des protocoles relatifs à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, la Suisse a lancé en octobre 2012 son Plan national d’action contre les trafics des êtres humains élaboré avec les ministères concernés et les organisations non gouvernementales spécialisées. La Suisse souhaite en outre une clarification de la définition du mot trafic dans le protocole de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. M. Seger a indiqué que les changements climatiques auront des impacts sur les déplacements dans le futur. Alors que certains trouvent refuge dans leur propre pays, d’autres sont obligés de traverser les frontières pour se protéger. La réponse reste insuffisante et dans l’objectif de resserrer cet écart, la Suisse et la Norvège ont récemment lancé la « Nansen Initiative », un processus consultatif à partir de la base visant à construire un consensus sur la nécessaire protection des populations obligées de traverser les frontières internationales dans des cas de catastrophes naturelles.
Mme ALINA POTRYKOWSKA, Secrétaire générale du Conseil de la population du Gouvernement de la Pologne, a rappelé que son pays avait une population de jeunes parmi les plus importantes d’Europe. Néanmoins, la Pologne est confrontée à une baisse significative de sa démographie. D’ici à 2030, elle perdra 1,3 million de personnes, en raison de la réduction du taux de renouvellement des générations. Mme Potrykowska a jugé capital que les autorités polonaises créent des conditions propices pour le maintien des migrants dans le pays. Une politique migratoire réfléchie permet de limiter les conséquences négatives des changements démographiques, a-t-elle dit. Sans une politique de la population, il est impossible de poursuivre des politiques migratoires ciblées susceptibles d’influencer la démographie d’un pays, a-t-elle prévenu.
M. GILLES RIVARD (Canada) a tout d’abord détaillé les mesures prises par son pays pour lutter contre la traite des personnes sous toutes ses formes, notamment le lancement en 2012 d’un Plan d’action national qui vise à protéger les victimes, à traduire en justice les responsables et à promouvoir des partenariats efficaces. Sur le plan de la protection des enfants et des jeunes, notamment des jeunes filles, le délégué a indiqué que les autorités du Canada ciblaient en particulier le secteur du tourisme afin de prévenir l’exploitation sexuelle. Gravement préoccupé par le sort des réfugiés, des demandeurs d’asile et des personnes déplacées, il a indiqué que le Canada soutenait les organisations humanitaires internationales afin que les personnes, en particulier les femmes et jeunes filles, ayant dû fuir une situation de conflit ou une catastrophe naturelle, reçoivent la protection adéquate.
Le représentant a ensuite souligné la nécessité de prendre en considération les besoins spécifiques des jeunes migrants, y compris l’accès à une éducation et à des soins de qualité. « Le Canada reconnaît que le contrôle des flux migratoires requiert une coopération internationale approfondie et un partenariat renouvelé entre les États Membres, les organisations gouvernementales et non gouvernementales, et les autres parties prenantes », a-t-il conclu.
Table ronde sur le thème « Les migrations et le développement »
M. TOBIAS BILLSTÖM, Ministre de la migration et de la politique d’asile de la Suède, le modérateur de cette table ronde, a constaté que les femmes migrent de plus en plus souvent seules et que les migrants couvrent des distances toujours plus grandes pour arriver à leur pays de destination. Il a vu dans la migration un catalyseur de développement et un débouché en matière d’épanouissement professionnel. Les migrants, a-t-il affirmé, promeuvent les investissements et les idées nouvelles, et contribuent au développement de leur pays d’origine et de destination.
M. MAREK OKÓLSKI, Professeur de démographie à l’Université de Varsovie, a observé que mesurer la migration ne reflétait pas l’ensemble des flux migratoires, les données n’étant pas comparables du point de vue international. Il faut donc demeurer très prudent, a-t-il dit. De même, la migration est aujourd’hui davantage choisie que nécessaire. Le nombre des migrants a augmenté mais celui des réfugiés a légèrement baissé, a-t-il ajouté, précisant que la proportion de réfugiés dans le nombre de migrants était passée en 20 ans de 9 à 7%.
La diversité des mouvements a aussi changé. Les 10 premiers pays de destination reçoivent aujourd’hui une partie plus restreinte de migrants qu’en 2000. La migration régulière a diminué ces 10 dernières années, a-t-il dit, une tendance s’expliquant, en particulier, par la libre circulation des personnes au sein de l’Union européenne. Il y a eu aussi une chute de la migration irrégulière entre les États-Unis et le Mexique, en raison des contrôles plus stricts et de la crise économique, dans le premier, et du développement rapide et du déclin du taux de fertilité, dans le second.
Les formes de migration se sont diversifiées. On voit aujourd’hui une migration circulaire et temporaire, et des taux d’emploi et de qualification plus élevés parmi la population migrante. In 1990, un million de personnes sont parties de chez elles pour étudier alors qu’en 2099, ce chiffre est passé à 4 millions, pour la plupart des étudiants chinois. Le professeur a aussi parlé des effets du printemps arabe sur la migration et de la montée significative de la migration interne en Chine.
Lui emboitant le pas, M. ADERANTI ADEPOJU, Professeur à l’Université d’Ife, au Nigéria, a fait état d’une évolution des mouvements Sud-Sud liée, entre autres, à une économie de marché plus active. Il a également indiqué que la crise financière avait réduit l’importance des flux migratoires à destination de l’Europe, du Canada et de l’Australie, entre autres. Parmi les autres nouvelles tendances qui méritent d’être soulignées, le panéliste a évoqué le transfert des compétences, la mobilité des étudiants et la fuite des cerveaux inversée. Il a également parlé de la migration « spectaculaire » des travailleurs chinois vers l’Afrique, lesquels s’y rendent notamment pour y exploiter les mines. Le panéliste a aussi dit un mot sur la féminisation de la migration, notamment vers le secteur du travail domestique dans les pays du Golfe. La migration est devenue plus circulaire et transnationale. Elle est de moins en moins permanente.
Le professeur Adepoju a également parlé de « l’explosion » des coûts liés à la migration, les migrants ayant de plus en plus recours à des agences, notamment pour se rendre en Afrique du Sud ou de l’Amérique centrale vers les États-Unis. Parmi les autres nouveaux phénomènes, il a constaté que l’incitation au retour l’a désormais emporté sur les mesures de déportation. En outre, depuis 10 ans, on a pu observer une augmentation du nombre de migrants en transit, a-t-il ajouté, citant les migrants libyens qui se rendent d’abord au Sri Lanka avant de rejoindre leur pays de destination.
Mme MARCELLA CERRUTI, du Conseil national de la recherche technique et scientifique de l’Argentine, a indiqué que le Marché commun du Sud (MERCOSUR) avait intégré les flux migratoires dans un accord de résidence conclu par six pays de la région. Ainsi, tout citoyen a le droit de résider dans le pays de l’accord, a-t-elle dit, notant les aspects bénéfiques pour les migrants dans les domaines du logement, de l’emploi, du planning familial et de la santé des migrants.
Le Professeur Adepoju a détaillé certaines des contributions des diasporas à leur pays d’origine, à commencer par le renforcement des capacités sur le plan local. Les diasporas permettent également d’établir des ponts pour les échanges d’idées, la création d’entreprises et les liens entre les pays d’origine et de destination, a-t-il indiqué, sans oublier les envois de fonds qui contribuent pour beaucoup à la lutte contre la pauvreté. Le panéliste a également expliqué que l’Union africaine avait fait de la diaspora africaine une sixième région qui est invitée à participer aux discussions sur le secteur privé en Afrique.
Il a parlé de certaines initiatives lancées, par l’Inde notamment, pour rapatrier les émigrés qui travaillent dans le secteur de la santé ou le secteur technologique. Le Venezuela, le Ghana et le Nigéria ont eux aussi lancé des incitations de retour, tandis que la Thaïlande a mis en place un programme pour inverser la tendance à la fuite des cerveaux. Cependant, il convient de reconnaitre que toutes les diasporas n’ont pas les mêmes compétences et il importe donc, pour le pays de retour, de procéder à une bonne évaluation des capacités.
À cela, le Professeur Cerruti a fait observer que les pays du Sud attendent beaucoup des compétences techniques, ce qui a pour effet, a-t-elle indiqué, de faciliter le rapatriement de cette catégorie de professionnels. Mais pour que ces initiatives fonctionnent, a-t-elle indiqué, les migrants doit être organisés et mobilisés. Il faut des associations dans les pays d’origine où les gouvernements doivent s’impliquer pour fournir un appui financier.
« Les politiques migratoires sont réactives et pas anticipatives. Plus les gouvernements tenteront de s’ingérer et de gérer la migration moins ils auront du succès », a prévenu le Professeur Okólski, pour qui la ligne entre migration volontaire et migration forcée n’est pas évidente. Il n’en a pas moins constaté des cas « évidents » de migration forcée, liée notamment à une catastrophe politique ou naturelle, et a donc estimé nécessaire d’améliorer le suivi et l’aide à apporter et de renforcer la démocratisation des sociétés. Il a cité en exemple la « réussite » des anciens pays communistes d’Europe.
Il a également appelé à la levée des mesures qui entravent le développement et l’essor des marchés des pays d’origine. Les plus importants exportateurs d’armes devraient par exemple renoncer à leur monopole dans ce secteur, a-t-il ajouté, avant d’inviter les délégations à éviter de se laisser guider par des intérêts politiques contradictoires.
« Alors que 10% de la population mondiale migre soit au niveau national ou international, force est de constater que la majorité de la population mondiale ne migre pas », a enchainé le Professeur Adepoju. Ce dernier a dit l’importance de privilégier des politiques de développement communautaire et d’améliorer les conditions de vie des populations, pour ne pas faire de la migration une nécessité. La migration devrait être guidée par le choix et non pas par la nécessité, a-t-il souligné, avant de faire observer que la vie à l’étranger peut parfois être encore plus incertaine que dans le pays d’origine.
Les gouvernements doivent lancer des campagnes de sensibilisation plus vastes sur les risques et les défis de la migration irrégulière. Le panéliste a ensuite souligné que nombre de pays, à commencer par l’Australie, avaient bénéficié de la migration en instaurant des politiques de migration sélective. On parle beaucoup de la fuite des cerveaux, mais il faut aussi parler du « gain de cerveaux », a-t-il fait observer. Il a souligné que les envois de fonds représentent la deuxième source de revenus au Nigéria, juste après les revenus pétroliers.
Le concept de mouvement migratoire comme force économique est important, a poursuivi le Professeur Cerrutti qui a également estimé que les rapatriements de fonds ne constituaient pas une panacée pour surmonter les problèmes de développement.
Le représentant du Mexique a demandé quels étaient les indicateurs qui permettaient de montrer la contribution des migrants au développement des pays de destination. Il a également mis l’accent sur la nécessité de ne pas faire l’amalgame entre les flux migratoires et les flux de réfugiés, ces derniers disposant de cadres de protection très différents.
Pour le Professeur Cerruti, la contribution des migrants est un thème qui semble absent car il ne peut s’appuyer que sur des indicateurs clairs. Les gouvernements doivent consacrer davantage de ressources pour mieux faire connaître cette contribution. Le Professeur Adepodju a dit avoir constaté que 83% des envois de fonds sont consacrés à l’acquittement des impôts, à la consommation et aux contributions financières, d’où leur importance pour le développement des pays de destination. Plus les migrants restent, moins ils envoient de fonds, a-t-il souligné.
Le délégué du Nigéria a encouragé la diaspora à revenir chez elle et admis que les gouvernements doivent consentir à des efforts pour faciliter le mouvement.
Suite du débat général
M. GEIR O. PEDERSEN (Norvège) a affirmé que les migrations peuvent autonomiser les femmes et leur donner de nouvelles possibilités, mais présentent aussi d’immenses difficultés pour les femmes et les enfants particulièrement vulnérables aux différentes formes d’abus, comme l’exploitation sexuelle et la traite des êtres humains. Il a voulu que l’on aide les États à mettre en œuvre les régimes internationaux de protection et que l’on renforce la coopération, à cet égard.
Le délégué norvégien a également souligné que les migrations offraient aux migrants qualifiés ou semi-qualifiés une chance pour sortir de la pauvreté. La Norvège s’est engagée à ne pas recruter des spécialistes de la santé issus des pays en développement car ces derniers en ont cruellement besoin. Le représentant a mis l’accent sur l’importance du Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales et le développement, qui se tiendra les 3 et 4 octobre prochains dans le cadre de la soixante-huitième session de l’Assemblée générale de l’ONU.
M. ÁLVARO JOSÉ COSTA DE MENDONÇA E MOURA (Portugal) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur du Programme d’action du Caire et des objectifs de développement internationalement convenus, y compris les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Il a souligné qu’au Portugal, au cours de la première décennie du XXIe siècle, le nombre des migrants avait connu une croissance notable, pour former, en 2011, 3,7% de la population du pays. De même, selon les résultats du recensement de 2011, la population du pays a-t-elle progressé en 10 ans de 1,9% du fait, surtout, de la migration. Cette tendance, a-t-il dit, reflète la contribution démographique positive des immigrés à la société portugaise.
Le Portugal, a-t-il expliqué, a réussi à mettre en œuvre des mesures pour faciliter les retours volontaires et renforcer la lutte contre les trafics, avec une attention particulière accordée aux femmes et aux enfants, au lien entre migration et développement, à l’emploi et à l’intégration sociale. Le représentant a ajouté que le deuxième Programme national pour l’intégration des migrants 2011-2013 continuait de promouvoir une sécurité en matière de permis de séjour et d’emploi et garantissait un accès sans discrimination à la santé et à l’éducation.
M. PETER SILBERBERG (Allemagne) a affirmé que son pays était un pays de destination pour des groupes divers depuis plus de 60 ans. L’Allemagne, a-t-il dit, reconnaît que les migrants sont des agents de développement importants parce qu’ils envoient des fonds vers leurs pays d’origine et qu’ils représentent une passerelle entre les pays d’origine et de destination. L’Allemagne a notamment mis en place des services consultatifs pour les migrants qui souhaitent investir. Ils peuvent ainsi bénéficier de cofinancements pour des projets de développement et d’une réduction des coûts liés au rapatriement des fonds.
Le délégué allemand a souligné que la collecte de données ventilées fiables était essentielle pour mieux appréhender les défis des migrants sur le plan démographique. Il a mis l’accent sur la nécessité de faire en sorte que les besoins des femmes et leurs vulnérabilités soient suffisamment traités. L’accès à la santé reproductive des migrantes est une priorité du Gouvernement allemand, a-t-il affirmé, en demandant que les droits et les libertés sexuels et reproductifs soient intégrés dans l’agenda du développement post-2015.
M. CHRISTOPHER JOHN STOKES (Australie) a tout d’abord indiqué que 7,2 millions de personnes avaient émigré en Australie depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale et qu’un Australien sur quatre était né à l’étranger. Depuis le lancement en 2010 par le G-20 de l’agenda pour le développement, l’Australie a fait de la réduction des frais prélevés sur les transferts d’argent une priorité, a-t-il affirmé, rappelant que le G-20 s’était engagé à réduire le coût global de ces frais de 5% d’ici à 2014. Atteindre cet objectif permettrait de mettre à la disposition des familles pauvres près de 15 milliards de dollars par an, a-t-il dit. Le représentant a précisé que l’Australie avait contribué à hauteur de 3,5 millions de dollars américains au fonds de la Banque mondiale pour aider les pays en développement à payer moins de coûts en matière de transfert.
Rappelant que 1,75 million d’entrées temporaires avaient été enregistrées en Australie en décembre dernier, M. Stokes a affirmé « qu’une personne pouvait se rendre en Australie en tant que travailleur saisonnier, y faire des études puis trouver du travail avant de partir dans un troisième pays ». Les effets internationaux des flux migratoires ne doivent donc pas être considérés comme un jeu à somme nulle du point de vue national, a-t-il affirmé. Il a jugé important que la circulation des personnes entre des pays qui ont des niveaux de développement différents soit vue comme un mécanisme d’intégration dynamique au bénéfice de tous.
Mme FATOU ISIDORA MARA NIANG(Sénégal) a affirmé que son pays, qui a connu, bien avant le XXIe siècle d’importants mouvements migratoires, continuait, à l’instar des autres nations d’Afrique subsaharienne, de connaître une migration intense, tant au niveau interne qu’externe. S’agissant de la migration interne, au cours de la dernière décennie, plus de 15% de la population du Sénégal vivait en dehors de sa région de naissance. Une telle situation, a-t-elle dit, a entraîné une urbanisation galopante, une large concentration de la population active dans des villes et un accroissement rapide du taux de chômage, surtout des jeunes de moins de 35 ans. Sur le plan externe, le Sénégal demeure l’un des pays les plus touchés par les migrations, a-t-elle dit.
La représentante a souligné que les transferts de fonds des migrants contribuaient à l’amélioration des conditions de vie des ménages. Ceux-ci se sont élevés, en 2011, à 699,4 milliards de francs CFA, soit environ 10,3% du PIB (produit intérieur brut) provisoire de 2011. Selon Mme Diallo, la coopération entre pays d’origine et de destination doit figurer en tête des priorités dans la stratégie relative à la gestion des migrants. Une telle coopération devrait aider à amplifier les conséquences positives des migrations et à en réduire les effets négatifs pour toutes les parties concernées, a-t-elle dit.
M. STEPHEN O.KWANKYE,Directeur exécutif du Conseil national de la Population du Ghana, a souligné que le phénomène de la migration interne dans son pays avait connu des tendances contraires selon les périodes d’essor ou de difficultés. La migration des jeunes vers les centres urbains est en pleine croissance, a-t-il dit, précisant que ceux-ci étaient vulnérables aux différentes formes d’exploitation. Les femmes et les enfants sont souvent sujets à l’exploitation dans des services domestiques forcés et victimes d’abus, a-t-il ajouté.
Les envois de fonds de la diaspora ghanéenne ont dépassé l’aide publique au développement (APD), a-t-il par ailleurs fait observer. La migration peut aider bien des pays à sortir de la pauvreté, a-t-il reconnu. Au Ghana, un projet politique en cours d’adoption met l’accent sur la nécessité de préserver les droits des migrants, a-t-il ajouté. Il est nécessaire, a-t-il conclu, de tenir compte des relations migratoires et de la répartition démographique dans le cadre du développement, sans oublier la question de l’impact des changements climatiques.
Mme STRAKHOVA(Fédération de Russie) a affirmé que les migrations constituaient un facteur important du développement économique. Pour des raisons démographiques, il est important de favoriser l’accueil des migrants professionnels, a-t-elle dit. Le Gouvernement russe a mis en œuvre une politique migratoire publique qui s’étend jusqu’en 2025, laquelle, a-t-elle précisé, établit les objectifs, les défis et les domaines d’action. Une des priorités est de favoriser le retour volontaire en Fédération de Russie des émigrés.
La déléguée russe a mis l’accent sur la nécessité de simplifier le code du travail. La Fédération de Russie, a-t-elle dit, s’emploie à faciliter l’adaptation et l’insertion des immigrés de façon à lutter contre la migration illégale. Elle a conclu en indiquant que son pays était prêt à participer activement à un dialogue sur les divers aspects des migrations internationales.
M. TALAIBEK KYDYROV (Kirghizistan) a indiqué que les migrants représentent à présent un cinquième de la population de son pays. Or l’augmentation de la population active dépasse l’offre nationale d’emplois, créant ainsi un déséquilibre et poussant les jeunes à rechercher un emploi à l’étranger. Parmi les effets positifs de cette situation, M. Kydyrov a évoqué la baisse de la pression sur le marché du travail national et les envois de fonds. Si en 2003, le volume de ces envois représentait de 6,9% du PIB, en 2011, il est monté à 22% du PIB.
Au titre des points négatifs, le représentant s’est inquiété de la fuite de cerveaux et a indiqué que son gouvernement s’efforce de renforcer la compétitivité de sa main-d’œuvre. Il a élaboré un plan et un fonds d’appui aux migrants ainsi qu’une stratégie de réglementation de la migration d’ici à 2020. Le représentant a voulu que le Dialogue de haut niveau de l’Assemblée générale soit l’occasion de tirer le meilleur parti des migrations internationales. Il a cependant regretté qu’il n’ait pas été prévu de sanctionner le Dialogue avec un document final.
Mme BÉNÉDICTE FRANKINET (Belgique) a indiqué que son pays s’attachait à certaines priorités dont le respect des dispositions de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. La Belgique a apporté récemment des améliorations aux procédures d’examen des demandes d’asile et participe à plusieurs programmes concernant les réfugiés, que ce soit des programmes de retour ou des programmes d’intégration dans leurs premiers pays d’accueil ou encore des programmes de réinstallation de réfugiés venant de pays où ils ne peuvent rester sans danger pour leur sécurité ou trouver de solution à long terme. La Belgique attache également une grande importance à la lutte contre la traite et le trafic des êtres humains. Elle a adopté un plan d’action national et les différentes initiatives portent sur la prévention, l’assistance aux victimes et la poursuite des trafiquants ainsi que le partenariat avec les États tiers.
Mme Frankinet a souligné aussi l’importance de pouvoir se référer à une politique d’intégration des migrants qui est principalement axée sur l’accueil des primo-arrivants en Belgique. Une des mesures concrètes est qu’ils prennent connaissance de leurs droits et de leurs devoirs afin qu’ils puissent pleinement participer à la société. En Belgique, l’intégration est devenue une compétence régionale, a révélé Mme Frankinet. Elle a aussi rappelé que la Belgique soutient et croit au lien entre migration et développement. À ce titre, elle a organisé en 2007 la première édition du Forum mondial sur la migration et le développement qui avait permis de poser des questions parfois sensibles dans un cadre informel constructif. À l’aube du deuxième Dialogue de haut niveau et de la concrétisation de l’agenda du développement post-2015, le principal défi est de faire en sorte que la migration fasse désormais partie intégrante de la stratégie internationale de développement. Mme Frankinet a jugé intéressant de voir que la migration Sud-Sud est devenue une des nouvelles tendances.
M. GHOLAMHOSSEIN DEHGHANI (République islamique d’Iran) a affirmé qu’il était essentiel de reconnaître le lien entre migrations et développement, soulignant l’importance du Dialogue de haut niveau. Il a appelé tous les États et le système de l’ONU à prendre des mesures en vue de protéger les migrants et à lutter contre toutes les formes de traite humaine. Il a souligné que son pays condamnait dans les termes les plus forts les actes de racisme, de xénophobie, appelant également à renforcer la lutte contre l’impunité pour les auteurs de tels crimes.
Le représentant a notamment fait état de l’établissement d’un Haut-Conseil des Iraniens vivant à l’étranger et appelé les pays de destination à éviter toute restriction des contacts entre les migrants et leurs pays d’origine.
M. CHARLES THEMBANI NTWAAGAE (Botswana) a indiqué que son pays, après avoir été pendant longtemps un pays d’émigration, était devenu un pays d’immigration, citant comme principaux facteurs la stabilité politique et la croissance économique. Il a parlé des mesures prises pour promouvoir le développement des zones rurales, notamment le programme de « discrimination positive » en faveur des communautés vivant dans les zones reculées. Le délégué a ajouté que son pays avait mis en place un système de points afin d’attirer les personnes hautement qualifiées. Le Botswana, a-t-il souligné, veut l’échange des pratiques exemplaires afin de relever au mieux les défis migratoires. Le représentant a demandé des mesures concrètes pour optimiser les effets positifs des migrations tout en en atténuant les effets négatifs.
12 M. EDUARDO PORRETTI(Argentine) a mis l’accent sur la nécessité pour la communauté internationale d’intensifier ses efforts pour intégrer les migrants, notamment grâce à la Convention pertinente. Les efforts consentis en Argentine sont cohérents avec les programmes des Nations Unies. L’Argentine, a-t-il dit, a adopté des politiques claires contre toutes les formes de discrimination et de violence à l’égard des migrants.
Le représentant a plaidé pour une mise en œuvre totale et efficace du Programme d’action du Caire et a insisté sur l’importance qu’il y a à trouver des alternatives plus souples en vue de faciliter l’intégration des migrants dans chaque pays. Chaque gouvernement doit être en mesure de favoriser la communication et la sensibilisation du public pour présenter les avantages de la migration et éviter la discrimination et la xénophobie, a-t-il insisté.
M. CHRISTOPHER GRIMA (Malte) a insisté sur l’importance d’une bonne gestion des flux migratoires et de leur régularisation, afin d’assurer la transparence des mouvements entre les pays d’origine, de transit et de destination, et de veiller à la pleine connaissance par les migrants de leurs droits. Des actions orientées sur le développement sont également essentielles afin de répondre aux causes sous-jacentes des flux migratoires et créer des perspectives économiques dans les pays à forte propension migratoire. M. Grima a précisé que son gouvernement entretient des liens étroits avec la diaspora maltaise. Le Gouvernement s’engage aussi à protéger les droits des « véritables réfugiés », lesquels peuvent être mis à mal par des organisations criminelles.
La migration illégale représente un problème de taille pour Malte, a-t-il avoué, « un des pays les plus peuplés au monde ». Le Gouvernement s’emploie donc à installer ceux qui bénéficient de la protection internationale et à rapatrier les autres. Malte, a affirmé le représentant, est disposée à appuyer la réintégration des migrants qui choisissent de retourner chez eux et, en la matière, une plus grande coopération entre les États s’impose. Le Gouvernement, a encore assuré le représentant, augmentera son aide publique au développement (APD) aux pays qui s’engagent à accueillir leurs ressortissants en situation irrégulière à l’étranger. On ne gagne rien en cherchant à émigrer illégalement, a prévenu M. Grima qui a stigmatisé le nombre de morts en mer.
Mme JUDITH KING (Israël) a tout d’abord détaillé les principales vagues d’immigration connues par son pays depuis sa fondation. Quelque 650 000 immigrants du Moyen-Orient, d’Afrique du Nord et d’Europe –dont beaucoup de survivants de l’Holocauste– sont entrés en Israël dans les trois premières années de son existence, pour atteindre près d’un million au bout de 10 ans, a-t-elle expliqué, ajoutant qu’aucun pays n’avait connu une telle augmentation de population et un tel nombre d’immigrants sur une période aussi courte. Mme King a ensuite cité l’arrivée en provenance de l’ancienne Union soviétique de près d’un million d’immigrants au cours des années 1990, décennie qui vit également l’arrivée de nombreux Juifs éthiopiens.
Elle a ensuite détaillé les politiques mises en place par son pays pour faciliter l’intégration des nouveaux arrivants, dont la mise à disposition d’une aide financière afin de couvrir les frais des six premiers mois. Une famille de cinq personnes reçoit ainsi entre 14 700 et 17 500 dollars en fonction de l’âge des enfants, a-t-elle expliqué, ajoutant que ces subsides permettaient de libérer du temps pour se concentrer sur l’apprentissage de l’hébreu.
Mme King a aussi indiqué qu’un programme spécial avait été mis en place au bénéfice des immigrés de l’ancienne Union soviétique âgés de 45 à 65 ans. En ce qui concerne les immigrés d’Éthiopie, le développement de l’offre éducative a été perçu comme étant l’outil le plus efficace pour favoriser leur intégration, a-t-elle expliqué. Elle a ainsi détaillé les mesures spécifiques en faveur des lycéens et étudiants d’origine éthiopienne, expliquant que ces derniers bénéficiaient de critères assouplis pour l’admission à l’université. La déléguée israélienne a souligné l’importance de la collaboration entre États dans le domaine des flux migratoires. « Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres, que nous soyons pays d’origine, de transit ou de destination, a-t-elle dit.
M. EASTON WILLIAMS (Jamaïque) a rappelé que son pays fut confronté à de hauts niveaux de migrations internes et externes. Chaque année, environ 20 000 personnes émigrent vers les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni, a-t-il dit, précisant qu’une grande partie de ces migrants étaient des femmes qualifiées. Il a également mis l’accent sur le fort taux d’urbanisation dans son pays, évoquant les bidonvilles et les problèmes de violence qui en résultent.
Le représentant a en outre estimé que les migrations pouvaient être exploitées au profit des pays d’origine, des pays de destination et des migrants eux-mêmes. Il s’est félicité de ce que les questions soulevées seront intégrées dans l’agenda du développement post-2015.
M. SHAHZAD AHMED MALIK (Pakistan) a indiqué que sur une population de 184 millions de personnes, le Pakistan compte 7 millions de ressortissants qui vivent à l’étranger, principalement au Moyen-Orient, en Europe et en Amérique du Nord. Le phénomène de l’exode rural gagne aussi de l’ampleur: 38% de la population, soit 70 millions de personnes, vivent dans les zones urbaines.
Sur le plan international, le Ministère des Pakistanais de l’étranger a été créé en 2008 et pour le Pakistan, les envois de fonds ne sauraient remplacer l’APD, même s’il estime qu’il faut baisser les coûts de transaction. Le Pakistan veut aussi que la fuite de cerveaux profite mieux aux pays d’origine et appelle les États à renforcer la migration régulière afin de lutter contre la traite et les abus dont sont victimes les travailleurs migrants. On ne peut sous-estimer l’importance qu’il y a à protéger les droits de ces personnes.
M. JOSÉ MANUEL CASTILLO PÉREZ GÓMEZ, Directeur des organisations salvadoriennes de l’étranger, a fait état des différentes mesures prises par son pays en vue de faciliter les conditions de vie des Salvadoriens de l’étranger. Une loi électorale spéciale a été adoptée pour leur permettre de voter à la prochaine élection présidentielle de 2014. Il faut, a insisté le représentant, informer les travailleurs de leurs droits. Chaque pays d’accueil doit respecter la dignité et les droits élémentaires des migrants et assurer leur sécurité. Le délégué salvadorien a, de même, salué les efforts des États qui tentent d’intégrer les migrants dans leurs sociétés et a rappelé l’importance pour les États d’adhérer à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
M. JUAN CARLOS ALFONSO FRAGA, Directeur du Centre pour la population, le développement et le recensement à Cuba, a déclaré que, grâce aux programmes de développement socioéconomique, les indicateurs sociaux et démographiques de Cuba sont les mêmes que ceux des pays développés et conformes aux engagements pris dans les Programmes d’action du Caire et de Beijing ainsi que dans la Déclaration du Millénaire. Cuba, qui a une population de 12 millions d’habitants, était en très bonne place sur l’Indice de développement humain (IDH) en 2012. Cuba, s’est enorgueilli le représentant, est un pays développé démographiquement. Le volume de la migration interne a chuté de 50% depuis les années 90. La population de la capitale a baissé et sa part dans le nombre total d’habitants a aussi baissé par rapport à la décennie précédente. En revanche, les villes de petite et de taille moyenne continuent de croître bien que le degré d’urbanisation n’ait pas augmenté contrairement à la population rurale. Concernant les migrations externes, Cuba vient d’assouplir sa législation. Malgré l’engagement en faveur d’un flux organisé, sûr et régulier de ses migrants, les États-Unis maintiennent leur embargo et leur loi qui encouragent l’émigration illégale et sapent les efforts du pays visant à former une main-d’œuvre indispensable à son développement durable. La législation est aussi utilisée pour compromettre les projets de coopération de Cuba dans domaines tels que la santé publique et pour encourager la traite des êtres humains, a dénoncé le représentant.
M. CHARLES P. MSOSA (Malawi) a indiqué que la migration contribuait pour beaucoup aux changements démographiques que connait son pays, les hommes âgés entre 15 et 34 ans représentant la plus importante catégorie de personnes à émigrer des zones rurales vers les zones urbaines. Parmi les défis que ce phénomène entraine, le représentant a évoqué le manque de logements, les mauvaises conditions sanitaires, la criminalité, les infections au VIH/sida et le chômage. Il a indiqué que son gouvernement s’était engagé à construire un plus grand nombre d’institutions bancaires et à élaborer des mécanismes de prêts aux PME. Une loi qui criminalise la traite des êtres humains est en cours de rédaction et le Gouvernement espère qu’une politique d’incitation permettra d’inverser la tendance à la fuite de cerveaux, dans le secteur de la santé notamment. Des mesures ont également été prises pour faciliter les envois de fonds de la diaspora.
Mme REIKO HAYASHI (Japon) a indiqué que les étrangers ne représentaient que 1,7% de la population du Japon, un chiffre qui est néanmoins en constante augmentation. « Un enfant sur cinquante né au Japon a au moins un parent qui n’est pas citoyen japonais», a-t-elle précisé, indiquant que la société japonaise se diversifiait de plus en plus. Mme Hayashi a ensuite détaillé les mesures prises par son gouvernement pour répondre à cette nouvelle situation et faciliter l’entrée des étrangers hautement qualifiés et susceptibles de contribuer à la croissance économique.
D’un autre côté, a-t-elle aussi reconnu, le nombre de citoyens japonais ayant choisi de vivre à l’étranger a augmenté pour atteindre en 2011 le chiffre record de 1,18 million. Elle a également dit qu’une collaboration étroite entre pays asiatiques était cruciale pour répondre aux défis démographiques communs, en particulier au regard « d’un contexte asiatique qui confie à la famille un rôle important dans la prise en charge des aînés ». Soulignant que l’intégration régionale et l’échange des ressources étaient des facteurs clefs du développement, elle a indiqué que le Japon serait l’hôte en juin prochain de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD) qui parlera de l’optimisation des effets positifs des migrations et de l’atténuation des effets négatifs. Enfin, Mme Hayashi a jugé important de parvenir à une couverture sociale universelle, y compris au bénéfice des migrants.
M. WILBERFORCE KISAMBA MUGERWA, Président de l’Autorité nationale du planning de l’Ouganda, a fait état de la forte augmentation de la population urbaine dans son pays, l’exode rural ayant affecté la productivité agricole. Il a ajouté que son pays accueillait plus de 230 000 réfugiés en raison des frontières poreuses, une charge supplémentaire pour les services sociaux, a-t-il précisé. Il a également déploré l’émigration, qu’il a jugée considérable, des personnels ougandais semi-qualifiés et qualifiés. Le représentant a par ailleurs exprimé l’engagement du Gouvernement ougandais en faveur de la mise en œuvre des conventions et protocoles protégeant les migrants et leurs familles.
M. GHEORGHE LEUČA (République de Moldova) a affirmé que la coopération internationale devait parvenir à un équilibre entre le droit à la libre circulation et le droit des États à contrôler leurs frontières. Un tel équilibre ne peut être atteint que grâce à des partenariats renforcés, a-t-il dit. Il a ensuite détaillé l’effet positif et significatif que l’émigration a eu pour la stabilité macroéconomique de son pays, les envois de fonds des émigrés moldaves compensant le déficit commercial de l’État et soutenant la monnaie nationale.
L’investissement de ces sommes d’argent a permis d’injecter 2,4 millions d’euros dans le secteur des petites et moyennes entreprises, empêchant les populations, en particulier dans les zones rurales, de sombrer dans la pauvreté, a expliqué M. Leuca, qui a également insisté sur les défis démographiques qui résultent de ce phénomène. Un tiers de la population moldave devrait avoir 60 ans ou plus en 2050, a-t-il expliqué, plaidant pour des partenariats en matière de protection sociale entre pays d’origine et pays de destination. Dans ce droit fil, il a détaillé les résultats positifs de la mise en œuvre du partenariat pour la mobilité entre l’Union européenne et la République de Moldova.
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