« Nous devons refuser ensemble toute forme de relativisme culturel qui fait obstacle à la lutte pour l’égalité entre les sexes », souligne la Ministre des droits des femmes de la France, appuyée par de nombreux intervenants
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Commission de la condition de la femme
Cinquante-septième session
3re & 4e séances – matin & après-midi
« NOUS DEVONS REFUSER ENSEMBLE TOUTE FORME DE RELATIVISME CULTUREL QUI FAIT OBSTACLE À LA LUTTE POUR L’ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES »,
SOULIGNE LA MINISTRE DES DROITS DES FEMMES DE LA FRANCE, APPUYÉE PAR DE NOMBREUX INTERVENANTS
La prévention incombe en premier lieu aux États, mais elle requiert aussi la participation active de tous les secteurs de la société, y compris les hommes et les garçons, les femmes et les filles, les chefs traditionnels et religieux, ainsi que les médias, ont déclaré la majorité des États Membres, au cours du deuxième jour du débat général de la cinquante-septième session de la Commission de la condition de la femme.
La Ministre des droits des femmes de la France, Mme Najat Vallaud-Belkacem, a rappelé que des viols massifs sont perpétrés en République démocratique du Congo ou encore au Soudan, un niveau terrifiant de violences sexuelles accompagne la situation actuelle d’insécurité en Syrie mais aussi dans d’autres pays de la planète qui ne sont pourtant pas en conflit. Récemment en Inde, les faits commis, atroces, ont mis en lumière la réalité ordinaire des viols, aussi anciens et aussi répandus que la domination masculine elle-même.
« Les violences faites aux femmes, a-t-elle précisé, ne sont pas un fait isolé. Elles constituent l’un des fondements de cette oppression qui persiste sur le corps des femmes partout dans le monde. Les violences sexistes et sexuelles sont le révélateur extrême de toutes les autres inégalités entre les hommes et les femmes. » C’est pourquoi la France a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité tant au niveau national qu’au niveau international, a-t-elle assuré, avant d’ajouter: « Nous devons refuser ensemble toute forme de relativisme culturel qui laisserait sur le bord du chemin cette bataille essentielle de l’égalité entre les sexes ».
La Ministre des affaires féminines de l’Afghanistan, Mme HussunBanu Ghazanfar, a fait remarquer que lestrois décennies de guerre et d’insécurité qu’a connues son pays avaient contribué à donner place à la violence dans la société afghane. Le Gouvernement afghan déploie des efforts importants pour faire changer les mentalités qui, a-t-elle dit, sont préjudiciables aux femmes et aux filles.
« Il est inacceptable pour des pays d’invoquer la liberté de religion ou la diversité culturelle pour tenter de bloquer des décisions et de se soustraire à leurs obligations lorsque, pour la seule année 2012, 150 millions de filles âgées de moins de 18 ans ont subi des violences sexuelles », a insisté la Ministre de l’enfant, de l’égalité et de l’inclusion sociale de la Norvège, Mme Inga Marte Thorkildsen.
« La violence à l’encontre des femmes et des filles n’est pas une question de culture, ni une question de religion, mais plutôt de pouvoir, d’inégalités et de manque de volonté politique et de courage », a-t-elle argué.
À l’instar du Ministre de l’égalité des sexes de la Finlande, M. Paavo Arhinmäki, plusieurs délégations ont par ailleurs appelé les États à promouvoir de manière significative les droits sexuels et de santé génésique des femmes et des filles. « La négation de ces droits est trop souvent la première expression des violences qui sont exercées à l’encontre des femmes dès lors qu’elles se traduisent par le contrôle de leur corps ou sa contrainte », a notamment averti la Ministre de la France, tandis que la Ministre de l’égalité des genres de la Suède, Mme Maria Arnholm, a plaidé pour que l’accès à ces droits soit intégré dans une approche complète afin d’éliminer la violence à l’encontre des femmes et des filles.
L’impunité des actes de violence à l’encontre des femmes et des filles a été dénoncée à plusieurs reprises au cours du débat. Après avoir évoqué les « féminicides » commis à Ciudad Juarez, la Présidente de l’Institut national pour les femmes du Mexique, Mme Lorena Cruz Sanchez, a notamment insisté sur l’importance de promouvoir la participation et la sensibilisation des hommes et des garçons afin qu’ils deviennent des partenaires dans l’élaboration d’une société plus équitable et pacifique.
De son côté, la Ministre de l’égalité des chances du Luxembourg, Mme Françoise Hetto-Gaasch, a parlé de la réforme en cours de la législation luxembourgeoise sur la violence domestique qui vise « non seulement à responsabiliser les auteurs, mais surtout à prévenir les récidives ».
La représentante de l’Inde, MmeKrishna Tirath, a indiqué, quant à elle, que le Code pénal national avait été amendé en février 2013 afin d’étendre la définition des abus sexuels et des harcèlements, un des objectifs étant d’accroître la responsabilité des fonctionnaires.
Au cours de la table ronde consacrée, cet après-midi, à la prévention de la violence à l’égard des femmes et filles, les délégations ont par ailleurs pu écouter cinq panélistes, représentant différentes régions géographiques, présenter leurs recommandations destinées à mettre fin à ce fléau.
La Présidente du Conseil national de la femme de l’Égypte, Mme Merwat El-Tallawy, a notamment recommandé la création, au sein de l’ONU, d’un fonds spécial pour renforcer la prévention et assurer le suivi des mesures prises pour lutter contre la violence à l’encontre des femmes et tenir les gouvernements responsables de la sécurité des femmes. Il conviendrait également de créer un observatoire juridique international, a-t-elle suggéré.
La Directrice exécutive d’Imkaan, une ONG basée au Royaume-Uni, a appelé, de son côté, à mettre en œuvre un plan mondial de lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles qui serait axé sur la prévention. Elle a également réclamé le lancement d’un plan de mobilisation à l’échelon mondial ainsi que l’adoption de mesures intégrées pour prévenir et éliminer la violence faite aux femmes et aux filles.
La Commission de la condition de la femme poursuivra ses travaux demain, mercredi 6 mars, à partir de 10 heures.
SUIVI DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET DE LA VINGT-TROISIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE, INTITULÉE « LES FEMMES EN L’AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIE SIÈCLE »
a) Réalisation des objectifs stratégiques, mesures à prendre dans les domaines critiques et autres mesures et initiatives
Débat général
M. WILLY TELAVI, Premier Ministre de Tuvalu, parlant au nom du Forum des Îles du Pacifique, a assuré que les membres de ce Forum s’étaient engagés à éliminer la violence à l’encontre des femmes et à promouvoir et protéger les droits des femmes, ainsi qu’à encourager l’autonomisation de celles-ci. L’égalité entre les sexes est toujours un objectif stratégique du Plan pour le Pacifique, a-t-il dit. Lors de leur réunion annuelle en 2012, les dirigeants de la région ont adopté la Déclaration des dirigeants du Pacifique sur l’égalité qui fournit un cadre politique propice pour intensifier les travaux menés dans la région en appui à l’égalité de genre. M. Telavi a aussi mentionné le Plan d’action du Pacifique pour la promotion des femmes et l’égalité 2005-2015. Il a cité d’autres instruments utiles dans ce domaine, comme la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes que les États incorporent dans le droit national, ainsi que la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant ratifiée par tous les États membres du Forum. Le Premier Ministre a toutefois reconnu la nécessité d’accélérer le rythme des mesures prises aux niveaux régional et national.
La région du Pacifique a accompli des progrès dans la collecte de données sur la violence à l’encontre des femmes, a poursuivi le Premier Ministre de Tuvalu, tout en déplorant ce qu’elles révèlent: 2 femmes sur 3 dans la région ont fait l’expérience de violence physique ou sexuelle au moins une fois dans leur vie. Les études menées ont aussi jeté la lumière sur le niveau élevé d’abus, souvent au cours de l’enfance, ce qui invite à traiter plus efficacement de la violence au sein de la famille. Certains pays, comme les Palaos et Vanuatu, ont adopté des lois visant spécialement à combattre la violence domestique. M. Telavi a aussi parlé des groupes de travail mis en place dans la région, qui étudient les différents aspects de l’égalité entre les hommes et les femmes. Il a attiré l’attention de la Commission sur la nécessité de doter tous ces mécanismes des ressources suffisantes. Il a assuré que les pays de la région Pacifique déployaient des efforts pour garantir une bonne participation des femmes dans le développement de leurs communautés. Enfin, il a appelé à soutenir l’inclusion des questions de l’égalité entre les sexes dans le programme de développement pour l’après-2015. Il a souhaité que les conclusions sur la violence à l’encontre des femmes qu’adoptera la Commission à l’issue de la session portent sur plusieurs questions telles que les interventions multisectorielles coordonnées et l’instauration d’un climat favorable à la réalisation des droits des femmes.
M. TOLOFUAIVALELEI FALEMOE LEIATAUA, Ministre des femmes, des communautés et du développement social de Samoa, intervenant au nom des petits États insulaires en développement du Pacifique, a déploré le fait que trop de femmes dans sa région souffrent encore de violences. Il a estimé que l’architecture régionale d’ONU-Femmes mérite d’être revue, en se félicitant néanmoins des efforts soutenus déployés par l’entité en dépit d’un budget limité. M. Leiataua a ensuite mis l’accent sur la nécessité de renforcer certains secteurs sociaux, notamment le secteur agricole. Il a également parlé des problèmes liés aux changements climatiques lesquels, a-t-il affirmé, sont une des causes profondes des violences faites aux femmes. Dans certaines parties du Pacifique, a-t-il signalé, la montée du niveau des eaux a provoqué des déplacements de population ainsi qu’une pénurie en eau potable.
Le Ministre a expliqué que la productivité des femmes devient de ce fait de plus en plus limitée, provoquant un affaiblissement de leur statut social. Notre culture est menacée d’extinction, s’est-il alarmé, alors même que les activités de l’ONU se limitent à une simple gestion des catastrophes. Le Ministre a ensuite appelé à l’élaboration d’un Agenda pour le développement post-2015 « équilibré ». Les objectifs de développement durable, a-t-il ajouté, doivent être axés sur l’économie et l’environnement et équilibré sur le plan social.
M. WILLY TELAVI, Premier Ministre et Ministre des affaires de la femme de Tuvalu, a estimé que la lutte contre la violence à l’égard des femmes devrait commencer dans chaque pays par l’adoption de lois et de cadres juridiques adéquats et par leur application. Dans le cas de Tuvalu, le « Family Protection Bill » vient d’être élaboré et une consultation nationale va être lancée cette année, a expliqué le Ministre. Cette loi a pour vocation de protéger les femmes et les fillettes de toute forme de violence, y compris la violence sexuelle et la violence domestique et vise à faciliter leur accès à la justice. Le Gouvernement de Tuvalu s’est inspiré des instruments internationaux et régionaux existants en la matière pour les traduire dans les stratégies et politiques nationales, a encore précisé le Ministre. Il a cependant souligné que dans les pays les moins développés, comme Tuvalu, il était souvent difficile de dégager les ressources nécessaires pour certaines activités et programmes, en particulier pour ceux qui s’adressent aux femmes qui dépendent de financements de la communauté des donateurs.
Mme TEIMA ONORIO, Vice-Présidente de Kiribati, a souligné la prévalence alarmante de la violence sexiste et sexuelle dans son pays, qui a de graves conséquences sur la santé des femmes et filles mais aussi sur le bien-être des familles. Cette violence contribue aussi à ralentir le développement social. Elle a indiqué que le Président s’était engagé à éliminer la violence contre les femmes et les filles, et bénéficiait pour le faire de l’appui de la société et des communautés. Cet engagement politique de haut niveau est reflété dans le plan de développement de Kiribati. Ayant ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits des enfants et la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, Kiribati a pu paver la voie à des mesures dans ce domaine.
La Vice-Présidente a aussi mentionné l’existence d’une loi récente sur la famille qui a pour objectif de réduire la violence contre les femmes et les enfants. Les parlementaires ont exprimé leur soutien, en première lecture, à un projet de loi sur la protection de l’enfant, a-t-elle indiqué. Un autre projet de loi sur la paix dans la famille, actuellement à l’examen, a pour objectif de lutter contre la violence faite aux femmes. Mme Onorio a aussi mentionné la politique sur l’élimination de la violence sexuelle et sexiste et la politique sur le bien-être familial des jeunes et des enfants. Le Gouvernement de Kiribati reconnaît l’importance de la collaboration des organisations non gouvernementales et des organisations religieuses œuvrant dans ce domaine.
Mme MARYAN MOJTAHEDZADEH LARIJANI, Directrice du Centre pour les femmes et les familles de la République islamique d’Iran, a affirmé que la femme est une « manifestation de beauté et de l’amour de Dieu ». Elle a assuré que son gouvernement accordait la priorité à l’élimination de la violence faite aux femmes. Il est essentiel de remédier aux causes profondes de la violence contre les femmes. Mme Larijani a estimé que la dominance d’idéologies fondées sur le profit et le matérialisme compte parmi les causes principales de la violence contre les femmes. Elle a par ailleurs souligné que le renforcement de l’institution de la famille permettrait de prévenir et d’enrayer ce fléau. Mme Larijani a également dénoncé le fait que les conséquences de l’occupation étrangère sur les femmes soient ignorées.
Mme FATMA SAHIN, Ministre de la famille et des politiques sociales de la Turquie, a estimé que les actes de violence commis à l’encontre des femmes et des filles reflétaient un état d’esprit qui consiste à considérer celles-ci comme des individus de seconde classe dans la société et à vouloir les contrôler. Elle a ensuite plaidé pour une approche à plusieurs dimensions dans la manière de traiter à la fois les causes et les conséquences des violences. Il s’agit de développer une dimension multisectorielle, de réunir plusieurs agences et institutions concernées, en vue d’assurer, avec les services de police, la prévention et la protection des victimes, puis la condamnation des auteurs des faits.
La Ministre a ensuite fait remarquer que son pays avait été le premier à ratifier la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul. Cette Convention a été incorporée en droit interne par la loi n°6284 sur la protection de la famille et la prévention de la violence. Cette loi garantit, entre autres, l’anonymat des victimes et des membres de la famille dans les fichiers et établit des « Centre de suivi et de prévention de la violence », qui recueillent des données et offrent aussi une assistance 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Jusqu’à présent, des centres pilotes de ce type existent dans 14 provinces en Turquie. Outre ces mesures, la Turquie dispose également au sein de son Parlement, et depuis 2009, d’un comité pour l’égalité entre les hommes et les femmes qui traitent au sein de sous-comités d’une série de questions, telles que celle du mariage précoce, de la violence psychologique exercée sur les femmes à propos du sexe de leur enfant, ainsi que des questions de la dot et des traditions. La Ministre a encore mis l’accent sur la nécessité d’offrir des structures d’accueil pour les victimes de violences. Elle a précisé que depuis quelques années, la Turquie enregistrait une hausse importante du nombre de femmes accueillies dans ces foyers. Cette augmentation représente aujourd’hui 68%.
Mme TERESITA QUINTOS-DELES (Philippines), Conseiller présidentiel sur le processus de paix, a énuméré les trois piliers pour prévenir et éliminer les violences à l’égard des femmes et des filles que sont les mesures politiques et législatives qui criminalisent ces violences, les services intégrés de prévention et de prise en charge des victimes, ainsi que l’information et l’éducation qui améliorent la connaissance et les changements de comportement et d’attitudes pour rendre inacceptables des violences à l’encontre des femmes. Les Philippines ont atteint le point de non-retour en mettant fin à la violence au conflit armé interne, a déclaré Mme Quintos-Deles. Elle a rappelé que son pays avait signé un accord-cadre sur Bangsamoro qui établit une feuille de route pour mettre un terme à quatre décennies de guerre dans le sud du pays. La participation et le leadership des femmes dans les tables rondes ont été déterminants dans de nombreux domaines. Une loi sur la responsabilité parentale et la santé reproductive avait été adoptée en décembre 2012, qui reconnaît que la responsabilité sexuelle et reproductive.
La loi sur le travail domestique, promulguée en janvier 2012, accorde la pleine et formelle protection de l’État à la majorité de femmes qui travaillent comme domestiques. La semaine dernière, la Présidente des Philippines, Mme Aquino, a signé la loi de reconnaissance et des droits à réparation qui reconnait les atrocités commises durant les années de la loi martiale. Cette loi prévoit une réparation aux victimes des atrocités, y compris les violences sexuelles. Plus encore, une femme a été nommée à la tête de la justice. Par ailleurs, un trio de femmes est aujourd’hui à la tête du système judiciaire des Philippines, notamment à la tête du Département de la justice, du Bureau de l’Ombudsman. Le deuxième pilier permet au Gouvernement et au reste de la société civile de déployer à travers tout le pays des centres et des unités de protection pour les femmes et les filles dans les stations de police, les hôpitaux et des espaces de solidarités pour les femmes dans les centres d’évacuation, et des maisons sécurisées pour les femmes migrantes dans les services à l’étranger. Avant de conclure, Mme Quintos-Deles a indiqué que le troisième pilier pour éliminer les violences à l’encontre des femmes et des filles implique aussi les hommes avec l’établissement de groupes actifs qui s’opposent à ce fléau aux Philippines.
M. URMAS PAET, Ministre des affaires étrangères de l’Estonie, s’est félicité de la célébration, dans deux ans, du vingtième anniversaire du Programme d’action de Beijing et, l’année prochaine, de celui du Programme d’action du Caire. Il a ensuite insisté sur la nécessité d’élaborer un bon cadre stratégique pour réduire la violence contre les femmes sous toutes ses formes, notamment la violence domestique et la traite des êtres humains. Outre l’adoption d’un tel cadre, l’Estonie procède actuellement à la création d’un réseau de centres d’accueil pour les victimes et s’attèle à mettre en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité, a-t-il indiqué. Le Ministre a également insisté sur l’importance de lancer, avec l’appui d’ONG, des campagnes de sensibilisation. L’indépendance économique des femmes est tout aussi importante, de même que l’instauration d’un système de protection pour les victimes, a-t-il ajouté. M. Paet a ensuite précisé que son pays disposait actuellement de 10 centres d’accueil, et que les victimes de trafic ont par ailleurs accès à des services d’aide juridique. L’Estonie s’est également dotée d’une ligne téléphonique d’urgence et veille à la formation de son personnel judiciaire notamment, a-t-il fait savoir.
Mme AURELIA FRICK, Ministre des affaires étrangères du Liechtenstein, s’est dite « choquée » en tant que femme et en tant que Ministre de la violence dont sont toujours victimes les femmes dans le monde. C’est pourquoi, elle est déterminée à lutter contre cette violence dont les effets vont bien au-delà des conséquences mentales et physiques immédiates. « Cette violence pose un défi fondamental à nos sociétés, une menace au plein exercice des droits de l’homme de chacun ainsi qu’au progrès », a averti la Ministre. Pour elle, cette forme de violence remet en cause toutes les avancées faites en termes de situation des femmes et, pour y faire face, il faudrait faire preuve d’une réelle volonté politique. Compte tenu du nombre de ministres et de hauts fonctionnaires participant à la présente session de la Commission de la condition de la femme, Mme Frick s’est dite convaincue que la Commission était précisément l’instance appropriée pour stimuler un tel leadership politique, en premier lieu au niveau national.
La Ministre a insisté sur le fait qu’il ne s’agissait pas simplement de changer la législation. « Les lois doivent être comprises et appliquées afin de garantir l’accès à la justice aux femmes, mais il faudrait surtout changer les mentalités de ceux qui commettent ces actes de violence à l’encontre des femmes », a-t-elle déclaré. À cet égard, elle a dénoncé l’impunité dont profitent encore trop souvent les responsables de ces actes de violence, en particulier lorsqu’il s’agit de violence domestique, de violence ancrée dans des coutumes et traditions, ou encore des violences sexuelles dans les conflits armés. Concernant cette dernière forme de violence, elle a rendu hommage aux femmes et filles syriennes qui sont victimes de nombreuses violences, et a réitéré son appel au Conseil de sécurité pour qu’il défère cette situation devant la Cour pénale internationale (CPI). Elle a également demandé à l’opposition syrienne de s’engager à respecter le droit international humanitaire. Le Conseil de sécurité est un partenaire important dans la lutte contre la violence à l’encontre des femmes et des filles, a-t-elle dit, en souhaitant que les femmes soient davantage associées aux pourparlers de paix. Lorsqu’on n’aborde pas la question des violences sexuelles dès le début d’une médiation, elles restent souvent ignorées tout au long du processus de paix, a-t-elle averti. C’est pourquoi, aucun processus de paix engagé sous l’égide de l’ONU ne devrait « amnistier » ce type de violence qui équivaut, à ses yeux, à un crime grave comme le génocide, un crime contre l’humanité ou un crime de guerre.
Mme LORENA CRUZ SANCHEZ, Présidente de l’Institut national pour les femmes du Mexique, a expliqué que son gouvernement avait adopté, en 2007, la loi générale sur l’accès des femmes à une vie libre de violence qui engage toutes les agences gouvernementales ainsi que les pouvoirs judiciaires et législatifs à œuvrer ensemble pour la prévenir et l’éliminer. Elle a également précisé que, cette année, la lutte contre la violence faite aux femmes sera financée à hauteur de 1,5 milliard de dollars.
Mme Sanchez a ensuite indiqué que suite aux « évènements douloureux » de Ciudad Juarez, le Mexique a créé un nouveau cadre législatif pour sanctionner les « féminicides » et a établi un protocole précis pour enquêter sur tous ces cas, ainsi que sur les disparitions de femmes et les violences sexuelles. La représentante a également souligné que l’accès des femmes à la justice permettra d’éviter davantage de violences et de morts. Le Mexique entreprend donc de mettre en place des centres d’appui juridiques à l’intention des femmes. Mme Sanchez a par ailleurs fait part de ses préoccupations au sujet des violences dont font l’objet les défenseurs des droits de l’homme et a réclamé l’établissement d’un mécanisme de protection à leur intention. Elle a également souligné l’importance de promouvoir la participation et la sensibilisation des hommes et des garçons afin qu’ils deviennent des partenaires dans l’élaboration d’une société plus équitable et pacifique.
Mme ELSA FORNERO, Ministre du travail et des politiques sociales chargée de l’égalité des chances de l’Italie, a indiqué que 124 femmes avaient été tuées en Italie en 2012. Leurs expériences malheureuses ont permis de sensibiliser davantage au problème de la violence à l’encontre des femmes, a-t-elle fait remarquer. La Ministre a insisté pour que les États échangent les bonnes pratiques dans la lutte contre cette violence, sur la base du Programme d’action de Beijing, en réaffirmant leur volonté d’atteindre les objectifs d’égalité des droits et des chances pour toutes les femmes. En septembre dernier, l’Italie a signé la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention de la violence à l’encontre des femmes et de la violence domestique. L’Italie a aussi ratifié la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels.
La Ministre a indiqué que, parallèlement, l’Italie avait renforcé les services spécialisés pour les femmes victimes de mauvais traitements. Malgré une crise très difficile, le Gouvernement italien a débloqué des ressources importantes pour mener des activités contre cette violence localement, notamment pour créer des centres d’accueil des victimes. Les mesures prises pour lutter contre la violence à l’encontre des femmes doivent prévoir aussi l’instauration d’un environnement propice à la carrière des femmes, a ajouté Mme Fornero. Enfin, elle a assuré que le Gouvernement italien avait commencé à s’attaquer à la représentation sexiste du corps de la femme, mentionnant la suppression de 100 publicités rien qu’en 2012.
Mme HUSSUNBANU GHAZANFAR, Ministre des affaires féminines de l’Afghanistan, a expliqué que le Plan national d’action pour les femmes, qui a été élaboré dans le cadre de la décennie de transformation de l’Afghanistan pour la période 2015-2024, mettait l’accent sur la gouvernance, l’état de droit et les droits de l’homme, ainsi que le développement socioéconomique. Elle a également indiqué que suite à la Conférence de Tokyo de juillet 2012, son gouvernement s’était engagé à mettre en œuvre la loi de 2009 sur l’élimination de la violence faite aux femmes. La Ministre a ensuite passé en revue certains des progrès réalisés par l’Afghanistan en matière de « développement des femmes ». Ces dernières ont créé 760 entreprises dans le pays et le nombre de femmes présentes au sein du Gouvernement a augmenté de 25%, s’est-elle félicitée. Mme Ghazanfar a également indiqué que le nombre d’enseignantes avait augmenté de 31%, tandis que celui des étudiantes dans les universités avait augmenté de 19%. Des progrès ont aussi été enregistrés en matière de réduction du taux de mortalité maternelle, a-t-elle ajouté.
Cependant, de nombreux défis persistent, notamment dans les zones rurales et reculées du pays, a fait remarquer la Ministre. Plus de trois décennies de guerre et d’insécurité ont contribué davantage à la violence et c’est pourquoi, le Gouvernement afghan accorde beaucoup d’attention aux programmes de paix et de réconciliation nationale. La persistance de coutumes préjudiciables pose aussi problème, a-t-elle indiqué. Le Gouvernement afghan déploie de nombreux efforts pour sensibiliser l’opinion publique « dans un contexte islamique », mobiliser les « oulémas » et établir des réseaux pour les femmes avec l’appui du Ministère du Hajj et des affaires religieuses et du Conseil des oulémas. Mme Ghazanfar a par ailleurs dénoncé « la propagande et les attaques » des ennemis de la paix et de la stabilité. Le manque d’éducation et la pauvreté sont d’autres défis auxquels le pays doit faire face pour mettre fin à la violence à l’encontre des femmes et des filles, a-t-elle déclaré, avant de conclure.
Mme BASSIMA HAKKAOUI, Ministre de la solidarité, des femmes, de la famille et du développement social du Maroc, a exprimé tout son soutien à la lutte contre la violence à l’encontre des femmes et de manière générale au respect des droits des femmes et à leur autonomisation. Elle a aussi invité à tenir compte de la spécificité des pays. En introduisant des réformes pour corriger de façon progressive tous les écarts entre les hommes et les femmes, le Maroc a choisi de suivre une approche participative, a-t-elle expliqué. Le Maroc s’est fixé pour priorité de s’attaquer à tous les facteurs qui facilitent la violence, comme la pauvreté et la marginalisation. Le Gouvernement marocain a adopté des mesures préventives visant notamment la promotion de la tolérance sociale. Il cherche à enraciner les valeurs d’égalité et de justice par le biais des campagnes de sensibilisation annuelles.
Mme Hakkaoui a précisé que son gouvernement mettait l’accent sur le cadre législatif nécessaire pour parvenir à une vraie démocratie, qui fasse participer tous les acteurs et notamment la société civile. Celle-ci peut d’ailleurs participer aux initiatives d’intérêt public, comme le prévoit la Constitution. La Ministre a ensuite mentionné différents projets de loi à l’examen, portant sur la lutte contre toutes les formes de discrimination, la lutte contre la violence faite aux femmes et la création d’un conseil chargé de ces questions.
Mme NAJAT VALLAUD-BELKACEM, Ministre des droits des femmes et Porte-parole du Gouvernement de la France, a déclaré que la question des violences faites aux femmes nous concernait toutes et tous, dans tous les pays, dans toutes les sociétés. Mais il y a aussi des moments où elle se pose avec une acuité particulière, a-t-elle fait remarquer, en citant les pays en conflits où les femmes continuent d’être la cible de violences sexuelles intolérables, souvent utilisées comme arme de guerre et comme arme de destruction des populations.
Des viols massifs sont perpétrés en République démocratique du Congo ou encore au Soudan, un niveau terrifiant de violences sexuelles accompagne la situation actuelle d’insécurité en Syrie mais aussi dans d’autres pays de la planète qui ne sont pourtant pas en conflit. Récemment, en Inde, les faits commis, atroces, ont mis en lumière la réalité ordinaire des viols, aussi anciens et aussi répandus que la domination masculine elle-même, a-t-elle rappelé. Les violences faites aux femmes ne sont pas un fait isolé. Elles constituent l’un des fondements de cette oppression qui persiste sur le corps des femmes partout dans le monde. Les violences sexistes et sexuelles sont le révélateur extrême de toutes les autres inégalités entre les hommes et les femmes. C’est pourquoi la France, a-t-elle précisé, a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité tant au niveau national qu’au niveau international.
« Nous devons refuser ensemble toute forme de relativisme culturelqui laisserait sur le bord du chemin cette bataille essentielle de l’égalité entre les sexes », a insisté Mme Vallaud-Belkacem, en faisant remarquer que cette égalité passait non seulement par l’autonomie économique et politique des femmes mais aussi par le droit des femmes à disposer de leur corps et les droits fondamentaux que constituent les droits sexuels et reproductifs, dont il faut que nous fassions un sujet. La négation de ces droits est trop souvent la première expression des violences qui sont exercées à l’encontre des femmes dès lors qu’elles se traduisent par le contrôle de leur corps ou sa contrainte.
La France, a-t-elle annoncé, accueillera le 20 mars prochain à Paris le premier Forum des femmes francophones, puis, les 3 et 4 juillet, la réunion ministérielle de l’Union pour la Méditerranée, consacrée au renforcement du rôle des femmes dans la société. À chaque fois, la question des violences faites aux femmes fera évidemment partie de façon centrale de l’ordre du jour.
La présente session de la Commission de la condition de la femme est un moment crucial dans la perspective en particulier de l’actualisation des Objectifs du Millénaire du développement en 2015. Ces Objectifs, comme les Conférences du Caire et de Pékin/Beijing, ont fait considérablement progresser les droits des femmes, mais trop souvent ces engagements sont encore restés lettre morte, a regretté la Ministre. C’est pourquoi la Commission doit adopter aujourd’hui les conclusions concertées ambitieuses, en particulier en matière de réalisation de l’autonomie réelle des femmes. Cela passe aussi par la libre disposition du corps, a-t-elle ajouté.
Mme JULIE COLLINS, Ministre de l’emploi des autochtones et du développement économique, du service communautaire et de la condition de la femme de l’Australie, a mentionné la stratégie adoptée par son gouvernement pour la période 2010-2022 afin de lutter contre la violence à l’encontre des femmes et de leurs enfants. Son pays lutte aussi au-delà de ses frontières dans ce domaine et a engagé de nouvelles ressources financières pour permettre à des pays comme l’Afghanistan et le Cambodge de réduire cette violence. L’Australie a aussi mobilisé 320 000 millions de dollars pour promouvoir l’égalité des sexes dans la région du Pacifique, a-t-elle ajouté. La Ministre a indiqué que l’Australie travaillait aussi à la participation des femmes dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales. Expliquant les mesures prises sur le plan national, elle a indiqué que la loi pénale punissait désormais les mariages forcés. Elle a assuré que le Gouvernement australien poursuivait sa lutte contre la traite des êtres humains. La Ministre a aussi parlé de la réforme en cours visant à réduire l’écart des salaires entre les hommes et les femmes, ainsi que des mesures prises pour lutter contre la discrimination fondée sur la race et l’ethnie.
Mme MELANIE GRIFFIN, Membre du Parlement des Bahamas, a indiqué que depuis 1962, année de leur autonomisation, les femmes étaient plus nombreuses à exercer leur droit de vote que les hommes. Les Bahamas sont actuellement dans la phase finale de la révision du Plan national de la politique sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Dans le cadre de la lutte contre la violence dont sont victimes les femmes et les filles, la loi sur la violence domestique de 2007 et la loi sur la violence domestique et les infractions sexuelles de 2008 soulignent l’engagement du Gouvernement des Bahamas dans ce domaine. À cela s’ajoute le Plan quinquennal stratégique sur la violence domestique qui fait actuellement l’objet d’une révision par les experts. En outre, le Bureau des affaires de la femme travaille actuellement, en partenariat avec le Réseau d’action des hommes des Caraïbes pour développer de nouvelles mesures en matière de prévention. Mme Griffin a ajouté que grâce à l’appui financier du bureau régional d’ONU-Femmes, le Bureau des affaires de la femme des Bahamas établira un projet sur le renforcement de la responsabilité de l’État et de l’action communautaire pour mettre fin à la violence basée sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans la région des Caraïbes.
Mme ANA MATO ADROWER, Ministre de la santé, des services sociaux et de l’égalité de l’Espagne, a indiqué que son pays s’était doté d’un cadre juridique adéquat et avait adopté une approche holistique visant à éliminer toutes les formes de violences faites aux femmes. Elle a notamment affirmé que l’Espagne était devenue une référence en matière de droit comparé, à la suite de la réforme de son Code pénal et de l’adoption de plusieurs lois consacrées à la protection des victimes de violence et de leurs familles. La Ministre a indiqué que son gouvernement s’efforçait de briser le silence complice qui entoure la violence sexiste et qu’il tenait en outre à faire participer l’ensemble de la société pour identifier les cas d’abus et promouvoir l’élimination complète de cette forme de violence. Elle a insisté sur la nécessité d’adopter une approche intersectorielle en la matière.
La Ministre a ensuite annoncé la tenue, au mois d’avril, à Madrid, d’une conférence internationale sur l’échange des meilleures pratiques établies au niveau européen, ainsi que sur l’utilisation de nouvelles technologies dans la lutte contre la violence faite aux femmes. Mme Adrower a également expliqué que son gouvernement avait lancé une initiative spéciale par l’entremise de laquelle des entreprises s’engagent à embaucher des victimes de violence. Elle a aussi précisé que les victimes de la traite avaient accès à une aide juridique gratuite. Le Gouvernement espagnol s’efforce en outre de tirer profit des nouvelles technologies de l’information et de la communication pour combattre la violence faite aux femmes et entend par ailleurs obtenir davantage de données scientifiques sur l’étendue de ce fléau.
Mme JO GOODHEW, Ministre des affaires féminines de la Nouvelle-Zélande, a indiqué que son pays avait présenté, l’an dernier, son septième rapport au Comité sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et qu’il travaillait maintenant à mettre en œuvre les recommandations de ce Comité. Elle s’est félicitée que son gouvernement ait joint sa voix à celle de 29 autres gouvernements qui se sont engagés à prendre des mesures pour éliminer la violence à l’encontre des femmes et des filles, par le biais de l’initiative d’ONU-Femmes intitulée « Engagez-vous » (« Commit »). Nous nous engageons à mener une politique de tolérance zéro dans ce domaine, a-t-elle dit, en soulignant que le droit à vivre dans la sécurité est un des droits fondamentaux des femmes. La Ministre a aussi fait valoir le cadre juridique ferme mis en place dans son pays, qui couvre la protection des victimes et la poursuite des auteurs des violences. Des mesures sont également prises pour éviter que des abus sur le plan économique soient commis et pour protéger les victimes contre leurs agresseurs après leur sortie de prison. Mme Goodhew a aussi mentionné les travaux réalisés par une équipe spéciale qui est chargée d’aider les familles à sortir de la violence. Un groupe ministériel a aussi été constitué sur la violence domestique. Avant de conclure, elle a assuré que la Nouvelle-Zélande jouait un rôle de chef de file dans la région pour le renforcement des capacités des services de police afin de répondre efficacement à la violence dans les familles.
Mme KRISHNA TIRATH (Inde) a déclaré que son gouvernement avait récemment mis en place des mesures pour aider à éliminer les violences à l’encontre des femmes. C’est ainsi que des procédures accélérées ont été mises en place. L’Inde a amendé son Code pénal en février 2013 afin d’étendre la définition des abus sexuels et des harcèlements, y compris les nouveaux types de violences comme le voyeurisme. L’objectif est notamment d’accroître la responsabilité des fonctionnaires. Le Parlement indien a également adopté la loi sur le harcèlement sexuel dans les lieux de travail en février 2013. Cette loi couvre les lieux publics et le secteur privé tandis que la loi de protection des enfants contre les abus sexuels est entrée en vigueur en novembre 2012. Le Gouvernement a alloué 200 millions de dollars pour la mise en œuvre de mesures assurant la dignité et la sécurité des femmes. En outre, le Gouvernement a mis en place des centres où les femmes peuvent obtenir des services divers (« One Stop Crises Center for Women ») dans 100 districts les plus concernés dans le but d’offrir des services intégrés aux femmes victimes de violence.
Mme Tirah a ajouté que l’omniprésence des violences à l’encontre des femmes est le reflet de la structure inégale du pouvoir entre les hommes et les femmes. C’est pourquoi, il est important de travailler pour l’autonomisation des femmes aux plans politique, économique et social. « Nous devons également débattre des croyances et des habitudes sociales pour qu’elles facilitent le développement social et le progrès économique », a-t-elle dit. En 1992, l’Inde a réservé 33% de postes pour les femmes dans les organes gouvernementaux en milieux rural et local. Actuellement, 1,5 million de femmes sont élues dans ces organes. Le Gouvernement de l’Inde a proposé de créer la première banque des femmes et y a alloué 200 millions de dollars. Quarante autres millions de dollars ont été récemment affectés pour l’autonomisation des femmes vulnérables.
Mme HAJIYA ZAINAB MAINA, Ministre des affaires des femmes et du développement social du Nigéria, a précisé que le Président du Nigéria avait dégagé un budget particulier spécifiquement axé sur les femmes pour financer des projets dans le domaine de l’accès aux ressources en eau, dans l’agriculture, en matière de santé, d’emploi, ainsi que dans le secteur des technologies de l’information et de la communication. Le Gouvernement nigérian a pris d’autres initiatives visant également à favoriser l’autonomisation des femmes par le biais de l’octroi de subsides ou de crédits. Il a également entrepris des efforts qui ciblent plus particulièrement la justice, à travers l’adoption de lois condamnant les violences à l’encontre des femmes tant au niveau fédéral qu’au niveau de chaque État fédéré. Certains de ces États disposent ainsi de lois sur la violence domestique, le mariage précoce, le veuvage des femmes ou les mutilations génitales féminines. Au niveau fédéral, une loi sur la violence à l’encontre des personnes est actuellement à un stade avancé des discussions au sein du Parlement, a-t-elle précisé.
Pour répondre de manière efficace à la violence dont sont victimes les femmes et les filles, le Nigéria préconise la création de centres uniques qui permettent aux victimes d’avoir accès à un ensemble de services. Il s’agit de construire des synergies entre toutes les parties et de mettre en place une réponse pertinente afin de traiter, par exemple, des traumatismes associés au viol. Elle a rappelé que les femmes victimes d’un viol devaient souvent décrire le calvaire qu’elles ont subi auprès de divers services et à un nombre considérable de personnes. L’objectif de ces centres uniques serait de réunir sous le même toit un conseiller, un médecin, les différentes technologies de laboratoire, un responsable de la police. La Ministre a ensuite insisté sur le rôle des hommes et sur leur implication dans la lutte contre les violences à l’encontre des femmes. À cet égard, elle a salué l’initiative du Secrétaire général de l’ONU de mettre en place un « Réseau des dirigeants masculins » qui s’engagent à lutter contre ces violences.
M. PAAVO ARHINMÄKI, Ministre de l’égalité des sexes de la Finlande, a indiqué que son pays a adopté une position très ferme à la présente session de la Commission de la condition de la femme, visant à travailler ensemble à l’élimination de toutes les formes de violence à l’encontre des femmes et des filles. La promotion des droits sexuels et génésiques des femmes et des filles est, a-t-il dit, une thématique prioritaire pour la Finlande. Il a appelé les États à promouvoir ces droits de manière significative. Il a également mis l’accent sur le rôle important des organisations de la société civile, notamment des organisations de femmes, expliquant qu’elles ont beaucoup d’expérience sur le terrain. Ce sont des partenaires essentiels aux niveaux national et international, a-t-il fait observer.
Le Ministre a en outre souligné le rôle très important des hommes et des garçons, avant d’insister sur l’éducation et la sensibilisation. Le Gouvernement finlandais a adopté un plan d’action quinquennal pour lutter de manière holistique contre la violence à l’encontre des femmes, a-t-il indiqué, en précisant que les mesures préventives sont un élément clef de ce plan. Les femmes ne sont pas seulement des victimes mais elles sont aussi des acteurs essentiels dans la société, a rappelé le Ministre. M. Arhinmäki a indiqué par ailleurs que le deuxième plan d’action adopté par son pays visait à mettre en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, paix et sécurité. La Finlande soutient activement les efforts d’ONU-Femmes, a-t-il assuré avant de conclure.
Mme NANA OYE LITHUR, Ministre des femmes, des enfants et de la protection sociale du Ghana, a indiqué que malgré les nombreuses lois dont s’est doté son gouvernement pour combattre la violence domestique, la traite, ou encore l’esclavage coutumier, les femmes et filles de son pays continuent d’être victimes d’abus sexuels, de violences et de coutumes préjudiciables. La Ministre a notamment fait savoir qu’en 2011, plus de 12 000 cas de violence contre les femmes avaient été enregistrés à l’échelon national. Une récente étude a également révélé une importante prévalence de violences sexuelles dans les établissements scolaires du pays où 52% des étudiantes ont été victimes de coups et 14% d’abus sexuels. La Ministre s’est également inquiétée du fait que les enfants sont de plus en plus exposés à la pornographie sur Internet. Au Ghana, au moins deux femmes sont tuées par leur conjoint chaque mois.
Pour faire face à cette situation, le Gouvernement du Ghana met en place, au sein de la police nationale, une unité d’appui aux victimes de la violence domestique. Des abris pour les victimes ont également été ouverts à Accra. La Ministre s’est ensuite félicitée du rôle inestimable que joue la société civile pour prévenir la violence sexiste. Elle a par ailleurs fait savoir que le taux des mutilations génitales féminines était de 3,5% et que les mariages d’enfants posaient toujours problème au Ghana.
Mme ALEJANDRINA GERMÁN, Ministre de la femme de la République dominicaine, a expliqué que son pays s’était doté d’un cadre juridique qui incorpore les avancées significatives dans la lutte contre toute forme de violence à l’encontre des femmes. À cet égard, elle a rappelé que la Constitution de 2010 consacrait l’égalité entre les sexes, le droit à l’intégrité personnelle ainsi qu’au respect de l’intégrité physique, mentale et morale et le droit à une vie sans violence. Elle va même plus loin et condamne la violence domestique et toute forme de violence à l’encontre des femmes, a-t-elle précisé avant de rappeler certaines lois spéciales pour lutter contre ce type de violence.
L’un des quatre piliers de la Stratégie nationale de développement pour la période 2010-2030 est l’égalité des droits et opportunités pour tous, a rappelé la Ministre. Elle a également cité le Plan national pour l’égalité entre les sexes 2007-2017, le Plan stratégique de prévention et de punition de la violence à l’encontre des femmes et de la violence domestique ainsi que la mise en place de 14 unités, et de 52 bureaux provinciaux et municipaux pour les femmes, ainsi que de centres d’accueil pour les victimes de violence. La Ministre a reconnu cependant que les femmes continuaient d’être victimes de violences dans son pays et qu’il faudrait aller plus loin en intégrant dans le Code pénal les recommandations faites par le Ministère de la femme et les organisations de la société civile. Elle a préconisé en outre le renforcement et l’intégration de mécanismes nationaux et de réseaux de soutien pour combattre la violence à l’encontre des femmes ou encore de faire de l’égalité entre les sexes une priorité éducative.
Mme LUKIA NAKADAMA ISANGA, Ministre d’État pour la parité, le travail et le développement social de l’Ouganda, a indiqué que son gouvernement exigeait une tolérance zéro en ce qui concerne la violence à l’encontre des femmes et des filles. Plusieurs lois ont été adoptées en ce sens, pour punir la violence dans les familles, les mutilations génitales féminines et la traite des personnes. En outre, l’Ouganda a mis en œuvre des programmes de prévention qui encouragent les communautés à agir dans ce domaine. Ces initiatives contribuent à la sensibilisation du public et à la poursuite en justice des auteurs de la violence, a-t-elle expliqué. En matière de santé, il prend des mesures de prophylaxie pour empêcher la contamination des victimes de la violence par le virus du VIH/sida.
La Ministre a aussi fait part de progrès dans la collecte de données sur la violence à l’encontre des femmes. Elle a aussi signalé les efforts entrepris pour former les enseignants afin qu’ils communiquent sur ce sujet avec les filles et les garçons vulnérables. Il y a encore des obstacles à surmonter dans la lutte contre la violence à l’encontre des femmes et des filles, a reconnu la Ministre. Elle a fait remarquer que, seuls 2 cas de violence faite aux filles sur 10 sont portés à la connaissance des services susceptibles de les aider et qu’il existe encore des attitudes culturelles qui encouragent certaines formes de violence. Le sida affecte beaucoup plus les femmes et c’est pourquoi, il faudrait mettre l’accent sur la lutte contre le VIH/sida, a-t-elle souligné.
Mme INGA MARTE THORKILDSEN, Ministre de l’enfant, de l’égalité et de l’inclusion sociale de la Norvège, a salué le courage des femmes qui ont, à travers les siècles, eu l’audace de faire avancer les choses et d’affronter l’opposition des hommes. Elle a notamment cité l’exemple de l’activiste féministe française, Olympe de Gouges, morte guillotinée. La Norvège célèbre, cette année, le centenaire du droit de vote des femmes, obtenu après une lutte difficile, a-t-elle rappelé, en estimant que les réunions de la Commission de la condition de la femme contribuaient à la célébration de ces évènements historiques où les hommes et les femmes mènent un combat sans peur, ni intimidation pour la justice.
La Ministre a ensuite fait remarquer que la violence tuait plus de femmes que le cancer, la malaria, les accidents de la route et les guerres réunis. En outre, a-t-elle rappelé, cette violence représente un coût énorme pour tous les pays. Pour la Norvège, petit pays d’environ cinq millions d’habitants, ce coût est estimé à 1 milliard de dollars par an, a-t-elle précisé. « C’est la raison pour laquelle le message concernant la violence contre les femmes et les filles est simple: elle ne peut être ni acceptée, ni excusée, ni même tolérée », a-t-elle dit. Elle a appelé à mettre fin à l’impunité dont bénéficient souvent les auteurs des faits et a invité les cabinets –souvent dominés par des élites et les ministres masculins- à prendre en compte la réalité de cette violence en tant que priorité politique et non comme un problème d’ordre privé.
Mme Thorkildsen a ensuite considéré que le recours à des arguments faisant référence à la liberté de religion ou à la diversité culturelle en vue de bloquer la prise de décisions était inacceptable face à 150 millions de filles âgées de moins de 18 ans qui ont souffert de violences sexuelles en 2012. « Il ne s’agit pas de culture. Il ne s’agit pas de religion, mais de pouvoir, d’inégalité et de manque de volonté politique et de courage », a-t-elle argué.
M. GILBERT SABOYA SUNYÉ, Ministre des affaires étrangères d’Andorre, a souligné la nécessité d’adopter une approche multidisciplinaire pour enrayer le fléau de la violence faite aux femmes. Les victimes doivent bénéficier du soutien de tous. L’éducation aux droits de l’homme doit être utilisée comme moyen de mettre un terme aux comportements problématiques, a-t-il estimé. Le Ministre a indiqué que son gouvernement avait organisé plusieurs ateliers allant dans ce sens dans les établissements scolaires du pays. La Principauté d’Andorre avait adhéré, le 22 février 2013, à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul, a précisé le Ministre. Il a fait observer que cette Convention était le premier instrument juridiquement contraignant dont dispose l’Europe en la matière. Cette Convention, a-t-il ajouté, a également une vocation universelle. Le Ministre s’est par ailleurs félicité de la parité qui existe dans la composition du Parlement d’Andorre.
Mme MARIA ARNHOLM, Ministre de l’égalité des genres et Vice-Ministre de l’éducation de la Suède, a déclaré que la violence à l’encontre des femmes n’était pas inévitable et, c’est pourquoi, des mesures de prévention doivent être prises. En tant qu’États Membres, nous devons nous acquitter de nos obligations à cet égard, a-t-elle lancé. « Nous avons l’obligation de poursuivre les coupables et de veiller à ce que les femmes victimes de ces violences puissent obtenir réparation du préjudice subi. Elle a aussi estimé que le refus d’accès aux droits de la reproduction pour les femmes et les filles constituait une violation des droits de celles-ci. L’accès à ces droits doit, a-t-elle insisté, être intégré dans une approche complète pour éliminer la violence à l’encontre des femmes et des filles. La Ministre s’est élevée contre toute forme de violence faite aux femmes et aux filles, comme le mariage précoce ou forcé, les mutilations génitales féminines et la traite des personnes. Il faudrait aussi interdire la punition corporelle des enfants, a-t-elle dit. Mme Arnholm a ensuite appelé à lutter contre les normes sociales discriminatoires et les stéréotypes qui sont à l’origine de ces violences. Il faut aussi encourager les hommes à créer un environnement exempt de violence. La Ministre a aussi fait remarquer que la violence à l’encontre des femmes avait un impact considérable sur la situation économique et sociale des pays. Les femmes doivent, a-t-elle souligné, être encouragées à participer aux processus politiques et de consolidation de la paix.
Mme FRANÇOISE HETTO-GAASCH, Ministre de l’égalité des chances du Luxembourg, a déclaré qu’aussi longtemps que la violence à l’égard des femmes ne sera pas éradiquée, une égalité dans la vie privée ne sera pas possible. Outre un engagement politique « clair », il faudrait, a insisté la Ministre, veiller à ce que les promesses faites en la matière soient accompagnées d’un renforcement du cadre normatif et d’un suivi régulier et transparent. Elle a estimé que des stratégies efficaces pour éliminer les violences faites aux filles et aux femmes nécessitent à la fois l’existence d’un cadre juridique rigoureux et des mesures non législatives axées avant tout sur la prévention et la prise en charge globale des victimes. Elle a également engagé les États Membres à veiller à ce que leurs forces de l’ordre soient suffisamment sensibilisées et formées pour reconnaître et traiter les cas de violences faites aux femmes.
Mme Hetto-Gaasch a ensuite fait savoir que le Parlement luxembourgeois travaille actuellement sur un amendement de la loi sur la violence domestique qui repose, a-t-elle précisé, sur le principe de l’éloignement du domicile familiale de l’auteur. Elle a expliqué que la réforme prévoit que les auteurs de violence domestique doivent obligatoirement contacter un service spécialisé pendant la durée de leur expulsion du domicile. Il s’agit non seulement de responsabiliser les auteurs, mais surtout de prévenir des récidives, a-t-elle indiqué. La Ministre a également souligné l’importance de ne pas oublier les enfants touchés par les violences faites aux femmes. Elle a indiqué qu’un comité de coopération des professionnels avait été mis en place, et des campagnes d’information et de sensibilisation avaient été lancées pour lutter contre la violence. Mme Hetto-Gaasch a aussi insisté sur l’importance de l’éducation sexuelle et affective, avant d’inviter les délégations à ne pas réduire le rôle des hommes à celui d’auteurs potentiels, mais à les mobiliser pour participer activement à la lutte contre ce fléau.
Mme ANNE DÉSIRÉE OULOTO, Ministre de la solidarité, de la famille, de la femme et de l’enfant de la Côte d’Ivoire, a passé en revue les efforts menés par son gouvernement pour améliorer la condition de la femme. Une Stratégie nationale de lutte contre les violences basées sur l’égalité entre les hommes et les femmes a été adoptée récemment, a-t-elle indiqué. Expliquant la vulnérabilité particulière des femmes et des filles dans un pays qui se relève d’une longue crise politico-militaire, la Ministre a toutefois fait valoir que la politique en faveur de la femme avait permis d’atteindre des résultats tangibles. Elle a ainsi mentionné les mesures prises pour la prise en charge des victimes de violence à l’encontre des femmes, pour la réinsertion des victimes de ces violences, ainsi que pour la protection des orphelins. En outre, la Ministre a mentionné la création d’un Fonds d’appui aux femmes de la Côte d’Ivoire, qui vise l’autonomisation des femmes les plus pauvres.
Plusieurs initiatives visent par ailleurs l’égalité hommes-femmes, comme la révision des lois sur la famille et l’adoption d’un quota de 30% de représentativité des femmes aux postes nominatifs et électifs. La nouvelle loi sur le mariage a fait disparaître la notion de « chef de famille » et a prévu la possibilité pour l’épouse de choisir librement une profession de son choix, a précisé la Ministre avant de conclure.
Mme JIKO LUVENI, Ministre du bien-être social, des femmes et de l’élimination de la pauvreté de Fidji, a indiqué que son gouvernement s’était doté d’un plan d’action pour la période 2010-2019 qui met l’accent sur la promotion et la défense des droits des femmes à travers un programme de développement précis, ainsi que sur l’élimination de la violence faite aux femmes et la protection des victimes. Des peines plus longues sont désormais imposées aux auteurs de ces violences, en cas de récidive notamment, tandis que médecins et enseignants sont invités à faire états des situations de violences, a-t-elle précisé.
La Ministre a également indiqué qu’un programme avait été lancé pour éliminer la violence dans les communautés rurales. Les communautés qui décident d’y prendre part s’engagent à créer des comités au sein desquels les jeunes et les hommes occupent un rôle de chef de fil après avoir suivi une formation spécialisée. Elle a expliqué que ces comités sont ensuite chargés d’assurer le protection des victimes, de créer des programme de « changement de comportement » pour les auteurs de sévices, de faire le lien avec les unités de police et d’assurer, enfin, le suivi de la campagne. Mme Luveni a précisé que le Gouvernement de Fidji espère que 63 communautés décideront d’y prendre part d’ici à la fin de l’année.
Table ronde 1: Thème ciblé: prévention de la violence à l’égard des femmes et filles
Lançant la discussion, Mme ANA MARIE HERNANDO (Philippines), Vice-Présidentede la Commission de la condition de la femme et modératrice de la table ronde I, a appelé à favoriser des changements dans les croyances et les attitudes, en mettant l’accent sur les programmes d’éducation. La prévention nécessite la participation de tous les secteurs de la société, a-t-elle souligné. Mme Hernando a demandé aux participants de s’interroger sur les défis à relever et les moyens permettant de mettre fin à la violence à l’encontre des femmes et des filles. Les participants devront partager les expériences réussies dans ce domaine, a-t-elle annoncé, en invitant les délégations à engager un dialogue interactif avec les panélistes.
Mme MERWAT EL-TALLAWY, Présidente du Conseil national de la femme de l’Égypte, a indiqué que les évènements du printemps arabe avaient déclenché une nouvelle forme de violence et d’oppression à l’encontre des femmes après l’émergence de mouvements religieux fondamentalistes dans tous les « pays arabes en transition ». Les mauvaises interprétations de la religion et de la culture deviennent autant d’outils brandis contre les femmes, a-t-elle fait remarquer. Mme El-Tallawy a signalé qu’en Égypte, les femmes avaient été écartées lors des nominations pour l’élaboration de la constitution provisoire et des listes de candidats aux élections législatives. La nouvelle Constitution de l’Égypte, a-t-elle fait observer, ignore les droits fondamentaux des femmes sur le plan politique, social et économique, s’est indignée la panéliste. Mme El-Tallawy a également qualifié le « harcèlement sexuel de groupe » d’instrument politique contre les femmes égyptiennes qui participent à des manifestations. Il semble que des bandes sont recrutées pour commettre de tels actes, a-t-elle dit.
La panéliste a indiqué que les femmes, « même analphabètes », sont plus nombreuses à porter un intérêt particulier à la politique. Mme El-Tallawy a exhorté les délégations à scinder le droit des femmes des intérêts politiques. Elle a également recommandé la création au sein de l’ONU d’un fonds spécial pour renforcer la prévention et assurer le suivi de mesures prises pour lutter contre la violence à l’encontre des femmes et tenir les gouvernements responsables de la sécurité des femmes. Il conviendrait également de créer un observatoire juridique international, a-t-elle suggéré.
Mme PINAR ILKKARACAN (Turquie), professeur à l’Université du Bosphore, a abordé la question de la prévention sous l’angle de la santé et des droits sexuels et reproductifs. Elle a dénoncé toutes les formes de violence à l’encontre des femmes, en indiquant notamment que, chaque année, plus de trois millions de filles en Afrique courent le risque de subir des mutilations génitales féminines. Parmi les causes profondes de cette violence, elle a cité le système patriarcal et la violation des droits reproductifs et sexuels. Ces droits sont constamment ignorés. La panéliste a dénoncé les pratiques traditionnelles qui cherchent à contrôler la sexualité et la reproduction des femmes et des filles. On refuse aux femmes la jouissance de leurs droits fondamentaux, a-t-elle regretté. Au motif qu’il faut protéger leur chasteté, on empêche parfois les filles d’aller à l’école. On refuse également de reconnaître leur droit à l’avortement, même en cas de viol ou d’abus sexuel.
Mme Ilkkaracan a aussi fait remarquer que la capacité des jeunes filles à se décider par rapport à leur avenir était limitée par les normes concernant la sexualité. Elle a dénoncé les pratiques qui conduisent à décider à la place des filles de la façon dont elles vont vivre leur sexualité. Comment l’agenda international peut-il ignorer les droits sexuels des filles? a-t-elle demandé, en rappelant que le Programme d’action de Beijing précisait que les hommes et les femmes ont le droit de décider de leur autonomie sexuelle et de leur santé reproductive et sexuelle. Comment se fait-il que les droits de la femme continuent à être remis en question? L’Équipe spéciale de haut niveau de la Conférence sur la population et le développement, qui s’était tenue au Caire en 1994, avait demandé aux gouvernements de remédier à cette situation en adoptant des mesures de protection des droits reproductifs et sexuels, en examinant les lois qui entravent l’exercice de ces droits, et en rendant l’éducation sexuelle accessible à tous.
Mme LIINA KANTER, Directrice du Département de l’égalité du genre du Ministère des affaires sociales de l’Estonie, a indiqué que la création, il y a 95 ans de la République d’Estonie, était fondée sur l’égalité entre les sexes. Il n’en demeure pas moins que même en Estonie, la question du droit des femmes doit demeurer au centre de toutes les préoccupations, a-t-elle cependant ajouté. La panéliste a notamment pointé du doigt un manque de prise de conscience, y compris chez de nombreuses femmes, de l’importance d’assurer l’égalité entre les sexes. Il est essentiel de faire changer les mentalités, a souligné la panéliste. Pour Mme Kanter, la dépendance économique des femmes, la prévalence de mythes qui entourent la violence et le manque de ressources accordées aux victimes sont autant de facteurs qui contribuent à faire perdurer cette situation.
La panéliste a ensuite fait savoir que, sur le plan national, un amendement apporté en 2012 au Code pénal estonien permet à présent de criminaliser les actes de la traite des personnes. Elle a ensuite engagé les États Membres à faire preuve de courage pour examiner la situation dans son ensemble et assumer leurs responsabilités.
Mme MARAI LARASI, Directrice exécutive de Imkaan, Vice-Présidente de l’organisation End Violence Against Women Coalition, UK (EVAW), a présenté le rapport du Groupe d’experts sur la violence à l’encontre des femmes et des filles, élaboré par 19 experts grâce à la collaboration d’ONU-Femmes et différentes institutions du système des Nations Unies. Les experts ont reconnu qu’il faudrait résoudre les problèmes de base pour prévenir cette violence, même si la notion de prévention n’est pas forcément la même pour tous. La normalisation de la violence à l’encontre des femmes est exacerbée par la militarisation ou le fondamentalisme religieux, s’est inquiétée Mme Larasi. Les experts s’étaient concentrés sur la situation des femmes qui évoluent dans un milieu violent comme les gangs, a-t-elle indiqué. Les réseaux sociaux risquent parfois d’exposer des femmes à des dangers.
Les actions menées au titre de la prévention de la violence faite aux femmes et aux filles permettent de mieux faire comprendre que l’égalité entre les hommes et les femmes est bénéfique à toute la société. Mme Larasi a noté que les organisations de femmes sont en première ligne dans les efforts de prévention. Mais les hommes et les garçons doivent aussi participer à la prévention, a-t-elle estimé. Dans leurs conclusions, les experts avaient appelé à renforcer les activités de prévention et à élaborer un plan d’action général dans ce domaine, a-t-elle dit. Ils avaient aussi préconisé de renforcer la sensibilisation sur la violence à l’encontre des femmes et poursuivre les recherches sur les causes et les conséquences de cette violence. Mme Larasi a annoncé qu’un plan mondial sur l’élimination de la violence à l’encontre des femmes et des filles sera lancé en 2015. Elle a souligné qu’il faudrait collaborer avec des donateurs et des institutions nationales et internationales pour coordonner les stratégies dans ce domaine. Les États doivent aussi investir dans les mécanismes qui appuient les changements de mentalité, a-t-elle ajouté.
Mme CLAUDIA GARCIA-MORENO ESTEVA, Directrice de l’équipe pour la santé sexuelle, la parité, les droits reproductifs et l’adolescence de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), a indiqué que les normes sociales qui confèrent aux hommes une autorité particulière au sein des foyers contribuaient de manière notable à la violence faite aux femmes. C’est pourquoi, il est important de mener des campagnes de sensibilisation dans l’espoir de modifier les mentalités. La panéliste a également fait observer que l’obtention d’un emploi formel et l’octroi de ressources permettaient aux femmes de mettre un terme à une relation abusive. Elle a également fait un lien entre les envois de fonds et la baisse de la violence dont sont victimes les femmes et les filles. Il importe également d’accorder une attention particulière aux enfants maltraités et/ou exposés à la violence car ceux-ci sont plus enclins à avoir un comportement violent à l’âge adulte, a-t-elle signalé. La panéliste a également mis en garde contre les méfaits de la consommation d’alcool et a préconisé une plus forte imposition fiscale des boissons alcoolisées. Mme Garcia-Moreno Esteva a aussi souligné l’importance de traduire les auteurs de violence en justice.
Discussion interactive
La discussion avec les panélistes a permis d’aborder les différents moyens de prévenir la violence faite aux femmes et aux filles. Outre la violence domestique qui mobilise tous les efforts des gouvernements, les délégations ont aussi abordé des formes nouvelles de violence à l’encontre des femmes, comme le harcèlement en ligne. Les délégations ont aussi partagé les expériences en ce qui concerne les mesures prises pour changer les mentalités favorisant la violence contre les femmes.
De nombreux pays, comme la Chine, ont adopté une politique visant à prévenir et à éliminer la violence domestique. L’Indonésie, par exemple, a adopté une loi spéciale sur cette question et créé un service chargé de recevoir les plaintes des femmes qui en sont victimes. La représentante de l’Italie a mentionné la formation qui est dispensée dans son pays au personnel de la santé pour qu’il soit en mesure d’apporter les premiers secours aux victimes de la violence domestique. En Fédération de Russie, une ligne téléphonique pour les victimes de cette violence a été mise en place. De son côté, la représentante d’Israël a demandé de partager les bonnes pratiques dans la prise en charge des victimes et la prévention de la récidive dans ce domaine. La représentante du Timor-Leste a, quant à elle, souligné le rôle crucial de la famille pour prévenir cette violence.
La prévention de la violence à l’encontre des femmes passe aussi par la sensibilisation dès le plus jeune âge, comme cela est prévu dans les écoles en Italie, au Viet-Nam et aux Philippines. La délégation de l’Union européenne a demandé des conseils aux experts pour la mise en place de programmes de prévention à l’école. L’experte de l’Estonie a expliqué que le programme développé pour les jeunes dans son pays avait pour objectif de renforcer la bonne image que les filles se font d’elles-mêmes. Pour sa part, la représentante de la Suède a exigé d’éliminer complètement les châtiments corporels aux enfants.
La sensibilisation des hommes à la violence à l’encontre des femmes a été mentionnée plusieurs fois comme l’un des procédés essentiels à la prévention. La représentante des Philippines a demandé aux délégations de partager les bonnes pratiques dans ce domaine. Les représentants du Canada et de la Suisse ont mentionné le programme mis en place dans ce domaine dans leurs pays respectifs.
La représentante de l’Espagne, dont le pays dispose d’un cadre législatif efficace pour changer les mentalités et les attitudes, a soulevé le problème des nouvelles violences aux femmes pratiquées par les jeunes, comme le « cyberharcèlement » qui va être pénalisé en Espagne. L’experte de l’Estonie a indiqué que, dans son pays, certains agents de police étaient spécialisés sur l’espace Internet. La Directrice exécutive de Imkaan a suggéré de mieux gérer l’utilisation des médias sociaux pour ne pas laisser se développer une violence nuisible aux femmes.
Certains intervenants ont appuyé la protection des droits sexuels et reproductifs en tant que moyen de prévention de la violence faite aux femmes, comme la représentante des États-Unis. La représentante de la Suisse a aussi plaidé pour que la femme dispose librement de son corps et ait un accès sans entrave aux services de santé reproductive et sexuelle.
En ce qui concerne la violence liée à l’homophobie, la représentante de la Géorgie s’est interrogée sur les moyens de prévenir tout meurtre basé sur l’orientation sexuelle. La Géorgie a prévu de réprimer spécialement ce genre de crime en droit pénal, ce qui a été salué par la professeur de l’Université du Bosphore.
Parmi les bonnes pratiques partagées par les délégations, la représentante du Brésil a parlé du projet « femmes pour la paix » qui prévoit une mobilisation communautaire en faveur de la prévention de la violence à l’encontre des femmes. Il est bon que les communautés s’approprient les activités de prévention, a commenté la Directrice exécutive de Imkaan. La représentante d’El Salvador a, quant à elle, parlé du projet « villes sûres » qui cherche à traiter en amont de cette violence. La représentante de la Nouvelle-Zélande a demandé des exemples de lutte contre la violence faite aux femmes autochtones, tandis que celle de la Belgique a invité à partager tout indicateur utile en matière de prévention. La déléguée de l’Angola a, pour sa part, demandé des précisions sur les mesures de réinsertion des prostituées. De son côté, la représentante de la République démocratique du Congo a assuré des efforts de son pays pour lutter contre la violence sexuelle, notamment par deux lois et une stratégie nationale de lutte contre la violence basée sur le genre.
Abordant la prévention sous un angle plus large, le représentant du Maroc a demandé de traiter de cette question de manière transversale et cohérente dans toutes les politiques. Il a aussi souligné la nécessité d’orienter le budget national en fonction des questions de parité, ce qu’a confirmé la Présidente du Conseil national de la femme de l’Égypte.
Intervenant au titre de la société civile, la représentante du Comité de l’Amérique latine et des Caraïbes pour la défense des droits des femmes a demandé comment on pouvait arriver à la mise en œuvre des recommandations de la Commission. Elle a regretté qu’il n’y ait pas assez de mécanismes efficaces pour permettre aux femmes de dénoncer les violences sur le plan judiciaire. Pour la représentante de l’OMS, il est important de faire participer activement les acteurs de la société civile dans l’élaboration des mesures de prévention de la violence à l’encontre des femmes. Reprenant la parole, la Présidente du Conseil national de la femme de l’Égypte s’est également félicitée de la contribution des organisations non gouvernementales dans ce domaine, en regrettant cependant que l’une d’entre elles attaquait de manière erronée les projets de recommandation de la Commission.
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