La Commission du développement social débat du bien-fondé du nouveau paradigme du « développement pour tous » dans la lutte contre la pauvreté
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Commission du développement social
Quarante-neuvième session
4e et 5e séances – matin et après-midi
LA COMMISSION DU DÉVELOPPEMENT SOCIAL DÉBAT DU BIEN-FONDÉ DU NOUVEAU PARADIGME
DU « DÉVELOPPEMENT POUR TOUS » DANS LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ
Au deuxième jour des travaux de sa quarante-neuvième session, la Commission du développement social s’est penchée sur le nouveau paradigme du « développement pour tous » et a débattu du bien-fondé du concept relatif à la redistribution équitable des richesses et de celui du cadre macroéconomique libéral dominant et appliqué à ce jour à l’économie mondiale, entre autres sujets.
Le paradigme du « développement pour tous » a notamment été évoqué par Mme Isabel Ortiz, Directrice adjointe des politiques au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), qui était un des quatre experts invités à participer, ce matin, à une table ronde de haut niveau organisée autour du thème de l’élimination de la pauvreté. « La conception traditionnelle du développement met l’exigence de la croissance au premier plan, alors que le nouveau paradigme en voie d’apparition considère que les politiques sociales sont en elles-mêmes un investissement », a notamment expliqué Mme Ortiz.
Elle a indiqué que, si traditionnellement on a porté beaucoup d’attention des dernières décennies aux réductions fiscales et à la réduction des dépenses publiques, nombre de pays veulent maintenant beaucoup plus promouvoir le bien-être de leurs populations et par conséquent augmenter leurs dépenses sociales. « Le concept de redistribution des ressources et des bénéfices du développement réapparait dans les stratégies de développement, avec notamment l’attention portée au concept de « plancher de protection sociale pour tous », a-t-elle précisé.
Autre expert invité à cette table ronde, le Professeur Jimi Adenisa a argué que les stratégies de redistribution étaient seulement efficaces dans les sociétés où 10%, ou moins, du total de la population vivent dans la pauvreté. « Dans les sociétés où 50% ou 75% de la population vivent dans la pauvreté, il importe avant tout d’adopter des politiques sociales basées sur la promotion de l’égalité et de la solidarité, et de prôner des politiques de lutte contre la pauvreté capables de cibler l’ensemble de la population afin de renforcer la cohésion sociale », a-t-il affirmé. « L’histoire a montré que plus on met l’accent seulement sur les pauvres, moins on est capable de réduire la pauvreté », a-t-il ajouté. Le Professeur Adenisa a par ailleurs déploré la diminution du rôle de l’État imposée par les institutions financières internationales et les politiques de libre marché, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé, des infrastructures et de l’emploi.
Appuyant les propos de ce dernier, le représentant de la Namibie a en effet observé que les politiques actuelles ne permettent aux gouvernements que d’essayer de traiter les symptômes de la pauvreté, au lieu de s’attaquer à ses causes premières.
Cet après-midi, dans le cadre du débat général, le représentant du Mozambique, s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a engagé les délégations à se départir d’un cadre politique macroéconomique qui ne cherche qu’à contrôler l’inflation et les déficits budgétaires et de favoriser au contraire la dimension sociale du développement.
Allant plus loin dans la critique du cadre économico-financier mondial actuel, son homologue du Venezuela a soutenu que l’élimination de la pauvreté passe par un remplacement pur et simple des structures capitalistes, et il a plaidé en faveur de la mise en place d’une structure sociale « inclusive, socialiste, humaniste », et qui soit assortie d’un système solide de protection sociale.
Tout au long de cette journée de débats, un grand nombre de délégations ont souligné les mérites de l’accès universel à la santé et à l’éducation, comme moyen d’assurer d’une part, l’intégration et la stabilité sociale, et de l’autre, de réduire la vulnérabilité temporaire et générationnelle des populations à la pauvreté chronique.
La Commission du développement social poursuivra ses travaux demain, vendredi 11 février, à partir de 10 heures.
SUITE DONNÉE AU SOMMET MONDIAL POUR LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL ET À LA VINGT-QUATRIÈME SESSION EXTRAORDINAIRE DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE(E/CN.5/2011/2 ET E/CN.5/2011/4)
Table ronde sur le thème « Thème prioritaire: élimination de la pauvreté » E/CN.5/2011/3)
Déclarations liminaires
Le Président de la Commission du développement social, M. JORGE VALERO BRICEÑO, du Venezuela, a invité les participants à la Table ronde à réfléchir, au cours de cette rencontre, aux obstacles qui ont empêché l’accomplissement de progrès notables en matière d’élimination de la pauvreté dans certains pays. M. Valero Briceño les a aussi invités à présenter les mesures prises pour faciliter la mobilisation de ressources publiques dans ce domaine et à examiner si et comment les gouvernements ont accordé la priorité à l’adoption et à la mise en œuvre de stratégies d’élimination de la pauvreté. Le Président de la Commission du développement social a aussi proposé que les participants à la Table ronde mesurent les progrès accomplis à ce jour en vue d’identifier ou de proposer des actions qui pourraient être lancées après la date butoir de 2015.
M. LU MAI, Secrétaire général de la « China Development Research Foundation », a présenté la situation prévalant en Chine en matière de pauvreté, un fléau qui affecte encore 150 millions de Chinois si l’on applique au pays le critère adopté par les Nations Unies, qui estiment que toute personne vivant avec un dollar par jour est dans un état de pauvreté. M. Lu a précisé que 85% des pauvres en Chine vivent dans les zones rurales. Il a ensuite parlé des trois piliers de la politique menée par le Gouvernement de la République populaire de Chine pour éliminer la pauvreté, qui sont la promotion soutenue du développement, la mise en place d’un filet de sécurité sociale et le développement du capital humain. Pour ce qui concerne le développement, le Gouvernement met l’accent sur les infrastructures rurales et cherche actuellement à éliminer la pauvreté dans 148 000 villages à travers la Chine. Le système de sécurité sociale permet d’aider les pauvres des zones rurales et urbaines, en leur offrant une subvention mensuelle minimale, a indiqué M. Lu. En outre, 95% des habitants des zones rurales font partie d’une coopérative médicale et ne paient que 20% des frais médicaux pour les soins qui sont leur prodigués. S’agissant du capital humain, le Gouvernement a énormément investi dans les secteurs de l’éducation et de la santé. Il a ainsi élaboré un programme qui subventionne les besoins d’éducation de 12 millions d’étudiants des zones rurales, a indiqué M. Lu Mai.
L’expert chinois a ensuite expliqué le programme mené par la « China Development Research Foundation », qui a pour but d’améliorer le sort des enfants en bas âge vivant dans les zones rurales, cette catégorie de la population étant encore très touchée par la pauvreté, dont les impacts sur l’enfance se traduisent par des maladies telles que l’anémie et une situation de sous-alimentation et de malnutrition. Les efforts déployés en Chine portent donc essentiellement sur l’éducation, a indiqué M. Lu en soulignant les difficultés que rencontrent les enfants des zones rurales pour aller régulièrement à l’école. Le programme de la fondation a pour but l’amélioration de l’alimentation des enfants et des femmes enceintes et propose aussi aux femmes et à celles qui sont déjà mères de se former aux questions concernant la maternité. Aux femmes qui se rendent aux « écoles pour mamans », nous offrons un accouchement à l’hôpital, a-t-il expliqué. Nous envoyons aussi des équipes de volontaires dans les villages pour dispenser une éducation préscolaire aux jeunes enfants, a-t-il ajouté. M. Lu Mai a ensuite expliqué les propositions faites par sa fondation pour mettre en place un « Plan 2100 », dont les modalités sont notamment destinées à promouvoir une nutrition de qualité aux femmes et aux enfants pendant 1 000 jours entre le début d’une grossesse et le deuxième anniversaire de l’enfant après sa naissance. Ce Plan se concentre aussi sur l’éducation des enfants de moins de 5 ans, qui est extrêmement importante pour le développement des capacités cognitives des nouveau-nés.
M. JIMI ADENISA, Professeur de sociologie à l’Université de Rhodes, en Afrique du Sud, et Chercheur à l’Institut nordique-Afrique de l’Université d’Uppsala, en Suède, a argué qu’à l’heure actuelle, il existe une discordance entre, d’un coté, ce que l’on sait au sujet de la pauvreté, et de l’autre, les actions menées et les objectifs fixés en matière de lutte contre la pauvreté. Il a commenté le « caractère problématique » du consensus actuel, qui fait de la pauvreté abjecte le centre de toutes discussions et des politiques préconisées ou adoptées. Se donner pour objectif d’atteindre au moins 1,25 dollars par jour et par personne comme mesure de succès de la lutte contre ce fléau pose problème, a affirmé M. Adenisa, tout en remarquant que l’élimination de la faim à elle seule ne suffit pas pour proclamer qu’on a vaincu la pauvreté. Les êtres humains ont également besoin de se vêtir et de disposer d’abris décents. L’objectif d’atteindre 1,25 dollar de revenu quotidien par habitant, a-t-il argué, va ainsi à l’encontre des analyses des documents fondamentaux de l’ONU qui stipulent que chaque individu a droit à un niveau de vie qui le rende capable d’assurer sa santé et son bien-être.
L’expert a engagé les délégations à prêter attention à la situation des gens classées comme non-pauvres, mais qui vivent en situation précaire, c’est-à-dire aux personnes qui sont susceptibles de sombrer dans la pauvreté au moindre choc ou imprévu, car « ne pas prêter attention à cette catégorie provoque une illusion de réussite en matière de lutte contre la pauvreté ». Attirant l’attention sur le fait que la majorité de la population du continent africain pouvait être regroupée dans cette catégorie, l’expert a appelé la Commission à établir un nouveau consensus en matière de protection sociale.
Il a notamment estimé que dans les sociétés où 10%, ou moins, de la composante de la population vit dans la pauvreté, il était possible de combattre ce fléau par le biais de stratégies de redistribution, mais que dans les sociétés où 50% ou 75% de population vivent dans la pauvreté, il importe avant tout d’adopter des politiques sociales basées sur la promotion de l’égalité et de la solidarité. Or, on ne peut avoir un programme de politique sociale qui prône la solidarité si les politiques économiques vont dans une toute autre direction, a-t-il notamment fait remarquer.
« L’histoire a montré que plus on met l’accent sur les pauvres, moins on est capable de réduire la pauvreté », a poursuivi M. Adenisa qui a dénoncé la « pauvreté des discours centrés sur la pauvreté ». On laisse les pauvres à la merci des non-pauvres et les services qui leur sont destinés ont souvent tendance à devenir des services de mauvaise qualité, a-t-il relevé. Il a préconisé l’adoption de politiques de lutte contre la pauvreté capables de cibler l’ensemble de la population. Il faut permettre à l’ensemble de la population de prendre part au contrat social, et ce faisant, on parviendra à éviter, par exemple, le ressentiment éprouvé par des personnes qui paient leurs impôts mais qui ne peuvent profiter des nouvelles politiques sociales, ce qui permettra par ailleurs de renforcer la cohésion sociale, a-t-il notamment expliqué.
Le Professeur Adenisa a également invité les membres de la Commission à surmonter l’idée que la protection sociale devait être centrée sur la question de l’emploi. Se préoccuper uniquement de la situation des pauvres n’est pas non plus très efficace en matière de lutte contre la pauvreté abjecte ou contre les vulnérabilités qui en sont la cause, a estimé M. Adenisa qui a au contraire prôné l’adoption de mesures destinées à augmenter la production, la consommation des ménages, ou encore le financement des programmes visant à les aider.
Il a également souligné les mérites de l’investissement social universel dans les domaines de la santé et de l’éducation qui permet, a-t-il indiqué, de réduire la vulnérabilité temporaire et générationnelle tout en ayant des retombées positives sur l’économie. Selon M. Adenisa, les stratégies efficaces de lutte contre la pauvreté doivent adopter des cadres capables d’aborder le problème de la vulnérabilité en amont, et non pas après coup, et elles doivent être basées sur le développement économique et non pas sur la seule notion de « croissance économique ».
Il faut assurer une plus grande efficacité des marchés tout en réduisant le coût des activités économiques, a dit l’expert pour qui un calendrier de lutte durable contre la pauvreté exige l’adoption d’une vision plus large en matière de politique sociale. Il a souhaité la création d’instruments polyvalents axés sur la protection, la reproduction et la cohésion sociale, entre autres. On n’a pas encore démontré qu’une politique sociale unidimensionnelle puisse être efficace, a souligné M. Adenisa. Il a également préconisé plus de changements dans les politiques économiques et sociales. Il est par ailleurs impératif de comprendre que les instruments de politique sociale ne sont jamais neutres du point de vue du genre, a-t-il ajouté.
Mme ISABEL ORTIZ, Directrice adjointe des politiques au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a rappelé que 80% des ressources et des biens mondiaux sont entre les mains de la frange de la population mondiale la plus riche, qui ne représente cependant que 20% du total de la population de la planète. Commentant les chiffres mondiaux sur la pauvreté, elle a remarqué que, si l’on exclut la Chine qui a réussi à sortir du besoin une part appréciable de sa population, le nombre de pauvres à travers le monde n’a pas baissé et reste stable, ce qui révèle le peu de progrès accomplis dans ce domaine. Mme Ortiz a indiqué que 22 millions de pauvres vivent avec 25 centimes de dollar par jour et que près de 50 millions survivent avec moins de 34 centimes. Pour relever les défis de la pauvreté, elle a appelé tout d’abord la communauté internationale à éliminer les inégalités hommes-femmes, soulignant que dans les pays en développement les femmes passent plus de temps au travail que les hommes chaque jour. Elles produisent entre 60% et 80% des produits alimentaires dans la plupart de ces pays, a-t-elle estimé. Les emplois pour les jeunes doivent aussi être une priorité, a-t-elle dit, notant qu’en 2010 il y a moins de jeunes occupant un emploi qu’il y a quelques années. Mme Ortiz a aussi mentionné l’impact cumulatif des différentes crises « mondiales », rappelant notamment la flambée des prix alimentaires qu’elles ont causée en 2008.
Une des conséquences de ces crises est que les pays diminuent leurs dépenses publiques, a expliqué Mme Ortiz, avant d’expliquer le nouveau paradigme de « développement pour tous » qui prend en compte l’impact social des politiques économiques adoptées. La conception traditionnelle du développement met la croissance au premier plan, alors que le nouveau paradigme en voie d’apparition considère que les politiques sociales sont un investissement, a expliqué Isabel Ortiz. Si traditionnellement on porte beaucoup d’attention aux réductions fiscales et à la réduction des dépenses publiques, beaucoup de pays veulent néanmoins maintenant augmenter leurs dépenses sociales, a-t-elle remarqué. Le concept de redistribution réapparaît dans les stratégies de développement, avec notamment l’attention portée au concept de « plancher de protection sociale pour tous ». En matière de justice sociale, l’équité contribue à la croissance, a-t-elle expliqué. Parmi les mesures sociales à prendre, il faut promouvoir les petites et moyennes entreprises, ainsi que les entreprises familiales, ce qui permettrait de réduire la vulnérabilité des pays et des populations aux crises, a préconisé Mme Ortiz. Elle a aussi appelé à examiner les sources de conflit afin de mettre en place des systèmes de prévention et d’alerte précoce.
En ce qui concerne la fiscalité, Mme Ortiz a mentionné diverses possibilités dont l’application permettrait d’assurer un financement du développement social, comme par exemple une taxation sur l’exploitation des ressources naturelles. Elle a donné l’exemple de la Mongolie, qui utilise les revenus de l’exportation du cuivre pour alimenter un fonds d’aide au développement. Elle a aussi indiqué que, selon certaines informations, dans certains pays d’Afrique subsaharienne, 36% des montants de l’aide publique au développement étaient jusqu’à maintenant conservés dans les banques centrales, comme réserves, s’interrogeant sur les raisons de la non-utilisation de ces fonds. Elle a par ailleurs mentionné le cas du Cameroun, pays où le déficit fiscal a été éliminé, passant de -0,7% à +0,7% en 3 ans, ce qui a permis au Gouvernement de doubler le niveau des dépenses publiques.
M. PEDRO SASSONE, Représentant auprès du Conseil des délégués de l’Union des nations de l’Amérique du Sud, du Ministère du pouvoir du peuple pour les affaires étrangères du Venezuela, a déploré le manque de vigueur des politiques actuelles de lutte contre la pauvreté. Il a estimé que la question de la protection sociale devait être abordée comme idée transversale et qu’il ne pouvait y avoir de développement économique sans que l’accent ne soit mis sur le secteur social. Pour M. Sassone, il faut reposer la question de la productivité. À travers le monde, il y a une grande contradiction dans le fait que l’augmentation de la productivité ne s’est pas traduite par une amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs, a-t-il notamment estimé. Il a invité la Commission à repenser ce que doit être la notion d’action « sociale » et à rétablir le concept de l’État comme étant le garant de la justice sociale. L’État doit être à la hauteur de ses responsabilités et la politique sociale doit être « re-politisée » car, a-t-il estimé, il ne peut y avoir de politique sans légitimité. Le représentant s’est également dit partisan d’une « re-polarisation » des politiques sociales afin de garantir la participation directe de tous les citoyens à la vie nationale.
M. Sassone s’est ensuite interrogé sur l’existence présumée d’un « seuil d’amélioration des indicateurs », estimant qu’il serait préférable de se pencher sur les rapports sociaux et leur amélioration. Comment améliorer les indicateurs si on n’améliore pas la structure sociale? a-t-il notamment demandé. En Amérique latine, a-t-il ajouté, il existe au sein des pays, une structure fondamentale qui favorise l’exploitation de la majorité par la minorité, et la pauvreté est une conséquence de l’exclusion sociale, a souligné M. Sassone. Il a également fait observer qu’un programme de lutte contre la pauvreté ne pouvait exister si les politiques sociales sont elles-mêmes inexistantes ou inadaptées. Parlant du système capitaliste, il a affirmé que l’inégalité en est la caractéristique intrinsèque et que la pauvreté ne pouvait pas en être éliminée, à moins d’y imposer un changement structurel fondamental. La protection sociale universelle ne verra jamais le jour dans ce genre de système si on ne résout pas le problème de l’inégalité entre le capital et le travail, et entre les intérêts privés et les travailleurs, a indiqué le panéliste. M. Sassone a par ailleurs recommandé que soit mis en place un système qui assurerait une meilleure distribution des richesses au sein de chaque société et entre les différents pays. Il a relevé que l’Amérique latine était le continent où on voit le plus d’inégalité sociale. M. Sassone a ensuite parlé de la politique sociale du Venezuela. Il a déclaré que la pire conséquence des politiques néolibérales avait été le démantèlement de la structure étatique qu’elles ont imposée aux quatre coins du monde.
Débat interactif
Ouvrant le débat interactif après les présentations des panélistes, la représentante de la délégation de l’Union européenne auprès des Nations Unies a demandé comment les pays traitaient des différences qui existent entre pauvreté rurale et pauvreté urbaine. Constatant que les pays qui ont accompli le plus de progrès dans l’élimination de la pauvreté sont ceux qui ont augmenté leurs gains en productivité agricole et qui ont développé des initiatives de travail décent en zones rurale et urbaine, elle a demandé à la représentante du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) quels sont les défis majeurs que rencontre cette organisation et quel rôle peut effectivement jouer l’éducation dans l’élimination de la pauvreté.
Relevant que la représentante de l’UNICEF invitait la communauté internationale à promouvoir une politique économique ciblant l’emploi, au lieu d’adopter des politiques ciblant le contrôle de la seule inflation, le représentant du Maroc a estimé que le genre de politique de l’emploi préconisé n’est pas envisageable dans les pays en développement. Répondant à ces questions, Mme ORTIZ a expliqué que l’étude qu’elle a évoquée se basait sur les travaux menés par plusieurs organismes de l’ONU, notamment le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Elle a indiqué qu’il revenait à chaque pays d’évaluer les options dont il dispose, au cas par cas. L’UNICEF travaille avec les gouvernements et fournit des services, notamment en matière de santé et de nutrition, a-t-elle expliqué.
Concernant l’aide publique au développement (APD), le représentant du Maroc a rappelé qu’elle avait été conçue pour permettre aux pays en développement de jeter et d’asseoir les bases d’une économie productive. Ce n’est que par la suite que les bénéfices de l’APD se sont révélés limités par la nécessité d’assurer le rétablissement des déséquilibres macroéconomiques dont souffraient les pays récipiendaires.
Appuyant les propos de M. Sassone, le représentant de la Namibie a observé que les politiques actuelles ne permettent aux gouvernements que d’essayer de traiter les symptômes de la pauvreté au lieu de s’attaquer à ses causes premières. Pour faire face au fléau, il faut modifier la structure sociale de la société, sans quoi il ne sera pas possible de surmonter la pauvreté, a confirmé M. SASSONE. Il a réaffirmé notamment que la qualité de l’emploi dont peuvent jouir les individus était un élément essentiel d’une vraie lutte contre la pauvreté et ses conséquences.
S’adressant à M. Adesina, une représentante de la société civile a demandé comment on pouvait parvenir à adopter et mettre en place une politique contraignante et intégrée de lutte contre la pauvreté. C’est seulement en ciblant les pauvres et les plus vulnérables que l’on parviendra à réduire la pauvreté, a estimé de son côté la représentante de l’Éthiopie. Le représentant du Zimbabwe a demandé pour sa part à M. Adesina de définir et expliquer de manière détaillée les fondements du concept de protection sociale basée sur un pacte social. Il lui a aussi demandé des explications sur son avis selon lequel les transferts d’argent en espèces ne contribuent pas efficacement à la lutte contre la pauvreté.
M. ADESINA a expliqué que les vraies mesures antipauvreté ne sont pas celles qui sont couramment perçues comme visant l’élimination de la pauvreté. En Afrique, ces 20 dernières années, on ne parlait pas de la pauvreté en tant que telle. Mais en y mettant l’accent sur l’éducation, les soins de santé, les infrastructures et l’emploi, on y faciliterait la réduction de la pauvreté. Mais, a-t-il déploré, si l’État n’est plus capable d’intervenir dans ces secteurs, rien ne peut vraiment être fait de manière efficace, a-t-il dit, faisant allusion à la diminution du rôle de l’État, imposée par les institutions financières internationales et les politiques de marché. Il a donc invité les États à mettre l’accent sur l’établissement d’un « pacte social », et a par ailleurs réaffirmé que les transferts en espèces, tels que le font les travailleurs migrants et autres, ne peuvent régler tous les problèmes de pauvreté dont souffrent les familles.
En guise de conclusion, M. LU MAI a invité la Commission et les pays à tirer parti des possibilités de la mondialisation. En ce qui concerne l’urbanisation croissante, il a souligné la nécessité d’aider les migrants à s’installer et à bénéficier pleinement des avantages sociaux disponibles.
Suite du débat général
M. DANIEL ANTÓNIO (Mozambique), intervenant au nom du Groupe des États d’Afrique, a déclaré que l’accès universel à la santé et à l’éducation était essentiel pour briser le cycle de la pauvreté. Il a expliqué que comme preuve de leur engagement à accélérer le développement social durable du contient, les chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine avait adopté en 2009 le Cadre de politique sociale pour l’Afrique. Le représentant a indiqué que malgré les efforts considérables déployés par les pays du continent, la « crise de développement » de l’Afrique n’avait pas fondamentalement changé à cause des crises économique, financière et alimentaire, des changements climatiques, des conflits, et de la pandémie de VIH/sida et d’autres maladies.
Le représentant du Mozambique a ensuite expliqué que la question de l’emploi avait mobilisé une attention de haut niveau au niveau politique en Afrique. Il a rappelé qu’en 2004, l’Assemblée extraordinaire des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine avait adopté la Déclaration de Ouagadougou sur l’emploi et l’atténuation de la pauvreté. En mars 2010, a-t-il ajouté, le Comité des experts africains s’est réuni à Lilongwe, au Malawi, pour étudier comment les pays africains pouvaient réaliser une croissance de qualité en adoptant des politiques de développement axées sur la promotion du développement lui-même. Ces efforts soulignent la reconnaissance du fait que la stagnation des taux de chômage au cours des trois dernières décennies en Afrique témoigne des limites des politiques de développement qui ont été préconisées au continent, a estimé M. António. Le représentant a ensuite réclamé un appui financier adéquat à l’Afrique, l’adoption de politiques cohérentes et durables, tant au niveau national qu’international, ainsi que le renforcement des partenariats. Il faut se départir qu’un cadre politique macroéconomique qui cherche essentiellement à assurer le contrôle de l’inflation et des déficits budgétaires et favoriser la dimension sociale du développement, a estimé M. António. De plus, a-t-il ajouté, les politiques fiscales doivent permettre aux pays de répondre à l’impact humain et social des crises, et de fournir à leurs populations une protection sociale capable de remettre l’Afrique sur la voie de la réalisation des OMD.
M. CONROD HUNTE (Antigua-et-Barbuda) a pris la parole au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et a relevé, dans le rapport du Secrétaire général sur l’élimination de la pauvreté, que les petites et moyennes exploitations agricoles fournissent des emplois à une majorité de la population des pays en développement. Il a aussi noté l’importance des marchés nationaux pour stimuler la productivité agricole. Cela correspond à ce qui se passe dans de nombreux pays de la CARICOM, a-t-il indiqué, où la production agricole est liée non seulement aux marchés urbains mais aussi au marché du tourisme. Il reste cependant encore beaucoup à faire pour que nos peuples reconnaissent l’importance de l’agro-industrie et de son potentiel, a dit le représentant. M. Hunte a aussi remarqué que les petites et moyennes entreprises emploient une bonne part de la main-d’œuvre urbaine et rurale, et ce, dans de nombreux pays. Ce fait doit nous inciter à intégrer davantage de personnes dans les industries du tourisme dans les Caraïbes, a-t-il dit.
Le représentant a ensuite souligné l’importance du rôle que jouent les familles pour bâtir des sociétés fortes. Il a constaté la tendance à la féminisation de la pauvreté et a lancé un appel pour que les personnes et leurs vies soient mises au centre des objectifs de développement. M. Hunte a souligné la nécessité pour chaque pays de faire participer ses citoyens à la réalisation de ces objectifs. En matière de santé, il a reconnu le défi croissant que posent les maladies non transmissibles, telles que le diabète ou le cancer, qui entraînent notamment une réduction de la productivité en milieu de travail. Si ces maladies peuvent être prévenues et contrôlées, nos États ne peuvent cependant pas y arriver seuls, a-t-il expliqué. Il a donc dit attendre avec intérêt la Réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur les maladies infectieuses qui se tiendra en septembre 2011. Enfin, M. Hunte a appelé à une coordination accrue entre les institutions des Nations Unies qui travaillent sur les questions de la jeunesse.
« Au lieu de gérer la pauvreté et ses conséquences, nous devons offrir aux populations une voie pour sortir de la pauvreté », a déclaré M. ROBERT MARKS (États-Unis). Il a expliqué que son pays s’était engagé à développer des partenariats tendant à opérer un changement radical dans les paradigmes économiques et sociaux actuels et susceptibles de déboucher sur une croissance économique mondiale. Les pays qui ont atteint l’objectif d’une croissance économique de bonne facture ont également réalisé des progrès notables sur le plan de la lutte contre la pauvreté, a-t-il relevé. Le représentant a également souligné l’importance d’investir dans les systèmes d’éducation et de santé. La démocratie ainsi qu’une gouvernance transparente et responsable sont également des éléments essentiels, a-t-il ajouté.
M. SULJUK MUSTANSAR TARAR (Pakistan) a noté que les multiples crises financière, énergétique et alimentaire qui ont affecté le monde ont eu des répercussions sérieuses sur tous les pays, et notamment au Pakistan. Notre gouvernement a vu les montants des investissements directs dont bénéficiait le Pakistan baisser, a-t-il notamment expliqué. En outre, les inondations de l’an dernier ont causé des pertes de vies et des destructions d’infrastructures importantes. Le Pakistan a présenté quatre rapports sur les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), a poursuivi le représentant. En dépit de nombreuses difficultés, il a assuré que le Gouvernement pakistanais continue à mettre les pauvres au cœur de ses stratégies de croissance. Il a cité les objectifs que s’assigne le pays dans ce domaine, comme l’amélioration de la gouvernance par la consolidation de la démocratie, la poursuite de la stabilité macroéconomique en mettant l’accent sur l’agriculture, l’investissement dans le capital humain pour assurer les services sociaux nécessaires, ou encore l’amélioration de l’autonomisation des femmes. Nous avons plusieurs programmes de protection sociale, a ajouté le représentant, citant par exemple le Programme Benazir d’appui au renforcement des revenus, qui permet de transférer des sommes d’argent en espèces aux plus pauvres. Ce Programme devrait bénéficier à 5 ou 7 millions de familles d’ici à 2012.
M. HATEM TAG-ELDIN (Égypte) a estimé que la session actuelle de la Commission devait mettre l’accent sur la nécessité de traduire les décisions prises lors du Sommet de Copenhague en résultats concrets sur le terrain, par le truchement, notamment, de programmes d’élimination de la pauvreté et de lutte contre le chômage. Il a également appelé la Commission à multiplier l’appui aux politiques nationales en la matière et à adopter des stratégies effectives pour assurer la mise en œuvre des plans d’action de l’ONU relatifs à la famille, aux jeunes, aux personnes âgées et aux personnes handicapées, tout en favorisant la coopération régionale et internationale.
Le représentant a ensuite indiqué que le Gouvernement égyptien avait fait de l’élimination de la pauvreté une de ses plus importantes priorités. Il a notamment évoqué l’adoption, en juin 2010, d’une loi sur l’assurance et les retraites, dont les dispositions visent la réforme du système de sécurité sociale du pays. De nouvelles perspectives d’emploi ont été créées avec la coopération du secteur privé, tandis que le système d’octroi de microcrédits a été renforcé, a-t-il ajouté. M. Tag-Eldin a également expliqué que les denrées de base destinées aux pauvres et aux personnes marginalisées étaient subventionnées. Il a aussi fait savoir que le nouveau Ministère pour la famille et la population assurait la mise en œuvre des plans d’action de l’ONU relatifs à la famille, aux jeunes et aux enfants.
M. LAUTARO OVALLES (Venezuela) a expliqué que l’élimination de la pauvreté passe par un remplacement des structures capitalistes. Le capitalisme entraîne un système de commerce injuste qui approfondit les inégalités entre pays développés et pays en développement, a-t-il jugé. Le représentant a ainsi plaidé en faveur de la mise en place d’une structure sociale inclusive, socialiste, humaniste, et disposant d’un système solide de protection sociale. En 12 ans de révolution bolivarienne, le Gouvernement d’Hugo Chavez a réussi à consolider les progrès sociaux au Venezuela grâce à une politique de création d’emplois, une politique de santé pour tous et une politique d’investissement social, a-t-il indiqué. Le représentant a aussi parlé de la politique de sécurité alimentaire pour tous menée par le Gouvernement vénézuélien. Les droits des populations autochtones, des personnes âgées et des personnes handicapées ont en outre été renforcés, a-t-il indiqué. Il a signalé que le taux de chômage est passé de 15% en 1998 à 6,6% en décembre 2009. Le représentant s’est, d’autre part, félicité que le Venezuela soit le pays où les inégalités sociales ont connu la plus grande diminution. Au niveau régional, il a mentionné les efforts menés avec « les pays frères », mentionnant par exemple l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA), et l’Alliance pétrolière Petrocaribe.
M. WILLEM RAMPANGILEI (Indonésie) a réclamé l’adoption de mesures capables de protéger les acquis des pays en matière de développement. Il a estimé que la promotion de l’emploi était une manière importante de s’attaquer à la pauvreté et a ensuite souligné l’importance d’assurer une bonne productivité du secteur agricole, et de donner aux pays en développement l’accès dont ils ont besoin aux marchés internationaux. Le représentant a également appelé la Commission à examiner toutes les facettes de la protection sociale et à accorder une attention particulière à l’assistance sociale.
Le représentant de l’Indonésie a ensuite expliqué qu’en matière de lutte contre la pauvreté, le Gouvernement de l’Indonésie centrait ses efforts sur un programme de développement qui favorise les pauvres, la création d’emplois et la protection de l’environnement. Il a également évoqué l’existence de programmes de microfinancement et d’un vaste éventail de programmes de protection sociale.
M. GERT ROSENTHAL (Guatemala) a indiqué que sur une population de 14 millions d’habitants dans son pays, 54% vivent en zone rurale au Guatemala. Près de la moitié de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et un cinquième dans la pauvreté extrême, a-t-il ajouté. Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, il a expliqué que le Gouvernement guatémaltèque a adopté des politiques d’autonomisation des groupes les plus vulnérables de la population, et en particulier, des autochtones. Il a parlé du Conseil de cohésion sociale du Guatemala, qui accorde la priorité au développement humain au profit des familles. En outre, nous sommes intervenus dans les domaines essentiels de la nutrition, de l’éducation et de la santé, a-t-il dit. Tous nos programmes ont eu des incidences modestes, a cependant reconnu le représentant, la pauvreté ayant reculé lentement. Les progrès les plus importants ont été constatés dans le domaine de la malnutrition, qui a nettement reculé, et dans le secteur de l’éducation, avec une forte augmentation du taux de scolarisation. Parmi les défis à relever, il a expliqué qu’il fallait surmonter la faiblesse fiscale de l’État et renverser le processus de dégradation de l’environnement.
M. GONZALO GUTIÉRREZ (Pérou) a préconisé l’adoption d’une approche fondée sur l’équité qui prenne en compte les besoins des populations exclues et vulnérables, tout en s’attaquant aux causes profondes de la pauvreté. Il est essentiel d’adopter des politiques axées sur les principes d’égalité et de transparence et fondées sur le cadre juridique du pays concerné, a-t-il recommandé. M. Gutiérrez a également appelé la communauté internationale à prêter une attention particulière à la situation des migrants. Il a ensuite expliqué que le Gouvernement péruvien assurait l’approvisionnement en eau et en électricité des zones les plus reculées du pays, tandis qu’un programme de carte nationale d’identité permettra de suivre la nutrition et la santé des enfants. Il a également fait savoir que le Pérou avait assorti ses politiques d’ouverture aux investissements et de création d’emplois à des politiques de cohésion sociale. Un programme de lutte contre la malnutrition chronique des enfants a également été mis sur pied.
M. NASSIR ABDULAZIZ AL-NASSER (Qatar) a demandé que soient honorés les engagements pris dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement et au cours des grandes Conférences sur le développement social sur la question de la lutte contre la pauvreté dans le monde. Il a expliqué que les efforts menés au Qatar dans ce domaine ont conduit le pays à un développement rapide et durable, après une étude d’ensemble réalisée en 2008 qui a précisé la vision du Gouvernement qatari jusqu’en 2030. Cette vision comporte trois piliers d’action, le deuxième concernant la protection sociale. Nous préparons maintenant une stratégie nationale pour 2011-2016, qui est très ambitieuse et qui comprend une aide pour les petites et moyennes entreprises, a ajouté le représentant. Il a aussi mentionné une autre stratégie destinée aux familles, prévue au cours de la même période, et qui souligne l’identité arabe et islamique des familles qataries. Elle vise à renforcer la participation des familles au développement ainsi que la protection contre toutes les formes d’abus, a-t-il expliqué. « Concernant les personnes handicapées, nous avons créé une commission conjointe qui regroupe des représentants de nombreux ministères », a indiqué le représentant. L’État du Qatar n’a pas seulement aidé les citoyens qataris, a ajouté le représentant qui a évoqué l’aide humanitaire et l’assistance au développement qu’a fournies son pays à de nombreux pays, en y consacrant 2 milliards de dollars pendant la période 2005-2009.
M. RODOLFO ELISEO BENÍTEZ VERSÓN (Cuba) a déploré « l’injustice et l’exclusion engendrées par l’ordre économique actuel et qui, de surcroit, laisse une part notable des pays du Sud aux marges de la communauté internationale ». Il a notamment évoqué la question de l’accès aux marchés et le problème de la dette, ainsi que la prévalence de l’analphabétisme. Il s’est ensuite insurgé contre les sommes faramineuses versées par les pays industrialisés à l’industrie de l’armement, et qui vont notamment à l’entretien de 23 000 armes nucléaires, alors que des millions de personnes continuent de vivre avec moins d’un dollar par jour.
Le représentant a ensuite fait savoir que Cuba avait réalisé de nombreuses avancées pour réaliser les OMD, « et ce malgré le blocus unilatéral criminel et injuste imposé à son encontre par les États-Unis », et de nombreuses catastrophes naturelles. Le taux de mortalité infantile à Cuba est de 4,5 pour mille naissances vivantes, et c’est un des plus bas au monde, s’est-il notamment félicité. L’analphabétisme est inexistant dans le pays, a-t-il souligné. Il faut encourager avant tout une solidarité sans condition aux niveaux mondial et national et faire valoir les principes de justice, d’équité et de respect, a-t-il recommandé.
M. KIM SOO-GWON (République de Corée) a salué l’importance du rapport du Secrétaire général sur l’élimination de la pauvreté (E/CN.5/2011/3) qui met l’accent sur l’existence d’un cycle vicieux de la pauvreté, qui est amplifié par l’insuffisance d’accès aux services de santé et d’éducation. Il s’est félicité que ce rapport souligne les liens entre changements climatiques et pauvreté. M. Kim a notamment relevé que l’investissement dans les métiers « verts » est une stratégie d’atténuation importante de la pauvreté, et elle est également susceptible de réduire la pauvreté et de faciliter l’instauration de la stabilité sociale grâce à la création d’emplois. Présentant les initiatives de son pays, il a dit que la République de Corée avait lancé en 2000 son « Système national de subsistance de base » et avait décidé d’une pension de base pour les personnes âgées, en 2008, et pour les personnes handicapées, en 2010. Il a également cité la mise en place, en 2010, d’une base de données informatiques concernant toutes les personnes ayant reçu une aide sociale. M. Kim a indiqué que le thème du développement a été abordé pour la première fois par le G-20 l’année dernière à l’initiative de son pays lors du Sommet de Séoul. Il a également précisé que la République de Corée était devenue, en 2010, le vingt-quatrième membre du Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le premier qui ait, autrefois, fait partie du groupe des pays les moins avancés (PMA). Il a rappelé que son pays accueillera en novembre le quatrième Forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide au développement, (HLF-4) en précisant que son expérience d’ancien PMA lui sera très utile pour renforcer la coopération aux fins de la lutte contre la pauvreté.
M. NARCÍS CASAL DE FONSDEVIELA (Andorre) a appelé la communauté internationale à trouver des réponses globales à la pauvreté, expliquant que le fait d’atteindre l’OMD nº1 permettrait de progresser dans d’autres objectifs, comme ceux ayant trait à la faim et à la santé. La lutte contre la pauvreté ne peut pas se limiter à la croissance économique, a-t-il ajouté. Il faut notamment arriver à créer des emplois et à éliminer les inégalités sociales qui perpétuent la pauvreté. En ce qui concerne la Principauté d’Andorre, la crise financière a eu un impact important sur son système économique, a-t-il reconnu. Il a expliqué comment le Gouvernement andorran s’est efforcé de répondre aux nouveaux problèmes qui se sont posés en améliorant les services sociaux offerts à sa population. Nous avons approuvé un plan d’ensemble de lutte contre le chômage, ainsi qu’un plan d’action contre l’inégalité, et nous avons réorganisé nos services de santé. Andorre a aussi adopté des mesures transversales et cherche à réduire les inégalités entre les citoyens, a dit le représentant. En outre, le pays consacre une part de son budget à l’aide au développement afin de participer, à son échelle, et selon ses capacités, au développement d’autres pays, comme la République dominicaine, et à l’aide humanitaire, notamment en Haïti et au Pakistan.
M. MOHAMMAD KHAZAEE (République islamique d’Iran) a estimé que la situation actuelle illustrait ce qui n’allait pas avec l’architecture financière et économique mondiale. Ce sont les pauvres qui souffrent le plus de l’adoption de politiques néolibérales, erronées et irresponsables, s’est-il indigné, pour réclamer ensuite le transfert de technologies créatrices d’emplois et la levée des subventions agricoles des pays développés. Il a engagé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour s’assurer que l’ensemble des segments de la société, notamment les jeunes, les personnes âgées et les personnes handicapées, puissent réaliser tout leur potentiel.
M. Khazaee a ensuite fait savoir que le Gouvernement iranien accordait une attention particulière à l’élimination de la pauvreté, en tant qu’élément central de l’amélioration du développement humain. Il a notamment expliqué que l’Iran cherchait à augmenter la sécurité de l’emploi par le biais de l’augmentation de l’assurance chômage et qu’il facilitait l’accès à l’éducation et la construction de logements bon marché, entre autres mesures. Le représentant a également fait savoir qu’entre 1990 et 2005, l’Iran avait réussi à diviser par 2 le nombre de personnes souffrant de la faim sur son territoire.
M. LOETO DILAMPI (Botswana) a indiqué que si son pays a accompli des progrès modestes en termes de croissance économique et de développement humain depuis 40 ans, la pauvreté y demeure néanmoins un défi majeur, avec un tiers de la population qui y vit en dessous du seuil de pauvreté. La pauvreté est plus marquée en zone rurale, a-t-il précisé. Outre les facteurs classiques de pauvreté, il a mentionné les sécheresses et la pandémie de VIH/sida qui aggravent la situation des pauvres. Le Gouvernement du Botswana a donc développé une Stratégie nationale pour l’élimination de la pauvreté qui se concentre sur la sécurité alimentaire, la fourniture de moyens de subsistance et le renforcement des capacités pour les pauvres, grâce à un investissement social dans les services et les infrastructures, comme les écoles et les hôpitaux, a indiqué M. Dilampi. Il a aussi dit que le Gouvernement a mis en place un filet de sécurité sociale et qu’il a ciblé en particulier les jeunes, en leur offrant notamment des possibilités d’emploi. En outre, le Botswana a engagé le secteur privé à entreprendre des initiatives de lutte contre la pauvreté. M. Dilampi a aussi mentionné les efforts menés en matière d’éducation pour augmenter le nombre d’étudiants à l’université.
Mme NOA FURMAN (Israël) a insisté sur l’importance de l’accès à la santé et à l’éducation comme outils efficaces de lutte contre la pauvreté. En matière d’aide au développement, la représentante a indiqué qu’Israël centre ses efforts en premier lieu sur le renforcement des capacités des pays qu’il assiste. Tournant ensuite son attention sur le phénomène de la féminisation de la pauvreté, la représentante a affirmé que l’autonomisation des femmes était un élément central de la lutte contre la pauvreté. Elle a ensuite évoqué les activités du Centre de formation international Golda Meir-Mount Carmel, qui va accueillir, en 2011, en partenariat avec l’UNESCO, une conférence sur les femmes dirigeantes.
M. JAROSLAV KOVÁČ, Ministre du travail, des affaires sociales et de la famille de la Slovaquie, a indiqué que pour combattre la pauvreté et l’exclusion sociale, le Gouvernement slovaque a créé un espace pour mieux lier l’intégration sociale et la protection sociale, d’une part, et l’emploi et une coopération renforcée avec toutes les parties prenantes, dont la société civile, d’autre part. Il a détaillé les efforts nationaux que déploie le Gouvernement slovaque et qui sont résolument inscrits dans la politique plus générale de l’Union européenne. La Slovaquie, a-t-il souligné, s’est fixée pour objectif de sortir au moins 170 000 personnes de la pauvreté et de l’exclusion sociale d’ici à 2020. En 2008, 1,1 million de personnes étaient déjà dans ce cas, soit 20,6% de la population nationale, a dit M. Kovač.
Toutefois, a-t-il reconnu, la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale demeure un défi commun à relever pour l’administration publique, les autorités locales, les organisations non gouvernementales (ONG), les associations de la société civile et l’Église. Il est important, a-t-il dit, que l’Année européenne de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, proclamée en 2010, ne s’arrête pas à la fin de 2011. Elle doit, au contraire, devenir un point de départ pour la mobilisation de la société dans son entier.
Mme MONIA ALSALEH (République arabe syrienne) a expliqué les mesures prises par son pays pour remédier à la pauvreté et visant en particulier à atteindre l’objectif de créer une économie équilibrée permettant une répartition juste de la richesse. Ces mesures cherchent notamment à élever le niveau de vie dans les zones les plus défavorisées. Le Gouvernement syrien s’est attaché à développer les infrastructures et à mettre en œuvre des programmes visant toutes les catégories vulnérables de la société, comme les jeunes, les personnes handicapées, les migrants et les réfugiés, a expliqué la représentante. Le Gouvernement syrien travaille aussi à offrir davantage de possibilités à chaque famille syrienne et à donner à chacun la possibilité de trouver un travail décent. La représentante a regretté que les rapports du Secrétaire général sur la pauvreté, qui sont soumis à la Commission, ne mentionnent pas les effets négatifs qu’a sur le développement social l’occupation par Israël de plusieurs territoires arabes, et notamment l’utilisation contre les populations d’armes comme les bombes à fragmentation.
M. BUI THE GIANG (Viet Nam) s’est dit préoccupé par l’inégalité qui caractérise la distribution des ressources non monétaires et par la perspective que d’ici à 2015, des centaines de millions de personnes à travers le monde vivront dans une pauvreté extrême même quand leur pays aura réalisé des avancées notables en matière de développement ou de lutte contre la pauvreté. Il a préconisé l’adoption de politiques qui favorisent la création d’emplois et qui s’attaquent aux problèmes posés par les changements climatiques, entre autres. Le représentant a indiqué que le Gouvernement du Viet Nam avait décidé d’ajuster le critère de définition du statut de pauvreté entre 2011 et 2015, ce qui a placé le taux actuel de pauvreté dans le pays à 15%. Il a ensuite passé en revue les diverses politiques de lutte contre la pauvreté lancées dans son pays, notamment des programmes de subventions scolaires et de logement bon marché qui ont permis au Viet Nam d’enregistrer une croissance de 6,78%. Il a également signalé que l’éducation pour tous jouait un rôle critique pour assurer l’intégration et la stabilité sociale. M. Bui a également cité les mérites de l’échange d’expertise et du transfert de technologies dans la lutte contre la pauvreté.
M. ANDREW GOLEDZINOWSKI (Australie) s’est dit très préoccupé par les vulnérabilités et difficultés que rencontrent les pays les moins avancés (PMA). L’Australie, en tant que vice-présidente du Comité préparatoire intergouvernemental de la quatrième Conférence des Nations Unies sur les PMA, qui se tiendra en mai prochain à Istanbul, espère que le futur programme d’action d’Istanbul soulignera l’importance d’une appropriation nationale et d’un leadership national en matière de lutte contre la pauvreté, a-t-il dit. Le représentant a préconisé de renforcer les capacités productive et commerciale des PMA et à axer les efforts dans ces pays sur le développement humain. Il a jugé important de renforcer les mesures qui permettront aux PMA de parvenir à une croissance économique équitable. Cela passe par l’amélioration de la qualité et de la quantité des infrastructures, l’amélioration des conditions d’investissement aux niveaux national et international, et un meilleur accès des produits des PMA aux marchés internationaux. La productivité agricole et le développement rural sont aussi des éléments essentiels de la lutte contre la pauvreté, a-t-il ajouté. L’Australie, qui est aussi un pays agricole, va dépenser 1,8 milliards de dollars pour assurer la sécurité alimentaire mondiale au cours des cinq prochaines années, a-t-il indiqué. Nous sommes en passe de devenir un des plus grands donateurs de l’OCDE, a-t-il ensuite annoncé, avant de rappeler que l’Australie fournit aux PMA un accès libre à ses marchés, sans taxe ni droit de douane, depuis 2003.
M. KURT BODEWIG, du Forum des pays baltes, a expliqué que son organisation travaille en faveur de la promotion de la croissance et de la stabilité au sein des nations. Lutter contre la pauvreté, c’est promouvoir les droits de l’homme, a-t-il affirmé. Notre stratégie consiste à aider les pays à réaliser leurs objectifs à long terme en matière de développement en adoptant un model économique durable capable de créer des moyens d’existence plus durables au bénéfice de leurs populations, a-t-il expliqué. Il a cité les mérites de la coopération dans le domaine de la santé, relevant que la mauvaise santé était une des conséquences de la pauvreté et une cause et un facteur de ralentissement de l’économie.
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