En cours au Siège de l'ONU

DH/5012

L’Instance des peuples autochtones ouvre sa session sur une bonne nouvelle, l’« appui » de la Nouvelle-Zélande à la Déclaration de l’ONU sur les droits de ces peuples

19/04/2010
Conseil économique et socialDH/5012
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Instance permanente sur les questions autochtones

Neuvième session

1re et 2e séances – matin et après-midi


L’INSTANCE DES PEUPLES AUTOCHTONES OUVRE SA SESSION SUR UNE BONNE NOUVELLE, L’« APPUI »

DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE À LA DÉCLARATION DE L’ONU SUR LES DROITS DE CES PEUPLES


L’Instance permanente sur les questions autochtones a ouvert aujourd’hui sa neuvième session sur une bonne nouvelle.  C’est sous une impressionnante salve d’applaudissements que le Ministre néo-zélandais des affaires maories a annoncé la décision de la Nouvelle-Zélande d’« appuyer » la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.


La Nouvelle-Zélande a fait ce choix pour affirmer les droits fondamentaux des Maoris et exprimer ses « nouvelles et largement soutenues » aspirations, a déclaré Pita Sharples, à l’ouverture d’une session qui a pour thème cette année « Peuples autochtones: développement, culture, identité: les articles 3 et 32 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ».


Le Ministre néo-zélandais a souligné que la Déclaration des Nations Unies consacre des principes tout à fait conformes aux devoirs et principes énoncés dans le Traité de Waitangi, signé en 1840 entre les Maoris et la Couronne. 


S’agissant de la restitution des terres et de la gestion des ressources traditionnelles, Pita Sharples a précisé que son pays maintiendra le régime juridique actuel qui se fonde sur « la nécessité de se montrer juste et la capacité du pays à payer des indemnisations ». 


Pour ce qui est de la participation des populations autochtones aux processus de prise de décisions, il a invoqué l’arsenal des mesures existantes.  « Nous continuerons ce dialogue dans le cadre offert par le Traité et la Constitution néo-zélandaise », a encore précisé le Ministre. 


Jusqu’à présent, la Nouvelle-Zélande figurait parmi les quatre États Membres, à savoir l’Australie, le Canada et les États-Unis, à s’être opposés à l’adoption, en 2007, de la Déclaration des Nations Unies, considérée comme historique par de nombreuses parties car il affirme le droit des peuples autochtones à l’autodétermination.


Le thème du « développement, de la culture et de l’identité » choisi, cette année, a permis au Secrétaire général de l’ONU d’attirer l’attention sur des « statistiques alarmantes ».


Les peuples autochtones représentent 5% de la population mondiale mais un tiers des pauvres de la planète et souffrent plus que les autres de la pauvreté, des problèmes de santé, de la criminalité et des violations des droits de l’homme, a indiqué Ban Ki-moon dans son discours d’ouverture. 


« Nous avons besoin d’un développement qui s’appuie sur les valeurs de réciprocité, de solidarité et de collectivité et qui permette aux peuples autochtones d’exercer leur droit à l’autodétermination par une participation égale aux processus de prise de décisions », a-t-il commenté.


Le Secrétaire général a notamment entendu son adjoint aux affaires économiques et sociales, Sha Zukang, regretter que le développement fondé sur la libéralisation se fasse parfois au détriment des peuples autochtones, comme en témoignent les violations des droits de propriété et la confiscation des terres. 


La vingtaine d’orateurs a préconisé « l’institutionnalisation » de la voix des peuples autochtones pour les sortir de leur « invisibilité ».  De nombreux participants ont aussi réclamé des données fiables pour surmonter, comme l’a dit l’Administratrice associée du PNUD, « la tyrannie de la moyenne » qui fait que, dans certains pays, de bons indicateurs des Objectifs du Millénaire du développement (OMD) peuvent côtoyer de très mauvais chiffres de développement humain dans la population autochtone.    


Les travaux ont commencé par le tambour de Tiokasin Ghosthorse, Sioux du Dakota du Sud et la bénédiction traditionnelle de Todadaho Sid Hill, Chef de la nation Onondaga de l’État de New York.


Le Bureau de l’Instance a élu par acclamation Carlos Mamani Condori, Président de la neuvième session des ses travaux.  Hassan Id Balkassm, Bartolome Clavero Salvador, Michael Dodson et Onya Gonnella Frichner ont été nommés Vice-Présidents tandis que Paimaneh Hasteh assumera les fonctions de Rapporteur.


L’Instance permanente poursuivra ses travaux demain, mardi 20 avril, à partir de 10 heures.


Déclarations liminaires


M. BAN KI-MOON, Secrétaire général des Nations Unies, a déclaré qu’en matière de respect et des droits des peuples autochtones, le monde ne peut pas encore se reposer sur ses lauriers.  Le tout premier rapport sur la situation des droits des autochtones dans le monde, a rappelé le Secrétaire général, donne des « statistiques alarmantes ».  Les peuples autochtones souffrent de taux élevés de pauvreté, de problèmes de santé, de criminalité et de violations des droits de l’homme.  Ils représentent 5% de la population mondiale mais un tiers des pauvres de la planète.


Un Indien des États-Unis a 600 fois plus de chance de contracter la tuberculose que la population américaine en général, tandis qu’un enfant autochtone en Australie peut s’attendre à vivre 20 ans de moins que ses compatriotes, a-t-il signalé.  Le Secrétaire général a ajouté que, chaque jour, les peuples autochtones sont confrontés au problème de la violence et de la brutalité.  Leurs terres continuent à être confisquées alors que les changements climatiques, les conflits armés, le manque d’accès à l’éducation et la discrimination menacent leurs cultures, leurs langues et leurs modes de vie.


« Ce n’est pas seulement une tragédie pour les populations autochtones mais aussi pour la planète tout entière », a ajouté M. Ban.  La diversité, a-t-il dit, c’est une force pour les cultures et les langues tout autant que pour les écosystèmes.  Selon les prévisions, 90% des langues de la planète sont appelées à disparaître dans les 100 prochaines années, a souligné le Secrétaire général, en arguant que cette perte porte atteinte à un élément essentiel de l’identité d’un groupe.


Le Secrétaire général s’est donc félicité de ce que, cette année, les travaux de l’Instance soient axés sur le thème « Peuples autochtones: développement, culture, identité ».  « Nous avons besoin d’un développement qui s’appuie sur les valeurs de réciprocité, de solidarité et de collectivité et qui permette aux peuples autochtones d’exercer leur droit à l’autodétermination par une participation égale aux processus de prise de décisions », a conclu Ban Ki-moon.


M. ALI ABDUSSALAM TREKI, Président de l’Assemblée générale, a souligné, à son tour, que la question de l’impact des politiques de développement sur la culture et l’identité des peuples autochtones est au cœur des débats, cette année.  Pour avoir trop souvent vu leurs terres confisquées, leur culture niée et leurs peuples marginalisés, les peuples autochtones méritent que la communauté internationale se penche sur cette question, a estimé M. Treki.  Il a appelé à « une coopération universelle basée sur la bonne foi » pour rendre possible la protection des droits des peuples autochtones, avant d’ajouter que cela permettra également d’enrichir nos sociétés et de préserver notre environnement.


M. CARLOS MAMANI CONDORI, Président de l’Instance permanente des peuples autochtones, a estimé que les débats sur le thème « Peuples autochtones: développement, culture, identité, liés aux articles 3 et 32 de la Déclaration sur les droits de ces peuples, viennent à point nommé pour réfléchir à ce que signifie « développement, culture et identité » et en quoi est-ce différent des paradigmes actuels du développement.  Rappelant que la Journée internationale de la terre nourricière sera célébrée le 22 avril, le Président a estimé que la relation qu’ont les peuples autochtones avec la Terre nourricière pourrait servir d’exemple face au « défi mondial » des changements climatiques.


Revenant au thème de cette neuvième session, le Président de l’Instance a rappelé que l’un des objectifs de la deuxième Décennie des Nations Unies pour les populations autochtones était de redéfinir le développement du point de vue de l’équité et d’une manière culturellement appropriée, à savoir le développement sous l’angle de l’identité.


Notant les nombreux instruments de l’ONU sur la relation entre développement et droits de l’homme, y compris ceux des peuples autochtones, le Président a espéré que cette session permettra de démontrer que le développement au service de la culture et de l’identité était non seulement un atout pour les populations autochtones, mais aussi pour l’ensemble d’une planète qui fait face aujourd’hui à la mondialisation et à la crise économique.  Le Président a conclu sur le programme de travail des deux prochaines semaines.


M. SHA ZUKANG, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a salué l’engagement de plus en plus marqué des États Membres en faveur de l’Instance permanente sur les questions autochtones qui a été créée en 2000, et dont les travaux ont permis l’adoption de la Déclaration des droits des peuples autochtones de l’ONU en 2007, la nomination d’un Rapporteur spécial sur la situation des droits de ces peuples et la création d’un Mécanisme d’experts sur lesdits droits.  Cet engagement se traduit également par le nombre record de rapports sur les questions autochtones soumis par 15 États Membres, cette année.


En dépit des progrès importants, M. Zukang a reconnu que la situation des peuples autochtones dans certaines régions du monde reste critique et que ces peuples continuent d’être victimes de marginalisation et de pauvreté extrême.  Il a également regretté que le développement se fasse parfois au détriment du bien-être de ces peuples, citant à titre d’exemple les violations des droits de propriété.


Fort de ce constat, les travaux de l’Instance seront consacrés cette année à l’impact des politiques de développement sur la culture et l’identité des peuples autochtones, a-t-il souligné.  Il a encouragé les États Membres à essayer de trouver des moyens permettant d’intégrer les approches et visions différentes des peuples autochtones dans les programmes de développement aux niveaux national, régional et international.


Comment peut-on réintégrer les anciennes pratiques agricoles dans les technologies modernes?  Comment les gouvernements peuvent-ils assurer des services de santé aux peuples autochtones, tout en respectant leurs croyances et pratiques spirituelles?  Autant de questions qui méritent de trouver réponse pour M. Zukang qui a également mis l’accent sur la nécessité de prendre en compte les préoccupations des femmes et des enfants dans les travaux de cette session, soulignant que les articles 3 et 32 de la Déclaration pertinente des Nations Unies pourront servir de référence à ces discussions.


M. Zukang a également rappelé que le nouveau processus de travail de l’Instance prévoit un dialogue approfondi avec les différents organismes des Nations Unies, soulignant que cette année ce dialogue se fera avec le secrétariat de la Convention sur la diversité biologique.  Par ailleurs, dans le cadre des discussions avec les États Membres, il y aura un dialogue avec les gouvernements de la Bolivie et du Paraguay sur les conditions de vie des populations autochtones dans la région du Chaco.


M. AHMED DJOGHLAF, Secrétaire exécutif du secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, a rappelé, à son tour, la célébration, le 22 avril prochain, de la Journée mondiale de la Terre nourricière, avant de saluer la complémentarité entre le thème de cette session et d’autres célébrations cette année, celle de « l’Année internationale de la diversité biologique », ainsi que de « l’Année internationale du rapprochement des cultures ».


La célébration de l’Année internationale de la diversité biologique ne peut se faire sans les connaissances des peuples autochtones, a-t-il dit, en insistant sur le fait que « la promotion et la protection de la diversité culturelle et biologique représente une occasion unique d’unir nos efforts et de coopérer ».  La dixième Conférence des États parties à la Convention, qui aura lieu en octobre 2010 à Nagoya, devrait déboucher sur l’adoption d’un cadre international pour l’accès aux ressources génétiques et au partage des bénéfices.


À cet égard, a noté M. Djoghlaf, on ne saurait assez insister sur l’importance des connaissances traditionnelles, ce qui justifie la participation active des peuples autochtones à ces négociations.  Dans le cadre des préparatifs de la Conférence de Nagoya, il y aura une Conférence internationale sur la diversité culturelle et biologique, les 9 et 10 juin prochains sur le thème « Vivre en harmonie avec la nature, se préparer pour l’avenir », a également rappelé l’intervenant.


M. HAMIDON ALI, Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a tout d’abord expliqué que cette année, l’Examen ministériel annuel de l’ECOSOC serait consacré à la « mise en œuvre des objectifs et engagements convenus sur le plan international en matière d’égalité entre les sexes et d’émancipation des femmes ».  Évoquant « l’excellent travail » réalisé par l’Instance permanente en ce qui concerne la situation des femmes autochtones, il a attendu avec impatience la contribution de cette Instance à la session 2010.


Le Président a ensuite indiqué que le nombre d’ONG jouissant du statut consultatif auprès de l’ECOSOC était passé de 41 en 1946 à 3 187 de nos jours.  Il ne fait aucun doute, a-t-il expliqué, que le travail de l’Instance est particulièrement favorable au renforcement des liens entre les États Membres, le système des Nations Unies et les organisations autochtones du monde.  Les sessions de l’Instance, a-t-il précisé, représentent la manifestation de la société civile qui attire le plus de monde dans tout le système des Nations Unies.  M. Ali a de plus affirmé que le thème choisi cette année était particulièrement pertinent, non seulement pour les populations autochtones mais également pour les pays en développement confrontés à la mondialisation.


M. PITA SHARPLES, Ministre des affaires maories de la Nouvelle-Zélande, a annoncé, sous une impressionnante salve d’applaudissements, que le Gouvernement néo-zélandais venait de changer sa position et appuyait désormais la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  Il a rappelé que lors que l’adoption de ce texte, en 2007, son pays comptait parmi les quatre qui s’y étaient opposés.


La Nouvelle-Zélande appuie à présent la Déclaration, à la fois pour affirmer les droits fondamentaux et pour exprimer ses « nouvelles et largement soutenues » aspirations.  Il a notamment expliqué que les Maoris occupaient un statut spécial en Nouvelle-Zélande et que les droits et la culture autochtone étaient d’une importance fondamentale pour l’identité de la nation.  Le Ministre a ensuite affirmé que la Déclaration des Nations Unies consacre des principes tout à fait conformes aux devoirs et principes énoncés dans le Traité de Waitangi de 1840.


Le Ministre a souligné qu’en ce qui concerne les droits à la terre et la restitution des terres et ressources traditionnelles consacrées dans la Déclaration de l’ONU, la Nouvelle-Zélande avait adopté sa propre approche qui respecte la relation « importante » qu’ont les Maoris avec leurs terres et leurs ressources mais qui maintient aussi, et continuera de maintenir, le régime juridique actuel de la propriété et de la gestion des terres et des ressources naturelles.


Le Ministre a précisé que de nombreux groupes maoris avaient déjà bénéficié du transfert d’un nombre « considérable » de terres, de forêts et de pêcheries, conformément au Traité de Waitangi.  D’autres groupes sont d’ailleurs en train de négocier avec le Gouvernement.  Pour le Ministre, ces règlements contribuent au rétablissement d’une base économique pour le développement.  Les règlements se font, a-t-il avoué, en fonction de la nécessité de se montrer juste envers tous et de la capacité du pays à payer des indemnisations.


Pour ce qui est de la participation des populations autochtones au processus de prise de décisions, M. Sharples a attiré l’attention sur l’arsenal de mesures qui est déjà mis en place dans son pays.  Là encore, a-t-il poursuivi, le dialogue se fonde sur le Traité.  Les Maoris sont très actifs dans le développement de réponses novatrices aux questions qui ont une forte perspective autochtone.  Nous continuerons ce dialogue dans le cadre offert par le Traité et la Constitution néo-zélandaise, a dit le Ministre.


L’appui de la Nouvelle-Zélande à la Déclaration est l’occasion de réaffirmer la position culturelle et historique spéciale des Maoris dans le pays.  Il reflète la volonté de travailler ensemble à la recherche de solutions et souligne l’importance de la relation entre les Maoris et la Couronne, en vertu du Traité de Waitangi, a conclu le Ministre.


Débat sur le thème spécial de l’année: « Peuples autochtones: développement, culture, identité: les articles 3 et 32 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones »


Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, (Philippines), membre de l’Instance, a présenté le rapport du Groupe d’experts internationaux sur le thème spécial.  Elle a indiqué que le Groupe, qui s’est réuni du 12 au 14 janvier 2010, s’est penché sur l’impact des modes actuels du développement sur les peuples autochtones.  Les experts ont constaté que le paradigme économique basé sur la libéralisation économique et le libre-échange ne profite pas aux peuples autochtones et conduit souvent à la surexploitation et à la destruction de leur environnement ancestral.  L’économie de marché a surexploité les ressources naturelles et l’environnement; faisant des peuples autochtones des « obstacles » au développement.


Pour le Groupe d’experts, les peuples autochtones doivent développer leur propre paradigme de développement économique reflétant leur vision, leur perspective et leur identité.  Prenant note des progrès réalisés au cours de la dernière décennie, notamment l’adoption de traités et déclarations visant à protéger les droits des peuples autochtones, les experts ont reconnu que la communauté internationale était désormais davantage à leur écoute.


Il est essentiel, ont dit les experts, de préserver les connaissances traditionnelles des peuples autochtones; les recherches dans ce domaine pouvant constituer un moyen d’émancipation de ces peuples.  Les experts ont remis en question l’hégémonie du système de recherches occidentales.


Mme SUSANNE SCHNUTTGEN, Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture – (UNESCO), qui présentait le rapport du Groupe d’appui interinstitutions sur un développement respectueux de la culture, a expliqué que les participants à cette réunion avaient examiné la manière dont la question du développement avait évolué tout au long de l’histoire des Nations Unies pour devenir plus respectueuse des droits de l’homme.  Il n’y a pas un seul model sur lequel la stratégie du développement doit être basée, a estimé la représentante, pour qui la culture est un atout et non pas un obstacle au développement.


La participation et la liberté de choisir sont des piliers essentiels du développement au service de la culture, a ajouté Mme Schnuttgen, pour qui une approche beaucoup plus large à la question du développement mérite d’être adoptée.  Elle a indiqué que les agences de l’ONU étaient particulièrement actives, s’agissant de la préservation des moyens de subsistance des populations autochtones, de la protection de la biodiversité, de l’adaptation et de l’atténuation aux effets des changements climatiques et de la promotion des langues maternelles et de l’éducation interculturelle, entre autres.


Mme Schnuttgen a affirmé que le droit à l’autodétermination était central à la question du développement, avant d’attirer l’attention sur le fait que le Groupe d’appui souligne la nécessité de donner aux autochtones les moyens de pouvoir participer aux processus de prise de décisions.  Elle a relevé que nombreux sont les pays qui n’ont toujours pas reconnu ni politiquement ni juridiquement les droits des populations autochtones, ce qui risque d’exclure les populations autochtones des processus de prise de décisions.


Elle a réclamé des engagements institutionnels garantissant le respect de la vision des peuples, ainsi que l’intégration de leurs droits dans les programmes de l’ONU.  Il s’agit d’assurer l’indivisibilité de tous les droits, y compris le droit à l’autodétermination et le droit à l’égalité entre les sexes.


Mme REBECCA GRYNSPAN, Administratrice associée du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a relevé que depuis 2004, bien des mesures ont été prises au sein du système des Nations Unies pour faire avancer la cause des peuples autochtones et garantir le respect de leur culture et de leur identité.  Pour le PNUD, la liberté culturelle est un aspect central du développement humain a-t-elle affirmé, avant de regretter que les peuples autochtones ne soient toujours pas en mesure de jouir de cette liberté.  Elle attribue ce fait à l’ignorance générale des préoccupations des peuples autochtones.  Ils ne souffrent pas simplement de marginalisation et de pauvreté mais aussi de l’invisibilité de leur culture, a estimé Mme Grynspan, qui a invité les gouvernements à formuler des politiques pour inverser cette tendance.


L’Administratrice a souligné que cela passe par la représentation des autochtones dans toutes les institutions nationales.  Il est important de leur garantir l’accès à l’éducation et à la santé.  Le PNUD, a-t-elle assuré, œuvre contre ce qu’on appelle parfois « la tyrannie des moyennes » qui fait que les statistiques nationales passent outre la réalité des minorités dont les peuples autochtones.  Il faut des données ventilées pour pouvoir tenir compte des spécificités des différents groupes ethniques dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, a-t-elle dit, par exemple.


Mme AMY MUEDIN, Organisation internationale pour les migrations – (OIM), a souligné que les autochtones migrants subissent trop souvent des pressions pour s’assimiler aux communautés non-autochtones alors qu’en migrant et en envoyant des fonds, ils garantissent la pérennité de leur mode de vie ancestral.  Même si elle a contribué à faciliter leurs déplacements, et en particulier du milieu rural au milieu urbain, la mondialisation a compromis la vie des peuples autochtones à bien des égards, a dit la représentante.  Les migrations conduisent souvent à une dilution des coutumes et des traditions, s’est-elle expliquée, avant d’appeler à un système de protections spéciales.  Au-delà des protections, il faut promouvoir et encourager la connaissance et la compréhension mutuelles entre autochtones et non-autochtones.  L’OIM travaille à l’intégration d’une approche spécifique aux différents groupes ethniques dans les politiques et programmes nationaux en matière de migrations.


Mme BIRGITTE FEIRING, Organisation internationale du Travail – (OIT), a attribué l’impossibilité pour les populations autochtones à jouir de leur droit de faire entendre leurs priorités en matière de développement, au manque de reconnaissance constitutionnelle et juridique, d’institutions adéquates, de politiques et programmes pertinents et de ressources.  L’OIT, a-t-elle dit, établit actuellement un cadre de suivi cohérent pour faire le meilleur usage possible des mécanismes institutionnels existants.  Elle a évoqué l’existence d’un programme régional d’appui au développement des populations autochtones en Amérique latine et des programmes sous-régionaux en Afrique et en Asie.


Elle a estimé que la Déclaration de Paris et le Programme d'action d'Accra sur l’efficacité de l’aide, risquent de limiter la possibilité d’accorder des fonds aux populations autochtones ou d’assortir l’aide de conditionnalités liées au respect de leurs droits.  La réforme de l’architecture de l’aide n’offre aucun garde-fou pour s’assurer que l’« efficacité » ne mettra pas en péril l’approche du développement fondée sur les droits des populations autochtones.  La représentante a notamment prévenu qu’à moins de développer des mécanismes destinés à garantir leur participation effective, les populations autochtones risquaient d’être davantage exclues des processus de développement.  La Déclaration et la Convention 169 de l’OIT doivent devenir la norme des politiques nationales et de la coopération au développement, a-t-elle affirmé.


Mme SHARON BRENNEN-HAYLOCK, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture – (FAO), a souligné qu’à bien des égards, la diversité biologique et culturelle va de pair avec la sécurité alimentaire et expliqué que c’est pour cela que la problématique des peuples autochtones est désormais intégrée dans les approches et programmes de la FAO.  Parmi les exemples, elle a cité l’Initiative des systèmes de patrimoines agricoles mondiaux (GIAHS).  La FAO a également travaillé sur12 systèmes alimentaires autochtones dans le monde pour démontrer la valeur nutritionnelle, spirituelle et culturelle d’une alimentation traditionnelle par rapport à une alimentation moderne fondée sur l’homogénéisation des produits agricoles.


Mme ELISA CONQUI MOLLO (Bolivie), membre de l’Instance, a déclaré que la question du bien-être devait être le fondement même du paradigme du développement des peuples autochtones.  Elle a salué les efforts déployés par les gouvernements de la Bolivie et de l’Équateur pour inclure ce concept dans leur plan de développement.  Elle a, à son tour, souligné les lacunes des systèmes actuels de collecte de données; réclamant, une nouvelle fois, le changement des indicateurs nationaux relatifs aux OMD et des mesures spécifiques en faveur des peuples autochtones.


M. BARTOLOMÉ CLAVERO (Espagne), membre de l’Instance, a remarqué les différences d’interprétation des concepts de « développement » et de « développement humain ».  Il s’est félicité de ce que le PNUD et l’OIT envisagent les peuples autochtones du point de vue de leurs libertés, de leur culture et de leur droit au développement humain.  Il a également partagé l’avis selon lequel la visibilité des peuples autochtones dépend largement de leur présence dans les institutions nationales.


Mme TONYA GONNELLA FRICHNER (États-Unis), membre de l’Instance, a estimé qu’il était essentiel pour les populations autochtones de participer au travail du Représentant spécial et d’adopter un code de conduite.  Elle a également proposé que l’Instance publie un second volume sur l’état des peuples autochtones, pour ensuite attirer l’attention sur l’importance que revêt la collecte de données.


Mme LUZ ANGELA MELO, Fonds des Nations Unies pour la population – (FNUAP), a voulu que la session de l’Instance débouche sur un « ferme consensus » sur la reconnaissance de la perspective autochtone comme une contribution essentielle au réexamen des principaux paradigmes actuels de développement.  Elle a noté les « écarts importants » entre les moyennes nationales de la réalisation des OMD et la situation des populations autochtones, en particulier les femmes.  Les autochtones sont plus pauvres, ont plus de maladies, sont moins éduqués et souffrent de taux plus importants de mortalités maternelle et infantile ».


La représentante a aussi déploré la faiblesse des données alors que « sans données, on ne peut évaluer les progrès accomplis ».  Elle a indiqué que le FNUAP avait fait de la situation des populations autochtones un des thèmes clefs du recensement de la population et de l'habitat, en 2010.  Le Fonds procède à une analyse de la situation en Amérique latine et en Asie du Sud-Est, entre autres.


Mme Melo a plaidé pour le respect et la protection des droits sexuels et reproductifs des populations autochtones, en préservant leurs notions du bien-être, de la maladie, de l’accouchement et de la naissance.  La façon dont les populations autochtones conçoivent le monde est essentielle à leur identité et les politiques en matière de développement doivent les refléter et les renforcer, a-t-elle estimé.  Concluant sur la « complexité » du phénomène de mortalité maternelle, la représentante a estimé qu’outre des soins de santé reproductive de qualité, le personnel médical devait savoir exploiter des éléments culturels pour mettre à l’aise les femmes autochtones et leur famille.


Mme TRISHA RIEDY, Institut des Nations Unies pour la formation et la recherche – (UNITAR), a présenté le Programme de formation pour améliorer les capacités de prévention des conflits et de consolidation de la paix des peuples autochtones.  Ce programme a été mis en place en l’an 2000, à la demande des représentants de ces peuples et pour donner suite aux recommandations du Rapporteur spécial qui avait souligné la nécessité de renforcer les capacités de négociation des peuples autochtones et le dialogue interculturel.  La marginalisation et la multiplication des conflits liés à la propriété et à l’accès aux ressources naturelles sont deux thèmes extrêmement importants pour les peuples autochtones.


La vocation du Programme est de donner aux représentants des peuples autochtones les moyens de mener des négociations fructueuses avec les autorités nationales et régionales et de faire entendre leur voix.  L’UNITAR cherche à faire activement participer à ce Programme les femmes autochtones qui représentent 40% des participants.  À ce jour, 374 représentants des peuples autochtones du monde entier ont suivi le Programme.


M. WERNER OBERRMEYR, Organisation mondiale de la santé – (OMS), a fait part de ses préoccupations face à l’état de santé des peuples autochtones, avant de passer en revue les initiatives mises en place.  Il a notamment évoqué l’Initiative « Halte à la tuberculose » et les programmes de lutte contre le tabagisme.


Mme YAMINA DJACTA, Programme des Nations Unies pour les établissements humains – ONU-Habitat, a rappelé que son Programme fournit une aide technique aux gouvernements pour guider et orienter leurs programmes en faveur des populations autochtones en zone urbaine.  ONU-Habitat a l’intention de renforcer sa collaboration avec l’Instance permanente, a expliqué Mme Djacta.


Reprenant la parole, Mme SUSANNE SCHNUTTGEN, Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture – (UNESCO), a indiqué que l’adoption, en 2003, de la Convention sur la préservation du patrimoine immatériel stipulait que les communautés étaient les détenteurs de ce patrimoine et qu’il leur revenait de le gérer.  Elle a également évoqué l’importance pour les peuples autochtones de la Convention sur la protection et la promotion de la diversité culturelle ainsi que le Dialogue interculturel sur le développement durable.


Mme ANDREA CARMEN, au nom du Conseil international des Traités indiens (CITI) et de la FAO, a fait le point sur les « indicateurs culturels pour la sécurité alimentaire et le développement durable ».  Elle a expliqué que jusqu’en 2006, les indicateurs culturels étaient le chaînon manquant des politiques internationales de développement, y compris pour la sécurité alimentaire.  Une fois finalisés en 2007, ces indicateurs ont permis d’évaluer le bien-être des populations autochtones à différents niveaux.  Ils se sont avérés utiles en tant que méthode d’évaluation de l’impact des divers programmes, projets et technologies sur les communautés autochtones.  D’octobre 2007 à février 2010, CITI a mené une étude sur le terrain auprès de 450 autochtones de 60 communautés différentes pour tester la pertinence de ces indicateurs culturels.  Un rapport détaillé sur cette étude est à la disposition des participants à la session de l’Instance permanente.


M. JEAN-PHILIPPE AUDINET, Fonds international de développement agricole – FIDA, a déclaré qu’afin d’être efficace, le développement devait être nourri des contributions des populations autochtones.  Il a expliqué qu’au mois de septembre dernier, le FIDA avait adopté une politique visant à assurer la cohérence de ses initiatives avec les populations autochtones.  Il a souligné que l’information était un principe essentiel pour aider ces populations à assurer leur propre développement.  Il a engagé les États Membres à aider le FIDA à respecter les principes énoncés dans cette politique et à faire face aux pressions commerciales qui peuvent exister sur le terrain.  Le représentant a également indiqué qu’en 2009, le FIDA avait financé 140 projets pour appuyer le développement des peuples autochtones.


M. DANIEL SEYMOUR, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a expliqué qu’à la suite d’une étude en cours, le Fonds a l’intention de renforcer sa compréhension des questions autochtones pour pouvoir mieux tenir compte des notions d’identité et de culture dans ses programmes.  La culture est essentielle pour la mise en œuvre de la Convention sur les droits de l’enfant qui reconnaît le droit de l’enfant à la protection de son identité culturelle, a souligné le représentant.  Un enfant ne pouvant invoquer des droits qu’il ne connait pas; l’UNICEF a décidé de développer des versions simples de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  Ce document sera traduit dans les langues autochtones et sera présenté, le 9 août 2010, date de la Journée internationale des peuples autochtones.


Reprenant la parole, M. DJOGHLAF, Secrétaire exécutif du secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, a annoncé que la Convention organiserait en coopération avec l’UNESCO les 8, 9 et 10 juin prochain, à Montréal, une Conférence mondiale sur la biodiversité et la diversité culturelle.


M. CARLOS MAMANI, Président de l’Instance permanente, a souligné l’importance du droit à l’autodétermination pour les peuples autochtones ainsi que le droit à être consultés sur des questions les concernant. Il a également souhaité que les travaux de l’Instance puissent déboucher sur l’adoption d’une déclaration sur la santé, en particulier la mortalité maternelle et infantile.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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