« AU LIEU DE COUPS D’ÉTAT ET DE CHANGEMENTS ANTICONSTITUTIONNELS, EFFORÇONS-NOUS DE FAIRE EN SORTE QUE LA DÉMOCRATIE PROSPÈRE EN AFRIQUE », DÉCLARE BAN KI-MOON
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« AU LIEU DE COUPS D’ÉTAT ET DE CHANGEMENTS ANTICONSTITUTIONNELS, EFFORÇONS-NOUS DE FAIRE EN SORTE QUE
LA DÉMOCRATIE PROSPÈRE EN AFRIQUE », DÉCLARE BAN KI-MOON
Il appelle les dirigeants africains à renforcer les infrastructures politiques et de sécurité en Afrique
On trouvera ci-après le discours que le Secrétaire général de l’ONU, M. Ban Ki-moon, a prononcé à l’occasion du Sommet de l’Union africaine, à Addis-Abeba, le 2 février:
C’est pour moi un grand plaisir que d’être parmi vous à l’occasion de cet important Sommet de l’Union africaine. Je remercie le Premier Ministre Meles Zenawi ainsi que le Gouvernement et le peuple éthiopiens de leur hospitalité. J’adresse également mes remerciements au Président Kikwete et au Président Ping pour l’action qu’ils mènent en ces temps difficiles pour l’Union africaine.
Nos deux organisations doivent faire face à des questions complexes, qui appellent des réponses urgentes: conflits armés, répression politique, changements climatiques, prix élevé des denrées alimentaires et, bien entendu, crise financière et économique mondiale qui détruit des emplois et réduit à néant à une vitesse inquiétante les avancées durement acquises de ces dernières années. Pour la majorité des populations, notamment dans les pays en développement, la phase la plus douloureuse et terrifiante de cette crise ne fait que commencer.
Pour surmonter ces difficultés et parvenir au développement durable pour tous, l’Afrique et ses partenaires devront faire appel à toute leur créativité, ressources et volonté.
Je me félicite de l’accent particulier mis par ce Sommet sur les infrastructures dont le développement est un préalable essentiel à la croissance économique et au progrès social.
Les routes, les écoles, les hôpitaux, l’eau, de même que la production et la distribution d’électricité et les réseaux de télécommunication sont indispensables à la création d’emplois et à la compétitivité sur les marchés mondiaux.
Malheureusement, comme vous le savez, l’Afrique est pénalisée par le manque de cohérence de l’approche adoptée dans ce domaine. Je n’ai pas besoin de dresser ici la liste des insuffisances de nos efforts passés face à cette situation. Grâce à de nombreux travaux, y compris ceux du Groupe de pilotage pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement en Afrique, ces insuffisances sont bien connues.
Nous sommes également clairement conscients de l’importance des actions au niveau régional, qu’il s’agisse de l’interconnexion des réseaux électriques et d’adduction d’eau ou de la construction de routes pour pouvoir apporter sur les marchés côtiers les biens produits à l’intérieur du continent. Étant donné le grand nombre de petits pays et de pays enclavés ainsi que de pays qui partagent des bassins fluviaux, l’Afrique peut grandement bénéficier des économies d’échelle qu’offre la coopération transfrontière.
Le développement des capacités scientifiques et technologiques locales devrait aller de pair avec la coopération régionale. Les transferts de technologie sont, certes, vitaux, mais doivent être complétés par des investissements dans l’enseignement et la jeunesse.
Les partenariats entre secteur public et secteur privé sont essentiels. Le Groupe de pilotage pour la réalisation des Objectifs du Millénaire en Afrique estime que le secteur public et le secteur privé devront investir chaque année 52 milliards de dollars dans les infrastructures pour éliminer les principaux goulets d’étranglement qui existent dans ce domaine. Nous devrions tous appuyer les efforts du Consortium pour les infrastructures en Afrique en faveur de la mobilisation de ces ressources.
Le développement des infrastructures offre également la possibilité d’agir en faveur de l’environnement. Le développement de l’utilisation des sources d’énergie renouvelables favoriserait l’accès à l’énergie et offrirait une protection contre le changement climatique. Que ce soit l’énergie géothermique dans la vallée du grand Rift, l’énergie solaire au Sahara ou l’énergie hydroélectrique et la collecte de l’eau de pluie, toutes ces solutions permettraient de créer de nombreux emplois et de jeter les bases d’une économie dont les émissions de carbone sont limitées.
Les technologies de l’information et de la communication doivent également être développées. C’est en Afrique que le nombre d’abonnés au téléphone mobile a augmenté le plus rapidement et je ne doute pas qu’une croissance encore plus rapide est possible.
J’ai parlé des infrastructures en termes traditionnels. Je voudrais maintenant aborder la notion plus générale d’infrastructure politique.
C’est-à-dire les constitutions, les cadres juridiques, les organes électoraux, la participation à la vie politique, les mécanismes de protection des droits de l’homme et de recours, l’action de la société civile et une administration efficace et transparente.
Le développement et le renforcement de ces institutions, mécanismes et garanties sont aussi indispensables au bien-être futur de l’Afrique que n’importe quelle route ou voie ferrée.
Je félicite l’Union africaine pour l’adoption de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance et j’encourage tous ses États membres à la signer et à la ratifier sans retard. Au lieu de coups d’État et de changements de gouvernement anticonstitutionnels, efforçons-nous de faire en sorte que la démocratie prospère en Afrique. Continuons à entretenir les valeurs démocratiques dans l’ensemble du continent et à lutter contre les menaces pour la culture démocratique à chaque fois qu’elles se manifestent et où qu’elles se manifestent. L’Union africaine devrait continuer à défendre de façon inébranlable le principe de rejet de tout changement anticonstitutionnel et à lutter contre les menaces pour la culture démocratique.
Permettez-moi également d’insister sur l’importance de l’infrastructure en matière de sécurité en Afrique.
Moins de 10 ans après sa mise en place, l’infrastructure de l’Union africaine pour la paix et la sécurité est en train d’être consolidée. Je me félicite de ces efforts.
L’Union africaine et les communautés économiques régionales se sont montrées désireuses d’agir dans bien des situations difficiles, de l’Afrique de l’Ouest au Darfour et à la Somalie. À maintes reprises, une mission de l’Union africaine a précédé le déploiement d’une opération des Nations Unies lorsqu’il était crucial que le déploiement intervienne rapidement. Je remercie l’Union africaine du courage qu’elle a manifesté, et je rends hommage aux hommes et femmes d’Afrique que leur bravoure a portés à consentir le sacrifice suprême pour que d’autres puissent vivre dans la liberté et la paix.
J’en appelle à la communauté internationale – il faut qu’elle redouble d’efforts pour surmonter les obstacles qui ont parfois gêné ces opérations. La nécessité d’un financement plus prévisible et durable est une des plus évidentes, mais c’est loin d’être la seule. Le développement de la capacité institutionnelle de l’Union africaine et des organisations régionales doit être une priorité.
Les États d’Afrique et les organisations régionales prennent une part très importante aux opérations de maintien de la paix en Afrique et au-delà du continent, mais leur participation à la réforme du secteur de la sécurité est relativement modeste. Il faut donc se réjouir de votre décision, il y a un an, d’élaborer des directives globales pour la réforme du secteur de la sécurité.
Bien entendu, les solutions politiques viables sont encore plus souhaitables que les solutions de sécurité. Mieux vaut prévenir que guérir. L’Organisation des Nations Unies donne volontiers la préséance aux initiatives régionales, qui peuvent être bien plus efficaces que la diplomatie préventive lancée depuis New York. Toutefois, si la communauté internationale est toute disposée à soutenir les initiatives régionales, avec la préséance vient aussi la responsabilité d’agir, et le devoir d’être efficace. L’initiative de la Communauté de développement de l’Afrique australe est de celles qui font naître les espoirs, mais impose aussi le devoir urgent d’apporter une solution équitable, juste et durable.
Les questions d’infrastructure occupent une grande place dans bon nombre des problèmes ardus que nous avons à résoudre pour la paix et la sécurité.
Au Darfour, les causes profondes du conflit sont, au moins en partie, à rattacher au manque d’infrastructures politiques et matérielles qui permettraient de gérer des demandes antagoniques de ressources. Les rebelles ont pris les armes il y a plus de cinq ans pour protester contre ce qu’ils ressentaient comme une marginalisation procédant d’une répartition inégale des richesses, des revenus et des protections politiques.
Malgré les efforts d’intervention humanitaire, de maintien de la paix et de médiation lancés par la communauté internationale, l’insécurité et la souffrance sont toujours le lot du Darfour. L’état de droit, le respect des droits de l’homme et la bonne gouvernance économique et politique y font cruellement défaut. Les équipements matériels sont quasiment inexistants.
Tandis que nous poursuivons notre quête d’une solution politique, j’engage vivement le Gouvernement soudanais à développer et soutenir les infrastructures au Darfour sous toutes leurs formes, depuis les écoles, les routes et les dispensaires jusqu’aux institutions et à l’espace indispensable pour que puisse s’épanouir une société civile.
Les lacunes des infrastructures politiques et de sécurité du Soudan exercent aussi un effet néfaste sur la mise en œuvre de l’Accord de paix global. En vertu des dispositions de l’Accord, des élections devraient avoir lieu avant juillet 2009. Mais on risque d’avoir du mal à respecter ce délai vu les retards pris par la mise en place des infrastructures indispensables pour le scrutin.
La République démocratique du Congo a connu récemment un revers avec les événements dans l’est du pays. Mais il importe de rappeler les grands progrès réalisés. Des élections présidentielles réussies ont eu lieu en 2006. Les organes législatifs du pays assument de plus en plus les responsabilités qui leur sont dévolues aux termes de la Constitution, malgré les problèmes de ressources et de capacités. Et les trois quarts du pays ont enregistré une amélioration marquée de la situation de sécurité. Il nous faut faire en sorte que la situation dans l’est du pays ne menace pas ces progrès.
En Somalie, l’Union africaine, l’AMISOM et l’IGAD se sont dépensées sans relâche pour parer à une situation complexe. Nous devons maintenir le processus politique dans la bonne voie, soutenir l’AMISOM et les institutions somaliennes de sécurité, et fournir une assistance humanitaire d’urgence. L’Organisation des Nations Unies s’emploiera à accroître sa présence tout en faisant des plans au cas où il y aurait lieu de déployer une opération de maintien de la paix des Nations Unies. Je lance un appel aux dirigeants et au peuple somaliens, pour qu’ils mettent derrière eux près de 20 ans de guerre et prennent le chemin d’une solution politique durable.
Au Zimbabwe, je reste profondément inquiet de l’impasse politique où se trouvent les négociations que parraine la Communauté de développement de l’Afrique australe. L’Organisation des Nations Unies a continué de soutenir les efforts de médiation de la Communauté et de l’Union africaine. La grave situation humanitaire et économique du pays cause toujours des morts et des souffrances, et risque d’amener des tensions et une instabilité accrue dans la sous-région. La communauté internationale, y compris l’Union africaine, ne peut garder le silence sur ce problème. J’engage les dirigeants politiques et militaires du Zimbabwe à réexaminer leurs actions et à mettre fin à la situation inadmissible qui règne actuellement dans le pays, causant tant de souffrances à tant d’êtres humains.
En Afrique de l’Ouest, le nombre de conflits internes destructeurs a diminué, et il y a eu plusieurs cas de transfert pacifique et démocratique des pouvoirs. Même lorsqu’il s’est produit des changements de gouvernement qui n’étaient pas constitutionnels, comme en Guinée et en Mauritanie, l’Union africaine a pris l’initiative d’exiger un prompt retour à la légalité constitutionnelle. Je me réjouis de cette manière d’agir fermement et de manière prévisible, dans le respect des principes, et l’encourage vivement.
Mais le trafic de drogues devient un problème majeur pour la sécurité et la gouvernance dans la région, les trafiquants mettant à profit les frontières poreuses, le manque de mesures de sécurité et les limites des capacités nationales. Nous collaborons étroitement avec la CEDEAO pour faire reculer ce phénomène dangereux. Mais nos efforts ne font que commencer.
Le bien-être des êtres humains est dans une dépendance critique par rapport au développement des infrastructures. Nous sommes confrontés à des menaces graves au programme de développement de l’Afrique. Pourtant, nos objectifs communs demeurent réalisables. Sous votre ferme direction, avec un partenariat solide de la communauté internationale, le développement des infrastructures en Afrique, sous toutes leurs formes, est à notre portée.
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