POP/961

LA COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DÉVELOPPEMENT OUVRE SA QUARANTE ET UNIÈME SESSION EN EXAMINANT LES DÉFIS D’UNE URBANISATION MONDIALE CROISSANTE

07/04/2008
Conseil économique et socialPOP/961
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Commission de la population et du développement

Quarante et unième session

2e & 3e séances – matin & après-midi                        


LA COMMISSION DE LA POPULATION ET DU DÉVELOPPEMENT OUVRE SA QUARANTE ET UNIÈME SESSION EN EXAMINANT LES DÉFIS D’UNE URBANISATION MONDIALE CROISSANTE


D’ici la fin de l’année, pour la première fois de l’histoire, la moitié de la population du monde vivra en zone urbaine, une croissance qui sera absorbée principalement par les villes des pays en développement.  Ces projections sont au cœur des travaux de la Commission de la population et du développement, qui a entamé aujourd’hui, à New York, sa quarante et unième session pour en examiner le thème principal: « répartition de la population, urbanisation, migrations internes et développement ».


Selon le Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, M. Sha Zukang, qui a ouvert la session ce matin, la Commission de la population et du développement joue un rôle crucial dans la compréhension des origines et des causes des tendances démographiques.  Réunie du 7 au 11 avril, cette Commission technique, créée par l’ECOSOC, avec pour mandat de suivre et d’évaluer la mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence sur la population et le développement (CPD, tenue au Caire en 1994), examinait aujourd'hui les suites données aux recommandations issues de cette Conférence.  L’objectif est d’examiner les moyens de surmonter les défis que pose la croissance de la population mondiale et de tirer avantage des tendances démographiques.  Les défis à relever sont notamment ceux de la surpopulation, de la pollution environnementale et de la prolifération des bidonvilles, a fait remarquer le Président de la Commission, M. Ivan T. Piperkov, de la Bulgarie. 

La population urbaine mondiale comprendra 3,4 milliards de personnes en 2008, ont rappelé les intervenants qui ont d’abord examiné la cause de cette urbanisation croissante.  Ils ont relevé qu’elle est due non seulement au fait que le nombre de naissances dépasse largement aujourd’hui celui des décès, mais aussi à la migration humaine qui s’opère des zones rurales vers les zones urbaines et à la transformation de zones rurales en villes.


En tout premier lieu, « il faut prendre en considération les individus », a rappelé Mme Thoraya Ahmed Obaïd, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), qui a appelé les délégations à faire preuve de « sagesse collective ».  Comme d’autres intervenants, elle a mis l’accent sur le fait que l’urbanisation à laquelle on assiste peut jouer un rôle positif dans le développement économique et social, si et seulement si les pays s’y préparent bien.  La gestion de cette croissance passe d’abord par des mesures d’urgence pour améliorer les conditions de vie des plus pauvres dans les villes, en commençant par le renforcement des prestations concernant les services de base -eau, assainissement et électricité-, de santé et d’éducation.


À l’heure actuelle, sur 12 personnes au monde, six vivent dans des zones rurales, trois dans des petites villes, deux dans des localités de taille moyenne et une dans une grande agglomération, a indiqué Mme Hania Zlotnik, Directrice de la Division de la population au Département des affaires économiques et sociales.  Elle a noté que la pauvreté était principalement concentrée dans les zones rurales, et qu’elle était aussi plus importante dans les petites villes que dans les grandes agglomérations.  M. Thomas Buettner, Directeur adjoint de la Division de la population, a précisé que les enfants des zones rurales étaient particulièrement désavantagés quand on les comparait aux enfants des villes.


La croissance urbaine étant constatée principalement dans les pays en développement, avec par exemple une population urbaine d’Afrique et d’Asie qui devrait doubler en l’espace d’une seule génération, il est nécessaire de renforcer les capacités des gouvernements à y faire face.  La Directrice exécutive du FNUAP a expliqué la façon dont le Fonds apporte son aide aux pays, avant de lancer un appel pour encourager des donations en faveur des activités menées en matière de population, celles-ci ayant atteint 8,1 milliards de dollars pour 2006.  L’augmentation de l’aide en faveur du Programme d’action de la CPD se constate notamment dans l’augmentation des contributions au FNUAP, qui voit maintenant 182 pays contribuer volontairement au financement de ses opérations.  Mme Ann Pawliczko, de la Branche de la population et du développement du FNUAP, a cependant indiqué que ces ressources ne sont pas suffisantes pour permettre au FNUAP de répondre aux besoins des pays en développement.  Il faut, selon elle, en augmenter le niveau pour répondre aux besoins des plus pauvres et leur fournir des services de planification familiale, de santé reproductive et de lutte contre le VIH/sida.


La Commission a également entendu l’exposé de M. David  Satterthwaite, de l’Institut international pour l’environnement et le développement, qui est un spécialiste de l’urbanisation, et qui a mis en évidence le paradoxe de ce phénomène.  Si l’urbanisation est encore souvent vue comme un problème, a-t-il expliqué, elle est en même temps associée à la réussite économique.  Selon l’expert, le meilleur indicateur de la gouvernance d’une ville est la différence existant entre l’espérance de vie des groupes riches et celle des groupes pauvres.  La relation directe entre gouvernement et citoyens est aussi un critère de réussite pour la ville, a-t-il ajouté,  citant l’exemple de Porto Alegre, au Brésil, où a été mis en place un « budget participatif », et celui de Mumbaï, en Inde, où des partenariats ont été mis en place entre les agences gouvernementales et les fédérations des bidonvilles.


La Commission a adopté ce matin son programme de travail et a pris note du rapport concernant ses travaux intersessions.  Le Bureau de la Commission comprend quatre Vice-Présidents: Mme Alicia Melgar (Uruguay); MM. Hossein Gharibi (République islamique d’Iran) et Frederick Matwang’a (Kenya); ainsi que Mme Pauline Eisema (Pays-Bas), qui a été élue ce matin.  M. Hossein Ghabiri assure aussi les fonctions de Rapporteur.


Les représentants des pays suivants ont participé aujourd’hui au débat: Antigua-et-Barbuda (au nom du Groupe des 77 et de la Chine), Slovénie (au nom de l’Union européenne), Chine, Kazakhstan, Brésil, Bangladesh, Indonésie, États-Unis, Kenya, et République islamique d’Iran.  Les représentants des Commissions économiques pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), pour l’Asie du Sud et le Pacifique (CESAP) et pour l’Asie occidentale (CESAO) ont également pris la parole.


La Commission poursuivra son débat général demain, mardi, le 8 avril, à 10 heures.


SUITE DONNÉE AUX RECOMMANDATIONS DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LA POPULATION ET LE DÉVELOPPEMENT


Déclarations liminaires


M. SHA ZUKANG, Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales, a rappelé que d’ici la fin de l’année, pour la première fois de l’histoire, la moitié de la population du monde vivra dans des villes.  De plus, dans les années à venir, la croissance de la population sera absorbée principalement par les villes des pays en développement.  En effet, a-t-il noté, la population urbaine mondiale passera de 3,3 milliards aujourd’hui à 6 milliards en 2050, avec peu de changements dans les pays développés.  Il a aussi indiqué que dans un peu plus d’une décennie, la population rurale du monde atteindra un pic 3,5 milliards de personnes et commencera ensuite à décliner.


Le Secrétaire général adjoint a expliqué que l’urbanisation était due au fait que le nombre de naissances est plus important que celui des décès, et qu’elle provient aussi de la migration des zones rurales vers les zones urbaines, et de la transformation de zones rurales en villes.  Entre 1980 et 1990, a-t-il ajouté, 400 localités en Asie ont été classées en tant que villes, chacune avec 100 000 habitants ou plus.  Il a fait valoir que la réponse politique apportée pour réduire la croissance urbaine a été de tenter de diminuer les migrations vers les villes.  Toutefois, il a souligné que ce facteur n’était pas la plus importante cause de cette croissance dans les pays en développement et que ceux-ci devaient plutôt se concentrer sur les manières de réduire la croissance démographique naturelle dans les zones urbaines.


Par ailleurs, M. Sha Zukang a affirmé qu’il existait de larges disparités dans l’accès aux services non seulement entre les zones rurales et urbaines mais aussi entre les pauvres des villes et les autres résidents.  Il a mis en avant l’importance des programmes en faveur de l’amélioration de la santé des enfants pauvres, dans les zones urbaines et rurales.  Il a estimé que ces programmes permettent de sauver des vies, d’améliorer le bien-être des enfants et de montrer aux parents qu’ils pouvaient avoir moins d’enfants.  Enfin, il a souligné que la Commission de la population et du développement jouait un rôle crucial dans la compréhension des causes des tendances démographiques.


Mme THORAYA AHMED OBAÏD, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), a souhaité que l’on conserve une sagesse collective dans le domaine de la population et du développement, en prenant en considération en tout premier lieu les individus.  Elle a noté que les travaux menés en vue de mettre en œuvre les recommandations du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement doivent contribuer à réduire la pauvreté et à atteindre un développement durable.  Les progrès dépendent des partenariats entre les gouvernements, l’ONU, la société civile, les institutions académiques et le secteur privé, a-t-elle remarqué.  Mme Obaïd a ensuite abordé les questions relatives à la distribution de la population, de l’urbanisation et des migrations internes.  Elle a expliqué que la croissance urbaine mondiale, qui atteint un seuil historique cette année, devrait faire doubler la population urbaine d’Afrique et d’Asie en l’espace d’une seule génération.  Ainsi, entre 2000 et 2030, la population urbaine d’Asie devrait passer de 1,4 milliard à 2,6 milliards, et, pour l’Afrique, on passerait de 300 millions à 740 millions.  En ce qui concerne l’Amérique latine et les Caraïbes, Mme Obaïd a indiqué que la population urbaine passerait de 400 millions à plus de 600 millions.


La Directrice exécutive du FNUAP a mis l’accent sur le fait que cette urbanisation peut jouer un rôle positif dans le développement économique et social, si et seulement si les pays se préparent à une croissance urbaine qui somme toute est prévisible et prévoient des programmes et des politiques pour y faire face.  Les villes peuvent faciliter l’accès aux bénéfices des technologies, aux services sociaux et de santé, ainsi qu’aux infrastructures de base.  Malheureusement les personnes les moins favorisées profitent le moins de tout cela, et les conditions dans lesquelles elles vivent en matière de logement sont nettement insuffisantes par rapport aux besoins.  Les gouvernements ne sont pas préparés à absorber cette forte croissance urbaine, a souligné Mme Obaïd, alors qu’il faudrait s’y préparer.  Les changements doivent s’opérer notamment au niveau de la gestion, en prévoyant d’abord des mesures d’urgence pour une amélioration des conditions de vie et pour la création d’emplois.  Il faut aussi assurer des conditions minimales d’éducation dans les campagnes.  En outre, les jeunes doivent accéder à des services de base, a-t-elle ajouté.  Mme Obaïd a appelé les États Membres à échanger les meilleures pratiques, entre les différents pays ou régions du monde.  La croissance urbaine ne doit pas se faire aux dépends du développement rural, a-t-elle ajouté.  Elle a aussi souhaité une meilleure analyse des tendances de la population, afin de renforcer les capacités des gouvernements à faire face à la croissance urbaine.  Elle a évoqué la façon dont le FNUAP aide les pays pour qu’ils fassent front à un avenir urbain positif.


En ce qui concerne les flux financiers, elle a apprécié le fait que les donations en faveur des activités menées en matière de population continuent à croître.  Pour 2006, les chiffres définitifs de cette aide devraient atteindre les 8,1 milliards de dollars, a-t-elle indiqué.  En ce qui concerne les ressources au niveau national, elles devraient être de 23 milliards.  L’augmentation de l’aide en faveur du Programme d’action de la Conférence sur la population et le développement se constate notamment dans l’augmentation des contributions au FNUAP.  En 2007, 182 pays y contribuaient volontairement, y compris des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, ce qui est un symbole très important.  Toutefois les pays en développement ont vraiment besoin d’assistance pour mener à bien leurs politiques en matière de population, a souligné la Directrice exécutive du FNUAP.  Mme Obaïd a aussi salué les contributions techniques de la Division des statistiques des Nations Unies et celles des autres partenaires qui fournissent des données.


Les besoins ont parallèlement beaucoup augmenté, notamment en ce qui concerne le VIH/sida, a poursuivi Thoraya Obaïd.  Ce sont les femmes des pays les plus pauvres qui sont les plus menacées, a-t-elle aussi fait remarquer, citant les risques qu’elles encourent lors des maternités qui peuvent pourtant être réduits avec des moyens d’action suffisants.  Mme Obaïd a donc lancé un appel à toutes les sources de financement, afin qu’elles se concentrent sur la planification familiale.


Mme HANIA ZLOTNIK, Directrice de la Division de la population au Département des affaires économiques et sociales, a souligné qu’il existait seulement 49 agglomérations au monde avec plus de 5 millions d’habitants, 19 d’entre elles étant des mégapoles de plus de 10 millions de personnes.  Elle a précisé que ces grandes villes possédaient plus de résidents que 118 pays au monde n’ont d’habitants.  Elle a ajouté que les villes ayant entre 500 000 et 5 millions d’habitants étaient plus nombreuses, et qu’on en comptait environ 800.  Les villes qui comptent entre 2 500 à 500 000 habitants sont trop nombreuses pour être comptées, a-t-elle poursuivi.  Elle a fait remarquer que ces petites villes étaient cruciales, car elles étaient le lieu de résidence d’environ la moitié de la population urbaine du monde.  Elle a aussi souligné qu’à l’heure actuelle, sur 12 personnes au monde, six vivent dans des zones rurales, trois dans des petites villes, deux dans des villes de taille moyenne et une dans une grande agglomération.


La Directrice de la Division de la population a indiqué que comprendre la distribution démographique était essentielle, car l’endroit de résidence était un facteur clef dans le niveau de bien-être des personnes.  Elle a déclaré que les populations rurales avaient un moins bon accès aux services de base que les résidents des petites villes, qui sont, à leur tour, moins bien servis que les citadins des grandes villes.  Elle a de plus noté que la pauvreté était principalement concentrée dans les zones rurales, et qu’elle est plus importante dans les petites villes que les grandes.


Elle a ainsi estimé que les stratégies de réduction de la pauvreté devaient garantir que les autorités locales obtiennent l’assistance nécessaire pour pouvoir fournir les services de base nécessaires à leur population.  Selon elle, la priorité doit être donnée à des mesures visant à faciliter l’accès aux services des pauvres, que ce soit en zones rurales ou urbaines.  Elle a aussi fait valoir que, puisque l’urbanisation était inévitable, il fallait approcher cette tendance sous l’angle des opportunités qu’elle peut offrir.  Mme Zlotnik a en effet indiqué que les villes étaient des centres d’innovation, de commerce, de finance, de technologie, de culture et de prospérité économique.  Elle a aussi mis en avant les échanges et les réseaux qui lient les villes aux campagnes et rendent leur développement interdépendant.


M. IVAN T. PIPERKOV, Président de la Commission de la population et du développement a ensuite présenté le rapport des réunions du Bureau de la Commission qui s’est réuni trois fois, dont une fois à Sofia, en Bulgarie.  Constatant la vitalité des échanges qui ont eu lieu avec les experts bulgares, il a engagé les experts qui le voudraient à partager la même expérience ici à New York, à l’occasion d’une présentation qui sera faite demain, 8 avril, de 13 h 15 à 14 h 30 en salle de conférence 6.  Le Bureau s’est aussi réuni juste avant la reprise de session de la Commission pour préparer celle-ci.  Il a décidé que quatre intervenants principaux seraient invités à parler sur le thème « distribution de la population, urbanisation, migrations internes et développement ».  Il s’agit de M. David Satterthwaite, de l’Institut international pour l’environnement et le développement; M. Mark Montgomery, de la Division recherche et politique du Conseil de la population; Mme Helen Zille, maire de la ville du Cap; et M. Eduardo Moreno, qui est à la tête de l’Observatoire urbain mondial de la branche des systèmes de contrôle de ONU-Habitat.


Le Bureau a recommandé que le thème de la quarante-troisième session de la Commission en 2010 soit « santé, morbidité, mortalité et développement ».  Le Président a rappelé à cette occasion que l’Assemblée générale devrait revoir en 2010 la réalisation des Objectifs pertinents de la Déclaration du Millénaire.  Le Bureau a aussi fait des recommandations pour que la Commission prenne certaines décisions, relatives notamment au programme de travail pluriannuel et au thème spécial de la prochaine session.  Enfin, le Président a signalé à quelles réunions il avait représenté la Commission, en mentionnant notamment la session de fond du Conseil économique et social (ECOSOC) tenue à Genève en juillet 2007. 

Il a indiqué qu’il avait également été présent à la reprise de session de

l’ECOSOC tenue à New York en janvier 2008.  Il a conclu en remerciant le Secrétariat de la Commission pour son assistance dans la préparation de cette quarante et unièmesession, et notamment pour s’être assuré que la documentation soit disponible dans les temps.


M. THOMAS BUETTNER, Directeur adjoint de la Division de la population, a présenté le rapport du Secrétaire général sur le suivi de la situation mondiale en matière de population, et qui est consacré à la répartition de la population, à l’urbanisation, aux migrations internes et au développement (E/CN.9/2008/3).  Il a expliqué que ce document fournissait une vue d’ensemble des tendances régionales et mondiales en ce qui concerne l’urbanisation, la croissance des villes, le futur déclin de la population rurale et les schémas de migrations internes.  Il a rappelé que selon les estimations actuelles, la population urbaine mondiale devait augmenter de 3,1 milliards de personnes d’ici à 2050, principalement dans les pays en développement.  Il a souligné que malgré la rapide urbanisation qui devrait se produire en Afrique, en Asie, et en Océanie, ces zones resteront les moins urbanisées jusqu’en 2050.  L’Amérique latine et les Caraïbes sont déjà parmi les zones les plus urbanisées du monde, a-t-il ajouté.  Il a de plus noté qu’en dépit de l’attention qu’elles reçoivent, les mégapoles ne représentaient que 8% de la population urbaine mondiale.  En effet, 52% des citadins vivent dans des villes de moins de 500 000 habitants, a-t-il poursuivi.


Par ailleurs, M. Buettner a fait valoir que la pauvreté restait surtout concentrée dans les zones rurales.  Il a aussi noté que l’accès aux services de base était faible dans les zones rurales.  De plus, il a indiqué que les enfants des zones rurales étaient désavantagés quand on les compare aux enfants des villes.  Dans cette perspective, il a souligné que le rapport recommandait d’améliorer la fourniture des services aux citadins pauvres, aux habitants des petites villes et à ceux des zones rurales.  Il faut répondre aux besoins de planification familiale des pauvres urbains et des personnes vivant en zones rurales, a-t-il poursuivi.  Il a aussi souhaité que les autorités locales planifient la croissance urbaine à venir, notamment en construisant et en améliorant les établissements humains.  Pour lutter contre la pauvreté, il a suggéré de garantir les droits de propriété, d’améliorer l’accès à l’eau, et de faciliter les investissements en matière de productivité agricole.  Il a affirmé que des mesures à tous les niveaux gouvernementaux devaient être lancées afin de modeler le processus d’urbanisation, plutôt que d’en subir les conséquences. 


Présentant le rapport du Secrétaire général intitulé « Suivi des programmes de population axés sur la répartition de la population, l’urbanisation, les migrations internes et le développement » (E/CN.9/2008/4), M. JOSÉ MIGUEL GUZMAN, Chef de la Branche population et développement, à la Division de l’assistance technique du FNUAP, a indiqué que ce rapport étudie la transformation sans précédent de la population mondiale dont la majorité est passée d’un statut rural à un statut urbain.  Le rapport examine les implications économiques, sociales, démographiques et environnementales de l’urbanisation et décrit les erreurs communément commises en matière de croissance urbaine.  Le rapport formule aussi des suggestions quant aux façons d’utiliser le potentiel de cette urbanisation.  M. Guzman a rappelé que des millions de personnes vivent dans des taudis sans accès à l’eau, et que les gouvernements ne sont pas toujours prêts à absorber cette croissance urbaine inévitable.  Le FNUAP appuie toutes les activités en matière de développement durable, aidant les pays à élaborer des politiques efficaces, a expliqué M. Guzman.  Le Fonds essaie aussi de mieux faire comprendre les liens qui existent entre croissance mondiale et urbanisation.  Il essaie d’autre part de renforcer les capacités et l’aide technique, en encourageant notamment le dialogue et la collecte des données dans le but d’exploiter au mieux le potentiel des villes.  Dans le soutien qu’ils apportent aux gouvernements, afin d’assurer la mise en œuvre des plans nationaux de développement et de réduction de la pauvreté, les bureaux du FNUAP sur le terrain s’assurent que les questions de population sont intégrées dans les cadres de développement.


Mme ANN PAWLICZKO, de la Branche de la population et du développement du FNUAP, a présenté le rapport du Secrétaire général sur les flux de ressources financières devant concourir à l’application du Programme d’action de la Conférence internationale sur la population et le développement (E/CN.9/2008/5).  Elle a rappelé que le FNUAP avait la charge de suivre les progrès accomplis pour la réalisation de ce Programme d’action en ce qui concerne la mobilisation des ressources.  Elle s’est félicitée d’annoncer que l’assistance des donateurs et les dépenses domestiques en faveur des activités liées à la population continuaient à augmenter.  Elle a précisé que l’assistance des donateurs devrait dépasser 8 milliards pour 2006 et que les dépenses internes étaient estimées à 23 milliards pour la même année.  Toutefois, elle a regretté que ces ressources ne soient pas suffisantes pour répondre aux besoins des pays en développement, car la situation est aujourd’hui différente de 1993, alors que les objectifs du Programme d’action avaient été fixés au Caire.


Elle a indiqué que les lacunes financières se traduisaient par la faillite de certains programmes, ce qui entraîne une augmentation de grossesses non désirées, d’avortements, des taux élevés de mortalité maternelle et infantile, ainsi que des décès liés au sida.  Elle a dit qu’il fallait des ressources adéquates pour répondre aux besoins des plus pauvres et leur fournir des services de planification familiale, de santé reproductive et de lutte contre le VIH/sida, et qu’il fallait que ces services soient de qualité et abordables.  Par ailleurs, elle a noté que la mobilisation des ressources était principalement due au financement accru visant à mettre un terme à la propagation du VIH/sida.  Tout en s’en félicitant, elle a rappelé que d’autres éléments du Programme d’action devaient aussi recevoir des fonds suffisants.  Si la tendance à la baisse concernant le financement de la planification familiale n’est pas inversée, ceci affectera les progrès qui doivent être réalisés pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement, a-t-elle insisté.  Enfin, elle a affirmé que le manque de ressources était le plus grand obstacle à la pleine mise en œuvre du Programme d’action du Caire.


Débat général


M. JOHN W. ASHE (Antigua-et-Barbuda), qui s’exprimait au nom des pays membres du Groupe des 77 et de la Chine, a noté avec satisfaction que la croissance urbaine est vue comme un facteur positif de développement, mais s’est interrogé sur la réalité de son impact, que certains estiment « positif », dans les pays en développement où, actuellement, la pauvreté croît plus vite dans les villes que dans les zones rurales.  Pour que les villes soient viables, il faut assurer l’accès des services sociaux à tous et développer les infrastructures de base, a rappelé M. Ashe.  Il s’est demandé pourquoi les rapports soumis à la Commission ne traitent pas davantage des mesures à prendre pour faire face au phénomène d’urbanisation rapide.  Si une croissance urbaine forte est souvent le résultat d’un plus grand nombre de naissances que de décès, il ne faut pas oublier que c’est aussi le chômage et la pauvreté qui font s’accélérer les migrations vers les zones urbaines, a-t-il fait remarquer.


Le représentant a souhaité que l’on tienne également compte du lien existant entre les objectifs en matière de population et les autres Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD).  Les perspectives futures concernant la croissance économique dépendront de notre capacité à réaliser ces OMD, a-t-il souligné.  Le Groupe des 77 et de la Chine souligne que les déséquilibres au niveau commercial, le fardeau de la dette, et les mesures d’austérité financière, expliquent clairement pourquoi certains pays peinent à réaliser les OMD.  M. Ashe a aussi mis l’accent sur le caractère indispensable de la mobilisation des sources de financement privé pour promouvoir l’aide au développement.  Il a ensuite appelé à mettre en œuvre de façon intégrale le Programme d’action sur la population et le développement.  M. Ashe a enfin félicité le FNUAP pour son aide au renforcement des capacités, notamment dans les pays en développement, ce qui permet à ces États de mieux élaborer leurs politiques nationales en matière de population.


Mme SANJA ŠTIGLIC (Slovénie), qui prenait la parole au nom de l’Union européenne, a déclaré que l’amélioration des conditions de vie dans les zones rurales et urbaines constituait un élément important de la réalisation des OMD.  Malgré des progrès, a-t-elle précisé, la situation dans les pays en développement exige une attention continue et des mesures relatives notamment à l’inclusion sociale, l’accès aux services de base et la coopération pour le développement.  Notant que l’urbanisation faisait partie du développement économique et social, elle a constaté que ce phénomène avait des conséquences négatives pour les populations, dont la pauvreté et la dégradation de l’environnement.  La représentante a indiqué que le chômage des jeunes était un des plus grands défis auxquels faisaient face les villes européennes.  Pour y répondre, elle a mis en avant diverses politiques européennes, telles que l’adoption par le Conseil de l’Europe, en mars 2005, d’un Pacte européen pour les jeunes qui vise à améliorer l’éducation, la formation, la mobilité et l’inclusion sociale de ce groupe.  Elle a aussi expliqué que des échanges entre villes européennes et leurs acteurs permettaient de trouver les solutions les plus efficaces et de partager les expériences.


Face à l’urbanisation mondiale croissante, elle a indiqué que les gouvernements devaient y garantir des investissements à long terme en ce qui concerne la santé reproductive et sexuelle, la planification familiale et l’autonomisation des femmes et des filles.  De plus, elle a estimé qu’il fallait adopter une gouvernance urbaine proactive, qui comprenne la gestion des terres et la fourniture de services de base tels que l’accès à l’eau, à l’électricité et à l’assainissement.  S’agissant de la pauvreté, Mme Štiglic a insisté sur l’importance de l’emploi.  Rappelant qu’une grande partie des personnes habitant dans des taudis avait moins de 25 ans, elle a aussi mis en avant l’importance d’autonomiser les jeunes.  En outre, elle a noté le lien entre la réalisation des objectifs du Programme d’action du Caire et les OMD.  La réussite dépendra de la capacité de la communauté internationale à parvenir à des villes durables, a-t-elle précisé.  À cet égard, elle a fait remarquer que l’Union européenne s’était accordée, en mai 2007, sur la « Charte de Leipzig sur les villes européennes viables » qui appelle à des approches intégrées de développement urbain.  La représentante a aussi estimé qu’on ne pouvait traiter des défis de l’urbanisation sans prendre en compte les défis du développement rural.  Ainsi, elle a souhaité que la priorité soit donnée à l’amélioration de l’accès aux services de base en faveur des citadins pauvres et des habitants des zones rurales.  Enfin, elle a affirmé que les États devaient redoubler d’efforts pour gérer efficacement les liens entre urbanisation, répartition de la population, migrations internes et développement, afin que ces éléments contribuent à la réalisation des OMD.  Dans ce contexte, elle a déclaré que le maintien de la coopération et du dialogue au sein de l’ONU était aussi important que les politiques nationales. 


M. HAO LINNA (Chine) s’est félicitée du contenu du rapport du Secrétaire général qui apporte une bonne base aux délibérations sur l’urbanisation et la distribution de la population, ainsi que sur leurs impacts en matière de développement.  Elle a noté la mutation rapide que connaît le monde actuellement, où la population migre rapidement des zones rurales aux zones urbaines, et constaté qu’il y avait des stratégies nationales et internationales adoptées pour y faire face.  Elle a estimé que les gouvernements devraient inclure l’urbanisation et la distribution de la population dans leurs priorités.  Il faut faciliter une répartition raisonnable de la population dans les stratégies nationales, a-t-elle estimé, afin de limiter les conséquences négatives de l’urbanisation.  Le processus d’urbanisation doit en outre être mené de façon scientifique, a-t-elle ajouté.  Mme Hao Linna a apprécié le soutien des Nations Unies aux programmes nationaux relatifs à la population, notamment pour les pays en développement.  Il faut encourager une bonne coordination du développement urbain, a-t-elle ajouté, car les principaux migrants sont des jeunes adultes au niveau d’éducation relativement élevé.


La représentante a aussi appelé à faciliter le développement des zones rurales en prenant soin d’améliorer les services d’éducation et de santé, tout en s’attaquant au problème du vieillissement.  Elle a aussi appelé à renforcer les capacités des pays en développement dans la gestion de l’urbanisation, notamment par le biais du FNUAP.  Elle a émis l’espoir que la communauté internationale pourra aussi renforcer la coopération Sud-Sud.  La Chine a, à ce jour, la plus grande population de son histoire et cette situation requiert des mesures spéciales, notamment pour améliorer la sécurité et l’environnement, a-t-elle dit.  La Chine est prête à coopérer avec d’autres pays afin de faciliter le développement durable et de bâtir en conséquence un monde harmonieux, a conclu la représentante chinoise.


M. BEXULTAN TUTKUSHEV (Kazakhstan) a fait valoir que les défis de l’urbanisation étaient d’une grande importance pour son pays, qui compte plus de 50% de sa population vivant en milieu urbain.  Soulignant les disparités en termes de croissance économique et de niveau de vie entre zones rurales et urbaines, il a mis en avant les migrations de la population rurale de son pays vers les chefs lieux de district.  Toutefois, il a noté que les migrants internes avaient peu de capacités d’adaptation et que ces flux de personnes créaient une pression sur le marché du travail.  Les migrants internes deviennent en conséquence un groupe social à risque élevé, a-t-il argué.  Il a admis que les systèmes existants de gestion des migrations n’avaient pu influer sur ce processus et que le pays manquait des capacités d’analyse et de prévision pour améliorer ses politiques migratoires internes.  En outre, il a noté que l’introduction de technologies dans l’agriculture générerait une demande plus faible de main d’œuvre dans ce secteur et qu’on pouvait donc prévoir de nouvelles migrations.


Le représentant a ensuite mis en avant les efforts déployés par son pays pour faire face aux défis de l’urbanisation.  Ainsi, il a expliqué que pour éviter le développement de taudis, l’État fournissait des lopins de terre pour la construction de maisons.  Dans les zones rurales, a-t-il poursuivi, l’État prend des mesures pour améliorer les soins médicaux, l’éducation, et l’accès à l’eau notamment.  Il a aussi indiqué que le Gouvernement œuvrait pour soutenir les demandeurs d’emplois, y compris pour assurer une plus grande sécurité en créant des emplois dans le secteur public.  En outre, il a affirmé qu’un Groupe de travail chargé d’améliorer les politiques de gestion des migrations au Kazakhstan avait été mis en place et procédait à une étude transversale des situations existant dans d’autres États.  Étant donné sa rapide croissance économique, le Kazakhstan prend au sérieux la question de la répartition démographique, car c’est un facteur essentiel du développement durable, a-t-il conclu.


Discours inaugural de M. David Satterthwaite, Associé principal, Institut international pour l’environnement et le développement (Londres)


M. DAVID SATTERTHWAITE, Associé principal de l’Institut international pour l’environnement et le développement, a rappelé que l’urbanisation était encore souvent vue comme un problème, mais que ce phénomène était associé à la réussite économique.  Les nations les plus riches sont hautement urbanisées, et les économies les plus performantes, que ce soit en Afrique, en Asie ou en Amérique latine, connaissent une urbanisation rapide, a-t-il précisé.  De plus, il a souligné que l’urbanisation amenait des avantages en terme de développement, en diminuant les coûts de l’accès à l’eau, de l’assainissement, des services de santé par exemple, et en créant des avantages en terme d’environnement en offrant des opportunités de contrôle de la pollution et de réduction des gaz à effet de serre.


L’intervenant a indiqué que si l’urbanisation semblait suivre la réussite économique, elle servait aussi à la soutenir.  Il a noté que les nouvelles entreprises se concentrent dans les villes parce qu’elles y bénéficient des activités d’autres sociétés, de la disponibilité en main d’œuvre qualifiée, et des services qui s’y trouvent.  Pour les gouvernements, il y est aussi plus abordable de fournir les infrastructures et les services de base en ville, a-t-il ajouté.  Toutefois, il a fait valoir que cela ne signifiait pas qu’on allait connaître une concentration croissante de population et d’entreprises dans les grandes villes, d’un côté, et la pauvreté de l’autre.  Lorsque les économies nationales et régionales prennent de l’ampleur, les grandes villes deviennent trop chères pour de nombreuses entreprises et elles investissent dans des villes plus petites, a-t-il fait remarquer.  Il a de plus souligné que cette décentralisation du développement urbain était facilitée par la bonne gouvernance des petites villes.


S’agissant du lien entre santé et ville, M. Satterthwaite a admis que bien que la concentration de personnes, d’industries, de véhicules et de déchets ne soit pas forcément bonne pour la santé, les nations les plus urbanisées connaissent néanmoins les plus longues espérances de vie.  Il a estimé que le meilleur indicateur de la gouvernance d’une ville était la différence existant entre l’espérance de vie des groupes riches et celle des groupes pauvres.  Dans les villes mal gérées, l’écart peut être de 40 ans, a-t-il expliqué.  Lorsque la moyenne d’espérance de vie est bonne, la plupart de la population à bas revenu a accès à l’eau potable, à l’assainissement et à de bons services.  La concentration de personnes réduit les coûts des infrastructures et des services ainsi que ceux des opérations destinées à mettre en place un contrôle de la pollution, a-t-il affirmé.


Le panéliste a par ailleurs indiqué que la concentration urbaine favorisait la relation directe entre gouvernement et citoyens.  Il a cité l’exemple de Porto Alegre, au Brésil, où a été mis en place un « budget participatif » qui permet à chacun d’assister à l’établissement de priorités en termes d’investissement public.  Il a aussi mis en avant la ville de Mumbaï, en Inde, où des partenariats ont été mis en place entre les agences gouvernementales et les fédérations des bidonvilles.  Il a fait valoir que ces partenariats avaient notamment permis de construire des toilettes gérées par les communautés ou des postes de police communautaire.


En ce qui concerne l’environnement, M. Satterthwaite a réfuté l’idée selon laquelle les villes seraient responsables de 75% à 80% des gaz à effet de serre.  Il a en effet affirmé que les émissions en zones rurales ne pouvaient être de 20% à 25%, si on prend en compte les émissions provenant de l’agriculture, de la déforestation, des usines d’électricité ou des industries.  Il a dit que la plupart des villes avaient un niveau d’émission bas, car les taux moyens de consommation étaient assez bas aussi.  Il a aussi indiqué que les ménages riches des zones rurales où des banlieues produisaient plus de gaz à effet de serre que les ménages vivant en ville et ayant le même niveau de vie.


Dans une perspective du développement durable des villes, il a déclaré qu’il fallait encourager les gouvernements locaux à innover et à envisager les groupes à bas revenus, vivant dans des établissements humains informels et travaillant dans l’économie informelle, comme de véritables partenaires.  Il a affirmé que ces personnes avaient le savoir et les capacités qui leur permettraient d’aider à construire et améliorer les villes.


Questions


Après l’exposé de M. Satterthwaite, le représentant du Qatar a indiqué que dans son pays le terme « urbanisation » signifie passer d’une petite ville à une grande ville.  Il a donc souhaité que ce terme soit défini plus précisément.  Le représentant de la Norvège a demandé si l’on pouvait parler d’une « taille idéale de ville ».  Celui de l’Afrique du Sud s’est demandé comment intégrer ces questions dans le débat public.  Le représentant de la France a, pour sa part, demandé que soit davantage précisée la notion de « city governance ».  Peut-on parler aussi de la « force du pouvoir municipal » comme composante importante du succès de la gestion des villes? a-t-il voulu savoir.  Le délégué de Cuba, de son côté, a voulu savoir jusqu’où le monde peut supporter la croissance des villes et un appauvrissement des zones rurales.  Le représentant de l’Italie a ensuite posé des questions sur l’extension régionale des zones urbaines, notamment en Europe.  Il a aussi demandé comment mesurer l’espérance de vie dans les grandes villes du tiers monde.


Répondant à ces questions, M. SATTERTHWAITE a expliqué qu’il y a toutes sortes de définitions de l’urbanisation.  Par exemple, selon la définition de la Suède, où la définition de villes comprend les localités de plus de 100 habitants, le pays le plus urbanisé de l’Asie est l’Inde.  On peut poursuivre ce débat pendant des heures, a assuré l’expert, car les critères sont avant tout d’ordre politique.  Il y a des pays qui ont trouvé que leur population urbaine était trop importante et qui ont changé la définition de la ville, a-t-il dit.  Pour lui, une ville est une concentration de personnes ayant des emplois non agricoles, avec une densité particulière.  Au Nigéria, il y a 30 ans, il y avait des établissements humains avec une certaine densité de population, mais c’était toujours des établissements de type agricole.


Pourquoi faut-il opposer agricole et urbain?  En Argentine, on constate une urbanisation très rapide au cours des 40 ou 50 dernières années, a poursuivi l’expert.  Un développement rural prospère a mené à un développement urbain du même type.  Au Kenya, il y a des villes qui se développent rapidement parce qu’elles réussissent bien dans les secteurs du café et du thé.  Quant à la bonne gouvernance, c’est une expression qui en soi signifie une forme prudente de gouvernement, de responsabilité, et de transparence, qui permet d’avoir de bons liens avec les citoyens, a-t-il précisé.  Le meilleur exemple, pour M. Satterthwaite, est celui de la ville de Porto Alegre, au Brésil, qui pratique une budgétisation participative.


S’agissant de la taille idéale d’une ville, il a indiqué que chacun a des idées différentes selon ses intérêts.  Tout dépend de l’environnement et de la situation.  Préférez-vous vivre à Copenhague ou à Detroit? À Amsterdam ou à Detroit? a-t-il interrogé.  La plupart des gens répondraient Copenhague ou Amsterdam, car on constate dans ces villes une utilisation de carburant par tête d’habitant qui représente le quart de la consommation par individu à Detroit.  Les voitures sont notamment plus petites et en général la qualité de vie est meilleure dans les deux premières villes.


Le représentant des Philippines a ensuite demandé plus d’information sur les migrations internes, avec une répartition par sexe et par âge.  Le représentant du Pakistan a pour sa part voulu savoir comment le développement du secteur rural pouvait influer sur l’éducation, les industries et la gouvernance.  Les institutions n’arrivent pas à faire face à la migration qui se fait de façon très rapide, a constaté M. SATTERTHWAITE.  Il faudrait d’abord que les personnes vivant dans les campagnes bénéficient de tous les services de base et des soins de santé; et il appartient aux institutions de faire ce qu’il faut pour cela.


Suite du débat général


Insistant sur le droit à la mobilité au niveau national, M. EDUARDO RIOS-NETO (Brésil) a constaté les différences entre zones rurales et urbaines en ce qui concerne les services de santé et d’éducation ou encore les indicateurs économiques.  Il a par ailleurs mis en avant les disparités entre migrants et non-migrants qui vivent dans les grandes villes.  En effet, a noté le représentant, les migrants ne bénéficient pas du même accès aux services de base et aux infrastructures, qu’il s’agisse de l’électricité, du ramassage des ordures ou même de l’éducation et de la santé.  Il a estimé que ce phénomène créait une ségrégation au sein de la population et qu’il était essentiel d’assurer les mêmes droits aux migrants qu’aux non-migrants.  Selon lui, cette dimension doit être mieux prise en compte dans les villes qui connaissent une forte urbanisation.  Enfin, il a déclaré que la fourniture de services complets pour tous les migrants permettait d’améliorer les conditions de vie dans les zones urbaines, au bénéfice de tous les citadins et du développement durable de ces zones.


M. ISMAT JAHAN (Bangladesh) a rappelé que la croissance urbaine rapide a des conséquences importantes, notamment sur la pauvreté ou sur l’infection par le VIH.  Les projections semblent montrer que le nombre de taudis augmentera fortement, touchant environ 2 millions de personnes d’ici les 30 prochaines années, s’il l’on ne mène pas une action concertée dans ce domaine, a ajouté le représentant.  Les pays les plus pauvres sont les plus touchés, a-t-il ajouté, 80% de la population rurale des pays les moins développés vivant déjà dans des conditions de pauvreté extrême, avec un accès limité aux services de base et aux services de santé.  Une bonne gestion urbaine, avec une bonne planification, est indispensable pour tirer parti de la croissance urbaine, a-t-il déclaré.  Le représentant a poursuivi en demandant que le développement durable se fonde sur des technologies respectueuses de l’environnement.  Il est en outre indispensable de disposer de programmes de microcrédit pour permettre aux citadins pauvres d’avoir accès à des crédits immobiliers.  Il a enfin cité la résolution 62/203 de l’Assemblée générale qui demande d’inclure les pays les moins développés dans tous les rapports pertinents relatifs aux domaines économique et social, afin d’éviter la marginalisation de ces pays.  Il a donc demandé que le prochain rapport de la Commission se conforme à ces recommandations.


M. SISWANTO AGUS WILOPO (Indonésie) a souligné que l’urbanisation était une force positive pour le changement, mais qu’elle a aussi des conséquences sérieuses.  Il a noté que dans les pays en développement les migrations internes créaient souvent des déséquilibres en matière d’emploi qui peuvent affecter le développement aussi urbain que rural.  Il a aussi affirmé qu’au niveau mondial, l’urbanisation avait changé les schémas de production et de consommation, affaiblit l’économie rurale, et influencé le degré de pollution environnementale.  Dans ce cadre, il a fait valoir que la Commission devait appeler la communauté internationale à accorder une plus grande attention à la gestion de la croissance économique, particulièrement aux déséquilibres entre populations rurale et urbaine.  Il a aussi souhaité que la hausse des prix de l’énergie et des denrées alimentaires fasse l’objet d’une attention accrue, puisqu’elle affecte avant tout les pauvres.  Par ailleurs, il a suggéré de poursuivre le processus de décentralisation du développement, afin de combler l’écart entre les secteurs ruraux et urbains.  Le représentant indonésien a insisté sur l’importance d’améliorer la fourniture des services de base pour les pauvres, dont l’éducation, la santé et la planification familiale.  Il a en outre mis l’accent sur la nécessité de former de nouveaux partenariats pour renforcer les capacités et regrouper les financements.  Enfin, il a fait valoir que si les gouvernements avaient la responsabilité première de la réduction de la pauvreté, le secteur privé et la société civile avaient aussi leur rôle à jouer, et que leur participation devait être encouragée.


Mme DARLENE WILLIAMS (États-Unis) a indiqué que l’équilibre entre les populations urbaines et rurales que le monde connaissait cette année ne durerait pas longtemps, puisque le nombre de citadins allait bientôt dépasser le nombre des habitants des campagnes.  Nous vivrons alors dans un monde dont nous n’avons jamais fait l’expérience, avec des conséquences politiques importantes pour tous les gouvernements, a-t-elle déclaré.  Soulignant les bénéfices économiques que peut apporter l’urbanisation, elle a estimé que les gouvernements devaient créer des environnements favorables et adopter des politiques en faveur des pauvres et de la croissance afin d’améliorer la qualité de vie des citadins.  La représentante a aussi noté que l’urbanisation devait être considérée comme une question qui affecte à la fois les zones rurales et celles urbaines.  Affirmant qu’il fallait éviter les déclarations définitives, elle a argué qu’une urbanisation sans planification suffisante par tous les niveaux de gouvernement ne mènerait pas au développement durable mais, au contraire, exacerberait les défis auxquels font face actuellement les villes.  En conséquence, elle a affirmé qu’il ne fallait pas encourager une urbanisation accélérée dans toutes les situations, tel que semble le recommander le rapport du Secrétaire général.  Les gouvernements doivent fournir des options pour traiter de l’urbanisation accrue plutôt que de simplement la constater puis répondre comme ils peuvent à ses conséquences, a-t-elle avancé.


En outre, Mme Williams a regretté que si le rapport du Secrétaire général recommandait des partenariats entre les gouvernements locaux et les organisations non gouvernementales (ONG) pour améliorer la vie des résidents des taudis, il ne prenait pas en compte le rôle du secteur privé.  Selon elle, le niveau d’investissements requis est au-delà des capacités des autorités locales et des associations.  De plus, la représentante a souligné qu’il fallait traiter à la fois de la situation des taudis, mais aussi trouver les moyens de prévenir la formation d’autres bidonvilles dans le futur.  Elle a en effet rappelé que les pays en développement verraient près de 2 milliards de citadins supplémentaires s’acheminer vers leurs villes dans les prochaines 25 années, ce qui pourrait générer une croissance explosive des taudis.  Enfin, elle a fait part de l’engagement de sa délégation à travailler en partenariat avec les gouvernements aux niveaux national et local, les communautés, la société civile, le secteur privé, et les donateurs, pour traiter des défis complexes associés à la croissance urbaine rapide.


M. KOYUGI (Kenya) a fait part des progrès réalisés par son pays pour la mise en œuvre du Programme d’action de la Conférence sur la population et le développement (CPD).  Pour ce qui est de l’amélioration de la répartition de la population, dans des conditions économiquement et écologiquement viables, il a expliqué que le Kenya a adopté des programmes visant à mieux équilibrer la population.  Ces mesures comprennent la mise en œuvre d’une stratégie de développement rural, d’électrification rurale, et de développement des réseaux routiers.  S’agissant des centres urbains de petite et moyenne taille, il faut savoir que la moitié de la population urbaine se trouve dans les grandes villes kenyennes, a-t-il dit.  Pour encourager une meilleure gestion des logements et améliorer la qualité de vie des résidents à bas revenu, le Gouvernement a chargé les autorités locales de prendre des mesures depuis la CPD, a expliqué le représentant.  Enfin, s’agissant des personnes déplacées, le Plan d’action invite à les aider en recherchant d’abord les causes profondes de ces déplacements.  Il s’est avéré que ce sont les catastrophes naturelles qui sont les principales causes de déplacement au Kenya, a-t-il précisé.  Le représentant a indiqué que le Gouvernement du Kenya s’attaque à ce problème et fournit une protection adéquate aux personnes déplacées.


M. DIRK JASPERS-FAIJER, Directeur de la Division de la population de la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), a fait part des activités menées par cette Division notamment au cours de la dernière année.  Il a mis en avant la publication du « Panorama social de l’Amérique latine 2007 », qui aborde le thème des migrations internes et externes, leurs tendances et leurs conséquences.  Il a affirmé qu’il s’agissait de la vision la plus récente des mouvements migratoires dans la région.  Il a aussi fait valoir que la Division avait mis au point un logiciel appelé « REDATAM » qui a permis le recensement de la population dans de nombreux pays de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes.  Par ailleurs, il a noté que la Division avait collaboré avec différentes agences de l’ONU, dont ONU-Habitat et le FNUAP, avec lesquels des rapports techniques ont été élaborés.  Enfin, le Directeur de la Division de la population de la CEPALC a souligné le travail continu mené sur la mise à jour de la base de données « Répartition spatiale de la population et urbanisation en Amérique latine et aux Caraïbes », ainsi que les missions techniques qui ont eu lieu dans de nombreux pays de la région afin notamment d’offrir des conseils en matière de politiques urbaines ou encore, pour participer à des ateliers sur les migrations et le développement.


M. HOSSEIN GHARIBI (République islamique d’Iran) a relevé les changements attendus pour ce qui est des stéréotypes en matière de population, afin de tirer parti de l’urbanisation pour le développement.  Mais il a considéré que la démarche adoptée pour la rédaction du rapport ne lui permet pas d’être assez clair dans sa conclusion.  Les pays en développement font face aux problèmes d’urbanisation et à ceux qui se posent dans leurs zones rurales en même temps, a-t-il fait valoir, estimant qu’en soi l’urbanisation ne veut rien dire.  Les conclusions du rapport ne peuvent donc pas coïncider avec nos attentes, a-t-il déclaré.  Les responsables du FNUAP dans nos pays s’entretiennent avec des journalistes sur les projets de santé, mais cela ne suffit pas et les données collectées devraient être plus complètes, s’est plaint M. Gharibi.  Le représentant a aussi suggéré que le rapport inclut les critères de tous les pays en développement.  Enfin, il a signalé l’importance de la Division de la population de l’ONU pour ce qui est de ses objectifs et de ses mandats.  Il a aussi engagé la Commission à prendre en compte les avis des experts des pays en développement, et à promouvoir la coopération Sud-Sud.


Mme KEIKO OSAKI, Chef de la Section de la population et de l’intégration sociale de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), a affirmé que l’urbanisation nécessitait une bonne gestion pour obtenir de bons résultats.  Elle a noté qu’à mesure que la région Asie-Pacifique devenait plus prospère, l’urbanisation et la distribution inégale de la population posaient des défis à de nombreux pays.  Elle a indiqué qu’à l’heure actuelle, 60% de la population de l’Asie vivaient encore dans les zones rurales, mais que la population urbaine devrait y augmenter dans les années à venir, de 1,6 milliard en 2007 à 3,4 milliards en 2050.  Elle a aussi souligné la répartition inégale de cette population entre pays, alors que la Chine, l’Inde et l’Indonésie représentent ensemble environ 30% des citadins du monde.  La région compte 11 des 19 mégapoles du monde, a-t-elle ajouté.  Elle a en outre indiqué que la pauvreté dans la région Asie-Pacifique se concentrait encore dans les zones rurales et qu’en dépit de la réduction importante de la pauvreté ces dernières années, seuls 34% des habitants des campagnes ont accès à un assainissement amélioré.  Tout en reconnaissant que les villes étaient le principal lieu de la croissance économique, la représentante de la CESAP a toutefois indiqué que dans la région, l’emploi généré dans le secteur informel restait important et que 35% de la population des villes habitaient dans des bidonvilles.  Parmi les activités entreprises par la CESAP pour traiter de ces questions, elle a affirmé que le premier rapport sur les villes asiatiques serait lancé en novembre au prochain Forum mondial urbain d’ONU-Habitat, qui se tiendra en Chine.  Elle a expliqué que ce rapport devait aider les décisionnaires à améliorer leur compréhension du développement urbain durable, notamment dans la perspective de la réalisation des OMD.  En outre, elle a annoncé que la CESAP entreprendrait avec ONU-Habitat un projet de sécurité urbaine pour les pauvres qui sensibilisera les autorités locales à leurs responsabilités dans ce domaine. 


Mme BATOL SHAKOORI, Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (CESAO), a indiqué qu’entre 1980 et 2005 la population urbaine de la région arabe était passée de 44% à 55%.  Les prévisions pour 2010 sont donc de 57,1% et de 61,3% en 2020.  Cependant, la croissance urbaine devrait s’atténuer entre 2000 et 2020, pour ensuite décroître.  La représentante a présenté la troisième étude démographique de la CESAO, qui s’est axée sur les questions de vieillissement de la population rurale.  L’objectif dans la région est d’intégrer les femmes et les personnes âgées, a-t-elle précisé.  L’un des éléments les plus déterminants du vieillissement est la forte migration des hommes faisant partie de la population active, car l’exode concerne surtout la tranche d’âge 15-64 ans dans les régions rurales, a précisé Mme Shakoori.  La représentante a appelé à tenir compte du vieillissement de la population rurale dans les politiques adoptées dans les pays de la région.  Elle a abordé la façon dont la CESAO contribue au développement urbain rural, dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement, en prenant soin d’inclure les organisations de la société civile et le secteur privé, notamment pour améliorer le droit au logement.  La CESAO a tenu une réunion de son groupe d’experts qui portait notamment sur la mise en œuvre de l’Objectif nº11 des OMD « villes équitables », a indiqué Mme Shakoori.  En outre, la Commission publie tous les ans les profils des pays de sa région.  La représentante a également évoqué une étude qui a été menée, et qui porte sur le caractère changeant des villes arabes, à la suite de la migration urbaine.  On ne peut pas continuer à ignorer les inégalités dont souffrent les femmes dans les zones rurales, a-t-elle conclu.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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