CDD-16: DÉLÉGATIONS ET EXPERTS PARTAGENT LEURS EXPÉRIENCES EN VUE D’UNE MEILLEURE LUTTE CONTRE LA DÉGRADATION DES SOLS, LA SÉCHERESSE, ET LA DÉSERTIFICATION
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Commission du développement durable
Seizième session
6e & 7e séances - matin & après-midi
CDD-16: DÉLÉGATIONS ET EXPERTS PARTAGENT LEURS EXPÉRIENCES EN VUE D’UNE MEILLEURE LUTTE CONTRE LA DÉGRADATION DES SOLS, LA SÉCHERESSE, ET LA DÉSERTIFICATION
Les États Membres prenant part aux travaux de la seizième session de la Commission du développement durable (CDD-16), ont aujourd’hui, au cours des débats tenus dans le cadre de trois tables rondes thématiques, échangé leurs vues et leurs expériences en matière de lutte contre la dégradation des sols, la sécheresse et la désertification. Les délégations, les représentants des grands groupes et les experts ont également prolongé la discussion interactive qu’ils avaient entamée hier sur la question de l’agriculture et du développement rural.
Outre les interventions des experts, les discussions thématiques sur les sols, la sécheresse et la désertification étaient notamment alimentées par les informations et recommandations contenues dans les rapports soumis par le Secrétaire général sur ces questions.
Dans son rapport sur la sécheresse, thème d’une des tables rondes de la matinée, le Secrétaire général souligne la nécessité pour la communauté internationale de se préparer à faire face à des conditions météorologiques plus extrêmes que celles que l’on connait aujourd’hui au niveau mondial. Ceci est possible grâce à des programmes de réduction des risques de catastrophes, au sein desquels figurent des mesures prévoyant, par exemple, une plus grande sensibilisation du public aux risques, la mise en place de systèmes d’alerte avancés et la préparation en prévision des catastrophes.
Les participants à la discussion interactive ont notamment relevé qu’un meilleur accès à des technologies adéquates et abordables, ainsi qu’une formation sur le terrain, et qu’un renforcement efficace des capacités nécessaires à la pratique de cultures adaptées aux changements climatiques contribueraient, pour beaucoup, à maintenir la productivité des sols et à accroître la production alimentaire dans les régions arides affectées par la sécheresse.
L’ampleur de la pauvreté rurale dans de nombreux pays en développement, particulièrement en Afrique, reste le principal obstacle à la lutte contre la désertification, qu’elle freine considérablement. Des progrès à long terme dans la lutte contre l’érosion des terres et la désertification dépendent, pour une bonne part, de l’adoption de pratiques et de méthodes d’agriculture et de pâturage plus durables, ont affirmé les participants à la table ronde sur la désertification.
Les délégations, grands groupes et experts qui sont intervenus au cours de la discussion thématique sur les sols se sont, eux, attachés à examiner les possibilités d’adapter la technologie et les systèmes d’information, et de renforcer les capacités des communautés et des institutions, en vue d’actions concertées à long terme pour protéger les sols et empêcher leur dégradation.
Dans son rapport, le Secrétaire général souligne que la manière dont les terres et les ressources en eau sont utilisées, ainsi que les conditions climatiques, ont des répercussions sur l’état des ressources foncières. La dégradation des sols a des effets négatifs sur la productivité agricole et sur le développement rural, a-t-il souligné dans ce document. Pour le Secrétaire général, une gestion viable et efficace des sols implique donc de relever les défis suivants: assurer la sécurité d’occupation des terres, renforcer les moyens dont disposent les populations locales, adapter les techniques de planification de l’utilisation des sols et améliorer la communication de données.
Par ailleurs, la discussion thématique interactive portant sur l’agriculture et le développement rural, entamée hier, s’est poursuivie ce matin, enrichie par les contributions de nouveaux experts et par les interventions de représentants d’États Membres et de grands groupes sociaux.
La CDD-16 poursuivra ses travaux demain, jeudi, le 8 mai, à 10 heures.
MODULE THÉMATIQUE DU CYCLE D’APPLICATION 2008-2009
a) Agriculture (E/CN.17/2008/3)
b) Développement rural (E/CN.17/2008/4)
c) Sols (E/CN.17/2008/5)
d) Sécheresse (E/CN.17/2008/6)
e) Désertification (E/CN.17/2008/7)
f) Afrique (E/CN.17/2008/8)
Discussion thématique sur l’agriculture et le développement rural
La discussion thématique interactive portant sur l’agriculture et le développement rural, entamée hier, s’est poursuivie ce matin, animée par le Vice-Président de la Commission du développement durable, Sasa Ojdanic (Serbie), et avec les contributions de nouveaux experts.
M. SERGIO MIRANDA DA CRUZ, Directeur du Service développement des entreprises agricoles de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), a ainsi affirmé que les industries agricoles constituaient un bassin d’emploi essentiel dans les pays en développement, et contribuaient à établir des liens entre le secteur agricole et les stratégies de développement. M. Miranda da Cruz a cependant noté qu’un petit nombre de pays en développement domine actuellement les échanges commerciaux Sud-Sud de produits alimentaires.
Mme PUNEETHA S. PALAKURTHI, Professeur à la Southern New Hampshire University de Manchester, a souligné que les subventions agricoles continuent d’avoir un impact considérable sur le développement rural. Le soutien financier au développement rural est souvent insuffisant, a-t-elle néanmoins indiqué. Elle a expliqué que la microfinance avait démontré que des crédits importants pouvaient être accordés aux pauvres. La microfinance s’avère rentable, même avec de faibles taux d’intérêt, a-t-elle affirmé. Les principaux défis à la microfinance sont l’absence de coordination, le surendettement de certains clients et les problèmes de faillite dans certains pays, a cependant ajouté l’experte.
Mme COLIEN HEFFERAN, Département américain de l’agriculture, a mis l’accent sur la formation et l’apprentissage des jeunes. Il faut, a-t-elle dit, améliorer la conception de la citoyenneté, ainsi que les conditions de santé des jeunes et leur compréhension de la science et de la technologie. On a besoin de plus de jeunes pour promouvoir la durabilité dans le développement, notamment agricole, a-t-elle ajouté. Il convient également de veiller à ce que la durabilité soit fondée sur la conservation de la terre, qui constitue la matière première essentielle de l’agriculture, a préconisé Mme Hefferan. Elle a ainsi mis l’accent sur la nécessité d’aider les populations locales à s’appuyer à long terme sur la durabilité de leur environnement.
M. ARNE CARTRIDGE, Vice-Président de Yara International ASA, a souligné la nécessité d’être audacieux. Si on veut promouvoir un avenir positif pour l’agriculture africaine, il faut, a-t-il dit, y jouer un rôle actif, y être chef de file pour s’atteler à la tâche au lieu de se contenter d’énumérer à longueur de journée les défis à relever ou les difficultés à surmonter. L’approche à adopter doit être holistique, audacieuse, a-t-il ajouté. Nous sommes tous interdépendants, car nous sommes tous les parties et maillons d’une même chaîne, a-t-il également expliqué, mettant l’accent sur le rôle utile des partenariats multisectoriels. Les bailleurs de fonds ont fait défaut quand ils auraient dû être là, a-t-il regretté, en lançant un appel à toutes les parties prenantes pour qu’elles jouent un rôle clef en vue de parvenir à des résultats satisfaisants.
La représentante de la Bulgarie a affirmé que son pays, qui a connu une transition économique au cours des années 90, avait investi des efforts considérables pour surmonter les difficultés et les défis du développement rural durable. Son homologue de la République-Unie de Tanzanie a estimé qu’avec une approche holistique de l’agriculture, la politique gouvernementale de son pays disposait désormais d’outils pour améliorer la productivité agricole et bénéficiait du rôle accru qu’y jouent les partenariats public-privé. Le représentant tanzanien s’est également interrogé sur l’impact des organismes génétiquement modifiés sur la durabilité de la production alimentaire en Afrique. Il a émis l’espoir que la CDD-16 puisse faire des propositions visant à soutenir une agriculture et un développement rural durables. Comme celui de la Tanzanie, plusieurs représentants ont également mis l’accent sur les souffrances des populations africaines qui, actuellement, subissent de plein fouet la crise alimentaire mondiale.
Le représentant de l’Italie a rappelé l’engagement constant de son pays en faveur de l’alimentation et de l’agriculture, notant que l’Italie avait alloué à ces secteurs cette année un financement global de 130 millions d’euros. Son homologue du Japon a indiqué pour sa part que son gouvernement avait décidé de débloquer une aide alimentaire d’urgence de 100 millions de dollars, dont 15 millions pour l’Afrique. Le délégué du Japon a en outre mis l’accent sur les avantages du microfinancement.
Son collègue de l’Australie s’est dit conscient du fait que les changements climatiques pouvaient avoir des effets néfastes sur l’agriculture. Il a ainsi plaidé en faveur de l’intégration de stratégies d’adaptation dans certains programmes de développement. Le représentant de la Barbade, qui s’exprimait au nom de l’Alliance des Petits États insulaires en développement, a fait état de certaines mesures positives en vue d’assurer le développement rural, comme des programmes d’administration foncière qui transfèrent des terres à ceux qui les exploitent, donnant ainsi plus d’autonomie aux populations rurales. Les petits États insulaires craignent que les promesses émanant de la Stratégie de Maurice ne restent lettre morte, a-t-il également souligné. Son homologue de la Jamaïque a mis l’accent sur les effets dévastateurs qu’ont les cyclones sur le développement rural des petits États insulaires en développement. Il a ainsi souhaité que la présente session de la Commission aide ces États à mettre sur pied des programmes d’assurance agricole.
Le représentant de la Chine a estimé de son côté que les pays développés devaient ouvrir davantage leurs marchés au commerce international des produits agricoles, et en particulier des produits des pays en développement.
Au nom de l’Union européenne (UE), le délégué de la Slovénie a indiqué notamment que l’Union européenne appuyait une politique de qualité alimentaire vigoureuse dans le but d’encourager la production agricole diverse et d’accroître la sensibilisation des consommateurs et des producteurs. De même, le représentant a rappelé que l’Union européenne soutenait activement les politiques permettant aux pays en développement de bénéficier d’un meilleur accès aux marchés internationaux, à un niveau bilatéral ou multilatéral.
La représentante des États-Unis a souligné, pour sa part, que son pays était attaché à la conclusion du Cycle de négociations de Doha et était favorable à la production durable des biocarburants.
Le représentant du Soudan a estimé que l’agriculture était cruciale pour éliminer la pauvreté et renforcer la sécurité alimentaire. Il a précisé que son pays s’était lancé dans un processus ambitieux de transformation structurelle de son agriculture. Il a demandé à la communauté internationale d’honorer ses engagements en faveur de l’aide publique au développement, de renforcer son aide pour faire face aux changements climatiques, de lever les sanctions commerciales imposées à certains pays, de favoriser les transferts de technologies et de promouvoir l’usage des sources d’énergie non polluantes.
Son homologue de la République de Corée a mis l’accent, de son côté, sur la formation et l’éducation, données essentielles, selon lui, du développement durable.
Le représentant de la Côte d’Ivoire a déclaré que l’agriculture et le développement rural constituaient les problématiques principales des pays africains, en particulier ceux de la région subsaharienne. Il importe donc de renforcer les investissements dans les milieux ruraux communautaires, a-t-il préconisé. Il a également appelé des institutions financières, comme le Fonds pour l’environnement, à mettre l’accent sur le financement de l’agriculture et du développement rural pour aider les pays touchés à faire face à la crise alimentaire qui secoue le monde.
La déléguée de l’Algérie a rappelé que son pays avait mis en place, en 2003, une stratégie de développement rural visant notamment à contribuer à la lutte contre la pauvreté et à la diversification des activités du monde rural, ainsi qu’à préserver l’environnement et à encourager des investissements, et à renforcer la sécurité alimentaire de l’Algérie en donnant la priorité aux produits alimentaires de base. La stratégie vise aussi à consolider l’adaptation des systèmes de production aux conditions agroclimatiques, a-t-elle souligné.
Le représentant du Maroc a plaidé en faveur d’une coopération internationale Nord-Sud et Sud-Sud plus intense, laquelle constituerait, selon lui, le moyen le plus approprié pour faire face aux changements climatiques. Il a également souhaité la création d’un fonds multilatéral dans le but de financer un renforcement des capacités et le transfert de technologies à prix préférentiels, et de favoriser des mesures d’adaptation.
La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a noté que si les biocarburants pouvaient contribuer à atténuer les émissions des gaz à effet de serre, ils n’étaient néanmoins qu’une partie de la solution à trouver au problème. Une plus grande analyse de la situation est nécessaire, compte tenu de la spéculation, qui constitue une des causes de la crise alimentaire, a-t-elle dit, précisant que la FAO participerait à cette analyse.
Discussion régionale sur la question de la sécheresse
Dans les régions où la subsistance de millions de personnes, qui comptent parmi les plus pauvres et les plus défavorisées de la planète, dépend principalement de l’agriculture, le manque de résilience face à la sécheresse est un obstacle considérable à la production agricole et à la sécurité alimentaire. La CDD-16 a donc organisé ce matin une discussion interactive au cours de laquelle les délégations et les experts ont tenté d’identifier des solutions à ce problème.
Comme le Secrétaire général le rappelle dans le rapport qu’il a soumis sur la question (E/CN.17/2008/6), il faut se préparer à faire face à des conditions météorologiques plus extrêmes que celles que l’on connait aujourd’hui. Ceci est possible grâce à des programmes de réduction des risques de catastrophes, au sein desquels figurent des mesures prévoyant par exemple une plus grande sensibilisation du public aux risques, la mise en place de systèmes d’alerte avancée et la préparation en prévision des catastrophes.
Il a été établi au cours de la discussion interactive qu’un meilleur accès à des technologies adéquates et abordables, ainsi qu’une formation sur le terrain et le renforcement des capacités nécessaires à la pratique de cultures adaptées aux changements climatiques contribuaient, pour beaucoup, à maintenir la productivité des sols et à accroître la production alimentaire dans les régions arides touchées par la sécheresse.
Déclarations
Mme KATHLEEN ABDALLA, Directrice de la Division du développement durable du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la sécheresse. Ce document indique que dans certains pays et régions en développement, la sécheresse a de lourdes répercussions sur le développement durable, car elle donne lieu à des pénuries et à l’insécurité alimentaires du fait de la baisse de la production agricole. La sécheresse provoque aussi des périodes de disettes et de famines, des pénuries en eau et des pertes en vies humaines. Étant donné sa forte dépendance à l’égard de l’agriculture, le continent africain est particulièrement à la merci des effets de la sécheresse, note le Secrétaire général dans ce rapport. Les changements climatiques devraient accroître la fréquence de ce phénomène, dont les répercussions seraient ainsi encore plus négatives et durables, prévient le Secrétaire général. D’après les prévisions actuelles, les régions les plus arides de la planète le deviendront encore plus, la sécheresse risquant ainsi de frapper durablement de nombreuses zones arides, semi-arides et subhumides sèches, avec des effets négatifs plus importants et plus soutenus que ceux que l’on observe actuellement. Il s’agit donc de réduire la vulnérabilité du secteur agricole –notamment les risques en matière de disponibilité alimentaire à l’échelle régionale et mondiale– face à la variabilité du climat et face aux phénomènes climatiques extrêmes, y compris la sécheresse, les vagues de chaleur et les inondations, a dit Mme Abdalla, en mentionnant les recommandations du rapport.
M. ANADA TIEGA, Secrétaire général de la Convention relative aux zones humides, a évoqué le cas des terres humides, telles que les marécages ou les zones côtières, qui peuvent être utilisés à des fins de lutte contre la sécheresse. En effet, si l’on détruit la végétation des sols, cela entraîne des changements de caractéristiques hydrologiques et une réduction de la quantité d’eau et un appauvrissement de sa qualité, a relevé M. Tiega. La solution à promouvoir serait de mettre en place une gestion prévisionnelle des lacs et des bassins existants pour faire face à d’éventuelles sécheresses, a-t-il préconisé. Il existe 263 bassins nationaux et transnationaux au monde, et 60% des flux d’eau connus dans le monde proviennent de ces sites, a déclaré M. Tiega, qui a également préconisé de réfléchir à la question du droit à l’eau.
M. SCOTT CHRISTIANSEN, Assistant exécutif auprès du Directeur général du Centre international pour la recherche agricole dans les zones arides, a prévenu que les changements climatiques vont exacerber l’aridité des zones déjà touchées par la sécheresse, zones dans lesquelles vivent 34% de la population mondiale. Or, 10 à 20% de la surface terrestre sont frappés par la sécheresse et 72% de ces zones se trouvent dans les pays en développement. Jusqu’à présent, on comptait sur la résistance des écosystèmes pour remédier aux effets du phénomène, mais ceux-ci sont en train de se dégrader: la sécheresse aggrave la dégradation des sols, qui aggrave en retour la sécheresse, a indiqué M. Christiansen. Pour rompre ce cercle vicieux, des systèmes d’alerte et de préparation sont nécessaires, de même que des filets de sécurité: il faut notamment constituer des stocks de grains pour pouvoir faire face aux mauvaises récoltes dues à la sécheresse et promouvoir plus de financement dans les domaines de la recherche et la science agricole et de son environnement naturel, a recommandé l’expert.
M. ENOS ESIKURI, Banque mondiale, a parlé de la stratégie adoptée par la Banque mondiale pour faire face à la sécheresse. La réponse à apporter contre les conséquences de ce phénomène ne doit pas se résumer seulement à l’aide alimentaire, a-t-il estimé, tout en reconnaissant l’importance de cette aide. Il faut aussi prendre en compte les notions de risque et de vulnérabilité, a dit M. Esikuri. La Banque mondiale estime qu’il faut mettre en place une stratégie rurale, et notamment une stratégie en matière d’eau. Quelles sont les « meilleures pratiques » qui doivent à cet égard être retenues? s’est interrogé l’expert. Le renforcement des capacités, les contributions, l’analyse en amont et la productivité agricole, sont les domaines dans lesquels il faut investir et mettre l’accent, a indiqué M. Esikuri, en réponse à la question. Au Brésil, par exemple, l’analyse en amont a permis d’obtenir des résultats impressionnants en matière de sécheresse, a-t-il relevé.
M. ESTANBACIOS CASTRO DIAZ, Consultant auprès du Conseil du traité international indien, a évoqué l’expérience acquise par les populations autochtones, qui sont à la fois victimes de la sécheresse et fournisseurs de solutions à ce problème. Il a cité en exemple le cas des populations yaki, du Mexique, qui utilisent différents types de semences afin de diversifier leurs cultures et s’adaptent ainsi à la sécheresse. L’impact de la sécheresse est extrêmement clair sur les autochtones, qui ont donc dû reconsidérer leurs modes de production pour les adapter aux conditions changeantes de leur environnement, a dit M. Castro Diaz. Mais cela n’est pas sans créer des problèmes, comme en témoigne le cas des populations vivant essentiellement de l’élevage. Leurs vies sont déchirées par des conflits entre tribus qui luttent pour le contrôle et l’usage des mêmes ressources. Ce n’est que dans de rares occasions que ces populations retrouvent leurs terres d’origine, étant donné qu’elles sont souvent forcées à la migration.
Discussion interactive
Ouvrant la discussion, le représentant de Tonga, qui s’exprimait au nom du Groupe des petits États insulaires du Pacifique, a déclaré que l’impact de la sécheresse se faisait ressentir surtout dans les zones rurales de la région. Une attention particulière devrait être accordée au renforcement des capacités institutionnelles et techniques et notamment à la mise en place de systèmes d’alerte rapide, à la prévention des risques, aux stratégies de surveillance, d’adaptation et d’atténuation des effets de ce phénomène, et ce, afin de réduire la vulnérabilité, a dit le représentant de Tonga.
De son côté, le représentant d’Antigua-et-Barbuda, a défendu, au nom du Groupe des 77 et de la Chine, la planification de la préparation aux risques et aux catastrophes. Il a souligné la nécessité, pour les pays développés, d’honorer les engagements qu’ils ont pris en vertu de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, dans la mesure où ce phénomène ne fait qu’exacerber celui de la sécheresse.
Prenant la parole au nom du Groupe de Rio, le représentant du Mexique a proposé de développer des alternatives pour améliorer l’agriculture pluviale et des mesures qui donnent la priorité à la collecte et à la gestion des précipitations pluvieuses.
La délégation de la Slovénie, qui parlait au nom de l’Union européenne, a abondé en ce sens, estimant qu’il fallait tirer le meilleur parti des eaux souterraines, qui forment des réserves aquifères stratégiques, mais qui doivent faire aussi l’objet d’une utilisation durable et rationnelle pour éviter les risques de surexploitation.
Le représentant des États-Unis a cité l’exemple de son pays, qui a adopté, en 2006, un système intégré d’information nationale sur la sécheresse, qui repose notamment sur une architecture nationale d’alerte rapide. Confronté à une sérieuse dégradation de certaines de ses terres sous l’effet de la sécheresse au siècle passé, le Canada a, lui aussi, adopté une stratégie nationale, qui vise à unir les provinces et les autres parties prenantes dans la lutte contre la sécheresse, à établir des systèmes de surveillance et à améliorer la préparation et la réponse aux phénomènes de sécheresse, a indiqué la délégation canadienne.
Enfin, la représentante du Groupe des ONG a déclaré que toutes les mesures proposées devaient être appliquées dans le respect des croyances et des modes de subsistance des communautés locales, un point de vue également soutenu par son homologue du Groupe des peuples autochtones.
Discussion thématique sur les sols
Les participants à la discussion thématique interactive sur les sols, animée par le Vice-Président de la Commission, M. TRI THARYAT (Indonésie), se sont notamment attachés à examiner les possibilités d’adapter la technologie et les systèmes d’information et de renforcer les capacités des communautés et des institutions en vue d’actions concertées à long terme pour protéger les sols et empêcher leur dégradation.
M. ASLAM CHAUDHRY, Division du développement durable, a présenté le rapport du Secrétaire général sur « l’examen de la mise en œuvre d’Action 21: les sols ». Dans ce rapport, le Secrétaire général souligne que la manière dont les terres et les ressources en eau sont utilisées, ainsi que les conditions climatiques, ont des répercussions sur l’état des ressources foncières. La dégradation des sols a des effets négatifs sur la productivité agricole et sur le développement rural. Pour inverser cette tendance, des investissements à long terme dans tous les secteurs et par tous les partenaires concernés seront requis. Pour le Secrétaire général, une gestion viable et efficace des sols implique de relever les défis suivants: assurer la sécurité d’occupation, renforcer les moyens dont disposent les populations locales, adapter les techniques de planification de l’utilisation des sols et améliorer la communication de données.
M. AMUKO OMARA, Union internationale des associations de travailleurs de l’alimentation, de l’hôtellerie, de la restauration et du tabac, a affirmé que les salariés qu’il représentait, au nombre d’environ 10 millions, vivaient sur la terre où ils travaillent. Leur mode de vie est lié à la terre, a-t-il dit, précisant qu’ils étaient saisonniers pour la plupart. Le moindre changement aura un impact sur leur mode de vie, a-t-il expliqué. Il a ainsi proposé à la Commission du développement durable de se pencher sur les problèmes auxquels font face ces travailleurs saisonniers.
Mme JOLYN SANJAK, Millenium Challenge Corporation (MCC), a affirmé que la politique d’exploitation des sols et le régime des droits fonciers allaient de pair. Pour que les stratégies d’exploitation soient efficaces, celles-ci doivent aborder les questions de régime foncier, a-t-elle précisé. Pour Mme Sanjak, les régimes de droit foncier et les politiques d’exploitation des terres ont des dimensions économique, écologique, sociale et culturelle.
M. ERICK FERNANDES, Département de l’agriculture et du développement rural à la Banque mondiale, a affirmé que les changements climatiques représentaient un défi important pour l’avenir des terres. Les effets des changements climatiques ont des coûts humains et de développements élevés, a-t-il dit, estimant que les décideurs devaient pouvoir compter sur des sources d’information fiables et solides. De même, a-t-il estimé, il faut tenir compte de l’importance du rôle des femmes et des enfants pour recueillir sur le terrain des connaissances utiles ou pour délivrer des informations au niveau local ou encore, aux générations futures.
Mme CLARISSA AUGUSTINUS, Programme des Nations Unies pour les établissements humains (ONU-Habitat), a souligné que les personnes touchées par les effets des changements climatiques allaient généralement se réfugier dans les villes, ce qui, a-t-elle dit, a des répercussions sur l’utilisation des sols. Elle a mis l’accent sur la nécessité de créer un nouveau système d’information incluant non seulement les informations juridiques de jure, mais aussi les informations juridiques de facto, portant, par exemple, sur les droits pastoraux.
M. MICHAEL TAYLOR, Coalition foncière internationale, a souligné la nécessité de réagir d’urgence, compte tenu de la précarité de la situation dans laquelle vivent les pauvres face aux nouvelles pressions pesant sur la terre. Il est possible, selon lui, de s’appuyer sur le travail de nombreuses parties prenantes, d’habiliter les pauvres en vue de faciliter leur accès à la terre, et de renforcer les capacités de la société civile. Il a préconisé, à cet égard, une plus grande collaboration entre les gouvernements, les institutions intergouvernementales et la société civile.
Parmi les représentants des États Membres qui se sont ensuite exprimés, celui d’Antigua-et-Barbuda, parlant au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a en particulier mentionné le fait que les pays en développement n’avaient pas la technologie nécessaire pour relever les défis liés à la terre. Il a plaidé en faveur d’une coopération internationale accrue dans ce domaine. Il a également estimé que la dégradation des sols avait des incidences sur le développement durable mondial.
Au nom de l’Union européenne, la représentante de la Slovénie a souligné, quant à elle, l’importance d’une planification intégrée et d’une gestion des terres au moyen de systèmes administratifs améliorés. Elle a ainsi mis l’accent sur la nécessité de prendre en compte différents aspects liés à la terre, comme l’agriculture, le développement rural, la protection des sols, les forêts, la conservation de la biodiversité et le tourisme. Elle a indiqué que la Stratégie thématique pour la protection des sols de l’Union européenne représentait une approche coordonnée et complète de la question.
Le représentant de Tonga, qui s’exprimait au nom des petits États insulaires en développement, a jugé que les approches participatives appropriées devaient être étendues afin de renforcer les systèmes de gouvernance fonciers et faire en sorte que les sols continuent d’être sources de croissance économique et d’emplois. Tout effort visant à améliorer le système de droit foncier doit aussi respecter les systèmes culturels traditionnels, a-t-il ajouté.
Plusieurs représentants ont énuméré les mesures que leurs gouvernements avaient prises en faveur d’une gestion efficace et efficiente des terres, contribuant ainsi à la promotion du développement durable. Ainsi, le représentant du Sénégal a-t-il dit que son pays avait, sous l’égide d’ONU-Habitat, lancé en 2003 deux campagnes globales sur la sécurité de l’occupation foncière et la bonne gouvernance. À l’issue de ces campagnes, a affirmé le représentant, un plan d’action a été élaboré pour servir de cadre à la facilitation de l’accès et à une meilleure gestion foncière. Son collègue de l’Inde a indiqué que son pays utilisait les progrès offerts par les technologies de l’information et de la communication pour améliorer la gestion des terres et les moyens d’existence des populations. De même, les droits à la terre des communautés sont reconnus, a-t-il dit.
La représentante de la Malaisie a souligné l’importance qu’il y a à disposer d’une base de données sur la propriété foncière, afin de procéder aux remembrements utiles et à la mise en valeur des terres non utilisées. Le délégué de la Suisse a lui aussi estimé que les données globales sur la qualité des sols étaient insuffisantes et devaient être impérativement actualisées.
Le représentant de la Chine a affirmé que grâce aux différentes mesures prises, son pays était parvenu à atteindre l’autosuffisance en matière d’alimentation et à exporter sur le marché mondial. La Chine, a-t-il ajouté, s’attache désormais à formuler des plans d’utilisation des sols, à utiliser les terres de la façon la plus efficace, et à améliorer la qualité des sols cultivés.
La déléguée d’Israël a indiqué que son pays cherchait à maximiser les constructions de logements dans les zones à forte concentration urbaine, ce, afin d’utiliser de manière plus efficace et efficiente les transports publics. Une infrastructure efficace est la clef d’une bonne gestion des sols, a-t-elle dit. Le représentant de l’Égypte a, de son côté, invité la communauté internationale à aider les pays en développement à faire face aux effets des changements climatiques en matière d’atténuation, d’adaptation et de transfert de technologies. Pour sa collègue de l’Argentine, les subventions agricoles sont un facteur de création de stress sur les sols. C’est un élément nocif dont il faut tenir compte, a-t-elle estimé.
Discussion thématique sur la question de la désertification
L’ampleur de la pauvreté rurale dans de nombreux pays en développement touchés par la désertification et la sécheresse, particulièrement en Afrique, reste le principal obstacle à la lutte contre la désertification, qu’elle freine considérablement. La pauvreté pose également un frein à l’application des mesures visant à atténuer la sécheresse.
Des progrès à long terme dans la lutte contre l’érosion des terres et la désertification dépendent pour une bonne part de l’adoption de pratiques et de méthodes d’agriculture et de pâturage plus durables. Ces questions ont été débattues cet après-midi par les participants aux travaux de la CDD-16 au cours d’une des tables rondes de la journée.
Mme KATHLEEN ABDALLA, Directrice de la Division du développement durable, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la désertification (E/CN.17/2008/7). Il s’agit là d’un problème mondial, qui a des incidences graves au plan de la sécurité écologique à l’échelle de la planète, de l’élimination de la pauvreté, de la stabilité socioéconomique et du développement durable, a-t-elle dit. Selon les indicateurs de bien-être humain et de développement, et notamment le produit national brut par habitant, l’accès à l’eau potable et à des installations sanitaires adéquates, et les taux de mortalité infantile, les populations des zones arides, dont 90% au moins vivent dans des pays en développement, se classent loin derrière le reste du monde.
Les populations démunies qui vivent dans les zones arides sont aux prises avec des difficultés multiples: perte de revenus, insécurité alimentaire, détérioration de la santé, précarité des régimes fonciers et des droits d’accès aux ressources naturelles, et difficultés d’accès aux marchés. La précarité des moyens d’existence les oblige souvent à partir s’installer dans des zones qui ne sont pas touchées par la désertification dans l’espoir d’y trouver une vie meilleure. Les sécheresses, plus fréquentes, et plus graves, que vont engendrer les changements climatiques, risquent d’exacerber encore plus le phénomène de désertification, note encore le rapport du Secrétaire général.
Dans ce contexte, il est indispensable que la communauté internationale renforce le soutien qu’elle accorde à la mise en œuvre des programmes de lutte contre la désertification et contre la dégradation des sols dans les pays en développement touchés, précise le rapport. Le Plan-cadre stratégique décennal adopté par la Conférence des parties à la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification, à sa huitième session, traduit l’engagement renouvelé de la communauté internationale à lutter contre la désertification, atténuer les effets de la sécheresse et lutter contre les changements climatiques. La Convention constitue un cadre qui favorise l’adaptation, la capacité de récupération et l’atténuation des effets du phénomène, conclut le rapport.
Déclarations
M. URIEL SAFRIEL, Point focal de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques pour Israël, a axé son intervention sur la définition de la désertification. Il a expliqué que celle-ci se produisait dans les terres sèches et se traduisait par un déclin persistant de la productivité biologique, en raison du manque d’eau. M. JEFF HERRICK, Département de l’agriculture des États-Unis, a de son côté rappelé qu’il n’y avait pas suffisamment de ressources pour réhabiliter toutes les terres qui ont subi les effets de la désertification. Il a donc estimé qu’il fallait déterminer dans un premier temps ce qu’il est possible de faire en se fondant sur les particularités des climats et des connaissances locales. Ensuite, déterminer ce qui est réalisable en s’appuyant sur les sols et la végétation. Enfin, a conclu l’expert, en mettant en place des projets, puis en assurant une surveillance.
Mme SANJAY KUMAR, Inspectrice générale adjointe au Ministère de l’environnement et des forêts de l’Inde, a évoqué la situation en Inde, où la désertification se trouve aggravée par un taux de pauvreté rurale extrêmement élevé. Or, une des caractéristiques des zones arides, c’est que les personnes qui y vivent sont largement tributaires des ressources communautaires. Cependant, il n’a pas toujours été tenu compte des liens avec les organisations locales par le passé. C’est pourquoi l’Inde a lancé en 2008 un programme très important, qui prévoit de mettre en place des arrangements institutionnels avec les autorités locales pour participer à la lutte contre la désertification, a expliqué l’experte.
Mme NANCY KGENGWENYANE, US Agency For International Development (USAID), a évoqué le cas de l’Afrique, où les pratiques agricoles doivent être conciliées avec la lutte contre la désertification. Les pratiques agricoles et pastorales font dans ce continent partie intégrante du processus de développement, a-t-elle dit. Des études prouvent que les formes non viables de l’agriculture, basées sur la dégradation des terres et le surpâturage, ne font qu’aggraver la désertification, a indiqué l’experte. Il faut donc privilégier une approche holistique, basée sur de bonnes pratiques communautaires, a-t-elle recommandé. Une bonne gouvernance est également indispensable pour gérer les conséquences de la désertification.
Discussions interactives
Le représentant de la Suisse a estimé que l’urgence pour la communauté internationale était de mettre en place un partenariat mondial, qui vise à enrayer et à prévenir la désertification et la dégradation des sols. Ce partenariat concerne également l’atténuation des effets de la sécheresse dans les zones touchées afin de concourir à la réduction de la pauvreté et à une sauvegarde de conditions environnementales propices à la survie de la population.
Le représentant d’Antigua-et-Barbuda, qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et de la Chine, a indiqué que seule la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification pourrait permettre de relever ces défis. Il s’est ensuite déclaré très déçu que le Mécanisme mondial, établi lors de la première Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, n’ait pas été en mesure de mobiliser les ressources financières et technologiques des pays développés pour les mettre à la disposition des pays en développement qui sont dans le besoin. Elles sont en effet indispensables pour leur permettre de relever les défis climatiques et notamment la désertification, a-t-il expliqué.
Ce constat a été repris par le représentant de Djibouti, qui s’exprimait au nom du Groupe africain, et qui a appelé la communauté internationale à intensifier la lutte contre la désertification en Afrique, le continent le plus touché par ce phénomène, à travers un financement adéquat, des transferts de technologies, le renforcement des capacités et l’assistance à la recherche et au développement.
La représentante de la Slovénie, qui a pris la parole au nom de l’Union européenne, a indiqué que celle-ci avait intégré la question de la lutte contre la dégradation des terres dans son partenariat climatique avec l’Union africaine.
Le représentant du Groupe des ONG a estimé à 60 millions le nombre des « réfugiés climatiques », dont la plupart fuient les zones arides.
Celui du Canada a expliqué que son pays avait aidé de nombreux pays à mettre en place des projets de lutte contre la désertification, qui reposent sur des pratiques de conservation autochtones et des approches holistiques.
Enfin, le représentant de la France a déclaré que dans le cadre d’une telle approche, son pays militait pour la synergie entre la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification.
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