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DSG/SM/412-AIDS/144

LA VICE-SECRÉTAIRE GÉNÉRALE AFFIRME QUE LA PANDÉMIE DE VIH/SIDA ÉRODE LES GAINS DU DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE

09/09/2008
Vice-Secrétaire généraleDSG/SM/412
AIDS/144
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

LA VICE-SECRÉTAIRE GÉNÉRALE AFFIRME QUE LA PANDÉMIE DE VIH/SIDA ÉRODE LES GAINS DU DÉVELOPPEMENT EN AFRIQUE


Il est impératif d’effectuer des recherches pour renforcer les stratégies de base contre cette maladie


On trouvera ci-après le texte des remarques sur les dimensions socioéconomiques du VIH/sida que la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Asha-Rose Migiro, a formulées le 9 septembre à New York à l’occasion de la conférence à l’Université des Nations Unies et Cornell Lecture Series.


C’est un honneur pour moi que de m’adresser à cette troisième conférence de la série Afrique de l’Université des Nations Unies et de l’Université de Cornell.  Tous les thèmes sélectionnés pour cette série revêtent une importance critique pour l’Afrique mais aucun avec la même urgence que le VIH/sida.


La pandémie érode les gains du développement de l’après-indépendance dans de nombreuses parties de l’Afrique.  Ces défis doivent impérativement faire l’objet d’une réflexion collective et je me réjouis que vous soyez rassemblés ici pour assumer cette tâche.  Comme vous le savez, l’Afrique est jusqu’à présent le continent le plus touché par le VIH/sida.  Selon certaines estimations, au cours de la seule année 2007, 1,6 million des gens de l’Afrique subsaharienne seraient morts du sida et 22,5 millions des gens vivraient avec le VIH.


L’épidémie frappe en plein cœur le développement humain en tuant de jeunes adultes à l’âge où ils devraient être les plus productifs.  Les pertes en vies humaines et l’affaiblissement des capacités humaines privent les communautés de leurs ressources les plus précieuses.


Dans les pays à forte prévalence, l’épidémie prive systématiquement de travailleurs qualifiés, des secteurs –comme ceux de la santé, de l’éducation et de l’agriculture– entraînant une baisse de la productivité nationale globale.  Nombre des secteurs ainsi lourdement frappés sont déjà dans une situation difficile et l’effet de multiplication s’avère accablant.


Évaluer l’impact économique global n’a pas été une tâche facile.  Plusieurs études, faisant appel à diverses méthodes de modélisation économique, indiquent que dans les pays les plus touchés de l’Afrique, l’épidémie fait baisser le taux de croissance moyen du PIB (produit intérieur brut) dans une proportion allant de 0,5 à 4%.  Quel que soit ce chiffre, il représente une perte importante pour des pays pauvres dont les économies devraient se développer au lieu de ralentir.


Alors, oui, la rigueur est de mise dans la recherche, mais j’encourage les chercheurs à penser aussi à nos besoins.  Il serait très précieux pour des organismes comme les nôtres ou pour les ONG qui travaillent en Afrique de pouvoir tirer de la recherche des conclusions pragmatiques qui aident à renforcer les activités sur le terrain.  Cela aiderait aussi les gouvernements à élaborer leurs stratégies.


Par ailleurs, nous avons besoin de davantage d’informations sur la nature exacte de la maladie selon la zone où elle sévit.  Les effets du sida varient de pays à l’autre comme d’une région à l’autre à l’intérieur d’un même pays.  Je considère qu’à l’intérieur d’un même pays, la Commission du VIH/sida et de la gouvernance en Afrique a très bien défini la situation, lorsqu’elle a fait observer dans un rapport récent, que l’Afrique était victime de plusieurs épidémies.


En Afrique australe, le taux d’infection est en baisse dans certaines villes, tandis que dans d’autres, il continue d’augmenter.  Dans certaines régions, le taux d’infection des jeunes filles et des femmes est jusqu’à six fois supérieur à celui des garçons et des hommes.  Ces variations ont certes fait couler beaucoup d’encre mais on n’en a pas suffisamment tenu compte au niveau des politiques ou stratégies d’intervention nationales.


Prenons l’exemple du Botswana, pays africain dont l’économie est relativement prospère et où le taux de prévalence s’établit à 17,1% pour l’ensemble de la population.


Depuis son indépendance, en 1966, et jusqu’en 1989, le Botswana a vu son PIB augmenter en moyenne d’environ 13% par an.  Or, lorsqu’il a commencé à se ressentir des effets du sida, à partir de 1990, il a vu ce même taux diminuer de plus de la moitié, passant à 6%.  L’espérance de vie à la naissance a chuté également brutalement, passant de 65 ans pendant la période allant de 1990 à 1995, à moins de 40 ans de 2000 à 2005.


Dans l’ensemble de l’Afrique, les individus et les communautés ont relevé ce défi avec un courage et un esprit d’initiative remarquables.  Leurs souffrances sans nom soulèvent néanmoins plusieurs questions importantes:


Comment les individus et les foyers modifient-ils leur comportement dans un environnement où l’espérance de vie a chuté de cette façon?  Les gens seront-ils disposés à investir dans l’avenir ou bien considéreront-ils qu’ils n’ont pas d’avenir?  Comment les sociétés vont-elles s’adapter à la perte de parents, de compagnons et de beaucoup d’autres, fauchés par la maladie à l’apogée de leur vie active?


Nous pouvons trouver quelques réponses à ces questions en menant des études centrées sur les individus, les ménages et les petites entreprises, en vue de mettre en lumière l’incidence de la maladie au niveau local et orienter politiques et interventions en conséquence.


Des études sur les ménages effectuées en Éthiopie, au Malawi, en Ouganda, en Zambie et au Zimbabwe font ressortir que les familles touchées dépensent davantage en médicaments et ont des revenus moindres, soit parce que le soutien de famille est malade, soit parce qu’il ou elle s’occupe de proches atteints par la maladie.  Les entreprises sont touchées à leur tour, par l’absentéisme pour cause de maladie d’un travailleur ou d’un membre de sa famille, par la hausse du coût des prestations et des soins médicaux, par les frais d’obsèques pour les employés, par la réduction des effectifs pour cause de maladie ou de décès et par les efforts qu’elles doivent faire pour recruter du nouveau personnel.


Les travaux de recherche devraient déboucher sur des recommandations quant aux mesures à inclure dans les stratégies nationales de lutte contre la maladie.  Peu d’études ont su, à ce jour, produire des données sur les ménages à prendre en compte dans des plans d’action nationaux.  Il est encourageant que votre conférence se penche sur les méthodologies de recherche.


Les chercheurs se plaignent souvent du manque de statistiques exactes dans nombre de pays africains, qui complique la collecte d’informations à des fins d’évaluation scientifique.  Je tiens à souligner ici l’importance des connaissances locales.


Faites appel à des universités et à des centres de recherche locaux pour étayer systématiquement les informations.  Ils se trouvent en Afrique, opèrent en Afrique et vivent dans les communautés touchées.  La qualité de l’information disponible s’en trouvera améliorée.


Je félicite cette assemblée d’avoir invité des orateurs et des experts qui travaillent et qui vivent en Afrique.  Mais j’aimerais aller plus loin encore et inviter l’Université des Nations Unies, l’Université Cornell ainsi que tous les chercheurs et toutes les universités représentées ici aujourd’hui à établir des partenariats durables avec des institutions africaines.


Les organisations internationales devraient, de même, commanditer davantage de travaux auprès d’institutions africaines.  Le savoir est l’une des clefs du développement.  Les institutions africaines sont les mieux placées pour combler ses lacunes éventuelles.  Une telle collaboration les connectera directement au programme de recherche international, tout en leur permettant de conserver leur main-d’œuvre qualifiée sur le continent.


La stigmatisation continue d’être une question cruciale dans la lutte contre le VIH.  Presque partout dans le monde, la discrimination reste une réalité quotidienne pour les personnes qui vivent avec le virus, pour les hommes qui ont des rapports homosexuels, pour les consommateurs de drogues injectables et pour les autres communautés exposées au risque.


La stigmatisation reste le principal obstacle à toute action publique.  C’est la raison principale pour laquelle beaucoup de gens ont peur de consulter un médecin pour savoir s’ils sont ou non contaminés ou de se faire soigner.  La stigmatisation fait du sida un tueur silencieux, puisque les gens redoutent d’être mis au ban de la société lorsqu’ils parlent ouvertement de cette maladie ou lorsqu’ils prennent des précautions à la portée de tous.


Par ailleurs, la stigmatisation est l’une des grandes raisons pour lesquelles le sida continue de faire des ravages dans les sociétés du monde entier.  On le voit clairement dans le cas des jeunes femmes qui, dans nombre de pays, forment le groupe le plus exposé au risque de contamination par le VIH.  La plupart d’entre elles appréhendent de demander des conseils de prévention ou bien ne croient pas à la confidentialité du programme de dépistage volontaire.  Les programmes d’information devraient viser directement les jeunes femmes et la législation doit les protéger des représailles.


Nous pouvons combattre la stigmatisation avec des lois et politiques avisées.  Mais, plus important encore, ces mesures doivent être rigoureusement appliquées.  Dans nombre de pays, les bonnes politiques n’existent que sur le papier et rien n’est prévu pour les faire respecter.  Les femmes sont moins vulnérables à l’infection là où les lois qui les protègent sont appliquées et là où la loi leur reconnaît le droit d’hériter.


Cela suppose de l’esprit d’initiative à tous les niveaux de la société.  Des présidents aux professeurs, en passant par les chefs religieux et traditionnels et les médias – nous avons tous le devoir de nous exprimer haut et clair contre la discrimination.


Le Secrétaire général a montré sa capacité de direction dans le combat contre le VIH, qu’il considère comme prioritaire.  Il a, en outre, témoigné de son engagement, en rencontrant régulièrement des fonctionnaires qui vivent avec le VIH et en les écoutant.  Il s’appuie souvent sur l’expérience personnelle ainsi accumulée pour faire campagne contre la stigmatisation et la discrimination.


L’ensemble des organismes des Nations Unies est engagé dans ce combat.  Les équipes de pays des Nations Unies s’occupent à renforcer les réponses multisectorielles à caractère national, au moyen de programmes coordonnés, en fournissant un appui technique et jouant un rôle d’intermédiaire entre des partenaires essentiels – en particulier la société civile, notamment ceux qui vivent avec le VIH.


ONUSIDA orchestre les efforts et les ressources de 10 organismes des Nations Unies au service de la lutte contre le sida.  Pour ce qui concerne spécifiquement le développement, le PNUD collabore avec des pays africains, en vue de raffermir le cadre macroéconomique qui favorise un financement durable de la lutte contre le sida et l’élargissement de l’accès à des médicaments de qualité et à des prix abordables pour ceux qui sont dans le besoin.


La lutte contre le VIH/sida est une de celles qu’ensemble, nous pouvons gagner.  Les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) prévoient que d’ici à 2015, l’on aura arrêté et commencé à inverser la progression du VIH.


Dans ce contexte, il faut assurer l’universalité de l’accès au traitement d’ici à 2010.  Nous devons également transposer les leçons et les succès de la lutte contre le sida à d’autres OMD relatifs à la santé.


Vous venez de divers horizons et vous vous êtes colletés avec les divers problèmes qui vous sont soumis aujourd’hui, parfois de manière différente.  Je suis persuadée que vos échanges seront féconds et que vous tirerez profit de toutes vos expériences.


Il faut que vous réussissiez; vous ne pouvez pas échouer.  Sachez que vous pouvez compter sur le Secrétaire général et sur moi pour vous soutenir énergiquement dans vos efforts.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
À l’intention des organes d’information. Document non officiel.