CONFÉRENCE DE PRESSE SUR LE LANCEMENT DE L’ÉTUDE « EMPLOIS VERTS: VERS UN TRAVAIL DÉCENT DANS UN MONDE DURABLE À FAIBLE TAUX DE CARBONE »
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CONFÉRENCE DE PRESSE SUR LE LANCEMENT DE L’ÉTUDE « EMPLOIS VERTS: VERS UN TRAVAIL DÉCENT DANS UN MONDE DURABLE À FAIBLE TAUX DE CARBONE »
Comment la transition vers une économie plus « verte » sera-t-elle concrètement reflétée dans le monde du travail? Tel est le thème du rapport « Green jobs: Towards decent work in a sustainable, low carbon world » (Emplois verts: Vers un travail décent dans un environnement durable à faible taux de carbone) lancé ce matin au cours d’une conférence de presse conjointe tenue au Siège de l’ONU, à New York, par Juan Somavía, Directeur général de l’Organisation internationale du Travail (OIT); Achim Steiner, Directeur exécutif du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE); Guy Ryder, Secrétaire général de la Confédération syndicale internationale (CSI), et Ronnie Goldberg, Vice-Présidente de l’Organisation internationale des employeurs (OIE).
Comme l’a rappelé M. Steiner, la transition vers une économie plus verte, plus intelligente, et moins polluante dans l’utilisation des ressources de la planète, est déjà en cours. Mais la question est de savoir comment cette transition sera vécue par le monde du travail, aussi bien les employeurs que les employés. Le rapport cherche donc à montrer quelles seront les tendances dans un tel monde. Mais il souhaite aussi servir d’inspiration pour de futures actions, aussi bien dans le monde développé que dans les pays en développement. Il ne s’agit pas de donner une « définition mathématique » de ce qu’est « l’économie verte » mais plutôt de voir où, dans la transition vers cette nouvelle économie, de nouveaux secteurs seront susceptibles d’émerger, des emplois créés et des investissements mobilisés. Nous ne pouvons plus nous offrir les énormes gâchis du type d’économie qui a prévalu au XXe siècle. Il faut passer à une économie moins gourmande en combustibles fossiles et plus « cyclique » qui ne traite plus les déchets comme tels en s’en débarassant purement et simplement mais plutôt les recycle et les réutilise. Citant en exemple la production de quelque 1,3 milliard de pneumatiques qui sont généralement jetés après usage, ce qui pose de graves problèmes à l’environnement, M. Steiner a indiqué avoir rencontré un entrepreneur de Malaisie qui entend recycler de vieux pneus et produire ainsi un « caoutchouc vert » qui sera utilisé par un grand fabricant de chaussures. Des actions de ce type ne peuvent plus être considérées comme de simples niches commerciales; il faut plutôt les percevoir comme des initiatives permettant de créer des millions d’emplois, a t-il ajouté.
Achim Steiner a en outre rappelé qu’environ 300 milliards de dollars sont investis chaque année dans les industries liées aux énergies fossiles, alors qu’en 60 ans, 17 milliards seulement l’ont été pour renforcer l’efficacité énergétique. Ces chiffres montrent qu’il existe un potentiel énorme d’orientation de l’économie, a ajouté le Directeur exécutif du PNUE, qui a invité chacun à imaginer ce qui pourrait être fait si une fraction seulement des quelque 1 000 milliards de dollars qui risquent d’être investis en un seul mois dans la stabilisation du système financier du XXe siècle l’étaient au profit d’activités et de secteurs « verts ».
Dans la perspective de l’OIT, la transition actuelle représente un défi d’ampleur mondiale pour les entreprises et les employés, a indiqué pour sa part Juan Somavía. Aussi bien les gouvernements que le monde du travail doivent apporter leur aide pour faire en sorte que cette transition se passe bien, a-t-il préconisé. La transition en question est déjà en cours, a rappelé le Directeur général de l’OIT, citant l’exemple de l’Allemagne où le secteur des énergies renouvelables dépassera dans les 10 ans à venir en importance celui de l’industrie automobile ou des machines-outils. Le défi à relever est mondial, car la moitié des 2,3 milliards d’emplois de la planète se trouve aujourd’hui dans le monde développé et le « verdissement » de l’économie se doit aussi de prendre en compte le sort des plus pauvres d’entre les pauvres qui sont concernés. Il faut d’autre part que les « emplois verts » soient des emplois décents ce qui n’est pas automatiquement acquis. M. Somavía a cité sur ce point les millions d’emplois existant dans le secteur du recyclage des composants d’ordinateurs ou de téléphones qui se pratique notamment dans les pays en développement mais où « beaucoup trop souvent, la première chose qui va à la poubelle, ce sont les règles de sécurité et d’hygiène ».
En outre, si, dans la nouvelle « économie verte », des emplois seront créés, d’autres seront transformés, tandis que d’autres disparaîtront, a observé le Directeur général de l’OIT. Pour s’assurer le soutien des opinions publiques et la volonté politique des dirigeants, il faudra donc, dès le départ, mettre en place des politiques consacrées à ceux qui vont souffrir de cette transition, afin d’éviter ce qui s’est passé avec la libéralisation du commerce, où l’on a d’abord uniquement insisté sur les aspects positifs de l’ouverture commerciale avant d’en reconnaître plus tard les aspects négatifs. Aller vers une économie plus verte n’est pas seulement une affaire de financement et de technologies, mais aussi une question ayant un impact sur des êtres humains, des sociétés, et entraînant des changements culturels, a-t-il rappelé. C’est donc essentiellement une question de leadership qui se pose dans tous les domaines.
M. Guy Ryder, le Secrétaire général de la Confédération syndicale internationale, a estimé que le monde des syndicats a réussi à comprendre en très peu de temps à la fois ses responsabilités et l’urgence d’agir pour construire une économie plus respectueuse de l’environnement. Il a reconnu qu’il y a cinq ans, la communauté syndicale était incapable d’approuver le Protocole de Kyoto car elle craignait pour les emplois de ses membres. Puis, très rapidement, le mouvement syndical international s’est rallié à l’objectif conseillé par les experts de l’ONU d’une réduction de 85% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050, a indiqué Guy Ryder. Le Secrétaire général de la Confédération syndicale internationale a estimé qu’il est parfaitement possible de concilier les actions contre les changements climatiques avec le programme en faveur des emplois « verts ». La plus grande menace pour l’emploi consisterait à ne rien faire, a-t-il ajouté, tout en précisant que la création d’emplois « verts » décents, si elle est possible, ne sera pas automatique du seul fait du marché, mais qu’elle exigera des politiques publiques volontaristes au niveau international. Il faudra aussi obtenir rapidement un accord sur les objectifs au-delà du Protocole de Kyoto, a-t-il estimé.
M. Ryder a vu dans le rapport un grand pas en avant car il apporte une vision de ce qu’il faut faire. Il faut convaincre les opinions publiques que le mouvement en faveur de la promotion de cette économie plus respectueuse de l’environnement ne sera pas perçu par les individus comme allant à l’encontre de leurs ambitions et rêves personnels. Citant le rêve de posséder une petite automobile individuelle bon marché, qui fut celui d’une génération d’Américains, de Français ou d’Italiens, il s’est demandé comment il serait possible de dire aujourd’hui à un Indien qu’il ne saurait avoir le même rêve, car la possession de l’objet convoité n’est pas compatible avec la création d’un environnement soutenable. Je n’ai donc pas de réponse à cette question mais c’est ainsi que les gens voient certainement le problème, a expliqué M. Ryder. Il faut donc
qu’employeurs et employés travaillent ensemble, sans quoi les objectifs de Kyoto ne seront pas acceptés par les populations, a-t-il prévenu.
Mme Ronnie Golderg, la Vice-Présidente de l’Organisation internationale des employeurs qui représente 146 organisations patronales présentes dans 138 pays, a déclaré que, selon des estimations, le secteur privé devra apporter environ 85% des ressources nécessaires pour relever le défi posé par les changements climatiques. Ces investissements se feront à la fois directement dans la nouvelle économie « verte » et dans l’ancienne économie pour lui permettre d’assurer la transition nécessaire, par exemple dans le secteur essentiel des infrastructures, a-t-elle estimé. Elle a notamment insisté sur la nécessité de ne pas faire des distinctions trop marquées entre activités « vertes » et activités qui seraient « non vertes », se félicitant de la notion de « nuances de vert » évoquée dans le rapport. Les entreprises responsables, a-t-elle affirmé, traiteront les défis des changements climatiques avec le même sérieux que tout élément les affectant à large échelle, a-t-elle dit. Elle a également souhaité que la notion d’« emploi décent » soit définie au niveau local ou national. Il n’y aura pas un modèle universel d’« emploi vert » mais il y aura certainement une grande variété « d’économies vertes », a-t-elle estimé.
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