CONFÉRENCE DE PRESSE DU COORDONNATEUR DES SECOURS D’URGENCE, JOHN HOLMES, SUR LA SITUATION HUMANITAIRE AU MYANMAR
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CONFÉRENCE DE PRESSE DU COORDONNATEUR DES SECOURS D’URGENCE, JOHN HOLMES, SUR LA SITUATION HUMANITAIRE AU MYANMAR
« Malgré les petits signes de progrès, la frustration est toujours là et elle est d’autant plus grande que les risques d’épidémies commencent à se profiler à l’horizon », a déclaré aujourd’hui le Coordonnateur des secours d’urgence face au refus du Gouvernement du Myanmar d’autoriser le personnel humanitaire étranger à accéder aux 1,5 million de personnes gravement affectées par le passage du cyclone Nargis, les 2 et 3 mai dernier.
De lourdes pluies s’abattent sur le Myanmar mais rien ne signale l’arrivée d’un autre cyclone, a-t-il rassuré, en arguant que sans une réponse multinationale, il est impossible que les efforts soient à la hauteur des besoins. M. John Holmes, qui a donné aujourd’hui sa quatrième conférence de presse depuis le passage du cyclone, a estimé que la clef de la solution réside dans la logistique. « Je parle d’hélicoptères, de navires, de camions au moment même, a-t-il ajouté, où les autorités du Myanmar rejettent les propositions faites en ce sens par les pays voisins ».
Le Coordonnateur des secours d’urgence a dit attendre beaucoup de la réunion que le Secrétaire général de l’ONU doit tenir, cet après-midi, avec les États Membres de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (ANASE) « pour changer la dynamique et sortir de ce qui commence à ressembler à un blocage regrettable et inacceptable ». C’est avec la « bénédiction » du Secrétaire général que le Premier Ministre thaïlandais se rend aujourd’hui à Rangoun, a indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence.
M. Holmes a écarté l’idée de procéder à des opérations de largage non autorisées car, selon lui, ce n’est pas le moyen le plus efficace de distribuer l’aide humanitaire et de toucher les populations affectées. Ce n’est pas l’aide qui est refusée mais le personnel étranger, a-t-il rappelé.
Sur les 200 professionnels que l’ONU voudrait déployer sur le terrain, 100 sont toujours interdits d’accès aux zones dévastées même s’ils ont « un bon degré de pouvoir décisionnel sur la répartition de l’aide ». Jusqu’ici, s’est expliqué le Coordonnateur des secours d’urgence, aucune pression n’a été exercée pour privilégier tel ou tel village. Tous les efforts de distribution de l’aide sont confiés au personnel local de l’ONU, des ONG internationales ou du Comité national de la Croix-Rouge qui accomplissent « un travail héroïque ».
Si le personnel local est toujours majoritaire dans toutes les opérations de secours, il est néanmoins impératif qu’il soit encadré par un personnel international expérimenté dans l’organisation et la coordination de l’assistance humanitaire, a expliqué le Coordonnateur des secours d’urgence. Il a qualifié de « louable » la volonté de certaines ONG internationales d’organiser des cours de formation d’urgence pour le personnel local mais, a-t-il alerté, « le temps presse ».
Il a souligné qu’en temps normal, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), lui-même, dispense des cours de formation, par l’intermédiaire de ses équipes d’évaluation et de coordination en cas de coordination dont les membres ne sont pas des fonctionnaires mais volontaires.
Au titre des bonnes nouvelles, le Coordonnateur des secours d’urgence a cité la remise en fonction des ports de Rangoun. Il a également cité l’ouverture « sélective » du Gouvernement du Myanmar qui a autorisé le déploiement de 160 agents humanitaires de la Thaïlande, du Bangladesh, de l’Inde et de la Chine. C’est mieux que rien, a commenté M. Holmes, en s’interrogeant néanmoins sur la date effective de leur arrivée et sur la manière dont ils vont s’intégrer dans les efforts de coordination.
Comme autre signe positif, M. Holmes a attiré l’attention sur les 25 à 30 vols spéciaux qui ont atterri à Rangoun depuis le passage du cyclone et sur la poursuite des vols réguliers dont certains sont affrétés gratuitement par des organisations humanitaires. Mais quelle proportion de cette aide arrive vraiment aux populations? s’est inquiété le Coordonnateur des secours d’urgence qui a tout de même reconnu « un mieux ».
M. Holmes a révélé que les enquêtes menées jusqu’ici n’ont pu confirmer un détournement massif de l’aide. Le Programme alimentaire mondial (PAM) a réussi à faire entrer 700 tonnes de riz, de biscuits énergétiques et de haricots secs. Il s’approvisionne aussi auprès des producteurs locaux. Les travaux de réhabilitation des hôpitaux avancent et, à ce jour, 25 000 des 250 000 abris nécessaires ont été construits. Des produits pour rendre l’eau potable continuent également à être acheminés dans le pays, a indiqué M. Holmes.
Les informations nous parviennent au goutte-à-goutte et il est difficile de voir comment sans une forte présence internationale, on pourra éviter l’aggravation de la situation humanitaire, s’est alarmé M. Holmes. Les gens commencent à se déplacer vers des zones plus sèches, faisant naître une situation de risque sanitaire où quelque 550 000 personnes sont regroupées dans des camps rudimentaires.
Compte tenu de la paralysie du Conseil de sécurité et du Conseil des droits de l’homme, l’ONU est-elle vraiment bien placée pour trouver les moyens de débloquer la situation? Qui d’autre que l’ONU pourrait le faire, a répondu le Coordonnateur des secours d’urgence, en insistant sur le fait qu’on ne peut pas forcer un Gouvernement à faire ce que nous attendons de lui ».
Tout ce que l’on peut faire, a-t-il précisé, c’est solliciter l’aide des pays de l’ANASE qui entretiennent des relations bilatérales et des liens étroits avec le Myanmar. Il serait d’ailleurs dangereux de voir dans cette situation un test pour le concept de « responsabilité de protéger »* qui n’est peut-être pas applicable dans ce cas.
M. Holmes n’a pas pu confirmer les informations selon lesquelles le barrage de l’accès aux zones touchées serait motivé par une volonté politique d’isoler la communauté ethnique karen. Il a dit ne rien savoir non plus du fait que ce barrage soit lié aux préparatifs du référendum constitutionnel qui, tenu le 10 mai dernier, a été reporté de 15 jours dans les zones touchées par le cyclone.
Selon les chiffres officiels, le cyclone a provoqué 38 491 morts et 27 838 personnes disparues dans la capitale Rangoun et la région du Delta. Vendredi dernier, les institutions de l’ONU ont lancé un Appel-éclair visant à collecter une somme de 187 millions. Après les estimations du PAM, la somme a été révisée et s’élève désormais à 200 millions de dollars.
À ce jour, 150 millions de dollars ont été reçus ou promis, a indiqué le Coordonnateur des secours d’urgence, en ajoutant qu’à long terme, il faudra des investissements dans les infrastructures et l’agriculture que la Banque mondiale estime déjà à 243 millions de dollars.
* « Responsabilité de protéger les populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l’humanité », principe adopté par les chefs d’État et de gouvernement lors du Sommet mondial que l’Assemblée générale a tenu en septembre 2005
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