ASSEMBLÉE: LE PRÉSIDENT DE LA CPI PLAIDE POUR LE RESPECT DU MANDAT ET DE L’INDÉPENDANCE DE LA COUR « SURTOUT LORSQUE LES CIRCONSTANCES PARAISSENT DIFFICILES »
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Assemblée générale
Soixante-troisième session
34e et 35e séances plénières – matin et après-midi
ASSEMBLÉE: LE PRÉSIDENT DE LA CPI PLAIDE POUR LE RESPECT DU MANDAT ET DE L’INDÉPENDANCE DE LA COUR « SURTOUT LORSQUE LES CIRCONSTANCES PARAISSENT DIFFICILES »
« Il est particulièrement important, lorsque les circonstances paraissent difficiles, de réaffirmer et de respecter le mandat et l’indépendance de la Cour pénale internationale (CPI), a déclaré aujourd’hui à l’Assemblée générale, le Président de la CPI, Philippe Kirsh, qui présentait son rapport annuel aux côtés de son homologue de la Cour internationale de Justice (CIJ), Rosalyn Higgins.
Le Président Kirsh a d’emblée rappelé les États à leur obligation de coopérer avec la Cour, en insistant sur le fait qu’à ce jour sept mandats d’arrêts sont toujours non exécutés, dont ceux lancés contre Joseph Kony, Chef de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), Ahmad Harun, Ministre des affaires humanitaires du Soudan, et Bosco Ntaganda, membre du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), mouvement du général dissident Laurent Nkunda en République démocratique du Congo (RDC).
Philippe Kirsh a indiqué que la demande du Procureur de la CPI visant un mandat d’arrêt à l’encontre du Président soudanais, Omar Al-Bashir est en cours d’examen par des juges « qui décideront indépendamment s’il y a ou non des motifs raisonnables de croire que M. Al-Bashir a commis des crimes relevant de la compétence de la Cour ». Le 15 octobre, a-t-il encore rappelé, la Chambre a demandé au Procureur de lui présenter pour le 17 novembre, des éléments supplémentaires à l’appui de certains aspects de la demande de délivrance d’un mandat d’arrêt.
Dans sa longue intervention, M. Kirsch a jugé important d’éviter des idées fausses au sujet de la nature juridique de la CPI ou de la corrélation entre justice et paix. La CPI, a-t-il souligné, a été créée sur la base de la conviction que la justice et la paix sont complémentaires.
Le représentant du Soudan s’est élevé contre ces propos, en réaffirmant que la décision du Procureur de la CPI remet en cause les processus de paix. Il a estimé que l’« action catastrophique » du Procureur n’est qu’un maillon de la chaîne de « conspirations flagrantes » visant à déstabiliser le Soudan. Son homologue du Nigéria a d’ailleurs rappelé qu’une requête de sursis à poursuivre a été introduite. Il a espéré que la communauté internationale ne permettra pas la politisation du processus.
De son côté, Rosalyn Higgins, Présidente de la CIJ, a annoncé d’emblée que l’année écoulée avait été la plus productive de l’histoire de la Cour qui a rendu quatre arrêts et une ordonnance en indication de mesures conservatoires. Elle a également signalé, à la grande satisfaction des délégations réunies, que la CIJ avait réussi à rattraper son retard dans l’examen des affaires.
La Présidente a également expliqué qu’il y a 15 jours, concernant l’affaire Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), la Cour a prescrit aux parties de garantir la sureté et la liberté de circulation des personnes, ainsi que la protection des biens, des personnes déplacées et des réfugiés.
Mme Higgins a également promis que la Cour traiterait avec « toute la célérité requise » la question de savoir si la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo était conforme ou non au droit international, dont l’a saisie l’Assemblée générale à la demande de la Serbie.
Commentant le travail des deux Cours, parmi une quarantaine d’autres interventions, la représentante de l’Inde a dit craindre qu’avec la création de nombreux tribunaux et organes régionaux et internationaux spécialisés, une certaine fragmentation du droit international ne se profile à l’horizon. Elle a appelé à un équilibre entre, d’une part, le besoin de diversité et de régimes spécialisés et, de l’autre, le maintien d’un cadre juridique international capable d’offrir un degré suffisant de sécurité et de cohérence.
Son homologue de l’Égypte a proposé que, dans le cadre de la réforme globale des organes de l’ONU, l’Assemblée générale tienne un débat informel pour identifier, en vue de les résoudre, les principaux problèmes qui entravent l’exécution optimale des fonctions de la Cour.
La Présidente de la CIJ a par ailleurs signalé que seul trois des neuf postes de référendaires demandés par la Cour avaient été approuvés. La CIJ, a-t-elle dit, est la seule grande juridiction dont les juges ne bénéficient pas d’une assistance. Mme Higgins a également demandé la mise en place d’un mécanisme d’ajustement du régime des pensions des juges qui tienne compte de l’augmentation du coût de la vie et de la fluctuation des taux de change.
L’Assemblée générale a, par ailleurs, approuvé la recommandation faite hier* par son Bureau d’examiner le rapport du Conseil des droits de l’homme à la fois en séance plénière et à la Troisième Commission (questions sociales, humanitaires et culturelles). Elle a aussi inscrit à son ordre du jour le point intitulé: « Reconnaissance de l’anémie SS comme une priorité de santé publique » et « Octroi du statut d’observateur au Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral ».
La prochaine séance plénière de l’Assemblée générale se tiendra lundi 3 novembre à partir de 10 heures.
* A/63/250/Add.1
RAPPORT DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
Rapport du Secrétaire général sur le Fonds d’affectation spéciale devant aider les États à soumettre leurs différends à la Cour internationale de Justice (A/63/229)
Dans ce rapport, le Secrétaire général indique qu’en mars 2007, il a reçu de Djibouti une demande de remboursement des dépenses que ce dernier avait engagées pour introduire une instance auprès de la CIJ dans le cadre de l’affaire relative à certaines questions d’entraide en matière pénale (Djibouti c. France). Le Secrétaire général rappelle qu’il avait décidé, le 3 octobre 2007, d’accorder à Djibouti une aide financière de 290 500 dollars destinée à couvrir, entre autres, les honoraires d’agents, les dépenses de personnel et les frais de recherches juridiques.
Le Secrétaire général signale que pendant la période considérée, à savoir du 1er juillet 2007 au 30 juin 2008, le Fonds n’a reçu aucune autre demande d’aide financière. Il présente un tableau qui répertorie les contributions volontaires des États Membres au Fonds. Il précise qu’au 30 juin 2008, le solde du Fonds se chiffrait à un peu plus de 2,5 millions de dollars. Le Secrétaire général signale que le montant de l’aide accordée représente plus du double de celui des contributions. Il engage vivement tous les États et les autres entités intéressées à envisager sérieusement de verser au Fonds des contributions substantielles et régulières.
Déclarations
Mme ROSALYN HIGGINS, Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ), venue présenter le rapport de la CIJ allant du 1er août 2007 au 31 juillet 2008 (A/63/4), a indiqué que cette année-ci avait été la plus productive de l’histoire de la Cour. Elle a expliqué que la Cour avait rendu quatre arrêts au fond et une ordonnance en indication de mesures conservatoires. Elle a ajouté qu’en août, la Géorgie avait saisi la Cour de l’affaire relative à l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), précisant que la Cour avait rendu son ordonnance il y a deux semaines et que celle-ci ne figurait donc pas dans le rapport à l’examen. La Présidente a également indiqué qu’au cours de l’année écoulée, la Cour avait été saisie de 5 nouvelles affaires et que 13 affaires sont actuellement inscrites au rôle.
Mme Higgins a passé en revue les arrêts rendus par la CIJ durant la période à l’examen. Elle a ainsi indiqué que dans l’affaire relative au différend territorial et maritime entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes » (Nicaragua c. Honduras), la CIJ avait conclu que la souveraineté des quatre îles en question appartenait au Honduras. Elle a également expliqué comment la Cour avait procédé à la délimitation des zones maritimes. La Présidente a ensuite indiqué que dans l’affaire relative au différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), qui a également trait à la souveraineté de plusieurs îles, la CIJ avait jugé qu’un traité signé par les deux parties en 1928 réglait la question de la souveraineté sur les îles de San Andrés, Providencia et Santa Catalina, mais ne répondait pas à la question de savoir quelles autres formations maritimes faisaient parties de cet archipel. Elle a précisé que la Cour avait retenu les exceptions préliminaires de la Colombie dans la mesure où elles concernaient la souveraineté des îles susmentionnées.
S’agissant de l’affaire « Souveraineté sur Pedra Branca/Pulau Batu Puteh, Middle Rocks et South Ledge » (Malaisie/Singapour), Mme Higgins a indiqué que la CIJ avait décidé que la souveraineté de Pedra Branca/Pulau Batu Puteh appartenait à Singapour, et a jugé que la Malaisie devait être considérée comme ayant conservé le titre originaire sur Middle Rocks. Elle a statué que la souveraineté sur South Ledge appartenait à l’État dans les eaux territoriales duquel il était situé.
Passant ensuit à l’affaire qui oppose Djibouti à la France, Certaines questions concernant l’entraide judiciaire en matière pénale, Mme Higgins a indiqué que c’était le premier différend à avoir été porté devant la Cour en vertu du paragraphe 5 de l’article 38 du Règlement de la Cour. Elle a expliqué qu’il s’agit de la situation dans laquelle un État porte un différend devant la Cour en proposant de fonder la compétence de celle-ci sur un consentement non encore donné ou manifesté par l’État contre lequel la requête est formée. Elle a rappelé que l’affaire en question portait sur le point de savoir si la France avait violé les obligations que la Convention sur l’entraide judiciaire en matière pénale de 1986 mettait à sa charge. Mme Higgins a indiqué que la Cour avait considéré que les raisons données par le juge d’instruction français pour rejeter le demande d’entraide judiciaire relevait de l’alinéa c) de l’article 2 de la Convention qui habilite l’État requis à refuser d’exécuter une commission rogatoire s’il estime que cela est de nature à porter atteinte à sa souveraineté, entre autres. Elle a cependant précisé que la Cour avait néanmoins conclu que la France, qui n’avait avancé aucun motif dans la lettre par laquelle elle avait informé Djibouti de son refus d’exécuter la commission rogatoire, avait manqué à l’obligation qui lui incombait en vertu de l’article 17 de la Convention de 1986, et aux termes duquel tout refus doit être motivé.
La Présidente de la CIJ a ensuite indiqué que la Cour s’était prononcée sur deux demandes en indication de mesures conservatoires. S’agissant de la demande d’interprétation de l’arrêt Avena de 2004 soumise par le Mexique contre les États-Unis, la Cour a déclaré que les États-Unis devaient prendre « toutes les mesures nécessaires » pour que cinq ressortissants mexicains « ne soient pas exécutés tant que n’aurait pas été rendu l’arrêt sur la demande en interprétation présentée par le Mexique ». Se penchant ensuite sur l’affaire qu’elle avait évoquée au début de son intervention et qui oppose la Géorgie à la Fédération de Russie, Mme Higgins a indiqué que la Cour a tenu trois jours d’audiences en septembre. Dans son ordonnance, la Cour a prescrit notamment aux parties de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir la sureté des personnes, le droit de chacun de circuler librement et de choisir sa résidence, ainsi que la protection des biens des personnes déplacées et des réfugiés. La Cour a aussi appelé les parties à faciliter l’aide humanitaire, a-t-elle précisé.
La Présidente de la CIJ a ensuite indiqué que la Cour déploie d’importants efforts à l’élaboration de ses arrêts dans les affaires Croatie c. Serbie; Mexique c. États-Unis et Roumanie c. Ukraine. Elle a signalé que la Cour avait décidé de tenir des audiences pendant l’année 2009 en l’affaire relative au différend relatif à des droits de navigation et des droits connexes (Costa Rica c. Nicaragua) et de l’affaire relative aux usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay(Argentine c. Uruguay). Elle a ensuite déclaré que la Cour traiterait avec « toute la célérité requise » la question de savoir si la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo était conforme au droit international. Le 17 octobre, la Cour a déjà rendu une ordonnance relative aux étapes procédurales de cette affaire.
Mme Higgins s’est ensuite félicitée du fait que la CIJ n’avait pas de nouvel arriéré d’affaires. Elle a rappelé que la Cour avait demandé la création de neuf postes de référendaire, mais que seul trois d’entre eux avaient été approuvés. Ces postes sont plus nécessaires que jamais pour permettre à chaque juge de bénéficier d’une assistance juridique, a-t-elle dit, signalant ensuite que la CIJ est la seule grande juridiction dans laquelle les juges ne sont pas assistés par un référendaire. Selon elle, le rythme de travail de la Cour ne peut être poursuivi sans une telle assistance. Elle a également regretté que l’Assemblée générale ne lui ait pas fourni les moyens de créer une division de la documentation qui lui permettrait de renforcer sa productivité. La Présidente de la CIJ a indiqué que la Cour demanderait la création d’autres postes supplémentaires et des crédits pour assurer la modernisation des systèmes de conférence et du matériel audiovisuel dans sa salle d’audience historique.
Abordant ensuite la question des juges ad hoc, Mme Higgins a indiqué que la Cour en avait accueilli 40 au cours des six dernières années et qu’ils représentaient 2% du budget annuel de la Cour. Compte tenu de l’augmentation des coûts liés aux juges ad hoc, la Présidente a estimé que lorsque deux États comparaissant devant la Cour ne comptent aucun juge de leur nationalité sur le siège, ils pourraient très utilement s’inspirer de l’exemple de l’affaire Botswana c. Namibie (1999) et convenir de ne pas désigner de juge ad hoc.
La Présidente s’est ensuite félicitée de la décision 62/547 de l’Assemblée générale qui réaffirme le principe d’égalité entre les juges. Passant à la question du régime de pension des juges, Mme Higgins a signalé qu’aucun mécanisme d’ajustement tenant compte des augmentations des coûts de la vie et des fluctuations du taux de change n’avait encore été mis en place. La Cour compte sur la compréhension de l’Assemblée générale à cet égard, a-t-elle dit.
M. KEITH MORRILL (Canada), s’exprimant également au nom de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a constaté que les affaires dont est saisie la CIJ sont de plus en plus complexes, aussi bien en ce qui concerne les faits que les aspects juridiques et qu’elles continuent de toucher des enjeux transversaux. Il s’est également déclaré conscient que, face à une lourde charge de travail, la Cour doit répondre à des requêtes urgentes, en vue de statuer sur des mesures provisoires, tout en veillant à ce que les autres affaires progressent, y compris l’examen des questions préliminaires. Il a ainsi souligné que la CIJ a un calendrier chargé cette année, avec 12 affaires officiellement en instance.
En outre, le représentant canadien a constaté que le jugement relatif à certaines questions concernant l’entraide judiciaire en matière pénale est aussi l’une des rares décisions de la Cour fondée sur la prorogation de compétence. En d’autres termes, la compétence de la Cour se fonde sur la conduite de l’État défenseur face à l’application unilatérale par un autre État. Il s’est également réjoui que le public ait davantage accès aux travaux de la Cour, notamment par l’intermédiaire de son site Web amélioré. Il a aussi constaté que pour que la CIJ puisse continuer à examiner plusieurs affaires en même temps, il faudra remplacer et moderniser régulièrement les systèmes et matériels informatiques.
Après avoir souligné l’ordre du jour particulièrement chargé qui attend la Cour l’année prochaine, notamment après que l’Assemblée générale l’a saisie pour un avis consultatif sur la déclaration unilatérale du Kosovo, M. Morrill s’est félicité du rôle crucial qu’elle continue à jouer dans le règlement pacifique des différends internationaux et le renforcement de l’ordre juridique international. En conséquence, il a insisté pour que les États Membres, qui ne l’ont pas encore fait, déposent auprès du Secrétaire général des Nations Unies une déclaration dans laquelle ils reconnaissent la compétence obligatoire de la Cour.
Mme MIRIAM DEFENSOR-SANTIAGO (Philippines) a salué les efforts de la CIJ pour renforcer son efficacité et ses méthodes de travail, ce qui a permis notamment de conclure quatre audiences et de promulguer un arrêt pour une demande en indication de mesures conservatoires. Elle a également remercié la Cour pour la rapidité avec laquelle elle a donné suite à la demande présentée par la Géorgie pour une indication de mesures conservatoires concernant l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), ainsi que sur la requête pour avis consultatif de l’Assemblée générale sur la « Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance des institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo ». La représentante a estimé que la diversité des affaires dont était saisie la Cour reflétait l’universalité de cette juridiction. Ces affaires soulignent en outre que, même si les différends territoriaux restent nombreux, d’autres questions tout aussi complexes, telles que des allégations massives de violations des droits de l’homme ou la gestion partagée de ressources naturelles -qui résulte d’une interdépendance mondiale- figurent maintenant à l’ordre du jour de la Cour. En tant que principal organe judiciaire des Nations Unies, la CIJ a le devoir et la responsabilité de faire respecter le droit international dans le cadre des relations internationales, a-t-elle ajouté en conclusion.
M. JORGE VOTO-BERNALES (Pérou) a rappelé que la Cour constitue la seule instance internationale, de caractère universel dotée d’une compétence générale. Ses décisions mettent un terme aux différends juridiques que lui soumettent les États et elles contribuent à la consolidation de la paix internationale, a-t-il souligné. Ses avis consultatifs permettent le développement du droit international, a-t-il ajouté.
Le représentant a aussi lancé un appel aux États, qui ne l’ont pas encore fait, pour qu’ils acceptent la compétence obligatoire de la Cour. Les États sont obligés de respecter les décisions de la CIJ, a-t-il souligné. M. Voto-Bernales a constaté que la Cour a connu une année passablement chargée avec la présentation de quatre nouveaux cas, dont l’un implique le Pérou. Il a salué les efforts d’information du public grâce à l’amélioration du site de la Cour et a souhaité que les archives du matériel audiovisuel y soient bientôt disponibles.
Par ailleurs, le représentant a rappelé que la Cour doit disposer de ressources suffisantes et du personnel juridique nécessaire, ainsi que des moyens qui lui permettent de gérer la documentation qu’elle traite au quotidien. Il a également attiré l’attention des États Membres sur les coûts élevés pour un pays de l’accès à la Cour, soulignant qu’ils constituent « une barrière ». Il a ainsi salué la création du Fonds d’affectation spéciale.
Mme SANGEETA KUMARI SINGH DEO (Inde) a estimé que la période à l’examen correspond à l’année la plus chargée de toute l’histoire de la Cour, en se félicitant de ce que cette juridiction avait pu relever ce défi en rationalisant ses méthodes de travail et ses procédures. Notant cependant que la demande de la Cour pour obtenir neuf greffiers supplémentaires n’avait pas encore été satisfaite, elle a espéré que l’Assemblée générale serait en mesure d’approuver cette requête compte tenu du nombre croissant des affaires. Elle a ensuite souligné que la période récente se caractérisait par la création d’un grand nombre de cours et d’organes régionaux et internationaux spécialisés. Cette tendance peut avoir pour conséquence une fragmentation du droit international. Il est à craindre, s’est-elle expliquée, que les mêmes questions ou différends juridiques fassent l’objet d’interprétations finales et contraignantes par deux juridictions différentes dont les points de vue divergent.
Le défi consiste donc à trouver un équilibre entre, d’une part, le besoin de diversité et de régimes et solutions spécialisées et, d’autre part, l’importance de maintenir un cadre global ou « système » de droit international offrant un degré suffisant de sécurité et de cohérence. Elle a salué, à cet égard, l’initiative de la Présidente de la CIJ d’établir un dialogue régulier avec les cours et tribunaux internationaux dans le but d’améliorer l’unicité du droit international et de traiter du problème du « chevauchement de juridictions » ou de la « fragmentation du droit international ».
Mme NAMIRA NABIL NEGM (Égypte) a souligné la nécessité d’aider les pays, l’ONU et ses agences, à demander des avis consultatifs à la Cour dans les cas importants, étant donné que ces avis développent et codifient les règles du droit international et consolident les principes de justice et d’égalité, à l’échelle internationale. En tant qu’un des principaux organes des Nations Unies, la CIJ devrait être incluse au processus de réforme des Nations Unies, a-t-elle dit. Cela permettrait de garantir l’efficacité de l’Organisation, en la rendant capable de s’adapter aux exigences du monde actuel où les principes de l’état de droit dominent les relations internationales.
La représentante égyptienne a rappelé que le Sommet mondial de 2005 avait mandaté les États Membres pour qu’ils étudient les moyens de promouvoir la Cour. Aucune initiative n’ayant été prise jusqu’ici, la représentante a proposé que l’Assemblée générale tienne un débat informel avec la participation du Président et du Greffier de la Cour, pour déterminer les problèmes principaux qui entravent l’exécution optimale de ses fonctions et présenter les propositions qui permettraient de les surmonter.
Par ailleurs, Mme Negm a souligné la nécessité de bénéficier de l’expérience de la Cour dans la consolidation des lois relatives à la responsabilité des États de protéger leurs citoyens et de respecter le droit international, à travers, par exemple, la protection diplomatique ou les relations consulaires, a-t-elle dit, en citant aussi le non-respect par des pays du principe de compétence internationale en contradiction avec celui de la territorialité des États, et la distinction entre terrorisme et lutte militaire légitime, dans l’exercice du droit à l’autodétermination. Il est essentiel, a-t-elle dit, que la Cour se prononce sur les questions des droits de l’homme, celle de l’accaparement des ressources naturelles ou sur les prétextes fallacieux invoqués pour s’ingérer dans les affaires intérieures des États, a insisté la représentante.
M. FARUKH AMIL (Pakistan) s’est félicité de l’augmentation du nombre de décisions prononcées par la Cour, relevant toutefois qu’un problème émanait des États qui acceptent souvent avec réticence les arrêts de la CIJ. Le représentant s’est notamment félicité des décisions rendues dans les affaires des différends territoriaux qui opposent le Nicaragua au Honduras, le Nicaragua à la Colombie et la Malaisie à Singapour. Nous nous attachons à étudier soigneusement tous ces jugements qui ont des implications pour le droit international, a-t-il signalé. M. Amil a ensuite salué les efforts déployés pas la Cour pour améliorer sa productivité, se félicitant notamment du fait que les procédures orales pourront désormais commencer dans les délais requis. Il a rappelé que les principes de la coexistence pacifique et du respect des droits de l’homme ne pouvaient être garantis sans le respect de l’état de droit. Il a ensuite estimé qu’il incombe aux États Membres, à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité de définir et de promouvoir un système juridique international capable de promouvoir le respect de l’état de droit.
M. SAYEMAN BULA-BULA (République démocratique du Congo) a rappelé l’obligation qui s’impose à la Cour de veiller à l’équilibre entre les considérations relatives à l’environnement et celles relatives au développement. Consacrés, pour la première fois dans un traité par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le droit au développement et le droit à l’environnement appartiennent désormais au droit international général, a-t-il souligné. Après avoir commenté les décisions de justice ayant trait à des plaintes à l’encontre des organes de l’État, à des affaires relatives à la paix et à la sécurité internationales et à des contentieux se rapportant aux droits consulaires, le représentant s’est attardé sur les mérites de son pays. Pour avoir, a-t-il expliqué, contribué massivement avec cinq affaires à l’effectivité du règlement judiciaire internationale, la RDC est d’avis qu’un État qui a tant administré la preuve d’état de droit, respectueux du droit international a accumulé une riche expérience qu’il entend faire bénéficier à la communauté des États. Là gît, la motivation profonde qui sous-tend la toute première candidature que la RDC présentera aux élections du 6 novembre 2008 à la CIJ, a expliqué le représentant qui est le candidat en question.
M. EBENEZER APPREKU (Ghana) a estimé que le travail de la Présidente Higgins avait redoré l’image de marque de la CIJ. Les décisions prononcées par cet organe définissent de manière significative les règles qui régissent les rapports entre les États, les nations et les individus, a-t-il également signalé. De son avis, l’influence de la CIJ se fait particulièrement ressentir dans les domaines des droits de l’homme, du droit humanitaire international, ainsi qu’en matière de l’environnement, du partage des ressources naturelles et des relations consulaires. M. Appreku s’est ensuite félicité du dialogue entretenu par la CIJ avec le Tribunal pénal international et les tribunaux ad hoc pour l’ex-Yougoslavie, le Rwanda et la Sierra Leone. Il a estimé que la CIJ devait notamment privilégier le dialogue avec les nouvelles cours régionales et sous-régionales de l’Afrique. Il a estimé qu’il ne fallait épargner aucun effort pour répondre aux demandes de la CIJ en matière de ressources humaines et matérielles, relevant que la question du financement de la Cour était particulièrement urgente, étant donné que le nombre important de ses décisions avait des incidences sur la paix et la sécurité, le respect des droits de l’homme et le développement. Le représentant a ensuite salué les mesures prises par la Cour pour garantir la responsabilisation en matière de gestion des ressources budgétaires.
M. MOURAD BENMEHIDI (Algérie) a salué les résultats obtenus par la Cour lors de la dernière année, fruit d’efforts intenses de la part des juges, en dépit des difficultés logistiques signalées et réitérées par ses présidents successifs. Il est regrettable que l’instance judiciaire principale des Nations Unies continue à pâtir du manque de ressources budgétaires, a-t-il déclaré. Par conséquent, les États Membres, à travers l’Assemblée générale, se doivent de mettre à la disposition de la Cour les ressources humaines et financières à même de lui permettre d’accomplir efficacement sa mission, a-t-il déclaré. Il a également félicité la CIJ pour ses efforts continus visant à améliorer ses procédures et ses méthodes de travail et à accroître sa productivité. Cet effort de dynamisme et d’autodiscipline a permis à la Cour de résorber son arriéré judiciaire, s’est-il réjoui.
Par ailleurs, le représentant algérien a souligné l’importance capitale du respect des arrêts de la Cour rendus pour les parties concernées et pour toute la communauté internationale. Les avis consultatifs ne sont pas de simples points de vue, a-t-il souligné. Selon lui, ils réaffirment plutôt des principes du droit international et contribuent à l’enrichissement et à l’évolution de ce droit. Les avis de la Cour ne doivent pas rester sans suite, a-t-il déclaré. Il a demandé que l’organe principal de l’ONU, chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, prenne en compte le dernier avis relatif aux conséquences de l’édification du mur de séparation dans les territoires palestiniens occupés, qui a notamment consacré le principe de l’inadmissibilité de l’acquisition de terre par la force.
Mme SIMONA MICULESCU (Roumanie) a indiqué que son pays était résolument engagé à conduire ses relations internationales sur la base du respect du droit international et à régler tous ses différends par des moyens pacifiques. À cet égard, la Roumanie attache une grande importance au rôle crucial joué par la Cour dans la promotion de l’état de droit dans les relations internationales. La preuve en est, a-t-il dit, que mon pays a saisi la CIJ concernant un différend avec l’Ukraine relatif à la frontière maritime dans la mer Noire. Nous l’avons fait à l’issue d’un long processus de négociations bilatérales et seulement après avoir conclu que celui-ci n’aboutirait pas à une solution mutuellement acceptable dans un délai raisonnable. La décision de saisir la Cour, a expliqué la représentante, exprimait notre reconnaissance de son professionnalisme et, en particulier, de son expertise dans le domaine de la délimitation maritime.
Après que les audiences publiques ont eu lieu, du mardi 2 au vendredi 19 septembre 2008, la Roumanie attend que la Cour rende son avis consultatif, a précisé la délégation. La Roumanie ne doute pas que celle-ci trouvera une solution équitable grâce à une application rigoureuse du droit international et de la jurisprudence. Il va sans dire, a promis la représentante, que la Roumanie se pliera à l’avis rendu par la Cour, tout comme l’Ukraine s’y est également engagée. La confiance de la Roumanie dans la Cour est par ailleurs reflétée dans son vote en faveur de la résolution de l’Assemblée générale sur la requête pour avis consultatif sur la conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance des institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo, a conclu la représentante.
M. GORDON H. BRISTOL (Nigéria) a salué le travail acharné de la Cour, qui vient de connaître son année la plus productive depuis sa création en 1946. Il a souligné que la CIJ était saisie d’affaires de plus en plus complexes et de plus en plus diverses, qui s’étendent des violations massives des droits de l’homme, y compris le génocide, à la gestion partagée des ressources naturelles. Il va sans dire que l’alourdissement de cette charge de travail rend nécessaire l’attribution de ressources additionnelles, a estimé le représentant. Il a ensuite félicité la Cour pour les mesures qu’elle a prises en vue de rationaliser ses méthodes de travail et améliorer son efficacité, en s’appuyant notamment pleinement sur les outils technologiques dont elle dispose.
La contribution de la Cour ne se mesure pas simplement à l’aune du nombre de décisions qu’elle rend mais, plus largement, au développement du droit international. M. Bristol a noté avec satisfaction le dialogue et la coopération engagés par la Cour avec d’autres juridictions internationales, qui permettra de prévenir la fragmentation du droit international. C’est en reconnaissance de la compétence de la Cour que le Nigéria a fait appel à elle pour régler un différend avec un pays voisin, a-t-il ajouté, précisant que depuis l’avis consultatif rendu en 2002, son pays avait tout mis en œuvre, « douloureusement », pour appliquer ce jugement, un processus qui s’est achevé en août 2008. Ce faisant, le Nigéria a clairement démontré son engagement en faveur de la paix et de la sécurité internationales, a souligné le représentant.
M. ZACHARY D. MUBURI-MUITA (Kenya) a souligné que la diversité des cas soumis à la Cour témoigne de son universalité, ainsi que son rôle crucial dans le règlement pacifique de différends internationaux. Par conséquent, il a appelé les États, qui ne l’ont pas encore fait, à accepter la compétence obligatoire de la CIJ. Il a également encouragé les États à saisir la Cour de leurs différends mais également l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et les autres organismes de l’ONU à lui soumettre toute question juridique. Le représentant a félicité la Cour pour ses activités d’information et pour les visites que les juges effectuent dans les pays. Il a conclu en relevant la nécessité de moderniser les locaux de la Cour et en jugeant dignes d’intérêt ses revendications sur les retraites des juges.
M. JOEL MUSA NHLEKO (Swaziland) a estimé que la Cour, en tant que principal organe judiciaire du système des Nations Unies, avait apporté une contribution significative à la paix et à la sécurité internationales, en prenant des décisions qui ont fait date et en formulant des avis consultatifs reflétant la sagesse juridique de ses membres. Il a ensuite noté que le nombre d’affaires dont est actuellement saisie la Cour est particulièrement élevé et que plusieurs font suite à une demande de pays en développement. Mais, en dépit de ses difficultés financières, la Cour continue de répondre avec une détermination sans faille à la charge de travail de plus en plus importante qui est la sienne, a relevé le représentant. À cet égard, il s’est félicité de l’amélioration des méthodes de travail et des procédures de la Cour, qui a également modernisé son site Internet, où il est désormais possible d’avoir accès à sa jurisprudence complète depuis 1946. Le représentant a également exhorté les États qui n’ont pas encore reconnu la compétence de la Cour à le faire dès que possible.
M. NORIHIRO OKUDA (Japon) a affirmé que le dévouement et l’autorité juridique de la CIJ dans le règlement pacifique des différends inspiraient le respect et le soutien de la communauté internationale. En effet, une prise de conscience de plus en plus forte se fait au sein des nations, qui s’accordent à reconnaître la valeur et l’importance d’établir et de maintenir la primauté du droit international. À cet égard, le rôle de la Cour, en tant que principal organe judiciaire des Nations Unies, ne peut être sous-estimé. Le Japon, fermement engagé en faveur de l’état de droit, rend hommage à la Cour pour ses travaux accomplis au cours de l’année écoulée et ses délibérations exhaustives, a dit le représentant. Il a enfin exprimé son respect pour la capacité de la Cour à répondre aux attentes placées en elle et a exhorté les États Membres, qui n’ont pas encore reconnu la compétence de la Cour, à le faire en vue de renforcer l’état de droit.
M. PAUL BADJI (Sénégal) a souligné que la CIJ constitue le principal maillon de l’ordre juridique international qui, de part ses actions quotidiennes, concourt à la promotion de la justice internationale, à l’évolution du droit international ainsi qu’à la consolidation des idéaux de paix et de justice qui ont présidé à la création des Nations Unies. En promouvant le règlement juridique des différends, la Cour participe à la pacification des relations entre les États et contribue considérablement au maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il souligné. De même, en fondant son action sur la promotion de la règle de droit, elle contribue également au respect de l’état de droit au niveau international, a-t-il dit. Par ailleurs, le représentant a souligné la responsabilité particulière de l’ONU dans la promotion du règlement des différends, y compris ceux de nature juridique, par la CIJ. Pour cette raison, il a dit accorder beaucoup d’importance au Fonds d’affectation spéciale du Secrétaire général.
M. CARLOS ENRIQUE GARCÍA GONZÁLEZ (El Salvador) a reconnu la grande valeur juridique des décisions de la Cour, tant pour les États concernés par les différends, que pour le reste de la communauté internationale. Il s’agit de directives qui contribuent à la codification et au développement progressif du droit international ainsi qu’au renforcement de l’état de droit, a-t-il dit. Par ailleurs, il a salué le nouveau site Internet de la Cour, qui permettra aux futures générations de juristes de se familiariser avec sa jurisprudence.
Mme KOK LI PENG (Singapour) a estimé que la CIJ mettait à disposition des États un mécanisme efficace pour régler leurs différends. Elle a signalé que la décision rendue dans l’affaire Souveraineté sur Pedra Branca/Pulau Batu Puteh, Middle Rocks et South Ledge avait permis de mettre un terme à un litige qui opposait la Malaisie à Singapour depuis longtemps. Désireux de maintenir de bonnes relations bilatérales, le pays, a-t-il dit, avait décidé de saisir la Cour de cette affaire et de respecter le jugement qu’elle prononcerait, a-t-elle indiqué. Elle a ensuite expliqué que la Malaisie et Singapour avaient établi un Comité technique conjoint pour traiter des problèmes soulevés par le jugement. La représentante s’est ensuite félicitée des efforts déployés par la Cour pour moderniser son système et a pris note de ses besoins en ressources humaines. Elle a estimé que la CIJ devait bénéficier du plein appui de tous les États Membres et continuer de recevoir une allocation budgétaire de l’ONU.
M. LUIS SERRADAS TAVARES (Portugal) a déclaré que la charge de travail de la Cour confirmait le rôle essentiel que cette juridiction jouait dans le système juridique international. En juillet 2008, a-t-il fait observer, le nombre d’affaires dont était saisie la CIJ était de 12 et celle-ci a rendu quatre arrêts et une ordonnance sur une demande en indication de mesures conservatoires. Le représentant s’est félicité que les affaires portées à son attention proviennent du monde entier et reflètent une grande diversité de sujets. Il a cependant souligné l’importance d’accorder à la CIJ les ressources dont elle a besoin. Notant qu’au 31 juillet 2008, les 192 États Membres des Nations Unies étaient parties au Statut de la Cour et que 66 d’entre eux avaient reconnu sa compétence obligatoire, M. Tavares a prié tous ceux qui ne l’ont pas encore fait, de la reconnaître à leur tour.
M. TOMMO MONTHE (Cameroun) a déclaré que la CIJ était le meilleur moyen d’assurer aux générations futures un avenir plein d’espoir. Il a relevé que malgré le niveau élevé et la complexité des affaires qui lui sont soumises, la Cour n’avait jamais eu autant de succès qu’au cours des années récentes. De son avis, l’« admirable vitalité » de la Cour puise sa source dans la valeur intrinsèque et la haute « probité morale » des femmes et des hommes qui sont à son service. Elle tient également du sérieux des décisions rendues par la CIJ, a dit le représentant, pour ensuite se féliciter des succès enregistrés par la Cour dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
M. Monthe a ensuite déclaré que la confiance dans la Cour doit se pérenniser dans l’acceptation universelle de sa compétence obligatoire. Il a cependant signalé que moins d’un tiers des États Membres de l’ONU avaient fait des déclarations reconnaissant cette compétence. Il a également estimé qu’à moins de donner une suite favorable aux demandes financières de la Cour, on risque de porter un grand préjudice au fonctionnement de l’organe judiciaire principal des Nations Unies. De son avis, il importe d’accompagner la Cour dans l’accroissement de sa productivité, surtout pour ce qui est du développement progressif du droit international.
M. JOEL HERNANDEZ (Mexique) a souligné, avec préoccupation, la nécessité urgente de doter la Cour de ressources humaines plus importantes pour qu’elle puisse poursuivre sa mission. Il est nécessaire que les membres disposent d’un soutien juridique personnalisé afin qu’ils puissent consacrer plus de temps à la réflexion et à la délibération, a-t-il déclaré, tout en soulignant le besoin de créer un département de la documentation, en fusionnant la Bibliothèque et le Département des archives. Par ailleurs, le représentant a rappelé que 5 des 15 affaires traitées par la Cour, cette année, ont concerné l’Amérique latine. Il a notamment mis en exergue la décision du Mexique de saisir, pour la première fois, la CIJ dans l’affaire Avena et autres citoyens mexicains. En juin 2007, le Mexique a présenté une requête d’interprétation de l’avis de la CIJ sur ce cas, qu’il a accompagnée d’une demande de mesures provisoires pour éviter l’exécution de José Ernesto Medellin et de quatre autres Mexicains, a-t-il rappelé.
M. MOUSTAFA EL-SHAREEF (Soudan) a souligné que la CIJ constitue l’un des principaux piliers de la justice. Par conséquent, a-t-il dit, elle représente la justice elle-même et non pas l’hégémonie et la violence que certains États veulent imposer sur d’autres États. Il a rappelé que toutes les régions ont des systèmes juridiques différents, ce qui démontre la stature de la Cour. Selon lui, malgré l’augmentation des affaires dont elle est saisie, la CIJ est parvenue à émettre des mandats d’arrêts sur nombre d’entre elles. Il a confirmé la confiance de son pays dans la Cour et sa mission qui consiste à régler les différends sous l’angle du droit international. Ma délégation souligne la nécessité de respecter strictement les décisions de la CIJ, a-t-il assuré. Il a prévenu que cette attitude avait un effet négatif sur le rôle de la Cour. Par ailleurs, il a salué la diffusion des activités de la CIJ afin de familiariser le public avec ses activités. En conclusion, le représentant soudanais a réitéré la confiance de son pays dans le rôle important de la Cour.
RAPPORT DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE
Rapport du Secrétaire général sur les dépenses engagées et les remboursements reçus par l’ONU pour l’assistance fournie à la Cour pénale internationale (A/63/471)
Dans ce rapport, le Secrétaire général explique, entre autres, que pendant la période allant d’octobre 2004 à août 2008, les Nations Unies ont fourni des services et moyens à la CPI pour un montant de 989 785 dollars correspondant au coût des services de conférence et services connexes, des dépenses de sécurité sur le terrain, des services de bibliothèque et de la numérisation des documents.
Durant la même période, la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) a, en outre, fourni à la Cour des services de transport et d’autres services pour un montant de 102 253 dollars. Le Secrétaire général précise que la Cour a régulièrement remboursé à l’Organisation dès réception des factures.
Dans les deux annexes qu’il a jointes au rapport, le Secrétaire général énumère le détail des services et moyens fournis à la Cour par l’ONU et la MONUC depuis octobre 2004.
Déclarations
M. PHILIPPE KIRSCH, Président de la Cour pénale internationale (CPI), qui présentait le quatrième rapport annuel de la Cour (A/63/4), a indiqué que la CPI avait été saisie de quatre situation au cours de l’année écoulée, précisant que trois d’entre elles avaient été déférées par les États parties au Statut de Rome, et la quatrième par le Conseil de sécurité.
Il a expliqué que les préparatifs du procès de Thomas Lubanga Dyilo, qui est accusé d’avoir procédé à l’enrôlement et à la conscription d’enfants soldats en République démocratique du Congo, se sont poursuivis. Il a rappelé que cet été, la Chambre de première instance avait ordonné la suspension de la procédure puis la libération immédiate de l’accusé, ordre qui a été infirmé le 21 octobre, par la Chambre d’appel. Il a indiqué que la décision relative à la libération de Thomas Lubanga et à la requête du Procureur au sujet de la levée des restrictions concernant la confidentialité imposée à certains éléments de preuve, était actuellement à l’examen devant la Chambre de première instance.
M. Kirsch a ensuite expliqué que la Chambre de première instance avait été saisie, vendredi dernier, du dossier conjoint de Germain Katanga et de Mathieu Ngudjolo, tout deux accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité et également remis à la Cour par la RDC. Il a précisé que la Chambre avait commencé la phase préparatoire à leur procès.
Passant ensuite à l’affaire Jean-Pierre Bemba Gombo, soupçonné de crime de guerre et de crime contre l’humanité en République centrafricaine, le Président de la CPI a expliqué que la Chambre préliminaire III avait entamé les préparatifs de l’audience de confirmation des charges à son encontre.
M. Kirsch a également signalé que plusieurs personnes recherchées pour des exactions commises en République démocratique du Congo, en Ouganda et au Darfour n’avaient toujours pas été arrêtées ou remises à la Cour. Il a rappelé que les États parties au Statut de la Cour doivent procéder à l’arrestation et à la remise de ces personnes, en citant Bosco Ntaganda, Joseph Kony ou Ahmad Harun.
Le Président a ensuite rappelé que le 14 juillet 2008, le Procureur a demandé à la Chambre préliminaire I la délivrance d’un mandat d’arrêt à l’encontre du Président soudanais, Omar Al-Bashir. Il a indiqué que cette demande est en cours d’examen par les juges qui décideront indépendamment, s’il y a ou non, des motifs raisonnables de croire que M. Al-Bashir a commis des crimes relevant de la compétence de la Cour. Le 15 octobre, a-t-il expliqué, la Chambre a demandé au Procureur de lui présenter pour le 17 novembre, des éléments supplémentaires à l’appui de certains aspects de la demande de délivrance d’un mandat d’arrêt. M. Hirsch a ensuite indiqué que le Procureur de la CPI s’intéressait à des situations concernant la Colombie, la Géorgie, l’Afghanistan, la Côte d’Ivoire et le Kenya.
Le Président a ensuite dressé un bilan des activités de la Cour, rappelant que la création de celle-ci témoignait de la volonté ferme des États d’imprimer un caractère institutionnel et permanent au « délaissement de la culture de l’impunité » pour une conception fondée sur le respect de la justice et de l’état de droit. Sans faire partie du système des Nations Unies, la Cour y est liée, a-t-il dit. Mais, a-t-il précisé, elle est néanmoins une institution qui se distingue fondamentalement des autres. La Cour est impartiale et s’inscrit dans la durée. Elle est un rempart contre la tentation de brader la justice, a-t-il déclaré. Elle ne participe pas à des négociations politiques avant de décider d’ouvrir ou de suspendre une enquête ou une procédure.
Le Président a expliqué qu’afin de s’assurer que les critères objectifs énoncées dans le Statut de Rome étaient réunis, les juges de la CPI avaient étudié chaque requête déposée pas le Procureur aux fins de délivrance d’un mandat d’arrêt. Dans toutes les procédures, les Chambres ont fidèlement respecté le Statut de Rome, garantissant les droits des défendeurs et des suspects et traduisant dans les faits les droits des victimes.
Il a également rappelé que ce sont les États qui confient à la Cour la tâche d’enquêter et d’engager des poursuites. Il n’est pas encore de situation sur laquelle le Procureur se soit penché de sa propre initiative, a-t-il déclaré. Le Président a ensuite signalé que la coopération des États, des organisations internationales et de la société civile avait été capitale pour le fonctionnement de la Cour. Il a qualifié de « constante et exemplaire » la coopération de l’ONU avec la Cour.
M. Hirsch a ensuite mis l’accent sur le rôle « incontournable » des États, des organisations internationales et de la société civile pour garantir le respect du mandat judiciaire de la Cour. La Cour n’a pu être efficace que parce qu’elle est reconnue comme une institution indépendante, a-t-il dit, se félicitant du « climat favorable » à la Cour qui a été créé par de nombreux États.
La CPI est à un stade critique, a enchainé M. Hirsch pour qui il est encore trop tôt pour émettre une opinion sur sa réussite. De son avis, le succès de la Cour dépendra pour l’essentiel de sa capacité à remplir pleinement et exactement son mandat, mais aussi de l’action des autres. Il a notamment signalé que le nombre de ratifications du Statut de Rome aura des conséquences sur la capacité de la Cour à exercer sa compétence.
Pour qu’elle l’exerce à une échelle vraiment mondiale, la ratification du Statut devra être universelle, a-t-il déclaré, pour ensuite demander aux États, aux organisations internationales et à la société civile de s’acquitter de leur obligation légale de coopérer avec la CPI. Le point le plus évident est que les États doivent exécuter les mandats d’arrêt ou contribuer à leur exécution, a-t-il notamment signalé. M. Hirsch a ensuite invité les États qui ne l’ont pas encore fait, à passer avec la Cour des accords relatifs à la protection des témoins et à l’exécution des peines.
Le Président a également insisté sur l’importance pour les États, les organisations internationales et la société civile de respecter l’indépendance de la Cour. Dans certaines circonstances, leurs paroles ou leur silence peuvent avoir une incidence considérable sur l’efficacité de la Cour, a-t-il signalé. De même, a conclu le Président, il est important d’éviter des idées fausses au sujet de la nature juridique de la CPI ou de la corrélation entre la justice et la paix. La CPI, a-t-il souligné, a été créée sur la base de la conviction que la justice et la paix sont complémentaires. Il est particulièrement important, lorsque les circonstances paraissent utiles, de réaffirmer et de respecter le mandat et l’indépendance de la Cour.
S’exprimant au nom de l’Union européenne, M. HUBERT RENIÉ (France) a estimé que la Cour avait accompli des progrès substantiels dans la conduite des enquêtes et poursuites dans les quatre affaires en cours et notamment s’agissant de la République démocratique du Congo (RDC), de la République centrafricaine (RCA) et du Soudan. Les procédures judiciaires de la Cour ont également connu des développements significatifs, a relevé le représentant, qui a particulièrement souligné le cas de la participation des victimes ou encore des droits de la défense. En outre, les toutes dernières ratifications intervenues pour le Suriname et les Îles Cook ont permis de porter à 108 le nombre d’État parties à la Cour, s’est-il félicité.
M. Renié a ensuite indiqué qu’une coopération efficace avec la CPI est essentielle afin de la Cour puisse accomplir sa mission, comme en témoignent les arrestations de Germain Katanga, de Matthieu Ngudjolo et de Jean-Pierre Bemba qui n’auraient pas été possibles sans le soutien des États parties. L’Union européenne s’est résolument engagée à soutenir la Cour afin que les mandats d’arrêt soient rapidement exécutés, notamment au Darfour et en Ouganda. L’Union rappelle que l’obligation de coopération avec la Cour qui s’impose au Gouvernement du Soudan aux termes de la résolution 1593 du Conseil de sécurité, n’est pas négociable. Elle appelle à nouveau le Gouvernement du Soudan à coopérer pleinement avec la Cour afin de mettre en œuvre les décisions prises, a souligné le représentant.
La lutte contre l’impunité et la réalisation des objectifs que poursuit la Cour passent aussi par la mise en œuvre effective du principe de complémentarité posé par le Statut de Rome, a-t-il également souligné. Ce principe suppose toutefois, a-t-il précisé, que les États aient mis en œuvre les dispositions du Statut au niveau national et disposent d’un système judiciaire leur permettant de poursuivre et de juger ceux qui, sur leur territoire, ont commis les crimes les plus graves.
Dans un contexte où le recours à la « compétence universelle » fait débat, « non sans une certaine confusion », le représentant a rappelé que la Cour est une juridiction internationale, tirant sa légitimité et ses prérogatives des stipulations d’un traité international. M. Renié a ensuite fait valoir l’Accord de coopération signé en 2006 par l’UE et la CPI et la formalisation, intervenue en avril dernier, des arrangements relatifs à l’échange et à la protection des informations classifiées, qui tous deux ouvrent la voie à une coopération opérationnelle plus approfondie.
Aussi, pour la première fois, une opération européenne, l’opération EUFOR Tchad/RCA va-t-elle soutenir la Cour au Tchad sur les plans sécuritaire et logistique. Le représentant a en conclusion espéré que le Fonds d’aide aux victimes pourra être très bientôt pleinement visible aux yeux de tous et qu’elle permettra de rappeler aux victimes des crimes entrant dans la compétence de la Cour que le Statut de Rome a aussi été créé pour elles.
S’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Mme GAIL P. GUY (Trinidad-et-Tobago) a estimé que les progrès de la Cour dans les affaires dont elle traite actuellement démontrent son importance dans le système de justice pénale internationale. Elle s’est félicitée de l’impartialité dont la Cour a su faire preuve en général et en particulier dans le cas de Thomas Lubanga, dont la Chambre de première instance I avait ordonné la remise en liberté inconditionnelle, sous réserve de l’issue de la procédure d’appel.
Par ailleurs, sans la coopération des États parties, il serait difficile, voire impossible pour la CPI de s’acquitter de son mandat, a-t-elle rappelé, en jugeant que cela était tout particulièrement vrai de l’exécution des mandats d’arrêt, du transfert d’accusés, de la protection et de la réinstallation des témoins. La représentante a rappelé aux États parties qu’il leur fallait prendre les mesures nécessaires pour promulguer, dans les meilleurs délais, une législation nationale reflétant leurs engagements vis-à-vis du Statut de Rome.
Elle s’est félicitée de la coopération renforcée entre la CPI et les Nations Unies, notamment dans le cas de la République centrafricaine et de la République démocratique du Congo. Elle a estimé que toute dérogation aux critères de qualité exigés pour la nomination des juges pourrait affecter négativement la capacité de la Cour. Elle a souligné les mérites de Mohammed Shahabbuden, du Guyana, que la CARICOM soutient pour les élections de juges qui doivent avoir lieu dans le cadre de la prochaine Assemblée des États parties, en janvier 2009.
S’exprimant au nom du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (Groupe CANZ), M. ROBERT HILL (Australie) a salué la décision de la République démocratique du Congo de transférer Germain Katanga et Matthieu Chui à la Cour et la Belgique pour avoir arrêté et transféré Jean-Pierre Bemba. Il a ensuite appelé tous les acteurs pertinents, y compris les autorités d’Ouganda et de République démocratique du Congo, à coopérer étroitement avec la Cour et à veiller à la pleine mise en œuvre de leurs obligations en vertu du Statut de Rome, et notamment à l’exécution des mandats d’arrêt. Nous appelons le Gouvernement du Soudan à mettre fin à l’impunité et à prendre toutes les mesures nécessaires pour arrêter le Ministre des affaires humanitaires, Ahmad Harun, et à le transférer, ainsi que le milicien Ali Kushayb, a ajouté le représentant.
Le CANZ, a-t-il poursuivi, estime que la ratification universelle du Statut de Rome est cruciale pour le succès de la CPI. Il s’est félicité que trois États de plus aient ratifié le Statut de Rome. En août, la Nouvelle-Zélande et l’Australie ont participé à un séminaire régional organisé par le Gouvernement samoan visant à sensibiliser aux activités de la Cour et à développer un régime juridique commun pour la mise en œuvre du Statut dans le Pacifique, a-t-il indiqué. Il a conclu en rappelant que depuis 2000, le Fonds de paix et de sécurité mondial du Canada avait versé plus de 10 millions de dollars à l’appui de projets et d’évènements visant à promouvoir la ratification et la mise en œuvre du Statut de Rome.
M. PETER MAURER (Suisse) a indiqué que si le Statut fournit les moyens légaux à la Cour pour s’acquitter de ses tâches, il ne lui procure pas les compétences d’exécution. La Cour est par conséquence très largement dépendante de la coopération dans l’accomplissement de ses tâches. À cet égard, il s’est déclaré satisfait par la coopération de certains États, qui ont permis le transfert de trois prévenus au cours de l’année rapportée, dans le cadre des situations en RDC et en RCA. Le représentant s’est dit cependant préoccupé par le fait qu’à l’heure actuelle, pas moins de sept mandats d’arrêt sont en attente d’exécution. Il a rappelé qu’il incombait aux États, conformément au Statut de Rome et aux obligations découlant de la Charte des Nations Unies, de coopérer pleinement avec la Cour.
La coopération des États ne se limite pas toutefois à l’exécution de ces mandats, mais s’étend à d’autres activités, comme la protection des témoins. Cette coopération concerne en particulier les États concernés par les situations examinées par la Cour, ainsi que les États avoisinants, a fait observer le représentant, qui a salué les mesures prises afin de renforcer ce dispositif de protection. Revenant ensuite sur les voix critiques à l’égard de la Cour, qui se sont faites entendre au cours de l’année écoulée, il a estimé qu’elles étaient la preuve que la Cour est aujourd’hui bel et bien établie et ancrée dans le système international et que ses activités ont des effets concrets.
M. STEFAN BARRIGA (Liechtenstein) a salué les arrestations supplémentaires concernant les situations en République démocratique du Congo et en République centrafricaine, avant de se déclarer fortement préoccupé par les sept mandats d’arrêts en vigueur qui n’ont toujours pas été exécutés, certain d’entre eux depuis plus de trois ans. M. Barriga a souligné que les activités de la Cour ont reçu une attention extraordinaire de la part du public dans les derniers mois, en particulier après la demande par le Procureur d’un mandat d’arrêt international contre le Président du Soudan. Il a rappelé la position de son pays sur cette question. Les principes d’amnistie ou toute autre forme d’impunité pour génocide, crimes de guerre et crimes contre l’humanité sont inacceptables dans le droit international.
Pour le représentant, la juridiction de la CPI a deux bases. L’obligation pour les États de collaborer avec les enquêtes ne provient pas uniquement du Statut de Rome, mais aussi des résolutions du Conseil de sécurité, comme la résolution 1593 (2005). L’obligation de coopérer est inscrite dans la Charte des Nations Unies et n’est pas différente de celle de coopérer avec les Tribunaux pénaux pour l’ex-Yougoslavie et pour le Rwanda. Par conséquent, il a lancé un appel à la coopération à tous les États.
M. LUIS ENRIQUE CHÁVEZ (Pérou) a souligné qu’il reste encore un long chemin à parcourir tant pour la CPI que pour les États et les Nations Unies. Il a appelé les États qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier ou à adhérer au Statut de Rome afin qu’il puisse avoir une véritable portée internationale. Par ailleurs, a-t-il ajouté, la coopération des États est nécessaire pour que la Cour puisse atteindre ses objectifs. Dès lors, il est inquiétant que des personnes sous mandat d’arrêt de la CPI n’aient pas encore été arrêtées afin d’être jugées ou remises à la Cour, a-t-il expliqué. Il a appelé les pays où se trouvent ces personnes à coopérer avec la CPI, en les arrêtant immédiatement ou en donnant des informations sur l’endroit où elles se trouvent. Selon lui, il ne peut y avoir de paix durable si les responsables de crimes vivent dans l’impunité. Le représentant a souligné le besoin d’une collaboration étroite entre la CPI et les Nations Unies, notamment dans les régions où l’ONU travaille sur le terrain.
M. MANUEL DE JESUS PIREZ PEREZ (Cuba) a déclaré que son gouvernement avait toujours soutenu et soutiendrait toujours l’établissement d’une Cour efficace. C’est la raison pour laquelle il a estimé que le manque d’indépendance de la CPI était préoccupant, au regard de ses relations avec le Conseil de sécurité. L’Article 16 du Statut de Rome donne en effet pouvoir au Conseil de suspendre les enquêtes ou inculpations en cours de la CPI, a fait observer le représentant. Il a émis l’espoir que le Groupe de travail sur le crime d’agression, ouvert à tous les États Membres des Nations Unies, puisse mener son travail de manière concluante et parvenir dès que possible à une définition acceptée par une majorité d’États Membres. Pour Cuba, il est très difficile d’adhérer au Statut de Rome en l’absence d’une définition claire et précise du crime d’agression, a précisé M. Perez.
M. FEDERICO BARTTFELD (Argentine) a estimé qu’une véritable réconciliation nationale est impossible si un pays émergeant d’un conflit ne lutte pas contre l’impunité. Il s’est ensuite félicité du fait que cette année, 108 pays sont devenus parties au Statut de Rome. Il s’est cependant inquiété du fait que sept mandats d’arrêt émis par la Cour n’avaient toujours pas été exécutés. Le représentant a ensuite relevé certaines avancées dans le domaine de la coopération, s’agissant notamment des Missions des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) et en République centrafricaine. Il a également estimé qu’il importait de souligner l’Accord conclu le 3 mars 2008 entre la CPI et le pays hôte. Rappelant ensuite que la CPI ne dispose pas d’un corps policier, le représentant argentin a estimé qu’une coopération entre les États Membres, l’ONU et les organisations régionales était essentielle afin remplir les objectifs du préambule du Statut de Rome. Il a ensuite précisé qu’en 2006, l’Argentine avait mis en œuvre son propre dispositif juridique relatif au Statut de Rome ainsi qu’à la coopération entre l’État argentin et la CPI.
M. KAUTU MICHAEL MOELETSI (Lesotho) a estimé qu’une relation équilibrée et constructive entre les Nations Unies et la CPI permettrait de garantir le bien-être de la Cour tout en préservant son indépendance. La CPI a permis de renforcer la justice internationale et a grandement contribué à la promotion de la démocratie et du respect de l’État de droit, a-t-il dit, avant de mettre l’accent sur l’importance de la coopération, notamment dans les domaines de la communication, des transports et de la sécurité, y compris la protection des victimes et des témoins, ainsi qu’en matière de collecte d’informations. Le représentant s’est ensuite penché sur les problèmes liés à l’abus du principe de « compétence universelle » par certains États qui tend, selon lui, à prendre pour cibles certains dirigeants africains. Nous reconnaissons le fait que la compétence universelle est un principe qui garantit la traduction en justice des auteurs de crimes graves. Ce noble principe doit être appliqué avec impartialité et non pas à des fins politiques, a-t-il estimé. Toutefois, a-t-il dit, la création de la CPI a rendu ce principe inutile. Si un État refuse ou est incapable de gérer certaines situations graves, il devrait les référer à la Cour qui les examinera avec impartialité.
Mme MONA JUUL (Norvège) a déclaré que la Cour est indépendante mais qu’elle a de forts liens historiques, juridiques et opérationnels avec les Nations Unies. Cette interaction est inscrite tant dans le Statut de Rome lui-même que dans l’Accord sur les relations entre les deux institutions, a-t-elle rappelé. La coopération entre ces deux acteurs ayant pour objectifs communs la paix, la justice et la sécurité est très importante, notamment pour lutter contre l’impunité, a poursuivi la représentante. Rappelant que la Norvège, qui soutient de longue date le Statut de Rome et la CPI, est favorable au renforcement des relations entre cette dernière et les Nations Unies, Mme Juul a exhorté tous les États et organisations internationales à soutenir les deux institutions.
L’existence même de la CPI a un impact important sur les systèmes nationaux, a estimé Mme Juul. Le succès de la Cour ne doit donc pas être mesuré uniquement à l’aune du nombre d’affaires dont elle est saisie ni au nombre d’inculpés présentés à La Haye, mais en termes de baisse de l’impunité pour les crimes dont elle peut connaître. Quel que soit l’endroit où des autorités nationales enquêtent, poursuivent et jugent des affaires liées à des crimes internationaux graves, l’objectif au cœur de la création de la CPI est à chaque fois réaffirmé, a insisté Mme Juul. En revanche, à chaque fois que les autorités nationales ne peuvent pas ou ne veulent pas poursuivre de tels criminels, le principe de complémentarité sur lequel fonctionne la CPI doit jouer, a déclaré la représentante. Cela requiert une coopération internationale, essentielle au travail de la Cour.
Si la crédibilité de la Cour ne dépend pas du nombre des affaires qu’elle juge elle-même, le fait que quatre des sept mandats d’arrêt qu’elle a lancés durant les trois dernières années restent en suspens est source de préoccupation, a affirmé Mme Juul. Elle a donc invité tous les États concernés à assumer leurs responsabilités et à permettre l’exécution de ces mandats. La représentante a notamment cité le cas du Darfour, où le Gouvernement du Soudan, a-t-elle ajouté, ne se conforme pas à ses obligations, en vertu de la résolution 1593 du Conseil de sécurité, elle a exhorté ce pays à coopérer pleinement avec la Cour sans plus attendre.
M. EBENEZER APPREKU (Ghana) a souligné que le Statut de Rome contribue aux efforts en cours pour résoudre les tensions et les tendances souvent conflictuelles entre le principe de non-intervention dans les affaires internes des États et la responsabilité des États Membres en vertu de la Charte de l’ONU, en particulier leur obligation de respecter les droits de l’homme. Selon lui, le Statut de Rome a renforcé cette tendance, en promouvant l’idée que les personnes responsables des crimes les plus graves ne puissent se servir de la souveraineté de leur État comme bouclier de leur impunité. L’Union africaine (UA) a pris les devants dans certains aspects en incluant dans son Acte constitutif, le droit des États Membres à intervenir dans ce genre de cas, a-t-il expliqué. En Afrique, nous appelons cela la doctrine de la non-indifférence contre celle de la non-ingérence. Par ailleurs, le représentant ghanéen a noté que le Président de la CPI a attiré l’attention de l’Assemblée générale sur le besoin de doter la CPI des ressources adéquates et a souhaité que soient traités les facteurs à l’origine de la lenteur des réponses aux requêtes liées à un accord sur l’application des peines.
M. NORIHIRO OKUDA (Japon) a réaffirmé l’importance de la coopération entre les États, relevant qu’elle permettait à la CPI de progresser. Dix ans après l’adoption du Statut de Rome, le représentant a estimé qu’à moins que celui-ci soit mis en œuvre avec prudence, il sera impossible d’établir la crédibilité et la réputation de la CPI. Il a insisté sur l’importance de la complémentarité de la CPI, rappelant que chaque État doit faire tout son possible pour appliquer sa législation nationale avant de référer une affaire devant la CPI. Il a également estimé que la décision du Conseil de saisir la CPI implique une lourde responsabilité qui exige qu’il continue à coopérer étroitement avec la Cour sur la mise en œuvre de ladite décision. Dès que le Conseil décide de saisir la Cour, tous les États Membres de l’ONU sont tenus de coopérer avec cette dernière. La CPI, quant à elle, doit fournir des explications complètes sur ses actions pour avoir le plein appui des États, a dit le représentant, avant de juger que pour renforcer le rôle de la CPI, l’adhésion au Statut de Rome doit devenir plus universelle.
M. KABIR AHMED (Nigéria) a considéré la création de la CPI comme l’une des grandes avancées du droit international. Il a ainsi souligné le rôle critique de la coopération des États pour garantir des enquêtes correctes, l’exécution des mandats d’arrêt en cours, la reddition des personnes, la protection des témoins ou encore l’application des sentences. Il a également pris note des efforts de la CPI pour améliorer dans son recrutement, la représentation géographique, la parité et la représentation des différents systèmes juridiques du monde. Il a cependant souligné l’importance d’atteindre l’objectif d’une large représentation géographique et de la parité, notamment en ce qui concerne l’Afrique qui est toujours sous-représentée.
M. Ahmed a aussi souligné que les visites des personnes accusées par leur famille représentent des coûts importants, étant donné que les tribunaux sont situés très loin de leurs pays. Même s’il peut ne pas être considéré comme un droit fondamental, le refus de visites familiales peut démoraliser à la fois les accusés et leurs parents, a-t-il prévenu. Nous espérons que la plus grande attention sera accordée à ces aspects importants lors de la réunion des États parties à La Haye en novembre prochain. Par ailleurs, le représentant a souligné que la situation au Darfour a suscité beaucoup d’intérêt dans la communauté internationale, en particulier depuis le rapport du Procureur de la CPI au Conseil de Sécurité. Depuis lors, une requête de sursis à poursuivre a été présentée, conformément à l’article 16 du Statut de Rome. Nous pensons que cette requête ne signifie pas conflit entre paix et justice, et doit pouvoir poursuivre son chemin, a-t-il expliqué. Il s’est dit confiant que la communauté internationale ne permettra pas une politisation du processus, a-t-il conclu.
M. ZACHARY D. MUBURI-MUITA (Kenya) a déclaré que la mise en œuvre du Statut de Rome se heurtait à des défis en rappelant que le succès de la CPI dépendait avant tout de la coopération collective des États Membres. Il s’est félicité que le nombre d’États parties au Statut de Rome soit passé de 105 à 108 durant la période examinée avec les accessions de Madagascar, des Îles Cook et du Suriname. Il a estimé que le nombre croissant d’États parties au Statut de Rome et à l’Accord sur les privilèges et immunités témoignait du caractère judiciaire international de la CPI. Il a félicité le Mexique, le Portugal, le Royaume-Uni et les Pays-Bas d’avoir signé cet Accord. Il s’est dit inquiet du manque de progrès dans la définition de crime d’agression. Il a souligné les efforts de son pays, afin d’accélérer l’intégration du Traité de Rome dans les textes nationaux. Eu égard à ses responsabilités à l’égard du Statut de Rome, a-t-il précisé, le Kenya a promulgué une loi sur la protection des témoins le 31 octobre 2006 qui s’est traduit par le lancement d’un programme de protection des témoins présenté au Bureau des Nations Unies à Nairobi le 7 juillet 2008.
Il a estimé que ce programme est une référence en matière de justice pénale, en ajoutant qu’un effort budgétaire lors de l’année fiscale 2008-2009 permettra d’accélérer ces efforts. Il s’est félicité de la tenue de briefings diplomatiques sous les auspices de la CPI et de la CIJ. Il a salué le renforcement de la coopération entre l’ONU et la CPI, conformément à l’accord signé sur leurs relations. Il a souhaité l’établissement d’un cadre similaire avec les pays en développement, particulièrement africains. Il a dit que la conclusion de la première phase de numérisation de l’histoire législative du processus de Rome par l’Assemblée des États parties et la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques créée par la CPI était une étape importante pour la diffusion d’informations relatives à la Cour.
M. PAUL BADJI (Sénégal) a rappelé que son pays avait été le premier à ratifier le Statut de Rome. Il a souligné que la CPI a ravivé la lueur d’espoir que sa création a suscitée auprès des victimes dont les attentes et les espoirs de justice étaient si constamment déçus. Nous sommes aujourd’hui parvenus à mettre en place l’instrument tant attendu par toutes les femmes et les hommes de bonne volonté qui se sont ardemment investis pour que cessent les horreurs et atrocités qui ont secoué et bouleversé l’humanité tout entière, a-t-il assuré. Depuis sa mise en place, la Cour a contribué, par l’effet de dissuasion qu’elle exerce sur les potentiels auteurs de crimes graves, à la baisse des atrocités que le monde a connues. Le représentant sénégalais a également appelé à prendre la pleine mesure de la complexité et de l’ampleur des énormes défis auxquels nous devons faire face pour parachever notre œuvre commune de bâtir une justice pénale internationale à même de répondre aux aspirations légitimes des peuples à la paix et à la justice. Il a lancé un appel solennel à toute la communauté internationale pour qu’elle apporte à la Cour la coopération et le soutien nécessaires à l’accomplissement de ses nobles missions.
M. JOEL HERNANDEZ (Mexique) s’est déclaré préoccupé par le fait que le premier procès n’a pas encore commencé deux ans et demi après la remise à la CPI de son premier accusé. Il est fondamental que de possibles obstacles de procédure soient levés dès que possible pour que la Cour puisse exercer sa compétence de manière effective et efficace, surtout à partir du moment où les responsables présumés se trouvent détenus. Il a demandé aux États de suivre les ordres de la CIJ, notamment les mandats d’arrêt. Certaines enquêtes du Bureau du Procureur rencontrent constamment des obstacles, en raison du manque d’aide des autorités locales, a-t-il accusé. La communauté internationale est préoccupée par le manque de coopération du Gouvernement du Soudan, a-t-il dit. Il a rappelé la mort de plus de 200 000 personnes et l’existence de plus de 2 millions de réfugiés depuis le début du conflit au Darfour, tout en soulignant que 38 personnes du personnel humanitaire de l’ONU ont été tuées lors d’attaques. Ces chiffres ne témoignent pas de l’existence d’un processus de paix dans la région, a-t-il ironisé. Le faux dilemme entre paix et justice ne fait que du tort à l’intervention des institutions créées pour préserver la justice internationale. Rendre justice renforce la recherche de solutions pacifiques durables, a-t-il dit.
M. ABDALMAHMOOD ABDALHALEEM MOHAMAD (Soudan) a estimé que le rapport de la CPI était un tissu d’intrigues politiques. L’« action catastrophique » du Procureur de la CPI d’émettre un mandat d’arrêt à l’encontre du Président soudanais n’est qu’un maillon dans la chaîne de conspirations flagrantes visant à déstabiliser le Soudan. Plusieurs organisations régionales se sont émues d’une telle décision, qui remet en cause les processus de paix en cours, a affirmé le représentant. « Notre pays n’est pas partie au Statut de Rome et c’est son droit le plus strict », a-t-il rappelé. Dans ce contexte, la tentative d’imposer une convention qu’il n’a pas ratifiée sape les normes fondamentales du droit international, a-t-il asséné. Il a prévenu que ce genre d’agissements ne pouvait que nuire à la crédibilité de la CPI.
Dans sa résolution 1422, « le Conseil de sécurité avait pourtant spécifié que les États qui ne sont parties au Statut de Rome ne sont pas tenus d’appliquer les dispositions de cet instrument, une mention reprise par d’autres résolutions ». Est-il juste que le rapport passe sous silence les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis dans plusieurs pays du Moyen-Orient et d’Asie? a lancé le représentant. Il s’agit là d’un système de « deux poids, deux mesures », comme l’a bien souligné le Sommet de l’Union africaine, qui a dénoncé le manque d’impartialité dans la mise en œuvre du principe de compétence universelle que certains pays se sont donnée pour les crimes graves. L’action du Procureur, a-t-il dit, est incompatible avec les dispositions juridiques en vigueur au Soudan, a insisté le représentant. « La justice n’est pas un slogan qui peut être utilisé pour exercer un chantage sur un État Membre », a-t-il dit en conclusion.
Mme GLENNA CABELLO DE DABOIN (Venezuela) a souligné l’importance pour les États d’adopter des mesures à l’échelon national afin de renforcer la coopération internationale, garantissant ainsi que les crimes les plus graves soient soumis à la justice. Les compétences du Conseil de sécurité et de la CPI sont très bien définies, a-t-elle déclaré, tout en avertissant de ne pas créer de faux dilemmes autour des mesures qui doivent être prises face à ce genre de crimes ou concernant le crime d’agression, qui doit être répudié et condamné, sous toutes ses formes. La représentante vénézuélienne a saisi l’occasion pour appeler les pays, qui ne l’ont pas encore fait, à adhérer au Statut de Rome.
M. FRANCIS K. BUTAGIRA (Ouganda) a suggéré de renforcer le mandat de la MONUC pour lui permettre notamment d’appréhender les dirigeants de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), une organisation qui s’apparente à un véritable « cancer » et doit être éradiquée sans plus tarder. Le représentant a ensuite rappelé que l’Ouganda avait averti dès le départ que sans la coopération de la communauté internationale, la situation provoquée par les agissements de ce groupe pourrait provoquer un désastre aux proportions tragiques. Nous n’arrivons pas à comprendre la réticence de ceux qui ont les moyens de nous prêter assistance à débarrasser le monde de cette « tâche » honteuse, qui se répand maintenant sur les États voisins, a lancé M. Butagira. Aussi le représentant a-t-il demandé une coopération rapide pour faire traduire en justice les auteurs de crimes tels que l’enlèvement d’enfants, forcés à tuer leurs propres parents, ou encore l’esclavage sexuel. Il a ensuite appelé les Nations Unies et les États Membres à soutenir la CPI pour que sa crédibilité ne soit pas mise en cause. Il s’est félicité des programmes de sensibilisation lancés par la Cour en Ouganda pour mieux faire connaître la justice pénale internationale, en particulier auprès des victimes. Pour sa part, le Gouvernement ougandais a proposé d’accueillir la Première Conférence d’examen du Statut de Rome en 2010 et ce, afin d’accroître la visibilité de la CPI dans la région, a indiqué M. Butagira.
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