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CPSD/399

LA COMMISSION DES QUESTIONS POLITIQUES SPÉCIALES ET DE LA DÉCOLONISATION ENTEND DES INTERVENTIONS CONCERNANT LE SAHARA OCCIDENTAL ET LA NOUVELLE-CALÉDONIE

9/10/2008
Assemblée généraleCPSD/399
Département de l’information • Service des informations et des accréditations • New York

Quatrième Commission

5e séance – après-midi


LA COMMISSION DES QUESTIONS POLITIQUES SPÉCIALES ET DE LA DÉCOLONISATION ENTEND DES INTERVENTIONS CONCERNANT LE SAHARA OCCIDENTAL ET LA NOUVELLE-CALÉDONIE


La Commission des questions politiques spéciales et de la décolonisation (Quatrième Commission) a entendu cet après-midi les pétitionnaires ayant demandé à s’exprimer sur la situation au Sahara occidental et en Nouvelle-Calédonie avant d’entamer son débat général sur la décolonisation. 


Quatorze représentants d’associations et d’organisations diverses intéressées par la question du Sahara occidental ont pris la parole pour plaider en faveur d’un règlement du conflit qui, depuis plus de trois décennies, est un frein à l’intégration et au développement de la région du Maghreb.  Certains pétitionnaires ont apporté leur témoignage sur le mode de vie qui prévaut dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf, dans le sud-est de l’Algérie.  Certains de ces intervenants ont estimé que les réfugiés ne jouissent pratiquement d’aucun droit dans ces camps, une des pétitionnaires employant même le mot « esclavage » pour décrire ce qu’elle avait vu.  Elle a ajouté que les réfugiés devraient avoir la possibilité de faire le choix de revenir dans la partie du Sahara placée sous administration marocaine. 


M. Francesco Bastagli, ancien Représentant spécial du Secrétaire général pour le Sahara occidental, a pour sa part déclaré qu’au lendemain de sa démission, en 2006, il avait été apostrophé par une femme sahraouie dans une rue de la ville de Laayoune.  Son interlocutrice lui avait alors dit: « Merci de ne rien faire pour le peuple sahraoui! »  « Ce message ne s’adressait pas seulement à moi », a ajouté M. Bastagli, « mais aussi à cette Commission ».  Pour la énième fois l’an dernier, l’Assemblée générale a réaffirmé la responsabilité des Nations Unies envers le peuple du Sahara occidental, a dit Francesco Bastagli.  Et pourtant, a-t-il ajouté, 33 ans après qu’elle ait été saisie de la question, l’ONU n’a pas été capable de faire en sorte que les Sahraouis exercent leur droit à l’autodétermination.  Il est donc temps que les Nations Unies renoncent à prêter attention à des discours vides de sens et optent pour une stratégie d’actions, a conseillé l’ancien Représentant du Secrétaire général.  Il a prévenu que si l’on veut éviter une montée du mécontentement qui serait susceptible de conduire à des troubles, ou même à un conflit ouvert au Sahara occidental, il faut agir rapidement.  


La réunion de la Quatrième Commission s’est poursuivie par l’examen de la question de la Nouvelle-Calédonie, deux représentants de ce territoire français du Pacifique ayant demandé à s’exprimer.  M. Julien Boanemoi, sénateur coutumier kanak, a constaté que son peuple, les Kanaks, devenait de plus en plus minoritaire dans son propre pays, le flux de la migration en provenance de la métropole ayant considérablement augmenté depuis la signature des Accords de Matignon et de Nouméa de 1998.  Il a appelé la Quatrième Commission à se rendre en mission en Nouvelle-Calédonie.  « L’avenir du peuple kanak est sous votre responsabilité », a-t-il dit. « Aidez-le à fermer avec dignité cette parenthèse de l’histoire qu’est le colonialisme », a-t-il plaidé.  


Constatant que la France ne semblait pas souhaiter l’indépendance du territoire de Nouvelle-Calédonie, M. Rock Wamytan, Conseiller spécial auprès de la Présidence du Sénat coutumier, a souhaité que l’ONU fasse respecter par la France l’Accord de Nouméa.  « Elle fait tout pour garder la Nouvelle-Calédonie dans son giron et dans celui de l’Europe », a-t-il accusé.  Il a exprimé son inquiétude concernant la décision prise par le Président français, M. Nicolas Sarkozy, de regrouper en Nouvelle-Calédonie les moyens militaires français présents dans la région du Pacifique « dans le but d’assurer à la France une présence dans l’arc territorial mélanésien ». 


Lors du débat général qui a suivi, plusieurs États Membres ont affirmé le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination.  Le représentant du Pakistan a évoqué au passage les situations similaires dans lesquelles vivent les peuples de Palestine et du Cachemire.  Le représentant de l’Inde a regretté que son collègue pakistanais ait mentionné le Cachemire au cours de ce débat.  « Le Cachemire fait partie intégrante de l’Union indienne », a-t-il rappelé.  Le représentant du Kenya ayant apporté de son côté le soutien du Groupe africain à l’autodétermination du Sahara occidental, la délégation de Maroc s’est désolidarisée de cette déclaration, indiquant qu’elle n’avait pas été consultée sur son contenu.  


Outre les délégations citées, se sont aussi exprimées celles de: la Dominique, au nom du CARICOM; la République islamique d’Iran; la Namibie; le Sénégal et la République du Congo. 


Demain, la Quatrième Commission poursuivra son débat général sur la décolonisation et se prononcera sur une douzaine de projets de résolution. 


AUDITION DE PÉTITIONNAIRES


Sahara occidental


M. LORENZO OLARTE CULLEN, ancien Président de l’archipel des Canaries, a évoqué les liens fraternels et historiques entre les îles Canaries et le Sahara occidental.  Il a affirmé que des progrès extraordinaires avaient été accomplis dans le territoire depuis que le Maroc y a établi sa souveraineté.  M. Olarte Cullen, après avoir relaté les événements survenus après la mort du général Franco, et qui ont conduit à la fin du mandat espagnol sur le Sahara, a dit que l’on aurait pu alors ne pas écarter l’établissement de liens de libre association entre l’Espagne et le Sahara occidental, comparables à ce qui existe entre les Canaries et sa métropole. 


L’orateur a remercié le Maroc pour avoir offert au Sahara occidental l’autonomie, une proposition qui n’est pas sans risque pour un État centralisé, a-t-il noté.  Il a ajouté que le territoire devrait disposer de sa propre assemblée, et d’une justice veillant sur les droits de l’homme et les libertés fondamentales.  Cela suppose un processus de réconciliation qui permettrait enfin la réunification des familles, a-t-il recommandé.  


M. MIKAEL SIMBLE, du Comité norvégien de soutien au Sahara occidental, a rappelé que de nombreux textes internationaux avaient confirmé l’illégalité de l’occupation marocaine du Sahara occidental.  « En dépit de cela, des sociétés privées et publiques exploitent les richesses naturelles de ce territoire non autonome en collaborant avec l’occupant, ce qui complique la résolution du conflit », a relevé M. Simble.  C’est la raison pour laquelle le Comité norvégien a porté plainte pour recel, en août dernier, contre la société Yara International, spécialisée dans les engrais et contrôlée majoritairement par l’État norvégien.  Cette société importe des phosphates du Sahara pour alimenter son usine norvégienne alors qu’elle s’était engagée à ne plus s’approvisionner dans le territoire, a indiqué l’intervenant qui a cité d’autres sociétés qui exploitent les richesses du Sahara occidental et dont certaines sont basées aux États-Unis.  Ces sociétés peuvent s’attendre à une pression grandissante pour qu’elles cessent de s’approvisionner en matières premières au Sahara occidental, a-t-il assuré.  Il a engagé des pays comme la France et les États-Unis à placer le respect pour le droit international et la liberté d’autrui avant leurs propres intérêts.  


M. MARC LOUIS ROPIVIA, de l’Université Omar Bongo, de Libreville, au Gabon, a mis en avant la solution d’autonomie proposée par le Maroc qui s’inscrit « dans une perspective d’intégration nationale ».  Le royaume du Maroc n’est pas une puissance coloniale, a-t-il poursuivi, mais un pays qui a lutté contre les dominations étrangères de la France et de l’Espagne.  Le royaume chérifien a d’ailleurs été le premier à se positionner, en 1963, en faveur du Sahara occidental pour qu’il figure sur la liste des territoires non autonomes de l’ONU, a-t-il ajouté. 


La position innovante du Maroc est en phase avec les conceptions modernistes du territoire et témoigne de sa volonté de voir les peuples du Maghreb vivre ensemble dans un tissu politico-économique harmonieux, a jugé le professeur Ropivia.  Selon lui, le Maroc propose une autonomie du Sahara sous souveraineté marocaine, dans le respect de l’intégrité territoriale.  Il a conclu son propos en précisant que la proposition du Maroc présente, pour l’ensemble des parties maghrébines impliquées, des garanties incontestables de cohésion nationale et de stabilité régionale et constitue l’ancrage d’une évolution vers l’Union du Maghreb arabe (UMA). 


Mme JANE BAHAIJOUB, de l’Organisation « Family Protection », a évoqué les souffrances « des milliers de gens innocents » réfugiés dans les camps de Tindouf en Algérie.  Je crois, a-t-elle ajouté, qu’il est grandement temps pour la communauté internationale de dissocier le politique de l’humanitaire dans ce conflit.  Tandis que les parties sont en quête d’une solution, on devrait permettre à la population des camps de choisir entre le retour au Maroc et une vie dans des conditions plus favorables, a-t-elle estimé.  L’oratrice a indiqué que l’Algérie avait accueilli 4 000 réfugiés palestiniens en leur donnant pratiquement les mêmes droits qu’à ses ressortissants.  Pourquoi les autorités algériennes ne font-elles pas de même avec les Sahraouis? a-t-elle demandé. 


Évoquant « l’esclavage » des camps de Tindouf, l’oratrice a demandé pour quelle raison le Haut Commissariat pour des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) n’avait jamais été autorisé à effectuer un recensement dans ces camps, les seuls chiffres disponibles étant ceux des autorités algériennes, à savoir 158 000 personnes réfugiées en plein désert depuis 1975, un chiffre qui n’a pas évolué avec le temps.  Mme Bahaijoub s’est demandée comment une telle stabilité démographique était possible et a indiqué que le chiffre de 90 000 personnes apparaît plus réaliste si l’on se fie à l’aide fournie aux « personnes les plus vulnérables » par le HCR et le Programme alimentaire mondial (PAM).  « Et, selon certaines organisations non gouvernementales, ce chiffre est encore probablement exagéré », a-t-elle dit.  Elle a souhaité que l’on demande au POLISARIO, à qui allait l’aide fournie en surplus, et a conclu qu’il apparaissait évident que le maintien des camps de Tindouf servait uniquement à donner de la crédibilité au POLISARIO tout en maintenant la tension au Maghreb.  « Ce mouvement ne représente manifestement qu’une fraction de la population sahraouie, et seule l’option de l’autonomie paraît réaliste », a conclu l’oratrice.  


M. ERIC CAMERON, de l’Organisation Action du monde pour les réfugiés, Norvège, a dénoncé la situation des réfugiés du Sahara occidental qui vivent dans les camps de Tindouf, en Algérie, depuis 1976 « dans des conditions inhumaines depuis plus de 30 ans » et dépendant de l’aide humanitaire internationale.  M. Cameron a sensibilisé la Quatrième Commission sur l’importance de l’enregistrement et de l’identification des réfugiés afin de les protéger.  L’enregistrement doit être un processus permanent et pourtant, la population qui vit dans les camps de Tindouf n’a jamais fait l’objet d’un enregistrement crédible, a-t-il estimé en indiquant que les chiffres actuels sont contestés et que le nombre de 165 000 réfugiés reste « une hypothèse ». 


Il a par ailleurs dénoncé la situation des réfugiés, « souvent séparés alors qu’ils sont de la même famille ».  Les enfants sont déportés, a-t-il accusé.  « La liberté de mouvement et de circulation est restreinte dans les camps et contrôlée par le Front POLISARIO », a ajouté M. Cameron.  Il a conclu son propos en précisant qu’un grand nombre de réfugiés ont disparu, « notamment dans les camps de Tindouf » et il a appelé l’Assemblée générale à prendre des mesures et à recenser la population sahraouie.  


M. PEDRO PINTO LEITE, de la Plateforme internationale des juristes pour Timor-Leste, qui s’exprimait aussi au nom d’une autre association néerlandaise se consacrant à la question du Sahara occidental (Stichting Zelfbeschikking West Sahara), a fait un exposé juridique du problème en rappelant que la décennie pour l’élimination du colonialisme arrivait à son terme.  Il a dénoncé la « mauvaise foi dont a fait preuve » et la contradiction dans laquelle s’est placé le Maroc: il a noté que ce pays, bien qu’ayant accepté la tenue d’un référendum d’autodétermination, jugeait, en même temps, qu’il est « impossible d’établir le corps électoral concerné à moins que le vote ne serve uniquement à se prononcer sur un statut d’autonomie interne ». 


L’orateur a proposé la mise sur pied d’un tribunal pour juger les crimes commis dans la partie occupée du territoire du Sahara occidental.  Il a estimé que la raison pour laquelle le Maroc s’est opposé à la publication, en 2006, d’un rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l’homme était dû au fait que le document établissait un lien clair entre le refus du droit à l’autodétermination des Sahraouis et les violations des droits de l’homme qui en ont résulté. 


M. JUAN SOROETA LICERAS, de l’organisation non gouvernementale (ONG) Droit public international, a jugé que l’occupation du Sahara occidental par le royaume du Maroc était illégale et était « un véritable viol du droit international ».  Le Maroc n’est pas la puissance administrante du territoire mais, tout simplement, la puissance occupante, a-t-il estimé.  Le peuple sahraoui doit pouvoir bénéficier du droit à l’autodétermination, a-t-il poursuivi.  Les réfugiés sahraouis veulent revenir sur leur territoire, a rappelé M. Soroeta Liceras.  Le conflit ne cessera tant que le peuple sahraoui ne pourra retrouver son territoire, a-t-il prévenu.  Il a conclu son propos en lançant un appel demandant aux membres de la Quatrième Commission de ne pas céder à la pression du Maroc.  « Il faut promouvoir la décolonisation du Sahara occidental », a-t-il préconisé.  


M. JOSÉ LUIS JIMÉNEZ s’est présenté comme étant un « simple pétitionnaire » et a estimé que l’Algérie devait renoncer « à disposer d’un État tampon et renoncer à faire souffrir le peuple marocain ».  L’orateur a estimé qu’il fallait un « compromis éthique » devant « l’insécurité patrimoniale et physique » dont souffrent « ceux qui refusent les diktats séparatistes ».  Il a souhaité attirer l’attention sur un fait qu’il a qualifié d’inquiétant, en évoquant à cet égard, « la quasi impossibilité de recueillir des témoignages dans les camps de Tindouf ».  Il a souligné qu’il existait désormais deux sortes de Sahraouis: « ceux qui disposent du droit de vote et ceux qui n’ont jamais vu un bulletin de vote de leur vie ».  


M. FRANCESCO BASTAGLI, ancien Représentant spécial du Secrétaire général pour le Sahara occidental, a déclaré qu’un soir d’août 2006, quelques jours après sa démission, il se promenait dans un quartier pauvre de la ville de Laayoune, lorsqu’une femme lui a lancé: « Merci de ne rien faire pour le peuple sahraoui! »  Ce message ne s’adressait pas seulement à moi, a-t-il ajouté, mais aussi à cette Commission, et c’est la raison pour laquelle je vous le rapporte aujourd’hui. 


« Pour la énième fois, l’an dernier, l’Assemblée générale a réaffirmé la responsabilité des Nations Unies envers le peuple du Sahara occidental. »  « Et pourtant », a ajouté M. Bastagli, « 33 ans plus tard, l’ONU n’a pas été capable de faire en sorte que les Sahraouis exercent leur droit à l’autodétermination ».  Au-delà de cette « injustice historique », l’ONU a l’obligation fondamentale de placer les intérêts de la population au-dessus du reste, en attendant qu’elle puisse se gouverner elle-même, a-t-il ajouté, en citant le Chapitre XI de la Charte et en évoquant le pillage des ressources naturelles du Sahara occidental.  « En attendant un acte d’autodétermination et, en l’absence d’une administration légitime, c’est à l’ONU que revient le rôle de fournir une assistance économique et sociale au peuple sahraoui », a ajouté M. Bastagli.  Il a critiqué les « rapports soporifiques » soumis à la Commission et les a comparés « aux informations substantielles fournies par les puissances administrantes d’autres territoires non autonomes ».  Il est temps pour l’ONU de renoncer à se contenter de paroles vides de sens et d’opter pour l’action, a conclu l’orateur, si l’on veut éviter une montée du mécontentement susceptible de conduire à des troubles, voire à un conflit ouvert.  


M. JAVIER P. MORILLAS GOMEZ, de l’Observatoire de l’emploi de la Communauté de Madrid, a exposé l’activité de son organisme qui sert en particulier à mesurer le niveau de l’immigration illégale en Espagne, « conséquence de la situation désastreuse qui prévaut en Afrique du Nord ».  Une partie de ces « sans papiers » sont la conséquence, selon lui, « de la frustration et de la pauvreté matérielle provoquées par la coûteuse occupation du Sahara occidental ».  Il s’agit d’une dépense improductive qui ne va pas aux investissements et qui, au contraire, fait du tort au développement de la région, a-t-il estimé.  L’orateur a dénoncé « le sort de ces miséreux arrivés dans de frêles embarcations », amenés en Espagne par une « industrie de l’immigration ».  Il a estimé que la situation actuelle favorisait la montée des frustrations et de l’extrémisme sur le plan politique alors que, parallèlement, le trafic de drogues vers l’Europe est de plus en plus florissant.  Il a mis en garde contre la possible émergence d’une « alliance narcoterroriste » et a conclu par la nécessité de décoloniser le Sahara occidental si l’on ne veut que cette sombre prophétie se réalise. 


M. DIALLO BABACAR, du Centre d’études diplomatiques et de stratégie, Dakar, au Sénégal, a estimé que le statut du Sahara dit « espagnol » n’aurait jamais dû être analysé comme celui d’une colonie, mais comme celui d’un territoire et plus précisément, d’un territoire marocain, annexé et occupé par l’Espagne.  « Du point de vue du droit international, le retrait de l’Espagne d’une partie du territoire marocain qu’elle occupait sous l’appellation de Sahara espagnol, a mené à une situation où il est resté entre les mains des autorités légitimes du royaume du Maroc », a-t-il ajouté.  Il a salué le « coup de génie de Mohamed VI » pour la proposition que le souverain marocain a faite concernant un statut d’autonomie pour le Sahara occidental. 


Selon lui, « le plan marocain constitue la seule alternative au conflit du Sahara occidental ».  Il a lancé un appel à toutes les délégations pour qu’elles s’approprient cette idée et la soutiennent, et leur a notamment demandé de « soutenir le projet de Mohamed VI qui ouvre de nouvelles perspectives ». 


Mme ANJA OKSALAMPI, du Comité international pour les prisonniers de Tindouf (CIPT) et de l’Association YAAKAARE-REDHRIC de lutte contre le racisme et l’esclavage, a déclaré avoir visité « à plusieurs reprises » les camps de Tindouf et avoir constaté qu’il n’y a « aucune liberté d’expression dans ces campements ».  Les Sahraouis qui sont en Mauritanie, au Maroc ou en Espagne, ne seront pas écoutés car on dira toujours d’eux qu’ils sont des « instruments de la propagande marocaine », a dit la pétitionnaire.  Les réfugiés, même les enfants, ne peuvent pas parler de leur cas personnel et répondent invariablement par des phrases stéréotypées telles que: « mon sort n’a aucune importance en comparaison avec le martyre que vit mon peuple », a-t-elle ajouté.  Selon elle, « une révolte s’est produite dans les camps en 1988 », et a simplement été qualifiée de « débordements » par le Front POLISARIO. 


L’oratrice a rappelé que son organisation avait déjà réclamé, il y a trois ans, et devant la Quatrième Commission, l’ouverture d’une enquête internationale sur le sort des prisonniers de guerre marocains et mauritaniens.  Elle a dénoncé « l’esclavagisme pratiqué par le POLISARIO » en citant divers témoignages dont plusieurs proviendraient de journalistes. 


Mme GILONNE D’ORIGNY, pétitionnaire, a rappelé que « les pétitionnaires sont présents aujourd’hui devant la Quatrième Commission parce qu’il y a 33 ans, le futur roi Juan Carlos de l’Espagne avait signé un accord secret avec le roi du Maroc Hassan II ».  Mais le Sahara occidental n’appartenait pas à l’Espagne, s’est-elle insurgée.  Aujourd’hui il faut faire appliquer la tenue d’un référendum pour l’autodétermination des Sahraouis sous les auspices des Nations Unies », a-t-elle poursuivi.  « Le Maroc, avec l’appui de la France, s’est toujours ingéré dans le fonctionnement de la Mission des Nations Unies au Sahara occidental », a-t-elle accusé.  Le Maroc a d’ailleurs essayé d’imposer un plan d’autonomie, a dit Mme d’Origny.  Elle a appelé la Quatrième Commission à agir et à permettre au Sahara occidental de quitter « la liste des 16 territoires occupés ».  


Nouvelle-Calédonie


M. JULIEN BOANEMOI, sénateur coutumier de l’aire d'Ajië-Aro, a constaté que le peuple kanak devenait de plus en plus minoritaire dans son propre pays, le flux de migration en provenance de la Métropole, ayant considérablement augmenté depuis la signature des Accords de Matignon et de Nouméa en 1998, et cela malgré les promesses du Premier Ministre français de l’époque, Michel Rocard.  Le seul moyen retenu pour freiner ce flux incessant était la restriction sur le droit de travailler qui devait faire l’objet d’un projet de loi, ce qui est resté lettre morte.  « Le but est clair: il s’agit de peupler la Nouvelle-Calédonie de Français afin de noyer les Kanaks sur le plan démographique pour les priver de l’accès à l’indépendance », a accusé le Sénateur. 


Le dualisme de la société kanake s’accentue, a-t-il constaté.  « D’un côté, il y a ceux qui sont cantonnés dans leurs provinces et leurs tribus dans un mode de vie considéré comme « hors normes ».  « S’ils ne sont pas dans ce genre de situation, ils sont alors agglutinés dans la périphérie de Nouméa », a déploré M. Boanemoi.  Les tiraillements qui en découlent déclenchent des ravages sociaux aux effets négatifs –délinquance des jeunes, suicides, usage de drogues, alcoolisme-, a souligné l’orateur.  Il a dénoncé par ailleurs la spéculation foncière effrénée dont est victime la Nouvelle-Calédonie. 


Il a constaté qu’après 155 ans de colonisation, il n’y a encore aucun avocat kanak inscrit au barreau de Nouméa.  Sur la même lancée, il a constaté qu’il n’y a qu’un seul magistrat kanak, un seul professeur d’université, trois médecins et quelques dizaines d’ingénieurs autochtones.  En conclusion, il a appelé la Quatrième Commission à se rendre en mission en Nouvelle-Calédonie.  « L’avenir du peuple kanak est sous votre responsabilité », a-t-il conclu; « aidez-le à fermer avec dignité cette parenthèse de l’histoire qu’est le colonialisme ».  


M. ROCK WAMYTAN, signataire FLNKS de l’Accord de Nouméa, et Conseiller spécial auprès de la Présidence du Sénat coutumier, a mis en avant le processus de décolonisation de la Nouvelle-Calédonie qui est retardé, alors que de toute évidence la France ne semble pas souhaiter l’indépendance du territoire.  « Elle a fait tout pour garder la Nouvelle-Calédonie dans son giron et dans celui de l’Europe », a-t-il accusé.  Il a rappelé que le peuple autochtone kanak de Nouvelle-Calédonie s’est toujours battu pour son indépendance, et que lorsqu’il a signé les Accords de Matignon en 1988, c’était dans le but de parvenir à un accord de décolonisation.  Mais, le processus de décolonisation s’enraye tandis que le pillage des ressources s’accentue, a déploré le représentant kanak. 


Il a exprimé son inquiétude concernant la décision prise par le Président français, Nicolas Sarkozy, de regrouper en Nouvelle-Calédonie les moyens militaires français présents dans la région du Pacifique « dans le but d’assurer à la France une présence dans l’arc territorial mélanésien ».  Cela va à l’encontre de l’Article 18 du plan d’action qui précise que les États Membres devraient s’abstenir d’utiliser les territoires non encore autonomes comme bases, ou installations militaires, a poursuivi M. Wamytan.  Il a appelé la Quatrième Commission à la vigilance sur le processus d’émancipation engagé en Nouvelle- Calédonie.  Il a souhaité que l’ONU fasse respecter par la France l’accord de Nouméa qui est un accord de décolonisation par essence.  Il a conclu son propos en demandant qu’une enquête de l’ONU soit conduite concernant le pillage des ressources naturelles du territoire de Nouvelle-Calédonie par la Puissance administrante. 


DÉBAT GÉNÉRAL


M. YASIR IQBAL (Pakistan) a constaté la lenteur des progrès en matière de décolonisation et indiqué que son pays appuyait les recommandations du Comité spécial.  Il a rappelé la responsabilité des puissances administrantes qui doivent permettre aux peuples qu’elles dominent dans les territoires non autonomes, de se développer.  Il a rappelé que la domination étrangère constituait un déni aux droits de l’homme.  Il a émis l’espoir que l’on pourrait parvenir à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental avant de souligner que le problème se posait aussi pour la Palestine et le Cachemire.  Il a émis l’espoir que le processus d’Annapolis permettrait d’avancer en ce qui concerne la Palestine, et que les négociations en cours entre son pays et l’Inde permettraient de débloquer une impasse vieille d’un demi-siècle au Cachemire.  


M. CRISPIN S. GREGOIRE (Dominique) s’est exprimé au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Il a souhaité apporter l’appui de la CARICOM au processus d’autodétermination du peuple sahraoui.  Il a dit que la CARICOM s’inquiétait de l’augmentation du nombre de violations des droits de l’homme qui sont perpétrées contre le peuple sahraoui, et a exhorté la Haut-Commissariat aux droits de l’homme à publier, dès que possible, les résultats des enquêtes portant sur ces violations.  Par l’intermédiaire de son porte-parole que je suis, a dit M. Grégoire, la CARICOM attire l’attention sur le travail qu’accomplit le Secrétaire général pour favoriser le processus de négociations de Manhasset, qui doit faire progresser le dialogue entre le Maroc et le Front POLISARIO. 


M. Grégoire a appelé la Quatrième Commission à redoubler d’efforts et à parvenir à mettre en œuvre le mandat de la décolonisation qui lui a été confié dans les territoires encore occupés et, à assurer le respect des droits de l’homme dans le déroulement du processus d’autodétermination des peuples de ces territoires.  Par ailleurs, le représentant de Dominique, parlant au nom de la CARICOM, a détaillé les missions que doit remplir la Quatrième Commission dans le processus de décolonisation.  Il a regretté qu’en ce XXIè siècle, « la conduite à bon terme du processus de décolonisation continue d’échapper aux États Membres de l’ONU ».  Chaque année, des déclarations d’appui sont faites par les États Membres à l’intention des représentants des territoires non autonomes.  La mise en œuvre des promesses faites reste l’un des obstacles les plus fondamentaux à franchir dans le processus qui nous intéresse, a précisé M. Grégoire.  La CARICOM déplore que si au cours des deux dernières décennies un certain nombre de propositions ont été faites, elles n’ont cependant pas été prises au sérieux.  Il est temps que nous envisagions l’obtention de résultats concrets, a-t-il conclu. 


M. PAUL BADJI (Sénégal) a souligné que le statu quo n’était « ni viable, ni acceptable ».  « Il nous faut trouver des solutions hardies », a-t-il ajouté, et c’est justement en cela que la proposition de la partie marocaine, visant à accorder une large autonomie au Sahara occidental mais dans le cadre du respect de la souveraineté du royaume du Maroc, trouve toute sa pertinence et sa sagesse ».  Cette proposition, que « le Sénégal soutient et endosse », lui semble « réaliste et raisonnable », a dit M. Badji.  Le Sénégal est convaincu que seules des négociations sincères et loyales peuvent conduire à un règlement juste et durable de la question.  Il appelle en conséquence chaque partie à « faire preuve de réalisme » et « à lâcher du lest », ce qui est le but de toute négociation.  M. Badji s’est inquiété par ailleurs du constat de M. Peter Van Walsum, ancien Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies, devant le Conseil de sécurité selon lequel une impasse plus profonde s’est installée au cœur d’un processus qui avait justement pour but de sortir de l’impasse. 


M. ESHAGH AL HABIB (République islamique d’Iran) a félicité les Nations Unies pour le travail qu’elles mènent dans le domaine de la décolonisation.  « Il convient toutefois d’accentuer celui-ci, alors qu’il ne reste plus que deux ans avant la fin de la Décennie sur l’élimination du colonialisme », a-t-il cependant ajouté, exhortant les puissances administrantes à appuyer le travail de l’ONU afin d’éliminer complètement la « calamité » du colonialisme. 


Dans le même temps, le Comité spécial doit trouver de nouvelles initiatives plus innovantes, a estimé M. Habib.  Ce serait un revers pour les Nations Unies si cette deuxième Décennie contre le colonialisme devait s’achever sans progrès notable, a souligné le représentant de l’Iran qui a rappelé que son pays appuyait pleinement le droit des peuples dominés à exercer leur droit inaliénable à l’autodétermination.  Il a évoqué la poursuite de la colonisation qui se pratique désormais « sous des formes nouvelles », estimant que les politiques des Nations Unies devraient revoir certains critères face aux problèmes qui se posent aux pays et aux territoires dominés, dont la petite taille et la viabilité entravent parfois leur droit à l’autodétermination, et à qui l’accès à la souveraineté peut être dénié par les oppresseurs sous le « prétexte de la modernité » et du pseudo-processus démocratiques.  Le représentant de l’Iran a suggéré au Secrétaire général de nommer soit un représentant spécial, soit un groupe de travail pour étudier la manière de renforcer l’efficacité du travail de l’ONU dans le domaine de la décolonisation.  La réflexion à mener devrait aussi porter sur les moyens d’empêcher la formation de nouvelles formes de colonialisme.  


M. AJAI MALHOTRA (Inde) a souligné que le monde continue d’être aux prises avec le colonialisme, un système « archaïque » qui nie les principes mêmes de la liberté, de la dignité, des droits de l'homme et de la démocratie.  Rappelant que 16 zones géographiques figurent encore sur la liste des territoires non autonomes, il a plaidé pour une intensification de la mise en œuvre des diverses résolutions et recommandations adoptées par les Nations Unies en vue de l’éradication du colonialisme.  Le représentant indien a souligné l’importance, dans cette entreprise, de tenir compte des particularités de chaque territoire.  Il a demandé que ceci se fasse dans un cadre et dans des délais appropriés.  Reconnaître les aspirations politiques des peuples de ces territoires est fondamental pour mettre en place les décisions qui leur permettront de développer les structures et les institutions politiques et socioéconomiques de leur choix, a dit le représentant.  M. Malhotra a également insisté sur l’importance d’assurer une large diffusion des informations en ce qui concerne les options qui s’offrent aux populations de ces territoires.  Il s’est, par ailleurs, félicité de ce que les actions des puissances administrantes aient, ces dernières années, été imprégnées d’un bon esprit de coopération et de flexibilité.  Il a salué en particulier « l’exemple des Tokelaou » et a tenu à féliciter la coopération dont a fait preuve la Nouvelle-Zélande avec le Comité spécial des Vingt-Quatre sur cette question. 


À la fin de sa déclaration, le représentant de l’Inde a souligné que son collègue du Pakistan n’aurait pas dû parler du Jammu-Cachemire et évoquer ainsi, devant la Quatrième Commission, un territoire qui est partie intégrante d’un autre État Membre. 


M. ZACHARY D. MUBURI-MUITA (Kenya) a pris la parole au nom du Groupe des États d’Afrique et a regretté qu’il y ait encore dans le monde 16 territoires non-autonomes qui figurent sur la liste de décolonisation des Nations Unies.  Il a souhaité que tous les États Membres de l’ONU réaffirment leurs engagements en faveur de la mise en œuvre de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux.  Le représentant a appelé à plus de collaboration de la part des puissances administrantes, notamment pour qu’elles facilitent les missions des Nations Unies sur le terrain.  Ces puissances devraient aussi transmettre régulièrement des informations sur les conditions qui règnent dans les territoires dont elles sont responsables et faire en sorte qu’il ne soit pas porté atteinte aux droits des peuples concernés, a dit le représentant kényen.  M. Muburi-Muita, a relevé que le Sahara occidental est le dernier territoire non autonome en Afrique, et a rappelé que l’Assemblée générale a reconnu le droit inaliénable du peuple sahraoui à l’autodétermination et à l’indépendance.  Au nom du Groupe des États d’Afrique, le représentant a exhorté la Quatrième Commission, et à travers elle, l’ONU et les États Membres, à mettre en œuvre rapidement la résolution 1514 (XV) de l’Assemblée générale, et il a invité le Front POLISARIO et le Maroc à continuer de participer aux négociations, dans le but d’arriver à une solution juste et durable. 


M. KAIRE MUNIOGANDA MBUENDE (Namibie) a rappelé que le droit à l’autodétermination est un droit fondamental inscrit dans la Charte et que les Nations Unies peuvent être fières d’avoir engagé le processus qui a conduit à la célébration de la deuxième Décennie internationale pour l’élimination du colonialisme.  Alors que cette deuxième Décennie contre le colonialisme touche à sa fin, les Nations Unies peuvent-elles cependant promettre l’élimination de cette anomalie qu’est le colonialisme?, a interrogé l’ambassadeur.  La Namibie veut faire avancer le processus et parvenir à l’autodétermination des territoires occupés, a-t-il souligné.  


M. Mbuende a dit que la Namibie était inquiète de la situation qui règne au Sahara occidental.  Il a estimé qu’il n’y a pas de liens juridiques entre le Maroc et le Sahara occidental et qu’il faut dont trouver une solution politique durable et acceptable.  La Namibie a pressé le Conseil de sécurité afin qu’il donne pour mandat à la Mission des Nations Unies, d’organiser un référendum au Sahara occidental (MINURSO), de surveiller et de contrôler les violations des droits de l’homme dans le territoire sahraoui, a dit le représentant.  Par ailleurs, la Namibie est inquiète au sujet du peuple palestinien, a-t-i poursuivi.  Il a dit que son pays souhaitait la création d’un État palestinien souverain, d’un État palestinien indépendant dans lequel le peuple palestinien pourra enfin vivre dans la paix.  Il a conclu son propos en demandant à la Quatrième Commission de faire avancer le processus de décolonisation au Sahara occidental, en Palestine et dans les autres territoires occupés.  


M. RAPHAEL-DIEUDONNE MABOUNDOU (République du Congo) a relevé avec préoccupation que la deuxième Décennie pour l’élimination du colonialisme s’achevait sans progrès significatif dans la mise en œuvre du Plan d’action pour l’élimination du colonialisme.  La République du Congo réaffirme qu’il est « plus qu’urgent » de parvenir à l’achèvement du processus de décolonisation, a souligné M. Maboundou.  Elle appelle les puissances administrantes à coopérer pleinement avec le Comité spécial des Vingt-Quatre en vue de la jouissance, par les peuples non autonomes, de ce droit fondamental de l’homme qu’est le droit à l’autodétermination. 


Concernant le Sahara occidental, la République du Congo demande aux parties de continuer à faire preuve de volonté politique afin d’entrer dans une phase de négociations « sur les questions de fond » afin de parvenir à une « solution politique juste, durable et mutuellement acceptable », a dit M. Maboundou.  Il a déclaré qu’il était nécessaire qu’il y ait une coopération plus étroite entre le Comité spécial des Vingt-Quatre et les puissances administrantes en vue d’élaborer un programme de travail constructif répondant au cas particulier de chaque territoire. 


En fin de réunion, la délégation du Maroc a fait part de sa surprise concernant la déclaration du Kenya, prononcée au nom du Groupe des États d’Afrique.  Elle s’est dissociée de cette déclaration en indiquant qu’elle n’avait jamais été consultée sur la teneur de celle-ci.


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À l’intention des organes d’information • Document non officiel
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